[Châtellerault] Handiphobie d’Etat

Sous curatelle, ils veulent qu’on leur rende leur fille

Châtellerault. On leur a retiré leur fille dès la naissance. Depuis trois ans,  Cécile et Frédéric Renault, sous curatelle, se battent pour la récupérer.

Dans la chambre qu’ils avaient aménagée pour accueillir leur fille Clémence, née en 2009, Cécile et Frédéric Renault ont replié le lit à barreaux qu’il avait acheté pour elle. Elle n’y a jamais dormi. Et, de toute façon, maintenant, elle est trop grande…

Depuis trois ans, ils se battent pour récupérer leur enfant, que l’Aide sociale à l’enfance (Ase) leur a enlevé dès la naissance. Comme son épouse, le père de famille restera à jamais marqué par ce jour où on leur a « arraché » leur fille à la maternité du centre hospitalier Camille-Guérin de Châtellerault : les policiers qui le menottent parce qu’il refuse qu’on lui prenne sa fille, les infirmières qui retiennent sa femme… Un véritable cauchemar.

«  Pour eux, on n’est pas assez compétent  »

Résidant à Châtellerault, ils sont tous deux sous curatelle. « Au départ, on avait des problèmes pour remplir les papiers, faire des paiements», explique Frédéric, souffrant de « plusieurs maladies » (« J’ai des crises d’épilepsie, j’ai des problèmes de cœur… »). Et, selon leur avocat, Me Xavier Cottet, « l’Ase a estimé qu’il y avait danger pour leur fille » (1). « Pour eux, on n’est pas assez compétent, on est des personnes qui auraient des difficultés à répondre aux besoins de l’enfant, il faudrait qu’il y ait toujours quelqu’un derrière nous… », peste le père de famille. Après un mois en « pouponnière », Clémence a été placée dans une famille d’accueil. Depuis, ils ne la voient que deux fois par semaine, 2 heures le mardi et 3 heures le jeudi (2). Chez eux, en présence d’une « travailleuse familiale ». « On ne l’a pas pour Noël, ni pour les vacances, ni le week-end, ni pour le premier de l’an ! », déplore Frédéric. Ils ont pu faire son baptême. Mais le souvenir qu’ils en gardent leur fait encore mal au ventre… « On a fait le baptême. Après, on avait prévu un repas avec elle. Mais, aussitôt après le baptême, ils l’ont emmenée. » Aujourd’hui, contrairement à sa femme, Frédéric n’est plus en curatelle renforcée mais en curatelle simple. « Je fais mes papiers tout seul. »

Le placement de Clémence prolongé deux ans

Mais ça n’a rien changé… Alors qu’ils espéraient « l’avoir définitivement à la maison », le tribunal pour enfants de Poitiers vient de renouveler le placement de la fillette à l’Ase pour deux ans. Une nouvelle désillusion pour le couple. « J’en suis malade, confie Frédéric. J’en pleure à longueur de journée. » Pour autant, Frédéric et son épouse ne se découragent pas. Par l’intermédiaire de Me Cottet, ils ont fait appel du jugement. Cécile envisage aussi de lancer une pétition. Pour l’amour de Clémence.

(1) Contactée, la direction de l’Ase n’a pas souhaité s’exprimer sur ce dossier. (2) Clémence rentrera bientôt à l’école. A partir de ce moment-là, ses parents ne la verront plus que le mercredi et deux fois par an en période de vacances.

bon à savoir

La curatelle est une mesure judiciaire destinée à protéger une personne majeure qui, sans être hors d’état d’agir elle-même, a besoin d’être conseillée ou contrôlée d’une manière continue dans les actes importants de la vie civile. Une personne en curatelle simple accomplit seule les actes de gestion courante, comme la gestion du compte bancaire ou la souscription d’une assurance. En revanche, elle doit être assistée de son curateur pour des actes plus importants. Par exemple, le curateur doit consentir à un emprunt. En curatelle renforcée, le curateur perçoit les ressources de la personne et règle ses dépenses sur un compte ouvert au nom de celle-ci.

Nouvelle République, Alain Grimperelle, 3 avril 2012