[Poitiers] Etape : Squat évacué ? Place au business !

NdPN : le squat de l’Etape a été occupé pendant des mois par des familles de sans-papiers, récemment dégagées par la mairie « socialiste » et les flics. Maintenant qu’elles sont dispersées aux quatre coins de la Vienne, place au business : le promoteur de la société Fides n’a pas chômé pour déclarer que son projet immobilier repartait, comme si de rien n’était. Les prix seront « attractifs » annonce-t-il… Sauf pour les habitant.e.s de l’ex-squat, qui comme de nombreux prolos de la Vienne n’ont bien évidemment même pas de quoi s’acheter l’équivalent d’un demi-mètre carré de ces futurs logements pour riches. Mais bon, c’est pas la crise pour tout le monde… Et ce sera François Pin, l’architecte qui va aménager l’ancien Théâtre de Poitiers, qui dessinera les plans. La démocratie, c’est quand les gens sont égaux, mais y’en a qui sont plus égaux que les autres, surtout dans le cynisme.

L’ancien foyer l’Étape, rue d’OIéron, en centre-ville.

Squatté jusqu’en novembre, l’ancien foyer de la rue d’Oléron fera bien l’objet d’une réhabilitation. Dix-neuf logements sont annoncés par le promoteur.

Dix-neuf logements : des appartements et des maisons de ville. Présenté fin mars au conseil municipal, le projet sera bien mené à son terme. Propriété de la Ville, le foyer l’Étape accueillait des mères de famille en situation de fragilité. Le choix a été fait de les accueillir sur un autre site.

«  Nous allons reprendre le projet  »

Le foyer est donc devenu vacant. Et squatté par des familles Roms jusqu’en novembre. Cette occupation et le retard qui s’en est suivi allaient-ils remettre en cause le projet ? Lors de la réunion du conseil municipal de mars, en effet, deux clauses suspensives avaient été mises en avant. Un prix d’achat à la Ville de Poitiers fixé à 680.000 €, une somme validée par France Domaine. Mais surtout, il avait été indiqué que le promoteur ne donnerait pas suite si la moitié des appartements n’avait pas trouvé preneurs fin novembre. Ce promoteur, Loïc Perrot, P-DG de la société Fides, contacté par la NR, maintient son projet. Il a sollicité l’architecte François Pin pour dessiner les plans. « Nous allons pouvoir reprendre le dossier. Aujourd’hui, les études techniques ne sont pas terminées car nous ne pouvions pas accéder au chantier. » Basée à Lussac-les-Châteaux, la société Fides s’est lancée dans la construction et la réhabilitation d’établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). Elle travaille ainsi depuis trois ans sur la rénovation de la maison de retraite des Feuillants. La volonté du promoteur : proposer des logements « à des prix attractifs ». « Actuellement, le mètre carré sur le Plateau de Poitiers se négocie au-dessus de 3.000 €. Nos premiers prix descendront à 2.500 €. » Une fois les études finalisées et le permis de construire déposé et obtenu, un an de travaux sera nécessaire. Un chantier de réhabilitation conséquent. Les appartements et les maisons de ville devraient être livrés fin 2015, indique le promoteur.

Jean-Jacques Boissonneau, Nouvelle République, 12 décembre 2013

[Poitiers] Sécheresse de 2009 : catastrophe pour les habitant.e.s, mais pas pour l’Etat ni les compagnies d’assurance

NdPN : Etat et Capital, deux larrons en foire. Les habitant.e.s impacté.e.s par la sécheresse de 2009, qui espéraient beaucoup de l’action en justice des 14 communes ayant attaqué l’Etat pour sa non-reconnaissance de catastrophe naturelle (voir cet article de la Nouvelle République il y a quinze jours), n’ont plus que leurs yeux pour pleurer : les compagnies d’assurance peuvent dormir sur leurs deux oreilles, confortablement emmitouflées dans leur couette de pognon prélevé pour « assurer »… leur profit.

Poitiers: le tribunal administratif rejette la demande de catastrophe naturelle pour quatorze communes

Quatorze communes de la Vienne dont Poitiers et Châtellerault avaient attaqué l’Etat devant le tribunal administratif de Poitiers: elle contestaient la décision de ne pas leur reconnaître l’état de catastrophe naturelle après la sécheresse de 2009. Le tribunal administratif vient de rejeter leur requête.

Dépêche Nouvelle République, 11 décembre 2013

ZAD : Lettre aux comités locaux – Nouvelles et actions à venir

ZAD : Lettre aux comités locaux – Nouvelles et actions à venir

Depuis la zad de Notre Dame des Landes

Lettre aux comités locaux

Chers comités, nous étions un certain nombre à ressentir le besoin  de vous écrire depuis le mouvement d’occupation sur la ZAD. Il y a  quelques mois, dans une atmosphère de répit, porté-e-s néanmoins par la  force de la solidarité combative de l’automne dernier, beaucoup d’entre  nous commencions à entrevoir la possibilité d’un abandon du projet  d’aéroport. Nous voulions même imaginer ce que pourrait être dans ce cas  l’avenir de la zone en termes sociaux, agricoles, politiques. Si ces  réflexions étaient alors cruciales et nous ont aidé-e-s à donner un  nouveau souffle à la lutte et un surplus de sens au mouvement, nous  sentons aujourd’hui comme un regain de tension.

Les pro-aéroports, préfecture, vinci et consorts reprennent  indéniablement du poil de la bête : annonces va-t-en guerre et  commentaires victorieux sur le rejet des recours au niveau européen,  fuites sur de possibles barbouzeries, publication prochaine des décrets  préfectoraux nécessaires à « l’amélioration du projet », rapport fumeux  de la Direction Générale de l’Aviation Civile sur le coût du maintien de  l’aéroport actuel à Nantes, préparation du transfert des espèces et des  travaux sur le barreau routier, autorisation européenne au gouvernement  français de débloquer 150 millions d’euros pour la construction de  l’aéroport… Le ciel qui s’assombrit en ce début d’hiver est balayé par  de sales rumeurs et des signaux convergents. Il nous rappelle à la  nécessité de nous focaliser sérieusement sur la possibilité d’un  démarrage des travaux, accompagné ou précédé de nouvelles offensives  policières. Après avoir, dans cette lettre, paré au plus urgent et fait  le point sur les menaces qui pèsent sur la zad et sur les perspectives  d’actions, manifestations et réactions dans les mois à venir, nous  voulons aussi prendre le temps de faire quelques retours sur la vie ici  et sur les évènements marquants de ces derniers mois. Nous avons en  effet le sentiment de n’avoir pas toujours  réussi à transmettre où on  en était depuis la fin de l’occupation policière, ou alors de manière  éparpillée. Nous voyons bien que, de loin, il n’est pas toujours aisé  d’appréhender ce qui s’est tramé dans le bocage.

Avant d’aller plus avant, rappelons que nous ne parlons pas ici au  nom de l’ensemble du « mouvement d’occupation », entité multiple et  hétérogène, sans représentation unifiée (et tant mieux). Nous tâcherons  néanmoins dans la seconde partie de faire résonner jusque chez vous  quelques voix d’ocupant-e-s et espérons relancer les dialogues et  échanges nécessaires pour envisager ensemble la suite. Le début d’année  2014 sera sans nul doute décisif et il faut s’y préparer en conséquence.  Nous ne pourrons gagner les batailles qui s’annoncent sans compter sur  la force cumulée de tous les comités. L’un des objets important de cette  lettre est d’ailleurs d’inviter à une rencontre avec les comités  locaux, notamment ceux qui sont les plus proches géographiquement, le  samedi 11 janvier 2014 (lieu près de la ZAD à préciser) en vue de  préparer les prochaines actions communes.

Lire la suite ici sur Indymedia Nantes (11 décembre 2013)

Prostitution : un texte critique du projet de loi

Pénalisons les yeux fermés
In Le Monde libertaire # 1725 du 12 au 18 décembre 2013

SANS TROP DE SURPRISE, le 4 décembre, les députés ont adopté en première lecture le projet de loi visant à lutter contre la prostitution en France en pénalisant les clients. J’entends déjà la voix plaintive de certains lecteurs s’élever :

«Encore un article sur le sujet ! » Désolée si vous pensez que ceci ne vous intéresse pas mais les conséquences de cette loi vont toucher quelques centaines de milliers de personnes, principalement des femmes. En France, le nombre de prostituées est évalué entre 20000 et 40000 mais ce chiffre est contestable : en Allemagne il s’élève à 400000. Il est difficile d’imaginer un tel écart entre les deux pays. Les chiffres officiels français sont estimés à partir du nombre d’interpellations pour racolage et de victimes identifiées dans les affaires de proxénétisme. Ils intègrent une évaluation du nombre de prostituées passant leurs annonces sur Internet. Mais celle-ci est, de l’avis même des services de police, peu fiable, car cette activité, cachée et mobile, est très difficile à quantifier. Quelque 10000 annonces différentes ont été comptabilisées sur une journée.

La loi a été votée à l’Assemblée sans tenir compte des sonnettes d’alarme tirées par diverses associations de santé ou de terrain. Le vendredi 29 novembre, le jour où la loi a été débattue, l’hémicycle était presque désert.

Autant pour le débat. Plus de 200 signataires du manifeste contre la pénalisation ont été simplement ignorés, dont Médecins du monde, la Ligue des droits de l’homme ou encore le Planning familial. Pire, certains n’ont pas hésité à les taxer de prostitueurs, de proxénètes.

Quand certains députés, sceptiques, ont osé émettre des doutes sur l’intentionnalité de la loi et ses risques éventuels, on les a accusés de voter avec leur «calbute». Cette délicatesse vient du socialiste Jean-Marc Germain qui a sans honte fait un parallèle entre ses collègues non-abolitionnistes et les signataires du torchon Touche pas à ma pute, pétition signée par 343 salauds.

De nombreux députés étaient absents ou se sont abstenus. La mobilisation a été importante au groupe socialiste : 238 députés sur 292 ont soutenu le texte. En revanche, alors que le groupe avait dans un premier temps annoncé une abstention, l ’UMP a massivement voté contre avec 101 députés. Seuls dix députés UMP ont voté pour, dont l’un des principaux promoteurs du texte, Guy Geoffroy et la candidate à la mairie de Paris Nathalie Koscuisko-Morizet. Ce qui dérange les députés UMP, c’est avant tout l’abolition du délit de racolage institué par Nicolas Sarkozy ainsi que la proposition d’un titre de séjour temporaire de six mois pour les prostituées étrangères. L’UDI a aussi voté majoritairement contre, de même que les écologistes. La députée Europe Écologie-Les Verts Barbara Pompili s’est exprimée au moment du vote, déclarant qu’elle se refusait à soutenir ce texte d’une « logique répressive ». Avant d’entrer en vigueur, le texte devra être approuvé par le Sénat qui devrait l’examiner avant fin juin.

Il n’aura échappé à personne, que, là encore, les principales concernées par cette loi sont des femmes étrangères. Personne ne peut sérieusement penser que le gouvernement va régulariser quelque 20000 prostituées étrangères.

Que dire de cette phrase prononcée par Maud Olivier, nouvelle héroïne du féminisme :
« Je pense que notre future législation aidera à lutter contre l’immigration clandestine, dès lors qu’elle découragera les réseaux de traite aux fins d’exploitation sexuelle d’amener des jeunes femmes sur le territoire français. » Le féminisme institutionnel a donné toute sa place et, mieux, son soutien à une loi qui ne vise pas à protéger les prostituées mais masque en partie la politique en matière d’immigration du gouvernement français.

On ne peut certes pas accuser tous les défenseurs de ce texte de vouloir du mal aux prostituées mais, sous prétexte de faire une loi de principe, au nom de hautes et nobles valeurs, ils n’hésitent pas à sacrifier toute une frange de la population déjà faible et isolée.

Uniquement portée par une idéologie simpliste dictée parfois par une visée moraliste, cette loi est un net retour en arrière. « D’un côté, les femmes dignes et mariées et de l’autre les putes, êtres immondes privés de toute raison. Voilà une gauche moralisatrice qui, quand on remue leurs idées, se révèlent conservatrice et réactionnaire », note très justement le journaliste Robin Carel.

Outre l’incohérence manifeste de la loi, qui considère la prostitution comme une violence, comme un viol, mais qui ne punirait ce viol que d’une amende (?!?), elle laisse un goût amer aux putes qui, poussées vers la clandestinité, connaîtront des conditions d’exercice (encore plus) déplorables et dangereuses. Une amende pouvant aller jusqu’à 1500 euros sera infligée au client s’il est pris en flagrant délit.

La seule manière pour les prostituées de continuer leur activité sera donc de se cacher, aux dépends de leur sécurité. Plus que jamais isolées, les prostituées devront revoir à la baisse leurs prétentions sanitaires car, avec moins de clients, il leur sera difficile voire impossible de pouvoir faire le tri entre ceux-ci. De plus, les clients vont se faire tellement discrets qu’ils vont veiller à ne donner aucun nom, adresse ou numéro de téléphone. En cas de violences  ou de viol, les prostituées seront dans l’incapacité totale de porter plainte contre un agresseur non-identifié. Quant au montant de l’allocation de sortie de la prostitution, versée pendant quelques mois seulement, il est si ridiculement faible qu’il est insultant… Un climat plus putophobe que jamais et une position plus précaire et dangereuse, voici ce qui a été voté à l’Assemblée1. Nul doute pourtant que les associations féministes abolitionnistes sont en train de célébrer entre elles leur petite victoire de principe. Ces associations pourront se gargariser dans les séminaires et soliloquer que la France ne tolère plus la vente de sexe.

Associations et politiques ont fait ce qu’ils savent le mieux faire: expliquer à la place des concernées qu’elles ne savent pas vraiment ce qu’elles disent dans la mesure où les violences les ont rendus incapables de formuler un consentement éclairé. Le système patriarcal n’a jamais procédé autrement: affirmer que la parole des femmes doit être tenue comme négligeable car les femmes ne savent pas vraiment ce qu’elles disent.

Marie Joffrin Groupe Louise-Michel de la Fédération anarchiste

1. Voir l’article «Ne nous trompons pas de combat» de Marine, Le Monde libertaire n° 1721, pages 20-21.

Vu sur le forum anarchiste, 11 décembre 2013, et à paraître dans Le Monde Libertaire.