NdPN : bonne nouvelle, mais vus les retournements d’Ayrault et de Cuvillier sur la question, ne crions pas victoire trop vite !
La LGV Poitiers-Limoges repoussée au-delà de 2030
Le rapport de la commission Mobilité 21 remis au gouvernement hier préconise de remettre le projet de barreau ferroviaire à la période 2030-2050.
Impossible, en l’état des finances publiques, de réaliser les 250 milliards d’euros de travaux inscrits au Schéma national des infrastructures de transports. Chargée de hiérarchiser les projets en concurrence, la commission Mobilité 21 a remis son rapport au ministre des Transports, hier, pour préconiser notamment de traiter les « grands points noirs du réseau ferroviaire » avant de lancer la construction de lignes nouvelles.
S’il n’est pas enterré, le projet de ligne ferroviaire à grande vitesse entre Poitiers et Limoges est repoussé à la période 2030-2050.
Priorité à la branche vers Toulouse
Seule la branche Bordeaux-Toulouse figure parmi les « premières priorités » pour des travaux à engager entre 2017 et 2030 ; et encore, uniquement dans le scénario n° 2 basé sur une augmentation des moyens disponibles ! Alors que le président de la République qui suit personnellement le dossier cher à ses amis du Limousin avait laissé entendre au début du mois qu’il ne suivrait pas nécessairement les préconisations de la commission, le Premier ministre a déclaré à L’usine nouvelle qu’il partageait le « diagnostic précis » de la commission sur « nos besoins de transport ». Pas de quoi perturber, le député-maire de Poitiers qui dès mercredi avait réagi aux fuites en se déclarant confiant : « Je maintiens que les travaux commenceront avant 2030. Ça prendra peut-être cinq ans de retard (ndlr, par rapport à la mise en service attendue en 2020) mais pas davantage. » Du côté du Limousin où les collectivités ont participé aux financements de la ligne Tours-Bordeaux dans la perspective d’une poursuite jusqu’à Limoges, les réactions restent également prudentes. L’ancien ministre des Transports et président du conseil général de la Charente-Maritime, Dominique Bussereau ? s’est fait quant à lui fait plus menaçant sur Twitter en annonçant que son Département réexaminerait « ses engagements financiers » si la ligne devait s’arrête à Bordeaux alors qu’elle devait aussi rejoindre l’Espagne via Bayonne.
réactions
> L’ancien maire de Poitiers Jacques Santrot a vivement réagi sur France Bleu : « Le président de la République, qui est loin d’être sot, a bien compris que le désenclavement du Limousin ne pouvait pas attendre 2030. Donc cela pèsera dans le sens de la réalisation de cette ligne. »
> La Fédération nationale des associations d’usagers des transports se félicite de « l’élimination par report à un horizon lointain d’un certain nombre de projets inutiles voire fantaisistes » en citant la LGV Poitiers-Limoges.
Baptiste Bize, Nouvelle République, 28 juin 2013
Le rapport qui signe la fin du tout-TGV
Le gouvernement a tiré un trait sur les politiques de transport pharaoniques, avec la remise jeudi du rapport de la commission Mobilité 21.
Les branches Ouest et Sud de la ligne à grande vitesse Rhin-Rhône ou encore la ligne Toulouse-Narbonne sont repoussées après 2050. Comme l’autoroute A 26 entre Troyes et Auxerre ou l’A 51 entre Gap et Grenoble, entre autres. La commission Mobilité 21, dirigée par le député PS du Calvados Philippe Duron, a revu à la baisse les ambitions de l’État qui figuraient au Schéma national des infrastructures de transport (Snit), fort de 70 grands projets.
Le rapport abandonne le tout-TGV et les grands projets d’autoroutes auxquels la France s’était habituée. Il met l’accent sur une priorité : l’entretien du réseau existant. Ce réseau (routes, rail et ports), jugé « de haute tenue » par la commission, se dégrade depuis plusieurs années. Le rapport propose de mettre 25 à 30 milliards d’euros sur la table d’ici à 2030, quoi qu’il arrive, pour assurer sa régénération.
Une fois cet entretien garanti, la commission esquisse deux scénarios. Le premier ne prévoit pas d’augmentation du budget de l’AFITF. Parmi eux, de nombreux chantiers « ingrats mais nécessaires », explique Philippe Duron.
La commission recommande d’investir dans de grands « nœuds ferroviaires », destinés à désengorger de nombreuses gares, comme celle de Lyon et celle de Saint-Lazare à Paris, la Part-Dieu à Lyon ou Saint-Charles à Marseille ou Saint-Pierre-des-Corps.
La route et le fluvial font également partie des priorités avec notamment un passage à deux fois deux voies de la route Centre Europe Atlantique entre la Saône-et-Loire et l’Allier, ou l’amélioration de la desserte entre certains grands ports et la zone alentour.
Le second scénario, « plus ambitieux », affecte entre 28 et 30 milliards d’euros aux grands projets à l’horizon 2030 sera retenu par l’État, a annoncé Frédéric Cuvillier, ministre des Transports. L’occasion, tout de même, d’envisager d’autres LGV après 2030.
l’infographie
repères
> Le Snit. Le schéma national des infrastructures de transport (Snit) fixe les orientations de l’État en matière de développement, de modernisation et d’entretien des réseaux. La mise en œuvre complète représente une dépense estimée à 245 milliards d’euros sur vingt-cinq ans dont 105 milliards pour l’optimisation des réseaux et 140 milliards pour leur développement. A cela s’ajoute un effort de l’État de 8,5 milliards pour le soutien aux transports collectifs de province et d’Île-de-France.
> Les ressources de l’AFITF. Les financements de l’État en matière d’investissements dans les infrastructures terrestres de transport sont aujourd’hui assurés par l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) dont les ressources représentent entre 2,1 et 2,3 milliards d’euros : taxe d’aménagement du territoire et redevance domaniale prélevées sur les sociétés d’autoroute (750 millions d’euros en 2012), une partie du produit des amendes radars (270 millions d’euros en 2012). Une subvention versée par l’État (940 millions en 2012) assure l’équilibre mais avec la mise en place prochaine de la taxe poids lourds (870 millions en année pleine) cette subvention baissera progressivement et s’éteindra en 2016.
> Les dépenses de l’AFITF. Entretien et régénération des réseaux (350 millions en 2012) ; modernisation de réseaux existants (700 millions en 2012) ; grands projets (800 millions en 2012) ; renouvellement du matériel roulant, notamment des trains d’équilibre du territoire et le soutien de l’État au développement des transports collectifs (350 millions d’euros).
en savoir plus
> LGV POCL (Paris-Orléans-Clermont-Lyon – 14 milliards d’euros). Une ligne nouvelle de plus de 500 km qui desservira les régions Auvergne, Bourgogne et Centre. Le projet doit répondre à terme à la saturation de la ligne Paris-Lyon et au besoin d’amélioration de la desserte des territoires du centre de la France. La commission estime que cette saturation est difficile à appréhender et que le coût du projet mérite d’être substantiellement maîtrisé. Des conditions qui ne devraient pas permettre de justifier l’engagement des travaux avant 2030.
> LGV SEA Poitiers-Limoges (1,68 milliard). 112 km de ligne nouvelle, uniquement pour voyageurs, entre Poitiers et Limoges pour mettre respectivement Limoges à 2 heures et Brive-la-Gaillarde à 3 heures de Paris. Pour la commission le projet apparaît « controversé quant à son intérêt et ses enjeux » et elle ne le classe pas dans les premières priorités.
> A 831 Fontenay-le-Comte – Rochefort (750 millions). Projet de liaison autoroutière de 64 km qui relie l’A 837 de Rochefort à l’A 83 (Nantes/Niort) au niveau de Fontenay-le-Comte. Il n’a pas convaincu tant sur son intérêt socio-économique qu’environnemental. Le projet est dans la catégorie des projets à horizons plus lointains.
Nouvelle République, 28 juin 2013