[Poitiers] DAL 86 : Compte rendu de l’audience au TI du 15-02-13

Compte rendu de l’audience au TI du 15-02-13

Beaucoup de monde au Tribunal d’Instance en cette matinée. Beaucoup de dossiers aussi. L’affaire n’a été plaidée qu’à la fin à partir de 13h15. Grosse pression de la police remarquée par l’avocate dans sa plaidoirie. Les policiers se sont relayés tout au long de la matinée. Entre deux et six présents en même temps, plus un policier des renseignements généraux, pour être une dizaine avec des Officiers de Police Judiciaire à la fin vers 13h50, où il n’y avait qu’eux, la famille (la mère et sa fille de 13 ans), leur avocate et un membre du Dal…. Et tout ça, rappelons-le pour une audience au TRIBUNAL d’INSTANCE… Un goût amer de vrai Etat policier.

L’avocate de la partie adverse a plaidé en vue de l’expulsion immédiate de la Famille L. en invoquant deux raisons : la situation est dangereuse du fait de la défectuosité du système électrique et parce qu’ils seraient rentrés par « voie de fait ».

La stratégie est claire : ne pas jouer le droit de propriété contre le droit au logement mais centrer sur le bien de cette famille (la dangerosité du système électrique) et sur la seule chose légale qui pourrait amener le juge à prononcer une expulsion immédiate : l’entrée par voie de fait.

Or il se trouve que la partie adverse n’a aucunes preuves sur ces deux points. Sur la dangerosité du système électrique, le rapport produit date certes du 6 novembre 2012 mais ne précise pas que le système électrique actuel est dangereux et indique que « l’installation intérieure d’électricité n’était pas alimentée lors du diagnostic », et la partie adverse n’a produit aucune preuve que l’électricité est aujourd’hui alimentée dans la maison.

Sur l’entrée par voie de fait, il faudrait que la partie adverse ait les preuves qu’il y ait bien eu dégradation et qu’elle soit du fait de madame L. Or, il n’en est rien. La famille a toujours dit être rentrée par la porte ouverte le 27 décembre 2012 et ce n’est que le 6 janvier suivant que les propriétaires ont constaté que l’immeuble était occupé. Ils ne savent donc pas ce qu’il s’est passé le 27 décembre et donc n’ont aucune preuve de ce qu’ils affirment. Dans la plainte qu’il ont déposé le 23 janvier, ils affirment même qu’il étaient venus pour « vérifier si un menuisier qu’il avaient commandé avait posé une fenêtre qui était cassée ». La maison n’était donc pas totalement fermée lorsque la famille L. y a pénétré. De plus la partie adverse affirme que la famille L. est rentrée dans les lieux en « forçant la serrure » et produisent comme preuve un rapport d’huissier qui date du… 28 janvier soit plus d’un mois après l’entrée dans les lieux de la famille.

L’avocate de la famille L. a balayé ces arguments de mauvaise foi et a répondu en demandant que la loi soit appliquée. Non seulement, nous l’avons vu, il n’y avait aucune raison de réduire le délai de deux mois mais a demandé de le rallonger comme c’est prescrit dans l’article L412-2 du Code des procédures civiles d’exécution, du fait « des conséquences d’une exceptionnelle dureté » que cela a sur cette famille : nous sommes en hiver, il y a deux enfants de 9 mois et de 13 ans et cette famille malgré les démarches qu’elle a faite auprès des autorités compétentes, est dans une situation des plus précaires.

Elle a même demandé l’application de l’article L412-3 du Code des procédures civiles d’exécution qui stipule que « Le juge peut accorder des délais renouvelables aux occupants de locaux d’habitation ou à usage professionnel, dont l’expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales, sans que ces occupants aient à justifier d’un titre à l’origine de l’occupation. »

Une remarque concernant les démarches de la famille L. qui n’aurait pas fait de demande de « logement social ». C’est un fait avéré, sur Poitiers tout le monde, surtout les autorités, confondent tout et n’importe quoi. L’avocate adverse n’échappe pas à cette règle. Il est clair que la situation de la famille L. ne peut pas lui permettre de prétendre à un logement social comme elle leur a reproché mais seulement à un hébergement d’urgence. Et c’est là que le bas blesse. Dès le samedi 22 décembre au milieu de l’après-midi ils ont appelé le 115. La personne du standard du 115 a pris leurs noms et leur a dit qu’il n’y avait pas de place. L’un des militants du DAL86 a alors pris le téléphone et a insisté en appuyant sur le fait qu’il y avait un enfant de 9 mois, un autre de 13 ans qui étaient à la rue. La personne du standard du 115 a alors répondu qu’elle allait se renseigner et qu’il fallait rappeler dans une heure. Quand les personnes ont rappelé, le standardiste du 115 leur a dit qu’il y avait des places mais à 20 km de Poitiers… Le DAL86 les a ensuite conduit à l’Aide Sociale à l’Enfance le 24 décembre mais c’était fermé, puis le 26 décembre. Selon l’ASE, la situation de ces familles, de ces enfants de 9 mois et de 13 ans, n’était pas « préoccupante » puisqu’ils couchaient dans une voiture ! Et il ont refusé la prise en charge. Dès le 3 janvier, madame L. a fait un courrier recommandé au préfet dans lequel elle explique sa situation et demande d’être prise en charge, elle et sa famille. Elle n’a toujours pas eu de réponse à ce jour. Et le 6 janvier, par l’intermédiaire du Dal86, la famille L. a proposé aux propriétaires de faire un bail précaire le temps de la vente. Les propriétaires n’ont à ce jour donné aucune suite. D’autre part, la famille L. a une assistante sociale et est suivie par de multiples services sociaux et médicaux, le CCAS, la PMI, le CHU, le Relais Charbonnier, la Croix Rouge, le Secours Catholique… qui semblent être bien indifférents à leur situation dramatique.

La loi : Code des procédures civiles d’exécution Articles L412-1 à L412-8

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Permanences : tous les samedis matin de 11h à 12h et tous les mardis soirs de 17h à 18h Maison de la Solidarité 22 rue du Pigeon Blanc Poitiers

Vu sur DAL 86, 18 février 2013