La nationalisation des banques est fondamentalement une politique nationaliste (2009)

La nationalisation des banques est fondamentalement une politique nationaliste (2009)

Traduction par nos soins d’un article de Paddy Hackett, communiste irlandais, publié le 7 septembre 2009 sur Indymedia Ireland.

La nationalisation des banques dans l’économie d’un pays est fondamentalement une politique nationaliste. Le nationalisme et la nationalisation des banques sont une seule et même chose. C’est pourquoi le programme Eire Nua du Sinn Fein, si ma mémoire est bonne, pourrait volontiers appeler à la nationalisation des banques. Ce n’est pas une position communiste révolutionnaire.

Les communistes sont internationalistes et défendent la socialisation des forces productives sur une base mondiale. Par conséquent, ils ne défendent pas les solutions nationalistes aux problèmes mondiaux. Nationaliser les banques est une politique qui peut être réalisé dans le cadre du capitalisme. Ce n’est pas une politique communiste. La nationalisation des banques ne signifie pas nécessairement résoudre les problèmes de la classe ouvrière. Les banques peuvent être nationalisées et pourtant ne parviennent pas à satisfaire les besoins les plus élémentaires et évidents de la classe ouvrière. Les banques nationalisées peuvent être tout aussi impitoyables et sans merci dans leurs relations avec leurs clients issus de la classe ouvrière que toute banque privée. Il y a déjà eu des entreprises d’État dans la production qui ont échoué à satisfaire la classe ouvrière. Ceci parce que, comme toutes les entreprises capitalistes, elles sont assujetties à la loi de la valeur.

Même avec une nationalisation du système bancaire, les banques doivent encore observer les lois du capitalisme. Sinon, elles se retirent des affaires. Elles ne peuvent pas, simplement parce qu’elles sont nationalisées, transcender la loi de la valeur. Une banque nationalisée est même parfois la solution préférée de la bourgeoisie ou du moins d’une section de celui-ci. Les banques nationalisées sont toujours liées à la monnaie, au capital sous forme monétaire. De même, elles regroupent les opérations de crédit. Elles sont indissolublement basées sur la relation d’argent. Cette relation monétaire est elle-même basée sur la circulation des marchandises et en particulier la circulation du capital sous forme de matières premières. La circulation du capital marchandise est à son tour, enracinée dans le processus de valorisation. Ainsi le système bancaire implique le processus de la reproduction capitaliste.

Les banques d’État sous contrôle ouvrier, c’est un paradoxe. En raison de leur nature, les banques d’État ne peuvent jamais être authentiquement sous contrôle ouvrier. C’est comme dire que le capitalisme peut être sous contrôle ouvrier. Si les banques peuvent être soumises au contrôle démocratique de la classe ouvrière, le capitalisme le pourrait. Le communisme ne serait donc pas une nécessité historique. Le capital, par sa nature même, empêche son assujettissement au contrôle des travailleurs. Le trotskysme, avec le programme de transition de 1938, a fait de la nationalisation sous contrôle ouvrier une part importante de son programme. Le programme de transition de 1938 tente d’aller au-delà du cadre d’un programme minimum / maximum. Mais c’est un programme imparfait qui ne fait que renforcer la confusion au sein du mouvement ouvrier. Il peut y avoir que des programmes communiste.  Un programmes communiste consiste toujours à dire très clairement que le communisme est le but. Le communisme implique nécessairement une société sans Etat et sans classes.

Les communistes ne peuvent favoriser que les relations sociales communistes, qui sont, par définition, celles qui transcendent les rapports du capital: les relations bancaires, les relations d’argent et des relations de valeur en général. Les relations communistes se heurtent à l’existence de banques et de la valeur d’échange qu’elles expriment. Les relations communistes constituent l’antithèse des relations bancaires qu’elles soient privées ou publiques. Les premières sont des relations directement visibles alors que les autres sont des relations de la réification. Par conséquent les marchandises ne peuvent pas exister sous le communisme. Les produits ne peuvent pas prendre la forme de marchandises dans les rapports communistes. Ils sont juste des produits. En conséquence de l’argent et les banques sont superflus. Tout est produit et distribué conformément aux décisions démocratique de la communauté.

Même quelques figures de la gauche stalinienne et trotskyste sont conscientes que toute nationalisation des banques effectué par le gouvernement irlandais dans les conditions actuelles n’est pas la nationalisation au sens où Lénine et Trotsky l’entendaient. Certains appellent ça une nationalisation bidon. Dan La Botz le dit dans Monthly Review:

« Les nationalisations de banques dans la réalité, n’ont été habituellement qu’une simple étape dans les cycles d’expansion-récession de l’économie moderne, une période où l’État apporte son soutien à la finance pour traverser les moments difficiles, et une fois la situation rétablie, l’Etat les rend à ses propriétaires privés afin qu’ils puissent continuer à récolter les fruits de la richesse, plus les intérêts.  »

Je termine ce billet par une citation d’Engels:

« Mais on a vu récemment, depuis que Bismarck s’est lancé dans les étatisations, apparaître certain faux socialisme qui même, çà et là, a dégénéré en quelque servilité, et qui proclame socialiste sans autre forme de procès, toute étatisation, même celle de Bismarck. Évidemment, si l’étatisation du tabac était socialiste, Napoléon et Metternich compteraient parmi les fondateurs du socialisme. »

La Bataille Socialiste, traduit par Lucien