On est les champion, on est les champions, on est… oh. Wait.
Si l’on classe les technologies de surveillance dans 6 catégories : la surveillance d’internet, des téléphones mobiles, des sms, des système GPS, l’analyse automatique de la voix, et les virus-trojan destinés à espionner un ordinateur ou un mobile, trois pays se distinguent : la France, l’Angleterre et l’Allemagne. Ces trois pays disposent d’entreprises suceptibles de leur fournir l’ensemble des technologies necessaires à la mise en place d’un big brother.
Une forme d’indépendance pour la mise en place d’une dictature numérique, aussi connue sous le nom d’internet civilisé.
Il manque à priori les Etats Unis, qui ne devraient pas tarder à rejoindre le groupe des champions à l’occasion d’une prochaine fuite, on imagine que la Chine fait également partie du peloton de tête, mais là aussi, on manque encore de preuves flagrantes.
C’est donc ça l’économie numérique Française ? Ben oui. En tout cas, c’en est une partie significative. Depuis le temps qu’on vous dit qu’on est des champions en infrastructure et en réseaux… Vous vous imaginiez que ce n’était – que – un hommage appuyé à Free.fr ? Raté.
Le Fond Stratégique d’Investissement ne s’y trompe pas, d’ailleurs. Cet organisme en charge de soutenir financièrement des projets que l’Etat juge stratégiques (d’où son nom) a investi des sommes rondelettes dans deux des entreprises les plus symboliques du big brother made in France : Qosmos (en septembre dernier, alors que ce dernier travaillait à Damas à la mise au point d’un système de surveillance) et Bull/Amesys.
Après cela, on aura beau jeu d’agiter l’impérieuse necessité de trouver un statut fiscal approprié pour les rares startups funky nées en France, force est de reconnaitre que la ‘planification de l’économie numérique’ – plébiscitée également dans le camp du candidat socialiste à la présidentielle, ô surprise – se focalise essentiellement sur l’armement numérique.
La contre révolution : puisqu’on vous dit que ça n’a rien a voir avec les Droit de l’Homme
Le plan était pourtant simple. La mise au point de ces technologies de surveillance necescitait une période de bêta test assez complexe, et des cobayes : Libye, Tunisie, Maroc, Qatar, etc. Tout allait pour le mieux dans le meilleur des monde jusqu’au jour où les Tunisiens ont décidé de changer le cours de l’Histoire.
Du coup, on comprend mieux l’empressement de la ministre de la défense Française à prêter main forte à Ben Ali afin de rétablir l’ordre en janvier dernier. La volonté féroce de nouer au plus vite des partenariats étroits avec tout ce qui pourrait ressembler à une opposition en Libye, et la catastrophe que représente pour l’économie numérique Française (et le rayonnement de la France à l’étranger) le printemps arabe.
Non seulement les Tunisiens on bousillé ce qui devait être le plus gros test grandeur nature en matière de dictature numérique, mais ils ont failli révéler au monde le rôle de la France dans la préparation de ce qui s’abbatra inexorablement sur ses propres citoyens : l’internet civilisé.
Peine perdue, quelques mois plus tard, c’est en Libye, puis au Qatar, au Maroc et désormais un peu partout dans le monde arabe (et ailleurs) qu’on trouve ce qui fait l’innovation numérique en France, ou tout du moins une bonne partie : la dictature 2.0.
La Libye, elle, restera dans les annales comme un sommet de l’hypocrisie diplomatique. Ses opposants, désormais en charge du pays, étaient également surveillés par du matériel Français Bull/Amesys, comme le détaille dans cette enquète minutieuse Jean Marc Manach. BHL dont on imagine qu’il aura du mal à répondre à quelque question que ce soit sans passer – au choix – pour un imbécile ou un criminel, ne devrait pas réaparaitre de sitôt sur un plateau télé, ou alors dans une mise en scène savament orchestrée comme la télévision Française en a le secret.
Quant à Nicolas Sarkozy, un journaliste lui posera peut-être un jour la question qui fâche : comment expliquez-vous votre grand écart sur la Libye. Dans un premier temps vous fournissez la technologie nécessaire pour espionner les opposants à Mouammar Kadhafi et dans un second temps, vous envoyez la troupe pour chasser Mouammar Kadhafi du pouvoir… N’y a-t-il pas là comme une sorte de contradiction, d’incongruité inexplicable ?
Et oui, parce que tout de même, monsieur Sarkozy, vous avez une drôle de conception des Droits de l’Homme. N’est-ce pas vous qui disiez :
« Les droits de l’homme sont, pour toutes les démocraties du monde, à la fois un point de départ et un horizon qui se déploie toujours devant eux. La France ne fait pas exception, et il appartiendra au prochain président de lui faire franchir de nouvelles étapes dans la préservation et la conquête des libertés. Je veux être le Président d’une France qui se sente solidaire de tous les proscrits, de tous les enfants qui souffrent, de toutes les femmes martyrisées, de tous ceux qui sont menacés de mort par les dictatures et par les fanatismes. Le Darfour est un scandale inacceptable, la Tchétchénie une horreur, les infirmières bulgares en Libye, une barbarie, Ingrid Betancourt dans la jungle colombienne une tragédie. Président de la République, je ne me tairai pas devant ces insultes aux droits de l’homme. Je ne passerai jamais sous silence les atteintes aux droits de l’homme au nom de nos intérêts économiques. Je défendrai les droits de l’homme partout où ils sont méconnus ou menacés et je les mettrai au service de la défense des droits des femmes. »
Comment conciliez-vous ces grandes déclarations et la réalité de votre action, c’est à dire la validation par vous, vos amis, votre gouvernement de la vente d’un vaste système de surveillance des opposants Libyens détaillé dans l’article d’Owni cité plus haut ? Et vous allez voir, ce ne sera pas le dernier, d’autres révélations sur la surveillance des opposants Libyens sont en cours de préparation. Patience©…
Reste à voir quelle sera la réaction des citoyens Français. Il leur reste peu de temps avant de voir s’abattre sur eux ces technologies, au prétexte de lutter contre le piratage, les pédophiles, ou pire encore, les vilains terroristes d’Al Quaida. Au choix. A vrai dire, tout laisse croire qu’il est déjà trop tard. Et Reflets vous l’expliquera d’ici peu.
Reflets info, 1er décembre 2011