[Poitiers] Solidarité avec Ahmad !

Au Quai d’Orsay sans papiers

Doctorant, à Poitiers depuis dix ans, très investi pour les droits de l’homme, Ahmad Mohammadi est sous le coup d’une obligation de quitter le territoire.

Le 10 décembre dernier, Ahmad Mohammadi était invité au Quai d’Orsay après la candidature de son association Anahita pour le Prix international des droits de l’homme de la République française. « Alain Juppé y a parlé de l’engagement international de la France en matière des droits de l’Homme, de Shirin Ebadi. Moi j’y étais, sans papiers reconductible à la frontière… » Il sourit.

Titulaire d’un DEA en droit pénal et sciences criminelles, doctorant chercheur à Poitiers depuis dix ans, il travaille sa thèse sur son sujet favori: les droits de l’homme. C’est lui qui, à deux reprises, dès 2008, avec l’association qu’il a fondée à Poitiers pour promouvoir les droits de l’homme et l’égalité entre les sexes, a fait venir l’avocate iranienne (aujourd’hui en exil à Londres) Shirin Ebadi, prix Nobel de la Paix en 2003.

En octobre 2010, comme chaque année, Ahmad Mohammadi se rend à la préfecture pour faire renouveler son titre de séjour. Il fournit une attestation de son directeur de thèse (on ne lui a jamais demandé auparavant). En février 2011, il revient à la charge pour obtenir un second récépissé de demande de titre. « A la préfecture, j’attends des heures dans une pièce où je dois décrocher le téléphone pour entendre dire: Il faut patienter Monsieur, la patience est la mère de toutes les vertus! Ça faisait déjà quatre mois que j’avais déposé ma demande de renouvellement. »

“L’administration épuise, décourage les étrangers”

Après avoir menacé d’une grève de la faim et écrit au préfet, au maire et au président de l’université, il reçoit un deuxième récépissé, valable jusqu’au 6 juin 2011. Mais le 3 juin, il reçoit une obligation de quitter le territoire. Motivation: le doctorant n’a pas soutenu sa thèse dans le temps imparti (huit ans). Le recours devant le tribunal administratif de Poitiers de Ahmad Mohammadi est rejeté. La requête en appel à la cour administrative d’appel de Bordeaux devait être examinée hier, avec de nombreuses attestations et le soutien de Shirin Ebadi. Le jugement devrait être connu dans une semaine.

Lorsqu’on lui demande s’il se bat pour « rester » en France, l’étudiant chercheur corrige. « Je ne suis pas venu pour rester en France, J’y étais et je compte continuer à y ” être “. Même si j’ai bon espoir de lever l’OQTF, mon combat ne fait que commencer. J’ai écrit au préfet pour lui dire que cette décision n’est pas digne de la République française et que j’irai, s’il le faut, jusqu’à la Cour européenne des droits de l’homme pour la casser. Je ne suis pas amer ni dégoûté, mais je veux défendre les lois de la République et empêcher que la France se ridiculise par des méthodes indignes. L’administration épuise, décourage les étrangers. »

Quant à une expulsion en Iran, Ahmad Mohammadi ne donne pas cher de son avenir dans son pays. Son soutien à l’avocate iranienne est public. Shirin Ebadi devrait même faire partie de son jury de thèse… S’il parvient à la soutenir en France.

Laurence Chegaray, Centre Presse, 17 février 2012

Vu sur le blog RESF-Antenne universitaire 86