Aubade : le licenciement économique remis en cause
Saint-Savin. Le tribunal administratif pourrait remettre en cause le licenciement pour motif économique de huit salariées protégées de l’entreprise Aubade.
A quelques semaines d’intervalle, deux juridictions de Poitiers pourraient bien rendre des décisions totalement opposées.
Hier, le rapporteur public du tribunal administratif de Poitiers a estimé que huit anciennes salariées protégées de l’entreprise de confection Aubade de Saint-Savin étaient fondées à contester les arguments invoqués pour justifier du caractère économique de leur licenciement.
Un espoir après l’échec aux prud’hommes ?
Les juges rendront leur décision dans quinze jours. En règle générale, ils suivent la voie ouverte par le rapporteur public. Or, il y a tout juste un mois, le juge départiteur du conseil des prud’hommes de Poitiers, saisi par les autres salariées, avait fait une lecture économique totalement différente du dossier. Il avait rejeté la requête des 101 licenciées qui estimaient avoir été flouées. La décision qui sera rendue par les magistrats administratifs va donc être scrutée avec attention, car la décision des prud’hommes est contestée en appel. Au début de l’année 2010, l’inspection du travail de la Vienne signifiait leur licenciement économique à huit salariées d’Aubade bénéficiant d’un statut particulier. Les femmes dont il est question étaient déléguées du personnel, déléguées syndicales, participaient au comité d’hygiène ou siégeaient au comité d’entreprise ou au comité central d’entreprise du groupe Calida. Ce sont des salariées protégées et, dans ce cas-là, c’est l’inspection du Travail qui est chargée de donner son aval avant toute procédure de licenciement. L’aval a été donné et les huit salariées licenciées comme les autres, en raison des pertes essuyées par l’entreprise de lingerie. Hier, le rapporteur public a estimé que la procédure était conforme aux règles. L’inspecteur du Travail avait bien la compétence requise pour statuer sur un licenciement pour motif économique. Là où le bât blesse, c’est sur l’argumentaire retenu. Le rapporteur public relève que l’inspecteur du Travail a épousé la thèse de l’entreprise, à savoir qu’il ne fallait regarder que la situation financière d’Aubade et ne pas se pencher sur celle du groupe Calida. « Pour apprécier le motif économique du licenciement, il fallait regarder ce qui se passait à l’échelle du groupe », relève, lui, M. Jaehnert pour qui c’est le « périmètre » à prendre en compte. Et, force est de constater que les finances du groupe Calida, qui avait racheté Aubade en 2006, ne permettent pas de trouver les motifs économiques suffisants pour justifier les licenciements intervenus. L’avocat des salariés, Me Giroire-Revalier, boit du petit-lait Le rapporteur public enfonce le clou quand il relève qu’Aubade et Calida évoluent bien sur un même secteur d’activité, quand bien même la première société occupe le haut de gamme et la seconde distribue des produits plus communs. Une thèse toujours fermement contestée par les défenseurs du groupe Calida accusé d’avoir préféré ses bénéfices à l’emploi en France.
Nouvelle République, Emmanuel Coupaye, 16 février 2012