Communiqué de la fédération SUD éducation du 26 août 2014
Nous ne regretterons ni Peillon, ni Hamon. Et la nomination de Najat Vallaud-Belkacem comme Ministre de l’Éducation Nationale ne donne pas un bon signe : c’est elle, en tant que Ministre du droit des femmes (!), qui avait défendu l’arrêt des ABCD de l’égalité pour répondre à l’agitation réactionnaire suscitée par ce dispositif promouvant l’égalité des sexes.
Plus généralement, le changement de gouvernement ne changera rien sur le fond, la condition pour faire partie du nouveau gouvernement étant d’être totalement en phase avec la ligne libérale du duo Valls/Hollande. D’ailleurs, Pierre Gattaz, le Président du MEDEF, s’est dit très satisfait du remaniement et affirme que « C’est une bonne décision »…
La Valls Hollandaise se danse sur un rythme particulier : 3 pas en arrière pour le plus grand nombre, 2 pas en avant pour les plus riches. L’austérité est bien illustrée par le « pacte de responsabilité » : moins 50 milliards de dépenses publiques (services publics, collectivités, sécurité sociale) et un cadeau supplémentaire de 30 milliards au patronat. Antisociaux et économiquement contreproductifs, les effets bluesy de cette politique se sont encore manifestés cet été. Alors que la courbe du chômage refuse opiniâtrement d’opérer un demi-flip et que la sacrosainte croissance fait un moon-walk, les dividendes versés aux actionnaires des entreprises françaises ont fait un saut de chat de 30% au second trimestre. Affirmer que cette politique ne « marche » pas c’est se tromper de musique ; elle a l’effet recherché : un transfert de toujours plus de richesses vers les plus riches.
Dans l’Éducation, Médiapart a rendu publique une petite bombe début juillet : le « dossier ministre » remis par l’administration – en particulier la Degesco (direction générale des affaires scolaires) – à B. Hamon au moment de sa prise de fonction, pour le tenir informé en résumé de l’état du ministère et des politiques en cours. Sur le budget et les postes, c’est éclairant. Enfin, ce sera éclairant pour qui accorde peu de crédit au discours syndical que nous tenons depuis le début du processus dit de « refondation » ; pour les autres il ne s’agira que de confirmations.
La Degesco explique ainsi que les postes créés ne permettent pas de faire face à la croissance démographique et à la restauration d’une année de formation professionnelle. Elle confirme qu’en 2013, les « créations de postes » n’ont eu aucun effet sur le ratio entre nombre d’enseignant-e-s et nombre d’élèves. Elle prévoit qu’en 2014 cela va être encore pire. Dans le secondaire l’équivalent de 1000 emplois en heures supplémentaires sont prévus pour faire face aux besoins non satisfaits par des postes. Et la baisse continue des crédits de fonctionnement au primaire se poursuit, avec en première ligne les frais de déplacements.
Sur le quinquennat, la Dgesco explique que la programmation de + 60000 postes prévue par la loi de « refondation » ne sera pas réalisée. Il manquera 3200 postes de professeur-e-s des écoles. Dans le second degré c’est le recours aux contrats précaires qui essaiera de colmater les manques mais cela ne suffira même pas : d’ici 2017, pour simplement maintenir le taux d’encadrement, il faudrait dans le secondaire 11608 emplois supplémentaires alors que seulement 6280 sont financés. Soit un déficit de 5328. Rien n’est prévu pour faire face à l’accroissement du nombre d’élèves en termes de postes de surveillant-e-s, CPE, infirmier-e-s, etc. Au passage, on apprend que le ministère a bien l’intention de créer un statut à part pour les directeurs et directrices d’école, avec dès 2015 des créations d’emplois de direction au primaire.
C’est dans ce contexte qu’il faut replacer la réforme des rythmes scolaires dans les écoles, dont la mise en œuvre va se généraliser en cette rentrée, avec des effets qui sont déjà connus : conditions de travail dégradées, élèves toujours plus désorientés et fatigués, inégalités accrues. L’exemple de Nice est peut-être caricatural, il n’en est pas moins parlant : le maire UMP/droite extrême Estrosi a tarifé le périscolaire à 15 euros par mois et par enfant, sans progressivité ni quotient familial. Rien dans la réforme Peillon+Hamon ne l’interdit !
La priorité de cette rentrée est donc de construire la mobilisation contre les politiques d’austérité, pour un autre budget (pour l’école publique et pour toute la société), pour un autre usage des richesses, qui sont produites par les salarié-e-s. L’austérité, c’est nous et nos élèves qui la payons (conditions de travail dégradées, nombre trop élevé d’élèves par classe, dédoublements supprimés, concurrence entre équipes, entre écoles, collèges et lycées pour obtenir des miettes…).
Pour obtenir les moyens nécessaires à une année scolaire décente, SUD éducation appelle l’ensemble des collègues à :
Se réunir en AG d’établissements et de villes dès le jour de la pré-rentrée
Mettre en débat dans les AG la question des moyens et les perspectives de grève
Lutter collectivement contre les classes trop chargées
Vu sur le site de Sud Education
Rentrée scolaire 2014-15 : se syndiquer et se mobiliser !
On connaît tous la caricature du prof privilégié aux conditions de travail idylliques et perpétuellement en congé. Dans le contexte actuel de crise, le ministère de l’Éducation Nationale serait particulièrement préservé et favorisé… Alors tout baigne, et il n’y aurait plus de place pour l’action syndicale ?
Pas vraiment ! L’état général de l’École et de nos conditions de travail s’est largement dégradé dans la dernière décennie.
Des milliers de postes ont été supprimés avec des conséquences directes sur le taux d’encadrement, le système de remplacement, une pression aux heures supplémentaires dans le secondaire… Les créations de postes depuis deux ans n’ont pas permis de gommer les effets de cette saignée dans un contexte de hausse démographique des effectifs.
Le Ministère de l’Éducation Nationale est aussi touché par la précarisation , particulièrement forte dans les emplois de « vie scolaire ». Nous n’avons pas non plus été épargnés par la dérive managériale de gestion des personnels : renforcement de la hiérarchie, évaluationite, individualisation des salaires (heures sup’, primes au mérite…). La mise en concurrence et l’individualisme exacerbés par cette nouvelle politique dégradent les collectifs de travail.
Les ambitions affichées de rupture avec la politique précédente et de « rénovation de l’école » auront fait pschitt. Il en va ainsi d’une réforme des rythmes scolaires calamiteuse, imposée aux parents et personnels, accentuant les inégalités territoriales et générant plus de désorganisation que de bienfaits pour l’enfant. Le secteur de « l’éducation prioritaire » qui pourtant en avait le plus besoin, aura attendu deux ans pour des mesures réalisées à moyens constants et ne touchant qu’une centaine de réseaux cette année ! Le retour de la formation initiale, toujours handicapée par le maintien de la masterisation, s’avère également décevante. La formation pour les stagiaires varie selon les situations (titulaires d’un master ou pas, lauréat des sessions exceptionnelles ou des sessions rénovées des concours).
Au final, elle-même plus inégalitaire et moins efficace, l’école est en première ligne face à la violence d’une société en crise sociale.
Le constat est sévère et appelle à une rupture profonde. Il y a du pain sur le planche pour améliorer nos conditions de travail et proposer un service public d’éducation de qualité… Et pour ça, pas de secret, il faut se syndiquer et se mobiliser !