[Poitiers] Auchan-Sud : Greenpeace, la journaliste et le vigile

NdPN : voici un cas de figure que nous avons déjà connu ; la journaliste n’avait pas à effacer ses photos, car elle semble n’avoir commis aucun délit. Même si un magasin interdit de prendre des photos dans son enceinte, en aucun cas un vigile ne peut entraver sa liberté de circuler (l’empêcher de marcher), et nulle personne, pas même un policier, n’a droit d’effacer les photos sans commission rogatoire. Seul un officier de police judiciaire peut alors immobiliser et fouiller. Et si procès il y a, il n’est pas certain du tout que le magasin gagne ; vues les circonstances, le magasin aurait même pu être condamné à la suite d’une plainte ! Aussi la technique des vigiles consiste-t-elle à faire peur, à intimider. Rien ne les empêche en revanche de demander d’effacer, même avec insistance. On comprend pourquoi, vu que la journaliste semblait avoir obtenu la preuve photographique d’un beau délit d’entrave. La journaliste n’aurait pas dû céder… mais bienvenue à elle dans le quotidien des tracasseries des vigiles et des flics, qui ont souvent tendance à la jouer « le droit c’est nous » sans toujours s’appliquer leur propre règlement. En attendant bravo aux militant.e.s d’avoir tenté d’informer le public sur la dangerosité de certains produits.

Auchan-Sud : Greenpeace et journaliste refoulés

L’intervention programmée par le groupe local de Greenpeace, hier matin, avait pour but de s’inviter (certes sans autorisation) dans une grande surface afin d’y diffuser des informations sur la dangerosité potentielle de certains produits de grande consommation, recensés dans leur nouveau guide « Le Guetteur » (*).

11 h : les 9 militants se dispersent dans les rayons d’Auchan à Poitiers-Sud et signalent leur présence avec des petits panonceaux « produits de l’agriculture toxique, ouvrez l’œil », suspendus dans les airs par des ballons rouges gonflés à l’hélium. 11 h 05 : un premier vigile de l’enseigne fonce bride abattue sur un des militants, lui demande de le suivre d’une façon peu amène et adjoint le geste à la parole en le tirant par le bras. Dans la foulée, il me demande de le suivre. Objectant car je ne fais pas partie du groupe, le vigile zélé me somme de lui montrer vidéo et photos prises au cours de l’altercation. Je refuse. Les autres militants sont également « rabattus » en dehors de la zone d’achalandise et reconduits à l’extérieur. 11 h 20 : le vigile en question me signale que je ne sortirai pas du magasin sans avoir effacé mes photos. Je négocie la non-publication qu’il refuse au prétexte qu’il « n’a pas confiance dans les journalistes ». Cinq autres personnes m’encerclent. On me demande d’attendre. Qui ou quoi ? 11 h 30 : je propose de faire appel à un responsable du magasin. Refusé ! Donc aux policiers qui trancheront. On m’intime à nouveau l’ordre, après un échange dans un talkie-walkie, d’effacer les images. Je refuse. Le temps passe et les esprits s’échauffent. 11 h 45 : de guerre lasse, j’y consens alors que la plupart des photos sur lesquelles figure l’agent sont prises de dos. Où l’art de confondre zèle et sa propre sécurité…

(*) Produits pouvant contenir des OGM ou des pesticides.

Marie-Laure Aveline, Nouvelle République, 9 février 2014