[Poitiers] Misère, misère…

NdPN : Demain a lieu la « journée mondiale du refus de la misère », à l’initiative d’ATD Quart-Monde. Rassemblement 15H sur la place du palais de justice, à l’appel de plusieurs associations et collectifs. L’occasion de rappeler que c’est le capitalisme qui fabrique la pauvreté, et que l’Etat et ses flics chassent les pauvres du centre-ville ?

Deux articles de la NR d’aujourd’hui dressent un panorama de la pauvreté dans la Vienne.

 » Pour nous, la pauvreté gagne du terrain « 

L’épicerie sociale de Poitiers-Sud reçoit toujours plus de bénéficiaires dont des nouveaux venus : des retraités et jeunes de moins de 25 ans.

Jennifer, une maman de 20 ans attend d’être appelée pour acheter des produits alimentaires à l’épicerie sociale Go Elan, à Poitiers-Sud. Son compagnon s’occupe de leur garçonnet, âgé d’un an. « Je viens chaque mardi pour compléter. En dépensant 10 €, nous avons de quoi manger pratiquement toute la semaine », confie la jeune femme. Le couple a un budget de 700 € par mois. Il lui reste 300 € lorsque les dépenses fixes (dont le loyer) ont été soustraites. Le papa recherche un emploi de manœuvre dans l’intérim après avoir bénéficié d’un contrat aidé à Cap-Sud. Jennifer en a décroché un, à son tour, d’une durée de 7 mois.

«  Ils sont victimes de la société actuelle  »

Ses attentes : avoir un appartement plus grand à Bellejouanne où elle a toujours vécu, le permis de conduire indispensable pour obtenir un travail. « Si on pouvait avoir tout ça, ce serait bien », conclut-elle. Les bénévoles de l’épicerie sociale La Bien Lotie ont enregistré 201 familles ce qui représente 581 personnes sur Poitiers-Sud. Le pourcentage de 22 % de pauvres à Poitiers ne paraît pas énorme à la présidente de l’association Go Elan, au regard de la réalité qui s’affiche sur le terrain. Les bénéficiaires ? « Beaucoup de migrants installés depuis plusieurs années mais pas seulement. Des personnes surendettées, dépassées par les factures générées par «  la téléphonie  », par celles du gaz et de l’électricité, par l’augmentation du coût de la vie ou confrontées à l’absence de travail. » Elle observe que le nombre de pauvres augmente depuis 10 ans mais la courbe grimpe en flèche depuis deux ans. Des travailleurs pauvres, des jeunes de moins de 25 ans, des retraités, des familles avec de nombreux enfants viennent faire leurs achats à très petits prix. « Ils sont victimes de la société actuelle », commente Claudine Arnault. « La crise, on ne fait qu’entrer dedans. Je pense que l’hiver et le début de l’année prochaine seront difficiles. Et, pour beaucoup, il n’y aura que l’épicerie sociale et les Restaurants du Cœur pour se nourrir. » Elle se demande comment des jeunes sans aucune formation pourront trouver un emploi alors que les usines ferment dans le département. Mais se réjouit que des familles parviennent à s’en sortir. Son grand sujet de préoccupation : les enfants auxquels il faut porter une attention particulière.

le billet

Pauvre Sisyphe

Ce personnage des temps anciens fut condamné dans les Enfers à faire rouler sur la pente d’une montagne un rocher qui retombait toujours avant d’avoir atteint le sommet. Aujourd’hui, les Sisyphe des temps modernes sont légion. A Poitiers, services sociaux, médecins, assistantes sociales, militants associatifs et bénévoles que la pauvreté révulse s’efforcent d’œuvrer dans le même sens. Cela permet peut-être de juguler un peu mieux qu’ailleurs ses effets destructeurs. Mais chaque jour, en dépit de tous ces efforts, le travail est à refaire. Longtemps préservés, l’université et le monde étudiant sont aussi touchés. La tâche est donc immense. Aussi ne peut-on que saluer et soutenir le travail de ceux qui ont décidé de chasser la pauvreté jusque sur sa montagne.

publication

Objet d’études

En août dernier, un bureau d’études Compas publiait une analyse sur le taux de pauvreté des cent plus grandes communes de France. Il estimait à 22 % le taux de pauvreté de Poitiers, soit 7 % au-dessus du taux moyen pour la France métropolitaine. Le taux obtenu correspond au pourcentage des ménages qui, dans une ville donnée, perçoivent moins de 60 % du revenu médian national après prestations sociales.

(*) Publication du bureau d’études Compas, spécialiste de l’analyse des besoins sociaux des territoires. Étude disponible et téléchargeable sur www.lecompas.fr

rendez-vous

En lutte contre la misère

La journée mondiale du refus de la misère a lieu demain, mercredi. A cette occasion, plusieurs associations (L’Astre en moi, ATD Quart-monde, La vie nouvelle, le Toit du monde et la résidence Cécile et Marie-Anne) organisent un rassemblement place du palais de justice à Poitiers, à partir de 15 h. Temps de commémoration et témoignages, à 18 h.

Nouvelle République, 16 octobre 2012

Ils prennent un repas réduit quatre fois par semaine

Une récente étude menée auprès de plus de mille étudiants poitevins révèle que ceux-ci ne mangent pas tous les jours à leur faim. État des lieux.

Poitiers fait partie des plus grandes villes universitaires de France et compte plus de 23.000 étudiants, soit plus de 20 % de la population de la ville. D’avril à mai 2012, l’Association fédérative des étudiants de Poitiers (Afep) a mené une enquête de terrain auprès de 1.069 étudiants pour faire un état des lieux de la précarité. Les résultats sont édifiants. « On constate notamment que 20 % des étudiants prennent un repas réduit (un fruit et une boisson pour seul repas) au moins quatre fois par semaine, résume Florence Pasquier, de l’Afep et gérante du projet Agoraé, un type d’épicerie solidaire qui a déjà vu le jour sur plusieurs campus en France. On note d’autre part que les étudiants renoncent à se soigner pour des raisons financières chaque année, négligeant notamment les soins bucco-dentaires. »

Une épicerie après la Toussaint ?

Après Lyon, Nice ou Lille, l’université de Poitiers devrait se doter prochainement d’une épicerie sociale et solidaire, sur le campus, à la Maison des étudiants (MDE) Elle devrait dans un premier temps être ouverte une demi-journée par semaine. Un premier pas encore timide, mais bien nécessaire, vers une réduction de la précarité étudiante.

le chiffre

954

C’est en euros la somme en dessous de laquelle on est considéré comme pauvre. En France, huit millions de personnes vivent sous ce seuil. Six millions sont des travailleurs occupant des emplois à temps partiels subis. Et 40 % des salariés français n’ont pas un emploi stable.

Nouvelle République, 16 octobre 2012