Laïcité : la charte de la religion d’Etat

Vincent Peillon, très saint ministre de l’éducation nationale, prophète du dogme de la Laïcité révélée, a présenté il y a quelques jours une charte de laïcité à afficher et promouvoir dans les établissements scolaires. Nous nous sommes permis d’y ajouter quelques mots, en gras dans le texte, histoire de lever tout malentendu sur la compréhension de cette table de la Loi.

moise peillon

Charte de la laïcité à l’école

La nation confie à l’école la mission de faire partager aux élèves les valeurs de la République

La République est laïque

1. La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi, sur l’ensemble de son territoire, de tous les citoyens. Elle respecte toutes les croyances. En effet la France, en tant que nation, est elle-même la croyance au-dessus de toutes les autres. Cette religion de l’Etat est obligatoire sur tout le territoire, gouverné totalement par les instances de l’Etat. Démocratie et société n’existent que dans le cadre de l’Etat.

2. La République laïque organise la séparation des religions et de l’Etat. L’Etat est neutre à l’égard des convictions religieuses ou spirituelles. Il n’y a pas de religion d’Etat. En effet, l’Etat est lui-même la religion, au-dessus de toutes les autres.

3. La laïcité garantit la liberté de conscience à tous. Chacun est libre de croire ou de ne pas croire. Elle permet la libre expression de ses convictions, dans le respect de celles d’autrui et dans les limites de l’ordre public. L’Ordre Public limite la libre expression. L’Ordre Public est un très saint mystère incompréhensible par le commun des mortels, qui est révélé au seul très saint ministère de l’intérieur et dont l’application est confiée à la police et à la gendarmerie. La laïcité interdit à quiconque de ne pas croire en l’Etat.

4. La laïcité permet l’exercice de la citoyenneté, en conciliant la liberté de chacun avec l’égalité et la fraternité de tous dans le souci de l’intérêt général. La liberté s’oppose à l’égalité et à la fraternité. L’intérêt général, c’est-à-dire l’intérêt de la nation qui est supérieur aux misérables intérêts individuels, est le très saint mystère régulateur. Il est incompréhensible par le commun des mortels, et délibérément non écrit dans la constitution française. En effet, il est révélé aux seuls très saints gouvernants désintéressés de l’Etat français, seuls aptes à définir l’intérêt de la nation.

5. La République assure dans les établissements scolaires le respect de chacun de ces principes. L’école se doit d’éduquer les jeunes esprits dans la voie orthodoxe des principes révélés par l’Etat.

L’école est laïque

6. La laïcité de l’école offre aux élèves les conditions pour forger leur personnalité, exercer leur libre arbitre et faire l’apprentissage de la citoyenneté. Elle les protège de tout prosélytisme et de toute pression qui les empêcheraient de faire leurs propres choix. De cette sorte, leur personnalité, leur libre arbitre et leur apprentissage de la citoyenneté sont entièrement vierges et immaculés, tout disponibles à la seule révélation des principes de l’autorité de l’Etat.

7. La laïcité assure aux élèves l’accès à une culture commune et partagée. Nul ne saurait se soustraire à la doctrine de l’Etat.

8. La laïcité permet l’exercice de la liberté d’expression des élèves dans la limite du bon fonctionnement de l’école comme du respect des valeurs républicaines et du pluralisme des convictions. Tout élève est libre d’exprimer comme il l’entend son amour inconditionnel de l’Etat.

9. La laïcité implique le rejet de toutes les violences et de toutes les discriminations, garantit l’égalité entre les filles et les garçons et repose sur une culture du respect et de la compréhension de l’autre. Les individus sont divisés en deux sexes, dont la définition est confiée à l’Etat. Seuls les gardiens de l’Etat sont autorisés à exercer violence et discriminations, aux fins de la préservation de l’Etat. Leur fonction est de veiller à la mise en respect des individus les uns par rapport aux autres, de sorte qu’il ne puissent jamais s’associer en-dehors du cadre de l’Etat.

10. Il appartient à tous les personnels de transmettre aux élèves le sens et la valeur de la laïcité, ainsi que des autres principes fondamentaux de la République. Ils veillent à leur application dans le cadre scolaire. Il leur revient de porter la présente charte à la connaissance des parents d’élèves. La fonction des fonctionnaires est de se soumettre à l’Etat pour le servir, en même temps que d’apprendre aux élèves et à leurs parents la soumission et l’obéissance à l’Etat.

11. Les personnels ont un devoir de stricte neutralité : ils ne doivent pas manifester leurs convictions politiques ou religieuses dans l’exercice de leurs fonctions. La neutralisation est le ciment de l’Etat. Ce saint principe consacre et sanctifie les saints principes précédents.

12. Les enseignements sont laïques. Afin de garantir aux élèves l’ouverture la plus objective possible à la diversité des visions du monde ainsi qu’à l’étendue et à la précision des savoirs, aucun sujet n’est a priori exclu du questionnement scientifique et pédagogique. Aucun élève ne peut invoquer une conviction religieuse ou politique pour contester à un enseignant le droit de traiter une question du programme. Le programme de façonnage des consciences est révélé par le très saint ministre de l’éducation nationale de l’Etat français, qui a toute latitude pour l’imposer. Nul n’échappe à la Question de l’Etat.

13. Nul ne peut se prévaloir de son appartenance religieuse pour refuser de se conformer aux règles applicables dans l’école de la République. Les convictions doivent s’effacer devant les règles de l’Etat qui les garantissent. La plus grande liberté d’expression consiste à se taire. C’est là un grand mystère, révélé par l’Etat. Les règles de l’Ecole sont définies par le très saint ministre de l’éducation nationale de l’Etat français.

14. Dans les établissements scolaires publics, les règles de vie des différents espaces, précisées dans le règlement intérieur, sont respectueuses de la laïcité. Le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit. La tenue exigée correspond aux normes consuméristes et sexistes de la religion d’Etat, édictées par les designers capitalistes officiels.

15. Par leurs réflexions et leurs activités, les élèves contribuent à faire vivre la laïcité au sein de leur établissement. L’adhésion pleine et entière des élèves à la religion de l’Etat ne suffit pas. L’évangélisation est requise.

Pavillon Noir, 14 septembre 2013