[Johannesbourg] Quadrillage policier d’un quartier populaire pour le nouvel an

Les « frigos volants »: tradition du Nouvel An dans un quartier de Johannesburg

La police du quartier chaud de Hillbrow, à Johannesburg, sera de nouveau en alerte pendant la nuit du Nouvel An, pour tenter d’éviter les accidents causés par une « coutume » désormais incontournable: le jet de meubles et d’appareils électroménagers usagers par les fenêtres.

Des hélicoptères, des engins anti-émeutes et des unités spéciales de la police sud-africaine seront déployés dès la tombée de la nuit dans ce quartier connu également pour ses régulières flambées de violence.

Chaque année, quelques personnes sont blessées par la chute d’objets dans la nuit du 31 décembre.

« Nous jetons les vieux trucs, parce que nous en avons des neufs », explique Dickens Patwell, 24 ans, réparateur d’ordinateurs, qui se rappelle avoir jeté un lit par dessus son balcon il y a quelques années.

« Les gens se débarrassent de beaucoup de choses, des appareils électriques, micro-ondes, fours, téléviseurs », précise James Thomas, 26 ans, Zimbabwéen comme son ami Dickens.

En 2009, une petite fille de 11 mois a été blessée à la tête par une brique, et neuf personnes hospitalisées au total.

L’an dernier, les jets d’objets ont été accompagnées de caillassage des patrouilles de police. Bilan: quatorze blessés.

Beauty Dube, une Sud-Africaine qui vit à Hillbrow depuis seize ans, restera chez elle avec sa famille pendant la nuit de l’An. « Ceux qui sont blessés sont ceux qui sont ivres », assène-t-elle

James Thomas confirme que le but n’est pas de blesser qui que ce soit. « On sait que personne ne sortira. Mais nous, on crée du travail pour les gens », assure-t-il, en référence aux dizaines de ferrailleurs et autres collecteurs de produits recyclables qui sillonnent les rues de Johannesburg toute l’année.

Ancien « quartier latin »

Hillbrow, pourtant, a connu son heure de gloire. D’abord quartier cosmopolite blanc, il est devenu multiracial dans les années 1980.

On a parlé de « quartier latin », où Noirs et Blancs sud-africains ont voulu vivre ensemble et défier la loi du régime raciste au pouvoir.

On y écoutait de la musique tard la nuit dans des cafés bondés.

Mais au début des années 1990, les prix de l’immobiliers se sont effondrés, la criminalité a augmenté, les librairies et les disquaires ont fermé, les restaurants ont déménagé vers d’autres banlieues et les Blancs sont partis peu à peu.

Aujourd’hui, Hillbrow est notamment devenu un refuge pour les dizaines de milliers d’immigrants venus des autres pays africains. Les autorités savent que des trafiquants de drogue nigérians et des hommes recherchés pour le génocide ruandais s’y cachent.

Cette année, la police a prévu de déployer les grands moyens pour éviter les débordements. « Plusieurs unités vont être déployées: des unités canines, des hélicoptères, la police montée, la police anti-émeute », explique le porte-parole de la police provinciale Tshisikhawe Ndou.

Des centres de soins seront également installés autour du quartier pour traiter en urgence les éventuels blessés.

Certes, la situation s’est un peu calmée depuis quelques années, mais la police reconnaît qu’il est difficile d’anticiper les comportements lors de la nuit du Nouvel an. « On ne sait jamais ce qui va se passer cette année », admet M. Ndou.

Thomas, le Zimbabwéen, ne veut pas dire ce qu’il jettera cette année, mais il laisse entendre en souriant que quelques vieux objets pourraient voler depuis sa fenêtre: « Y’aura des trucs à jeter, mon vieux, des trucs qui sont plus sous garantie… »

AFP, 30 décembre 2011

[Kurdistan] Après le massacre, l’appel au soulèvement

Turquie: les parents des Kurdes tués par l’armée crient au « massacre »

« Ils nous ont délibérément massacrés. Pourquoi tout ce sang a été versé? Ils doivent nous répondre »: les larmes aux yeux, Kitan Encu, qui a perdu onze parents dans le bombardement près de son village kurde par l’aviation turque, ne cache pas sa révolte.

Le raid aérien dans la nuit de mercredi à jeudi près du village d’Ortasu, proche de la frontière avec l’Irak, visait officiellement des rebelles séparatistes kurdes du Parti des travailleurs du Kurdistan PKK, interdit) qui tentaient de s’infiltrer en Turquie.

Le bombardement a fait au total 35 morts et le parti au pouvoir à Ankara n’a pas exclu « une bavure de l’armée ».

Selon les autorités locales, les victimes, des jeunes pour la plupart, faisaient de la contrebande de cigarettes entre l’Irak et la Turquie, pays voisins, avec des mules et des ânes. « J’ai vu les corps pour les identifier. Ils étaient tous complètement brûlés, en morceaux », raconte Kitan Encu, au chevet de sa mère de 75 ans à l’hôpital de la ville d’Uludere, à 20 km de la frontière irakienne. « Le plus vieux avait la vingtaine », dit cette jeune femme de 33 ans: « ils étaient tous étudiants ».

Dans le sous-sol de l’hôpital, où les corps des victimes ont été amenés pour être autopsiés et identifiés, les familles se pressent, à la recherche de nouvelles, ou dans l’attente de récupérer la dépouille d’un des leurs.

« Je suis le père d’un martyr. Mehmet Ali Tosun était son nom. Il avait 23 ans », dit un homme de 50 ans, qui refuse de décliner son identité: « il était au chômage. Comme on est pauvres, on fait du commerce », ajoute-t-il, en référence à la contrebande de cigarettes, de gaz, ou de sucre entre la Turquie et l’Irak. « Ici, la vie vaut 60 livres » turques (moins de 30 euros), soit le salaire d’une très bonne journée de trafic, explique un jeune contrebandier de 19 ans, originaire du village voisin de Yemisli. Il a participé aux recherches des cadavres et, selon lui, les victimes « ont été tuées volontairement ».

Un autre jeune contrabandier de Yemisli assure qu’il faisait partie du groupe qui a traversé la frontière irakienne mercredi soir avec principalement du gaz et des cigarettes. « On a commencé à rebrousser chemin, on a marché ensemble environ 10 km, après on a pris la direction de notre village et eux celle » d’Ortasu.

« Plus tard, les soldats ont téléphoné au chef du village et lui ont dit que tous les contrebandiers étaient morts. Ils lui ont dit de venir et de prendre les cadavres. Comment pouvaient-ils savoir que les morts étaient des contrebandiers s’il s’agit d’une erreur », s’interroge le jeune homme, qui souhaite garder l’anonymat.

L’armée turque, qui bombarde régulièrement les repaires du PKK dans le Kurdistan irakien, fait face depuis l’été à une flambée de violence des rebelles qui utilisent leur bases arrières en Irak pour lancer des attaques contre des objectifs en territoire turc, près de la frontière.

Le PKK, considéré comme une organisation terroriste par de nombreux pays, a pris les armes en 1984 et le conflit a fait au moins 45.000 morts.

Des hommes portent le cercueil d'une victime du raid aérien de l'armée turque sur un village kurde le 29 décembre 2011 à Uludere

Des hommes portent le cercueil d’une victime du raid aérien de l’armée turque sur un village kurde le 29 décembre 2011 à Uludere
 

Turquie: les rebelles kurdes appellent au « soulèvement » après la mort de 35 civils

Les rebelles kurdes du Parti des travailleurs du Kurdistan PKK) ont appelé vendredi la population kurde de Turquie au « soulèvement » après la mort de 35 villageois dans un raid aérien mené mercredi soir par l’armée turque à la frontière irakienne.

« Nous appelons le peuple du Kurdistan, en particulier à Hakkari et Sirnak (deux provinces voisines de l’Irak, ndlr), à montrer sa réaction contre ce massacre et à demander des comptes à ses auteurs par ses soulèvements », a déclaré Bahoz Erdal, un des cadres de la branche armée du PKK, le HPG, dans un communiqué.

Le PKK utilise le terme kurde de « serhildan » (soulèvement) pour désigner des actions de protestation violente, impliquant des heurts avec la police, et de désobéissance civile.

Bahoz Erdal a également accusé l’armée turque d’avoir délibérément pris pour cible des civils.

« Ce massacre n’est pas un accident ou un acte non voulu. C’est un massacre organisé et planifié », a-t-il affirmé.

Des responsables locaux et le vice-président du parti au pouvoir, Hüseyin Celik, ont indiqué que les victimes étaient des contrebandiers se livrant avec des mules et des ânes à un trafic de cigarettes entre l’Irak et la Turquie.

L’armée a pour sa part indiqué que son opération visait des rebelles qui tentaient de s’infiltrer en Turquie et avait eu lieu dans une zone « qui n’abrite pas de population civile et où se trouvent des bases de l’organisation terroriste ».

« Ce commerce frontalier a lieu sous la surveillance des nombreux postes militaires déployés le long de la frontière. Il est donc impossible que ces civils n’aient pas été reconnus », a assuré Bahoz Erdal.

« Ces gens se déplacent presque tous les jours sans armes et avec leurs mules dans cette même zone », a-t-il ajouté.

AFP, 30 décembre 2011

[Poitiers] Comparution immédiate pour une récup

Comparution immédiate pour un vol de denrées périmées

Saint-Benoît

Le jeune homme qui s’avance à la barre commence à connaître le palais de justice de Poitiers. Le 1 er décembre dernier, ce militant anarchiste de 21 ans avait déjà comparu devant le tribunal correctionnel pour des dégradations commises en marge d’une manifestation ; sur la base d’un dossier mal ficelé, il s’en était alors tiré avec un mois de sursis et des travaux d’intérêt général.

Hier, c’est pour le vol de denrées alimentaires périmées dans une supérette de Saint-Benoît qu’il devait être jugé avec une jeune femme originaire d’Angoulême. Interpellés en flagrant délit au cours de la nuit de mercredi à jeudi, les deux prévenus ne semblent pas comprendre ce qui leur vaut de bénéficier d’une procédure de comparution immédiate. Ils ont d’ailleurs demandé un délai pour préparer leur défense.

« Je ne sais pas ce que je fais ici ; on a simplement pris des produits dans une poubelle », explique la demoiselle qui, comme son camarade, a refusé de parler aux enquêteurs de la police et de se soumettre au prélèvement biologique obligatoire. Le vice-procureur de la République qui a réclamé leur placement en détention provisoire estime au contraire qu’elle s’est introduite dans le dépôt de la supérette tandis que son complice chargeait la camionnette. Le tribunal a préféré les laisser en liberté dans l’attente de leur jugement le 23 janvier prochain.

Leur presse, Nouvelle République, 30 décembre 2011

[Madrid] Mails d’un pote sur la répression des indignéEs

Salut
 
Hier soir (mercredi), les Indignados de Madrid organisaient une calvalcade (coutume espagnole, avec des marionnettes de rois mages). Il y avait un Christ portant une croix de la consommation, enveloppée de papier cadeau, des rois mages Publicité, Consommation, Banques, qui fouettaient les fidèles, etc.
 
Au moment du rassemblement avant la manifestation, les policiers ont chargé : bilan une arrestation pour refus d’identification, et une jeune fille au cuir chevelu fendu (deux points).
 
Le projet de marche vers Paris/vers l’Élysée avance ; il a été proposé de la nommer Marche pour la souveraineté populaire.
 
@+

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Salut
Après la répression de la veille (les policiers ont en fait blessé cinq personnes et non une seule, qui a eu 6 points de suture) nous appelions à un rassemblement de protestation sur la Puerta del Sol, à 18 h. Nous étions une quinzaine, perdus au milieu de la foule de touristes et de gens plongés dans le climat de fêtes de fin d’année.

Après avoir reçu le renfort d’une demi-douzaine d’Anonymous qui tractaient en soutien à Bradley Manning, nous décidons de déambuler dans les rues, en chantant des slogans (¡ Policia assessina !, Mas educacion y menos policia, etc.) puis d’aller déposer plainte, dans le climat légaliste des Indignés. La plainte est déposée au commissariat de centre-ville, à la réputation de plus grande dureté que les autres ; les policiers qui ont matraqué la veille viennent d’ailleurs de ce commissariat.

Sitôt arrivés devant le commissariat de centre-ville, tous les policiers qui ne faisaient rien sortent pour « contrôler » la foule dangereuse que nous représentons. Au total, je compte 23 policiers, en tenue, civil et motards. Ils savaient pourtant que nous étions des indignés, et donc totalement pacifistes et légalistes.

Petit à petit, leur jeu de « permettre la libre circulation » dégage l’entrée du commissariat, puis nous en éloigne de plus en plus, avec contrôles d’identité à la clef. Les Anonymous sont séparés de nous, et ils avaient d’ailleurs l’air perdus.

Mais là où on voit le climat de guerre sociale et d’extrême tension entre la police et ce qu’on peut appeler un groupe de hippies inoffensifs, c’est qu’au bout de 15 minutes, 5 fourgons de CRS sont arrivés. Mais ils se sont rendus compte que nous étions totalement inoffensifs, et ne sont même pas tous descendus. Par contre, ils ont entravé la libre circulation des honnêtes citoyens, les fourgons bloquant la rue un quart d’heure de plus. Au total, plus de 60 flics mobilisés pour nous 🙂

Par la suite, il a fallu argumenter sévèrement pour que la plaignante entre accompagnée, il a fallu dire qu’il s’agissait d’un témoin. En discutant avec les CRS, l’un d’eux a été acheter du chocolat au bébé d’une de nous. Alors que nous leur posions des questions sur le respect de leur code de déontologie, ils nous ont sorti une version actualisée, et nous l’ont donnée.

Mails d’un pote, 29 décembre 2011