Interpellation de Clermont-Ferrand : la police des polices pointe une irrégularité
L’IGPN a été saisie après le décès d’un homme interpellé de manière musclée la nuit de la Saint-Sylvestre. L’Inspection relève l’emploi de la technique «du pliage», non homologuée.
L’Inspection générale de la police nationale (IGPN) a mis en cause une immobilisation irrégulière, appelée «pliage», employée par les policiers après l’arrestation mouvementée à Clermont-Ferrand de Wissam El-Yamni, décédé début janvier, selon une source judiciaire.
«Le rapport de l’IGPN pointe bien l’emploi de cette technique, et rappelle qu’elle ne fait pas partie des « gestes techniques professionnels en intervention » enseignés dans les écoles de police», a indiqué cette source, confirmant une information du journal le Monde.
Saisie après l’interpellation de M. El-Yamni le soir de la Saint-Sylvestre, la police des polices n’a pas jugé irrégulières les conditions de l’arrestation, mais s’est penchée sur le transport du jeune homme jusqu’au commissariat.
Dans la voiture, le chauffeur routier de 30 ans a été maintenu tête penchée contre les genoux, selon une méthode appelée «pliage» dans le jargon policier. Il a perdu connaissance au commissariat, avant de décéder le 9 janvier sans être sorti du coma.
Or, selon le porte-parole de l’IGPN cité dans le rapport, «le pliage (ne) fait pas partie» des techniques «apprises lors de la formation initiale et continue» des policiers, a souligné la source judiciaire.
«Wissam El-Yamni a été victime de violences, ça c’est certain. On peut éventuellement les considérer comme légitimes lorsqu’elles correspondent à des gestes professionnels répertoriés, mais ce n’est pas le cas du « pliage »», a commenté Me Jean-Louis Borie, avocat de la veuve du jeune homme.
Le pliage interdit pour la police de l’air et des frontières
Selon lui, la Commission nationale de déontologie de la sécurité a souligné dès 2005 la dangerosité du «pliage», après le décès dans des avions de deux sans-papiers maintenus dans cette position en 2003, et une circulaire interdit cette méthode à la police de l’air et des frontières depuis 2003.
Deux policiers, actuellement en congés, sont visés dans cette affaire. Une information judiciaire pour «violences volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner par personne dépositaire de l’autorité publique» a été ouverte.
Le rapport de pré-autopsie rendu la semaine dernière excluait un «décès directement traumatique», dû à des coups des policiers, avait annoncé le parquet de Clermont-Ferrand.
Les légistes évoquaient néanmoins une compression des artères carotides «lors du maintien en hyperflexion» dans la voiture, expliquant qu’elle «pourrait avoir entraîné» un ralentissement du flux sanguin «à l’origine d’une perte de connaissance».
Cette hypothèse, envisagée au conditionnel, devra être confirmé par le rapport définitif d’autopsie rendu d’ici plusieurs semaines, après des examens complémentaires, d’après le parquet.
Libération avec AFP, 29 janvier 2012