[Poitiers] Ouste Daoust

La rectrice s’en va : démission ou renvoi ?

Martine Daoust a annoncé de démission, hier, dans L’Express. Trois jours avant un probable limogeage en conseil des ministres.

Chaque mercredi, regardez le Journal officiel après le Conseil des ministres, un jour vous y verrez mon nom… » C’est la réponse qu’avait consenti à faire à la presse — le 4 septembre, jour de la rentrée — Martine Daoust, quant à son avenir à la tête de l’académie de Poitiers ! Ce ne sera pas aujourd’hui mais peut-être bien vendredi que l’on découvrira son nom parmi la liste des recteurs démis de leurs fonctions par le ministre de l’Éducation nationale, Vincent Peillon. C’est en effet ce jour-là que se tiendra le prochain conseil des ministres. La rectrice s’est confiée — chose rare — à la rédaction de L’Express, hier après-midi. Selon nos confrères, Martine Daoust aurait demandé au ministre de l’Éducation nationale « de la relever de ses fonctions », dans une lettre envoyée, il y a quinze jours.

Un difficile dialogue

C’est « le ras-le-bol » qui l’aurait conduite à prendre cette décision indiquant dans le magazine « avoir passé l’âge de se faire engueuler par les syndicats ». Martine Daoust dénonce une « certaine complaisance » de sa hiérarchie vis à vis des syndicats. On peut s’étonner de ce motif. Il ne colle pas vraiment à la personnalité forte d’une femme qui n’a jamais mâché ses mots quand elle consentait à s’exprimer. Sa notion toute personnelle du dialogue ne l’a pas aidée dans une tâche qu’elle aura menée deux ans, assurant la rentrée 2012. Ses décisions et propos – les derniers – sur les collégiens ruraux « qui font moins d’études supérieures que les urbains », rapportés dans notre édition du 9 septembre ont déclenché mouvements, réactions, levées de boucliers et parfois déception comme en mai dernier lorsqu’elle choisit d’annuler sans préavis un projet de voyage humanitaire de lycéens châtelleraudais au Maroc. Cette décision qu’elle n’a pas souhaité confirmer hier soir n’aurait rien à voir selon elle avec une « chasse aux sorcières ». La rectrice a indiqué «respecter l’alternance démocratique », ajoutant que « la relation au dialogue social sous un gouvernement de droite n’est pas la même ». Comment ce professeur des universités, agrégée de pharmacie en science du médicament qui a exercé plusieurs activités pédagogiques et de recherche entrevoit-t-elle l’avenir. Va-t-elle reprendre l’enseignement supérieur ? N’a-t-elle pas indiqué le 4 septembre dernier, lors de sa conférence de presse de rentrée que « ses étudiants seraient ravis de la voir revenir ? » Ou comme l’indiquent encore nos confrères se consacrer à des projets personnels. Selon L’Express, la rectrice pourrait se lancer dans l’ouverture de chambres d’hôtes.

Nouvelle République, Sylvaine Hausseguy, 26 septembre 2012

Réactions syndicales et de la FCPE

Les représentants syndicats et de la Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE) ont souvent côtoyé Martine Daoust depuis deux ans. Ils réagissent « à chaud » à la décision de la rectrice relayée par nos confrères de l’Express.

>  Isabelle Siroy (FCPE). « La FCPE n’est pas surprise par la démission de la rectrice. Il apparaît normal que le recteur applique les directives ministérielles et il était sans doute difficile pour elle de s’accorder avec l’esprit du nouveau ministre. Pendant deux ans, elle n’a pas été gênée par le fait «  de se faire engueuler par les syndicats  ». Son idéologie est différente de celle de l’école de la République et donc celle attendue. L’école pour tous n’était pas son truc. On peut lui reconnaître qu’elle a assumé jusqu’au bout, jusqu’au la rentrée. Nous nous sommes battus pour la retraite à 60 ans, nous lui souhaitons donc une bonne retraite. »

> Laurent Cardona (SE-UNSA). « Cette annonce est une bravade de plus. Son départ était attendu depuis longtemps. Elle a toujours eu un management et un pilotage très partisan. Avec un zèle certain pour mettre en œuvre une politique politicienne et non éducative. Elle a toujours eu une propension à créer une polémique et à se repaître du spectacle créé par la polémique. Elle a également conduit à une mise en place d’une nouvelle gouvernance académique catastrophique. Notamment, dans le premier degré. »

> Franck Loureiro (Sgen-CFDT). « Selon ses propos, elle ne souhaitait «  pas faire l’inverse de ce qui a été fait précédemment  » et estime avoir «  passé l’âge d’être démolie  » en évoquant sa «  relation avec les représentants du personnel très tendue et pas toujours équitable  ». Le Sgen-CFDT Poitou-Charentes rappelle l’impossibilité de mener un dialogue constructif et se souvient en particulier de la tentative de Mme Daoust de supprimer 10 des 14 Centres d’information et d’orientation (CIO) de l’académie. Seule la mobilisation des personnels, du Sgen-CFDT et des élus avait alors permis de faire échouer ce projet qui aurait porté un coup fatal à un service public d’orientation de proximité. »

> Myriam Lieby (FSU). « Elle semblait un peu loin des affaires depuis un moment. Le travail avec un recteur est toujours difficile. Il y a eu des épisodes difficiles avec des portes claquées. Les rapports ont été tendus et les oppositions fortes en terme d’orientation. Les relations n’ont pas été excellentes mais je veux rester respectueuse de la personne. »

Nouvelle République, 26 septembre 2012