[Poitiers] Rassemblement antinucléaire

Les antinucléaires dans le froid

Les militants antinucléaires ont déployé une banderole exigeant la sortie immédiate du nucléaire.

 

Les militants antinucléaires ont déployé une banderole exigeant la sortie immédiate du nucléaire.On ne peut pas dire que l’incident grave de Civaux ait donné une grande impulsion à la lutte antinucléaire. Une petite vingtaine de militants tout au plus se sont retrouvés hier soir devant le palais de justice de Poitiers à l’appel de la Coordination 86 pour une sortie du nucléaire, qui regroupe une dizaine de mouvements politiques ou de défense de l’environnement.

Vingt militants courageux, qui bravent le froid glacial, c’est peu pour obtenir la fermeture de la centrale de Civaux, dont l’existence est qualifiée d’aberration. A défaut, la Coordination exige la plus grande transparence sur ce qui s’est passé le 3 janvier (fuite de tritium radioactif dans la nappe phréatique). Elle demande, et devrait être rejointe au moins sur ce point par le plus grand nombre, que la pollution radioactive soit régulièrement mesurée désormais autour de la centrale et que ces mesures soient communiquées à la population. Constatant les retards dans la mise en place de l’alerte le jour de l’incident, la Coordination exige en outre une enquête indépendante pour que la population connaisse les risques auxquelles elle a été et reste exposée.

Nouvelle République, 3 février 2012

ndPN : On lira aussi avec satisfaction que les travailleur-euses CGT de la centrale de Civaux, malgré leur attachement tout corporatiste à cette énergie qui pue la mort leur gagne-pain, commencent à s’inquiéter de leurs conditions de travail et du manque de transparence :

La confiance brisée à la centrale de Civaux

La CGT s’inquiète publiquement des négligences en matière de maintenance. Depuis la récente fuite de tritium, ses représentants doutent de la direction.

Le rapport de l'Autorité de sûreté nucléaire a mis en évidence des négligences en matière de maintenance dans la zone de stockage des effluents radioactifs.

 

Le rapport de l’Autorité de sûreté nucléaire a mis en évidence des négligences en matière de maintenance dans la zone de stockage des effluents radioactifs.

 

La discrète section syndicale de la CGT a pris le temps avant de réagir publiquement à la fuite de tritium qui a pollué une nappe phréatique dans le sous-sol de la centrale nucléaire de Civaux, le mois dernier. Ses responsables ont interrogé leurs collègues du génie civil, de la chimie et de la maintenance. Ils ont aussi lu attentivement les communiqués de leur direction et les rapports de l’Autorité de sûreté nucléaire sur l’incident. Alors seulement ont-ils accepté de livrer leur sentiment. D’autant plus sévère pour EDF que la fédération CGT Mines-Energie a toujours revendiqué ses orientations pro-nucléaires.

« C’est justement parce que nous défendons le nucléaire civil que nous avons jugé nécessaire d’intervenir dans le débat », précise Christophe Laloup, secrétaire général de la CGT-UFICT. « Nous ne pouvons pas continuer dans cette voie-là. Nous ne voulons pas que notre centrale soit exploitée n’importe comment et nous voulons que les citoyens soient informés de ce qu’il s’y passe. » Les représentants du personnel souhaitent surtout que leur direction cesse de minimiser des incidents graves quand ils se produisent : « Cet événement nous interpelle sur la transparence, la communication, l’information – y compris en interne -, d’événements significatifs constatés sur notre site », ajoutent-ils. « Ces fuites vers la nappe phréatique, aussi faibles soient-elles, sont inacceptables. Et tous les salariés en sont bien conscients. »

  » Ce n’est pas une usine de cacahuètes ! « 

A Civaux, la CGT estime que « les moyens de contrôle et de maintenance mis en œuvre ne sont pas à la hauteur des enjeux, surtout dans un contexte post-Fuskushima ». Elle dénonce aussi « le manque de rigueur d’exploitation que les nouvelles organisations du travail ont amené » et la « situation préoccupante des prestataires de plus en plus précarisés » : « Dans certaines centrales, on arrive à huit niveaux de sous-traitance pour certaines tâches ! », se désole Jean-Luc Daganaud, de la CGT-OE. « Depuis le passage en EDF SA, la finance pèse lourd dans les choix stratégiques de maintenance. La philosophie a changé ; la sûreté n’est plus le seul paramètre qui est pris en considération », déplorent les syndicalistes. « On est pourtant dans le nucléaire ; ce n’est pas une usine de cacahuètes ! » Après « plusieurs écarts inquiétants ces derniers temps », la fuite de tritium a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase à la CGT : « Oui, cela nous a fâchés parce que nous faisions confiance à nos dirigeants qui sont des ingénieurs, des techniciens, des gens sérieux », reconnaît Christophe Laloup. « Je ne dirais pas que nous leur avons fait une confiance aveugle mais nous avons fait preuve de légèreté en nous laissant entraîner dans un processus de confiance. » A présent, la direction de la centrale devra compter sur des représentants du personnel vigilants, voire méfiants. Déterminés à peser pour élever le niveau d’exigence.

en savoir plus

Parmi les griefs adressés à la direction de la centrale, la CGT s’étonne que les réparations engagées sur la zone de rétention des réservoirs d’effluents radioactifs, après la première alerte de l’Autorité de sûreté nucléaire, en 2009, aient davantage relevé du bricolage (avec la pose de mastic sur les fissures) que de la solution pérenne. Elle regrette aussi que la santé du personnel ait été mise en danger lors de l’intervention dans la zone contaminée, que les salariés n’aient pas correctement été informés de la découverte de la fuite, que le grand public ne l’ait été que cinq jours après la confirmation des résultats et que la direction ait tenté de minimiser la gravité de l’incident en communicant l’information. Une autre question se pose : alors que la préfecture avait été prévenue de la fuite de tritium le vendredi 13 janvier et la commission locale d’information le lundi 16, revenait-il à EDF d’informer la population en publiant un communiqué sur son site Internet le mercredi 18 en fin de journée ?

Nouvelle République, Baptiste Bize, 3 février 2012