NdPN : Grève des personnels du lycée Branly à Châtellerault pour récupérer un poste administratif supprimé ; indignation de syndicats, de parents d’élèves et d’élus suite aux déclarations et aux propositions de la Rectrice sur les collèges ruraux… les « économies » poursuivies par le gouvernement n’ont pas apaisé la grogne à l’Education nationale.
Pendant ce temps, le ministre Peillon, nouveau préposé à l’usine à gaz, parle de « refonder » l’école sur la base de timides mesurettes. Et des milliers de postes continuent d’être supprimés, poursuivant la logique du « mieux faire avec moins » ; base élèves, socle commun et livret de compétences n’ont pas été abrogés, poursuivant ainsi la logique du contrôle social ; le service minimum au primaire est maintenu… Même dans l’Education, l’une des prétendues « priorités » de Hollande, le changement, c’est décidément pas pour maintenant !
Grève à Branly après la suppression d’un poste
Une grande partie des personnels du lycée Branly ont fait grève hier pour obtenir le rétablissement d’un poste administratif supprimé à la rentrée.
La rentrée s’est déroulée sans accroc à la Cité technique Edouard-Branly la semaine dernière. Mais le feu couvait…
Dès le mois de mai dernier, l’intersyndicale de l’établissement avait fait circuler une pétition contre la suppression d’un poste de secrétariat administratif cette année. En vain. Du coup, elle avait déposé un préavis de grève pour le 6 septembre. Malgré la création d’un demi-poste d’assistant d’éducation entre-temps, elle a fini par le mettre à exécution hier. Le mouvement a été suivi par l’ensemble des personnels administratifs et 40 % des personnels enseignants.
La mise en réseau de Branly et du Verger pointée du doigt
Aux yeux des grévistes, le demi-poste d’assistant d’éducation créé ne suffira pas à compenser le poste supprimé : « C’est un poste précaire et la qualification n’est évidemment pas au rendez-vous puisque l’essentiel de la mission à remplir est la gestion des examens : inscription, organisation et suivi des épreuves, traitement des copies, suivi du contrôle continu… ». Ils demandent que le poste de secrétariat administratif « soit rétabli de façon pérenne et occupé par un agent qualifié », d’autant, selon eux, que « l’équipe de direction est déjà incomplète compte tenu de la structure complexe du lycée (vaste offre de formations, direction conjointe lycée général et lycée professionnel, à laquelle vient de s’ajouter celle du lycée professionnel du Verger) ». D’après eux, cette suppression serait d’ailleurs « une des conséquences de la mise en réseau des lycées professionnels de Branly et du Verger ». Et ils craignent qu’il y en ait d’autres… Dans la matinée, ils ont été reçus par le proviseur Christian Alaphilippe (que nous n’avons pu joindre hier), auprès duquel ils ont sollicité une entrevue avec la rectrice Martine Daoust. Une entrevue finalement obtenue pour cet après-midi. Dans cette perspective, ils devaient reprendre le travail ce matin. Mais ils préviennent : « Si le Rectorat n’accède pas à notre juste demande, nous envisagerons d’autres actions ».
Alain Grimperelle, Nouvelle République, 14 septembre 2012
Le handicap de nos petits collèges de campagne
Les élèves issus des établissements ruraux ont deux fois moins de chance de faire des études supérieures. L’explication de la rectrice fait débat.
La polémique est née d’un constat dressé par la rectrice de l’académie de Poitiers et d’une phrase prononcée le jour de la rentrée des classes : « On a deux fois moins de chances de poursuivre ses études dans l’enseignement supérieur quand on est issu d’un petit collège de moins de 200 élèves que lorsqu’on est scolarisé dans un collège plus important », s’est désolée Martine Daoust en faisant référence aux statistiques sans appel de son administration (lire notre édition du dimanche 9 septembre).
Dans le public, deux collèges de la Vienne sont concernés – ceux de Charroux et de Saint-Savin -, et la tendance vaudrait aussi pour deux autres comptant moins de 250 élèves – à L’Isle-Jourdain et Saint-Jean-de-Sauves. « Le caractère convivial et familial, c’est bien. Mais on câline tellement les élèves dans ce type d’établissements qu’ils sont perdus quand ils se retrouvent au lycée », estime la représentante de l’Education nationale qui juge ce constat « absolument anormal ».
« Les enfants d’ouvriers ont trois fois moins de chances de faire des études supérieures »
Que faire pour corriger ce déséquilibre dans la mesure où le conseil général ne souhaite pas fermer les collèges ruraux concernés ? « Ces établissements ont longtemps été protégés, mis sous cloche ; il faut à présent les faire travailler en réseau avec un lycée comme nous l’avons déjà fait à Civray et à Loudun », ajoute Martine Daoust. Les représentants des enseignants et des parents d’élèves se rejoignent pour condamner cette interprétation des statistiques. « Ce n’est pas la structure qui crée le handicap », souligne Laurent Cardona, le secrétaire départemental du syndicat UNSA-Education. « La pauvreté des transports et les origines sociales ne sont-elles pas aussi des sources de frein aux études supérieures ? », interroge Isabelle Siroy, porte-parole de la Fédération des conseils de parents d’élèves de la Vienne. « Nier la difficulté sociale, c’est nier les statistiques de l’Education nationale qui montrent que les enfants d’ouvriers ont trois fois moins de chances de faire des études supérieures que les enfants d’enseignants ou de cadres supérieurs, et les enfants d’inactifs cinq fois moins ! » La FCPE dénonce au passage la suppression d’un poste d’assistante sociale dans le secteur de Civray. Elle rappelle aussi que « les parents souhaitant scolariser leurs enfants au collège de Charroux, soulageant ainsi celui de Gençay, n’obtiennent pas de transports scolaires ». Pour l’UNSA, la « bonne réponse est de donner aux établissements ruraux les mêmes moyens que dans les zones prioritaires des banlieues ». Pas simplement de les faire travailler en réseau, donc. Et encore moins de les fermer.
en savoir plus
» Une provocation de plus «
Le secrétaire départemental du syndicat UNSA-Education s’est dit « très choqué » par les propos de la rectrice au sujet des contraintes de la politique d’aménagement du territoire : « Il faut faire vivre le bar-tabac du coin où les profs vont boire leur café le matin. On ne peut pas dire qu’on veut revitaliser les campagnes et fermer les petits collèges… C’est difficile. » Pour Laurent Cardonna, c’est « une provocation de plus de la part de cette rectrice » : « Son raisonnement est trop grossier et trop simpliste pour ne pas être une provocation… Depuis deux ans qu’elle est en poste ici, elle en a après les petits collèges mais rien n’est fait pour l’école rurale. »
réactions
> Henri Colin, vice-président du conseil général en charge de l’Education : « Supprimer les cinq collèges de moins de 250 élèves à la périphérie du département reviendrait à créer des zones peuplées d’Indiens. Nous n’avons pas cédé du tout sur ce terrain quand nous avons rencontré la rectrice… Il faut aussi penser aux catégories socio-professionnelles des familles dont les enfants vont dans ces collèges. » > Yves Gargouil, conseiller général de Charroux (majorité) : « Je suis révolté, très énervé à la lecture des propos de la représentante de l’Education nationale dans la Vienne. Je l’invite à venir découvrir la qualité de l’accueil des élèves au collège Romain -Rolland à Charroux, où en juin dernier, tous les élèves ont eu leur brevet, avec de très bons résultats. » > Xavier Moinier, conseiller général de Saint-Julien-l’Ars (opposition) : « Il serait intéressant de connaître la réussite des enfants dans les collèges où les effectifs explosent mais il me semble bien plus urgent de remettre à plat la carte des collèges dans la Vienne. Une répartition plus équilibrée des effectifs pourrait être une première piste évitant leur fermeture définitive à terme. Une seconde piste serait d’envisager des fermetures là où un autre collège existe à proximité en mettant en place des transports collectifs. »
la phrase
» Les collèges de proximité sont une nécessité pour que nos enfants ne subissent pas plus de deux heures de trajet par jour. «
« Nous demandons depuis plusieurs années que soient revus les secteurs des collèges pour équilibrer les établissements et en finir ainsi avec les gros et les petits collèges », rappelle la porte-parole de la FCPE de la Vienne, Isabelle Siroy. « Dans notre département rural, les collèges de proximité sont une nécessité pour que nos enfants ne subissent pas plus de deux heures de trajet par jour et puissent donc conserver encore un peu d’énergie pour les devoirs du soir à la maison. »
Baptiste Bize, Nouvelle République, 14 septembre 2012