» Malaise salarial » à l’Esat de Saint-Benoît
Les choix de l’association parentale chargée de la gestion de l’Esat sont contestés par les salariés craignant pour l’avenir des résidants.
Les personnels de l’Établissement et service d’aide par le travail de Saint-Benoît (1) sont inquiets. Leurs conditions de travail – et par ricochet celles des travailleurs handicapés qui sont confrontés eux aussi à des changements au sein de l’établissement – deviennent peu à peu ubuesques. Un terme que Stéphanie Boutin (agent administratif) et Jean-Luc Soulard (moniteur en atelier) n’utilisent pas en nom propre mais qui reflète une situation qui semble s’être gangrenée depuis quelques années.
« Ces nouvelles tâches n’ont pas d’intérêt pour les résidants »
Et même s’ils ne s’identifient pas comme les représentants « officiels » du personnel, ils ont à cœur d’exposer le mal-être qui règne au sein de leur établissement. Dans ce registre, ils dénoncent plusieurs points. D’abord, l’évolution dans l’accueil des populations (« Nous sommes de plus en plus en contact avec des personnes en situation de handicap social et non plus handicapées. Nous ne sommes pas formés pour cela. »). Puis le taux d’encadrement des ateliers qui a baissé depuis près de trois ans (« Les départs n’ont pas été remplacés. Une dizaine de postes chez les encadrants qui ne sont plus que 24 pour 144 résidents. Certains moniteurs sont régulièrement appelés à encadrer deux ateliers en même temps dans des domaines complètement différents. »).
Du » Lean management «
Enfin, le choix des activités « rentables » (« Dès que le marché est en baisse, on ne fait plus de prospection, on laisse l’outil de travail se dégrader. ») à la suite de l’arrivée de la société Toptech (« Cette structure n’a pas seulement fait un état des lieux dans le cadre d’un audit, elle est « fournisseur » de conseils en orientant systématiquement la direction vers des activités sans grands investissements et rentables tout de suite. C’est ce qui s’appelle du Lean management ! ») Les deux salariés parlent du ramassage du papier ou du vidage des poubelles qui se seraient substitués peu à peu à des activités de menuiserie ou de cuisine qui généreraient trop de charges. « Ces nouvelles tâches n’ont aucun intérêt pour les résidents et ils en souffrent. » Bien que conscients des difficultés liées au contexte économique actuel, Stéphanie Boutin et Jean-Luc Soulard s’interrogent sur « le mutisme de la présidente et des cadres dirigeants face à cette situation irrespectueuse ». Tout simplement, ils ne reconnaissent plus les valeurs fondatrices de leur établissement.
(1) L’Esat est géré par l’ADAPEI (Association départementale des amis et parents d’enfants inadaptés de la Vienne) et compte une quarantaine de salariés (administratifs, moniteurs d’ateliers, agents techniques et personnels du pôle médical).
> Nous avons tenté en vain de joindre la présidente de l’ADAPEI86. Les nombreuses tentatives « téléphoniques » à la permanence de l’association et auprès d’un autre membre de l’ADAPEI sont restées sans réponse.
Nouvelle République, Marie-Laure Aveline, 12 mai 2012