Archives de catégorie : Questions de genres

« Capitalisme, chasse aux sorcières et biens communs »

« Capitalisme, chasse aux sorcières et biens communs »

Entretien avec Silvia Federici

 Il y a quelques siècles d’ici, elle aurait été envoyée au bûcher. Féministe infatigable, l’historienne et auteure de l’un des livres les plus téléchargés sur Internet, « Caliban and the Witch : Women, the Body and Primitive Accumulation » (Caliban et la sorcière. Femmes, corps et accumulation primitive. Edition française à paraître aux Editions Senonevero en 2013) nous explique de manière rigoureuse les raisons politiques et économiques qui se cachaient derrière la chasse aux sorcières. Son dernier livre, « Revolution at Point Zero : Housework, Reproduction, and Feminist Struggle » (Common Notions/PM Press, 2012) est un recueil d’articles indispensables pour connaître sa trajectoire intellectuelle. Entretien réalisé pour la rubrique « Numeros Rojos » du journal en ligne « Publico.es » (Avanti4.be)

C’est avec un œil scrutateur que l’italienne Silvia Federici étudie depuis plus de 30 ans les événements historiques qui ont provoqué l’exploitation sociale et économique des femmes. Dans son livre « Caliban et la sorcière. Femmes, corps et accumulation primitive », elle fixe son attention sur la transition violente entre le féodalisme et le capitalisme, où s’est forgé au fer rouge la division sexuelle du travail et où les cendres des bûchers ont recouvert d’un épais manteau d’ignorance et de mensonges un chapitre essentiel de l’Histoire. Dans son bureau du Département d’Histoire de la Hofstra University de New York, Federici nous parle de sorcières, de sexualité et de capitalisme et se propose de « faire revivre pour les jeunes générations la mémoire d’une longue histoire de résistance qui court aujourd’hui le risque d’être effacée ».

NdPN : La suite ici

Vu sur DNDF, 1er octobre 2013

Feminism Attack ! Le féminisme anarchiste en Tunisie

Feminism Attack ! Le féminisme anarchiste en Tunisie

La Tunisie, forte d’un mouvement féministe de plus de cent ans, est fréquemment considérée comme le pays du monde musulman le plus en avancé en matière de droits des femmes. Depuis 1957, le Code du statut personnel reconnaît des droits aux femmes tels que l’avortement, la contraception ou encore le droit à l’éducation. Bien que les mouvements féministes tunisiens aient permis ces avancées, la condition des femmes, comme dans beaucoup d’endroits sur la planète, est encore loin de correspondre à l’idée que s’en font les anarchistes. Rien de nouveau sous le soleil de la domination masculine : les femmes sont toujours considérées comme des mères et des épouses avant d’être des citoyennes. Après quelques jours passés en Tunisie, il est aisé de constater combien le jugement des autres et la crainte de compromettre une réputation peuvent freiner l’engagement et le militantisme des femmes. Il existe actuellement au moins trois collectifs féministes en Tunisie : Les Femmes démocrates, groupe constitué de bourgeoises qui se réunissent sans but politique ni revendicateur, les Femens, reconnues en Tunisie pour leur lutte. (Leurs actions ne font cependant pas l’unanimité.) et Feminism Attack, un mouvement collectif autogestionnaire et autofinancé, dont les membres ont une moyenne d’âge d’environ 20 ans. Il vise, inspiré par des idées anarchistes, à trouver des solutions radicales aux problèmes sociaux et politiques, ainsi qu’aux dangers qui menacent la position des femmes au sein de la société.
Le mouvement a pour but d’établir une culture autogestionnaire et croit en l’obligation de la révolte des femmes contre toute sorte d’exploitation.
Il remet en cause l’ensemble des aspects de la condition féminine au sein de la société patriarcale : abolition des stéréotypes basés sur le sexe, abolition de la déshumanisation et de l’objectivation des femmes, élimination complète de la violence dirigée contre les femmes (viols, violences conjugales, mutilations génitales, stérilisations forcées, attentats à la pudeur, harcèlements sexuels).
Nous avons rencontré Aika et les membres de Feminism Attack, avec qui nous avons réalisé cet entretien.

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Nath & Chris : Où se situe Feminism Attack et quelles sont vos tendances politiques ?

Feminism Attack : Nous sommes, pour le moment, situées à Tunis, la coloration politique est assez mitigée.

N. & C. : Pouvez-vous nous dire comment, quand et pourquoi est né votre groupe ?

F. A. : Nous étions un groupe de femmes partageant plusieurs idées et nous en sommes venues à mener les mêmes actions, mais à titre individuel : d’où l’envie de fonder le mouvement, fin 2011. Cette décision a été prise suite à notre prise de conscience de la condition de la femme en Tunisie, qui est, contrairement aux apparences, à la limite de l’acceptable. D’autant plus que les prétendus acquis se sont vus menacés par l’ascension au pouvoir du parti islamiste. Et puis, les mouvements prétendus féministes qui existent déjà n’ont pas vraiment servi la cause que nous prônons, ils ne représentent pas la vraie femme tunisienne, mais plutôt une image pseudo-bourgeoise au service d’un système.

N. & C. : Qui sont les militants de Feminism Attack ?

F. A. : Nous sommes encore un petit groupe d’élèves et d’étudiantes, nous appartenons à la classe moyenne. La tranche d’âge est comprise entre 18 et 24 ans. Nous n’avons pas encore recruté de militants de sexe masculin, bien que nous n’y voyions aucun problème.

N. & C. : En quoi consiste votre militantisme et quelles sont les actions privilégiées ?

F. A. : Pour le moment, nous n’avons pas réellement d’actions privilégiées, on fait un peu de tout, bien que nous fassions en majorité des bombages, mais c’est plus par manque de moyens et d’opportunités qu’autre chose. Nous comptons, bien évidemment, élargir notre terrain d’action et nos manières de faire dans un futur proche.

N. & C. : Comment vous organisez-vous, à quelle fréquence vous voyez-vous, de quels matériel et moyens de communication disposez-vous ?

F. A. : On s’organise autour d’assemblées générales dans lesquelles toutes les décisions du groupe sont prises. Les fréquences dépendent de la nécessité du moment. On n’a pas encore de local fixe, on se réunit dans des cafés ou des espaces publics…, ce qui n’est pas très pratique dans la mesure où nous avons déjà subi la pression policière, et même été contrôlées par des civils. Pour le moment, on n’a pas de matériel, c’est pour cela que nos actions sont assez limitées dans la mesure où nous nous autofinançons, et ce avec notre seul argent de poche. On communique avec tous les moyens à notre portée (Facebook, téléphone).

N. & C. : Quels sont les différents groupes féministes en Tunisie ? Vos rapports avec eux ? Que pensez-vous des Femen ?

F. A. : Le plus connu est l’association Femmes démocrates tunisiennes, il y en a d’autres, mais qui ne sont ni très connus ni très présents sur la scène politique. On n’a pas vraiment de rapports avec eux, étant donné qu’on ne se retrouve pas sur les mêmes principes, et nos méthodes de travail sont différentes. Sinon, nous avons déjà exprimé notre position vis-à-vis de Femen, nous avons même publié un article détaillé sur notre page Facebook.

N. & C. : L’action politique de Feminism Attack en Tunisie peut-elle s’allier à d’autres mouvements ? Lesquels et sous quelle forme ?

F. A. : On est assez proches des mouvements Blech 7ess, Désobéissance et Alerta (NDLR : Vegan/Green Anarchism). On organise des actions ensemble : des événements culturels, des projections de films, des concerts, etc.

N. & C. : En ce qui concerne les derniers soulèvements populaires en Tunisie, et encore aujourd’hui, dans quelle dynamique vous inscrivez-vous ?

F. A. : On s’inscrit dans tout soulèvement populaire qui sert la cause du peuple, qui est contre le système et qui, surtout, n’est pas organisé par des partis politiques, qui ne servent pas que leur propre cause et qui ne visent pas le pouvoir.

N. & C. : Comment les initiatives de Feminism Attack sont-elles perçues par les Tunisiens et par les autres militants révolutionnaires ?

F. A. : Nos actions n’ont pas un grand écho populaire : en général, les Tunisiens se limitent à l’information toute prête livrée par les médias, et hormis après une ou deux arrestations suivies d’articles bâclés et désinformateurs, nous n’avons pas reçu une réelle couverture médiatique. On ne s’en plaint pas réellement étant donné que notre but n’est pas de faire la une ni de courir après la gloire.

N. & C. : Quelles sont les contraintes qui pèsent le plus sur les militants de Feminism Attack ?

F. A. : Le système et la police, généralement.

N. & C. : Les villes sont-elles, d’après vous, davantage propices aux actions féministes ?

F. A. : En ville, le travail est plus facile, car il y a une certaine prise de conscience du peuple, les gens y sont plus ouverts et la femme y est plus émancipée, contrairement à la campagne où, parfois, les gens sont littéralement coupés du monde. Par contre, nous envisageons de travailler dans les milieux ruraux dès que nous en aurons la possibilité, nous avons d’ailleurs plusieurs projets à ce sujet.

N. & C. : Comment l’action répressive s’exerce-t-elle sur les anarchistes féministes ? Y a-t-il des précautions à prendre ?

F. A. : Les dangers sont à peu près les mêmes pour toute personne qui va « contre le courant » : bombes lacrymogènes, matraques, violences policières, interpellations, emprisonnements, menaces, etc. Nous n’avons pris aucune réelle précaution parce que cela nous limiterait énormément sur le plan des actions.

N. & C. : En dehors des forces répressives classiques, quels sont vos adversaires ou ennemis politiques les plus redoutables ?

F. A. : Les partis politiques extrêmes, qui sont tous au service du même système, directement ou indirectement.

N. & C. : Pour conclure, quelles sont vos perspectives ?

F. A. : Nous espérons combattre pour notre cause encore très longtemps et, surtout, que nos combats soient fructueux et qu’ils servent cette lutte, qu’on puisse aboutir à un réel changement et participer à une certaine prise de conscience du peuple.

Le Monde Libertaire n° 1715

PMA, homoparentalité, filiation : A propos de la pensée réactionnaire de quelques écologistes

NdPN : un texte polémique paru Indy Grenoble, en réponse à celui de Hervé Le Meur, relayé par PMO. Pour notre part, nous trouvons qu’il remet bien les pendules à l’heure.

PMA, homoparentalité, filiation : A propos de la pensée réactionnaire de quelques écologistes

Dans son numéro d’été 2013 la revue L’écologiste publie un article qui s’inscrit dans le débat sur la loi Taubira et « les enjeux sur la filiation ». Ce texte d’Hervé Le Meur, militant écolologiste, dénonce les prétendues dérives de la possible extension aux homosexuel.le.s de l’aide médicale à la procréation – plus connue sous le sigle PMA. Celle-ci aurait pour lui comme conséquence de bouleverser la filiation « naturelle » et les « fondements de la maternité ». Sous le titre choc « De la reproduction artificielle de l’humain », PMO, un collectif d’opposition à la tyrannie technologique a de son côté décidé de relayer largement ce texte sur Internet. La rhétorique est séduisante. Les envolées contre « l’idéologie de la Croissance », l’« individualisme inhumain », le « consumérisme », la « haine de la nature » ou la « volonté de toute-puissance » seront peut-être appréciées des militants néo-luddites, détracteurs de toute « manipulation du vivant », et autres critiques de la société techno-industrielle. Mais toute cette emphase ne parvient ni à dissimuler le caractère confus de l’argumentation ni à en rendre l’idéologie acceptable. Naïvement naturaliste, tout le propos participe à la justification des positions homophobes et anti-féministes. Ode à la famille nucléaire hétérosexuelle, à la maternité « naturelle », et à l’ordre hétérosexiste, ce texte s’en prend tout azimut à l’homoparentalité, aux lesbiennes, aux « théories du gender » [1], aux intellectuels qui « haïssent l’engendrement naturel », etc. Essayons de décrypter l’explicite et l’implicite de ce texte qui reflète une certaine pensée réactionnaire de gauche et qui nous a passablement énervé.

En finir avec l’idée de Nature

L’auteur pense que « tout écologiste garde une certaine tendresse pour tout ce qui est naturel ». L’idée de nature se place en effet au coeur de son argumentation. Mais de quoi parle-ton exactement ? Qu’est-ce que la nature ? S’agit-il de la Nature, concept des philosophes : identité immuable ou finalité intrinsèque des choses et des êtres (la nature d’une chaise serait d’accueillir un séant, la nature des femmes serait de mettre au monde des bébés) ? Ou alors s’agit-il de la Nature, thème cher aux Romantiques : de beaux espaces vierges et sauvages où Paul et Virginie gambadent nu.e.s ? L’auteur ne nous le dit pas vraiment, mais il y a sans doute un peu de ces imaginaires là dans son esprit. _ Mais poursuivons : qu’est-ce qui est « naturel » aujourd’hui ? Alors que l’humain a domestiqué et transformé a peu près tout ce qu’il a sous la main, on se demande bien en effet ce qui peut être considéré comme « naturel ». Une tomate bio qui pousse dans un potager coincé entre deux zones industrielles ? L’auteur a une réponse. Ce qui est « naturel », c’est ce qui n’est « pas contrôlé » par la technique et, par conséquent, « libre » et « sauvage ». Mais alors, dès lors qu’on s’intéresse aux pratiques humaines, qu’est-ce qui peut bien échapper au domaine de la technique ? La maîtrise du feu est une technique. L’usage de la fourchette est une technique. La reproduction humaine est, également, une technique. Quoi qu’en pense Le Meur, pour qui l’engendrement est un « fait de nature », dans toutes les sociétés humaines, la reproduction est toujours organisée socialement. Si processus biologique il y a, celui-ci apparaît comme secondaire dans la mesure où il est étroitement contrôlé : sélection des partenaires autorisés, techniques de contrôle des naissances, travail reproductif forcé pour beaucoup de femmes, etc. En cela, parler de reproduction « naturelle » est un non-sens [2]. Un mythe. La reproduction n’a pas ce caractère « libre » et « sauvage » pour lequel notre écologiste semble avoir une infinie tendresse. Mais nous y reviendrons.
Dans un premier temps, il faut donc rappeler que la Nature n’existe pas. Par contre l’idéologie naturaliste, elle, existe bien. Et elle ne se trouve jamais bien loin des discours sur la Nature comme cet article le prouve. Voilà pourquoi convoquer l’idée de nature est toujours suspect. Celle-ci charrie la croyance en un ordre harmonieux, régi par des lois assignant des places à chaque chose et à chacun.e [3]. Et le propre de l’idéologie naturaliste c’est de tout naturaliser, à commencer par les pratiques et les structures sociales, la psychologie et les relations humaines. Voilà pourquoi Le Meur s’autorise à dire que la différence des sexes est naturelle, la filiation hétérosexuelle est naturelle, le couple monogame est naturel…Puisque tout cela est « naturel », et que ce qui est naturel est bon, il ne faudrait pas y toucher ! La Nature c’est l’autorité suprême. Ce qu’elle couvre tombe dans le domaine du sacré. Tout doit donc rester dans l’ordre que la nature a souhaité. S’agissant de la reproduction, cela donne : le papa met naturellement sa grégraine dans la maman qui accouchera naturellement le sourire aux lèvres d’un rejeton dont les deux géniteurs seront fiers et avec lequel ils se comporteront, tout naturellement, en bons parents. Même si cette vision prête à sourire, il ne faut pas sous-estimer le danger qu’elle représente.
L’idéologie naturaliste est bien l’ennemi de l’émancipation et de l’égalité. Elle nous contraint à nous soumettre à ce qui serait « naturel », plutôt qu’à chercher ce qui est « juste » ou « bon » pour chaque individu comme pour la société toute entière. Elle légitime un ordre social basé sur la domination (en l’occurrence ici la domination masculine et la norme hétérosexuelle). Elle nie  l’autonomie des individus et ne leur reconnaît pas la liberté de choix. Le raisonnement naturaliste de  l’auteur est celui-ci : la maternité ne peut-être conçue que dans sa dimension physique (l’engendrement), donc on ne peut pas devenir mère sans passer par « la mise au monde ». Aller contre cette règle « naturelle » c’est bouleverser les « fondements de la maternité », c’est faire preuve d’un redoutable « orgueil individuel », s’adonner à la « volonté de puissance ». Et Le Meur s’en prend autant à ces femmes qui détruisent « la définition de la maternité » qu’aux techniques, telles que la PMA, qui leur permettent de parvenir à leurs fins. Si l’on pousse ce raisonnement insidieux, toutes les techniques de maîtrise de la fécondité et de la reproduction devraient être rejetées, la PMA, mais aussi les techniques de contraception et d’avortement. Avec ces arguments-là, Le Meur et PMO se retrouveraient-ils sur des positions anti-IVG ?
Contre ces arguments naturalistes il est important de rappeler quelques évidences. Non, les femmes ne sont pas dans la « volonté de puissance » quand elles veulent pouvoir refuser la maternité ou d’en définir les conditions (quand, avec qui…) ! Et si, la technique peut être mise au service des choix des individus (contraception, avortement, aide à la procréation…) et soutenir des dynamiques d’émancipation collective ! Les femmes ont lutté pour obtenir le droit et les moyens (techniques) de disposer librement de leur corps, de leur ventre. Et elles continuent de lutter. Non pas contre leur nature, ni l’ordre naturel des choses. Mais contre un système social, le Patriarcat. Un système qui les dépossèdent de leur corps et de leur vie, que ce soit en les assignant au rôle de poule pondeuse pour le compte des hommes, ou en leur refusant la possibilité d’avoir des enfants avec des femmes. Du haut de sa position privilégiée d’homme hétérosexuel obsédé par l’idée de nature, il n’est pas étonnant que l’auteur ne soit pas sensible aux inégalités sociales et aux injustices subies par les minorités sexuelles. Seuls comptent pour lui les prétendus problèmes posés par le contrôle de la reproduction humaine par la technique. _

Ni la différence sexuelle, ni l’hétérosexualité reproductive ne sont « naturelles »

Le Meur nous parle « d’altérité » des sexes, de deux « pôles » (masculin/ féminin, mâle/femelle) qui doivent « coexister ». Il est clair que dans son esprit, l’humanité se découpe en deux catégories à l’altérité radicale : les hommes et les femmes. Et comme ceux-là remplissent des fonctions biologiquement différentes dans la reproduction, ils doivent forcément aller l’un vers l’autre. Aller vers « l’Autre » (sexe) serait donc pour lui un mouvement « naturel ». Y résister serait contre-nature. Arrêtons-nous là-dessus.

La construction de la différence sexuelle
Peut-ont considérer que l’humanité est scindée en deux ? Qu’il existe deux groupes différents par « nature » : les hommes et les femmes ?  Qu’un individu est soit homme, soit femme, et qu’il ne peut pas en être autrement ? Telles sont les questions qu’il faut se poser avant d’aller plus loin.
Tout d’abord rappelons-nous « qu’hommes » et « femmes » sont des catégories construites. Elle n’existent que parce qu’elles sont pensées et nommées comme telles. Pour comprendre le monde et intervenir dessus, l’esprit humain crée des catégories dont la pertinence doit toujours être questionnée. D’autant plus que le projet de catégoriser les humains va de pair avec celui de les hiérarchiser (les hommes supérieurs aux femmes, les blancs supérieurs aux noirs) [4]. Qu’il existe dans notre esprit des catégories telles que le couple d’opposition hommes / femmes est une chose. Que ces catégories rendent compte de la réalité en est une autre. Et considérer qu’il est juste (au sens éthique) de créer ce type de catégorie est encore autre chose.
N’en déplaise à Le Meur, cela fait un moment que les fondements de la croyance en la différence fondamentale entre les sexes vacillent. Plus la recherche avance, plus les similitudes entre organes génitaux « féminin » et « masculins » apparaissent. Et plus on s’attèle à chercher où passe la frontière biologique entre hommes et femmes, plus l’idée même de frontière recule au profit de celle de « continuum » des sexes. L’idée de bicatégorisation stricte de l’espèce humaine a perdu de sa validité. L’intersexuation est bien une réalité biologique [5]. Et on a beau vouloir « faire disparaître » les individus identifiés à leur naissance comme « intersexes » (ni homme ni femme) en leur assignant un « sexe » (comme s’ils n’en avaient pas) par la chirurgie et la chimie [6], ils existent. N’en déplaise à Le Meur, on ne peut pas prétendre pouvoir « naturellement » ranger tous les individus dans l’une des deux cases [7]. Voilà pourquoi les féministes ont pu dire que la société patriarcale ne construit pas seulement le « genre » (l’ensemble des traits de comportement associés à un sexe) mais qu’elle construit aussi le « sexe » (pensé comme le marqueur de la division entre individus à partir d’une certaine représentation des différences biologiques). Parce que le Patriarcat a besoin qu’on croit à ces différences « naturelles » entre hommes et femmes. Ce sont elles qui permettent de justifier le partage des rôles (la chasse pour les uns, le pouponnage pour les autres), et surtout la subordination des femmes. Autant que la différence des genres, la différence des sexes biologiques n’existe que parce qu’on la fait exister pour organiser la domination.
Mais Le Meur nous dirait sans doute que, quand même, les différences anatomiques sautent aux yeux. Un pénis, ou un vagin ce n’est pas pareil, ça se voit ! Et puis surtout il y a bien une différence fondamentale entre les femmes et les hommes : les premières disposent d’un utérus où se passe la gestation, les seconds non ! Ce à quoi l’on peu répondre, qu’il y a bien d’autres différences physiques plus ou moins perceptibles entre des individus et groupes d’individus. Pourtant on ne divise pas le monde en deux entre, par exemple, les brun.e.s et les blond.e.s, ou entre les yeux clairs et les yeux foncés. Nos regards sont construits. On apprend que la différence sexuelle est la première des différences – la case « sexe » se coche en premier dans les formulaires administratifs – et que ce qu’on a entre les jambes détermine notre identité, notre place dans la société. L’apparence de nos organes génitaux est devenue (sur)déterminante. Quant à la fonction reproductive, on peut se demander pourquoi le fait d’avoir ou non un utérus devrait être plus important que, par exemple, le fait d’être ou non fertile. Le monde pourrait être divisé entre individus fertiles et non fertiles, quel que soit leur sexe, plutôt qu’entre mâles et femelles. Ce critère de la fertilité pourrait sembler tout aussi pertinent. Pourtant ce n’est pas celui-ci qui a été retenu pour fonder le principe majeur de la division de l’espèce. Arbitraire, quand tu nous tiens !

L’hétérosexualité reproductive : une norme !
L’individu a-t-il un programme secret qui le prédestine à participer à la reproduction de l’espèce ? Puisqu’il faut un mâle et une femelle (fertiles) pour se reproduire, doit-on considérer que l’hétérosexualité est « naturelle » ?
Bon, nous ne nous attarderons pas trop sur ce point. L’instinct de reproduction n’existe pas dans l’espèce humaine pas plus que la prédisposition à l’hétérosexualité. Un individu né avec des  organes sexuels féminins ne va pas être plus attiré par les individus nés avec des organes sexuels masculins, c’est à dire « L’Autre » dans le langage de Le Meur. Non, cet « Autre » ne nous attire pas « naturellement » plus que ça. Tous les schémas et pratiques érotiques sont possibles. L’hétérosexualité n’est plus « naturelle » que l’homosexualité. Elle est construite.
L’hétérosexualité n’est pas naturelle et il n’y a pas non plus d’instinct de reproduction ni de coïncidence entre la période de fécondité et le désir sexuel féminin. Puisque la sexualité humaine a comme particularité de pouvoir être totalement dissociée de la reproduction, renouveler l’espèce ne va pas de soi. Pour ne pas disparaître, les sociétés humaines ont donc dû s’organiser (encore de la technique sociale, monsieur Le Meur !) en canalisant l’activité sexuelle dans un but reproductif, en organisant le travail reproductif et la filiation légitime. Bref, il leur a fallu mettre de l’ordre dans tout ce désordre sexuel. En sous-entendant que la reproduction est un fait de nature et non un fait social, le texte véhicule une vision tout autant erronée qu’homophobe. Selon celle-ci, s’il y a une sexualité plus « naturelle » que d’autre (hétérosexualité reproductive), c’est qu’il y aurait une hiérarchie entre les sexualités et donc des sexualités « contre-nature ».

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La famille nucléaire hétéro, sinon rien !

Engendrement, reproduction, filiation, parentalité…. Pour développer son argumentation l’auteur se réfère à des phénomènes et des notions dont il maîtrise mal le sens. À moins que la confusion ne serve intentionnellement à masquer sa mauvaise foi et la faiblesse de ses arguments. Décortiquons tout çà.
Définir les termes pour sortir de la confusion
Le Meur voudrait nous faire comprendre que la nature c’est la biologie, et que la reproduction se résume à la biologie. On ne va pas le contredire sur un point. Bien qu’elle soit contrôlée socialement, la production des enfants ou procréation passe en effet par des processus biologiques : fécondation (rencontre de gamètes mâle et femelle) et gestation (processus de développement de l’embryon de la fécondation à la naissance). C’est ce qu’on appelle aussi la conception. Et c’est ce à quoi contribuent les géniteurs . Pour le reste, lorsqu’on parle de filiation et de parentalité, on entre dans le champ du social. La filiation c’est le fait de désigner un parent légitime ou légal pour l’enfant qui s’inscrit ainsi dans une généalogie. La filiation instaure un lien, une relation intergénérationnelle. Il faut donc distinguer cogéniteurs et parents (sociaux et légaux) d’un enfant. S’il y a un schéma dominant (cogéniteurs = parents), il n’est pas universel. L’adoption est un cas de figure connu dans nos sociétés, mais il en existe bien d’autres [8]. Cette réalité-là, plurielle, ne pose pas de problème éthique particulier mais semble perturber l’auteur fermement attaché au principe de filiation « biologique » ancrée dans la famille nucléaire hétérosexuelle.
Quant à la parentalité, c’est une notion plus récente qui désigne un rôle social qui met en jeu un ensemble de fonctions, devoirs et responsabilités. Dans notre conception moderne, les fonctions parentales comprennent généralement : l’apport de nourriture, la satisfaction des besoins matériels, le soin, l’affection, et l’éducation d’un enfant. Mais encore une fois, il n’y a pas de modèle universel de parentalité. Pas de correspondance automatique entre géniteurs et parents. Selon les sociétés et les classes sociales, les fonctions relevant du champ de la parentalité sont exercées par un ou plusieurs individus qui n’ont pas forcément de liens biologiques avec l’enfant (nourrices, tuteurs, oncles, grands-parents, beaux-parents [9]…). La parentalité s’éprouve dans l’action. Rien ne prédispose des géniteurs à se comporter en bons parents. Rien n’indique que des parents sociaux seraient moins compétents et moins capables de prendre soin et de dispenser de l’affection à un enfant.
        Mentirait-on aux enfants ?

Pour Le Meur, les meilleurs parents ne peuvent qu’être (et seulement) les cogéniteurs. La meilleure structure familiale ne peut être que la famille nucléaire hétérosexuelle. Le meilleur des mondes voulu par la Nature. S’écarter de ce schéma biologique sacré, ce serait s’introduire dans le royaume du « mensonge », du « manque », voire du « n’importe quoi ».

Le mensonge tout d’abord. L’homoparentalité se construit forcément sur un mensonge « légalisé » nous dit Le Meur. Avec « la loi sur le mariage gay », on affirme « qu’un enfant peut avoir deux mamans. Et donc pas de papa » [10]. On peut noter qu’il reprend sans vergogne la rengaine des homophobes de la Manif pour tous – un papa, une maman, on ne ment pas aux enfants ! Pour Le Meur comme pour les plus traditionnalistes des catholiques, puisqu’un enfant est conçu par une femme et un homme, un couple de parents ne peut qu’être constitué d’une femme et d’un homme. Un point c’est tout. L’homoparentalité ne peut être selon lui qu’une aberration qui impose aux enfants le silence quant à leur origine génétique. Non, on ne ment pas aux enfants. On ne voit pas en effet comment des parents homosexuel.le.s pourraient dissimuler à leurs enfants la manière dont ils ont été conçus. Et quand on leur explique, ceux-ci sont tout à fait en mesure de comprendre la différence entre un processus biologique (accompagné de techniques médicales,) et une pratique sociale. Enfin, contre les insinuations homophobes de Le Meur, rappelons quand même qu’un couple hétérosexuel ayant eu recours à la PMA peut tout à fait ne rien en dire à ses enfants. Le papa et la maman ne pourront alors être taxés de « menteurs » tant leur famille correspond en tout point à la norme de la famille nucléaire hétérosexuelle chère à Le Meur. Une fois encore cela montre que le problème se situe pour lui du côté de la (non)conformité à une norme.
Le manque ensuite. Pour Le Meur, les enfants des familles homoparentales peuvent être considérés comme des « orphelins ». Mais de quoi est-il question ? On peut constater qu’ici l’auteur se focalise sur les couples de lesbiennes qui se projettent dans une maternité sans père. Qu’elles ne désirent pas se soumettre à l’acte de pénétration fécondante, et refusent au donneur de sperme (dans le cas d’une Insémination Artificielle avec donneur) des droits sur « son » enfant, voilà ce qui lui semble inconcevable. Dans une envolée qui transpire la lesbophobie et le masculinisme [11], il pointe du doigt ces « lesbiennes qui ont un problème avec les hommes », ces femmes qui veulent « liquider » l’homme, cet « Autre » dont on a besoin dans la reproduction. Ce qui est sous-jacent dans son propos, c’est l’idée essentialiste que les hommes et les femmes auraient des rôles différents à jouer dans l’éducation du fait de leurs soi-disante différence biologique fondamentale, et que, de ce fait, les enfants de couples homoparentaux souffriraient d’un manque ou d’un brouillage de « repères ». Les doutes qu’il émet quant à la fiabilité des études prouvant que des enfants élevés par des parents homosexuels n’ont pas plus de problème que les autres sous-entendent la même chose. Rappelons ici qu’un enfant a besoin pour se construire d’affection, de soin, d’attention, et de plein d’autres choses. Mais pas forcément d’un individu avec pénis et d’un autre avec vagin, ni d’un référent masculin et d’un référent féminin, ni encore d’un père bricoleur et d’une mère cuisinière.

Enfin, le « tout et n’importe quoi ». Le Meur entend par là toute configuration familiale qui sort du cadre rigide de la famille nucléaire hétérosexuelle. Peu importe qu’une multitude de formes de familles et d’arrangements dans la parentalité existent ici ou ailleurs. Peu importe que les enfants issus d’autres familles que la famille idéale de Le Meur ne souffrent pas plus que ceux qui ne connaissent que la cellule papa / maman / enfant. Non, pour lui c’est forcément « n’importe quoi ». Il va jusqu’à accuser les partisan.ne.s de l’égalité et associations gay et lesbiennes de justifier la « polygamie » en voulant légaliser les « couples à trois ou quatre ». Telle est la manière outrancière de juger et de disqualifier toute les formes de co-parentalité. Le Meur devrait pourtant comprendre que les structures de la famille sont plurielles et évolutives : qu’il s’agisse des arrangements entre couples homosexuels au sujet de la conception et/ou de l’éducation d’un enfant, ou du partage des responsabilités entre géniteurs et beaux-parents dans le cadre de familles dites recomposées, par exemple. N’en déplaise à tous les réactionnaires et homophobes qui, comme Le Meur, ne se privent jamais de dire tout et n’importe quoi !

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Le texte que nous venons de décortiquer surfe magistralement sur la vague réactionnaire homophobe et sexiste qu’on a vu déferler ces derniers mois dans les médias et dans la rue.  Aveugle à la distinction entre parenté biologique et parentalité sociale, il alimente la croyance dans les fondements « naturels » du modèle de la famille nucléaire hétérosexuelle, justifiant ainsi les discriminations faites aux personnes qui, par choix ou non, ne rentrent pas dans ce schéma normatif. S’attaquant à l’usage de la « technique » dans le domaine de la reproduction, il passe sous silence le potentiel émancipateur que représentent pour les femmes, prises dans les rapports sociaux asymétrique de sexe, les techniques de maîtrise de la fécondité et de la reproduction (contraception, avortement, tout autant qu’aide médicale à la procréation).
Mais n’accordons pas trop d’importance à cette pensée mystificatrice, et songeons plutôt à nous réapproprier les questions liées à la reproduction en nous penchant sur les vrais problèmes que posent les questions de filiation et de parentalité. En effet, il y a, dans ce domaine bien des choses problématiques. Comme, par exemple la vieille règle patriarcale de la transmission du nom du père (qu’il s’agisse ou non du géniteur, d’ailleurs). Malgré les évolutions du droit, cette règle perdure, légitimant l’appropriation (symbolique et matérielle) des enfants par les hommes et l’infériorisation des femmes. Quant à l’implication réelle dans la parentalité, malgré toutes les gesticulations des associations masculinistes qui défendent la « cause des pères », il convient de rappeler que les inégalités entre hommes et femmes sont encore flagrantes. Au sein des familles « naturelles », la répartition du travail domestique et éducatif reste toujours aussi inégalitaire, les femmes accomplissant souvent double voire triple journée de travail [12]. Et là encore, la Nature n’a évidemment rien à voir là-dedans…

Diana Turelle et Gaby Olaugy, 10 août 2013

[1] Le genre (gender en anglais) n’est pas une théorie, c’est un concept, un outil d’analyse utilisés en sciences sociales pour étudier les différences non biologiques entre les hommes et les femmes. Voir l’article « Au risque de radoter, la théorie du genre n’existe pas » sur rue89.fr. On appréciera l’odieux amalgame de Le Meur, pour qui les personnes, notamment les féministes, qui s’approprient ce concept de genre, ne valent pas mieux que les Transhumanistes, ces fanatiques de l’humain « augmenté » grâce la synthèse entre biologie et technologie.

[2] Voir à ce sujet le texte de Paola Tabet, « Fertilité naturelle, reproduction forcée », La construction sociale de l’inégalité des sexes, L’Harmattan, 1998.

[3] Sur l’idéologie naturaliste, on peut se référer à Colette Guillaumin, Sexe, race et pratiques du pouvoir. L’idée de nature, Coté-femmes, 1992. Voir également le texte d’Yves Bonardel (d’après un texte de Estiva Reus), En finir avec l’idée de nature, renouer avec l’étique et le politique

[4] Christine Delphy, Classer, dominer. Qui sont les « autres ». La Fabrique, 2008.

[5] Voir à ce sujet, Julien Piquart, Ni homme ni femme. Enquête sur l’intersexuation, La Musardine, 2009.

[6] Voilà bien le type d’intervention technique, souvent mutilante, dont pourrait s’offusquer Le Meur… mais il ne le fait pas.

[7] Certains Etats ont même bien dû accepter cette réalité. Dernière exemple en date, l’Allemagne vient de reconnaître un statut pour les personnes ne rentrant pas dans les cases homme/femme.

[8] Le regard bien fixé sur son nombril, Le Meur oublie que toutes les sociétés ne fonctionnent pas comme les sociétés occidentales d’aujourd’hui. On ne peut que lui conseiller de prendre connaissance des travaux d’ethnologie et d’histoire qui ont étudié des systèmes de filiation et de parenté alternatifs au modèle aujourd’hui dominant. Voir notamment Françoise héritier, Masculin, féminin, 1. La pensée de la différence. Odile Jacob, 2012.

[9] On peut noter que depuis 2002, les procédures de partage de l’autorité parentale ont été simplifiées afin de donner plus facilement un statut aux beaux-parents. Ces nouvelles possibilité de délégation sont utilisées actuellement par les couples d’hommes ou les couples de femmes qui élèvent ensemble un enfant.

[10] Puisque Le Meur entretient le flou quant au contenu de la loi Taubira, précisons que celle-ci ouvre le mariage aux couples de personnes de même sexe et permet aussi l’adoption. Quant à la procréation médicalement assistée (PMA) est seulement autorisée pour le moment au couples hétérosexuels présentant des problèmes de fertilité. De nombreux couples français d’hommes ou de femmes ont donc recours à la PMA dans des pays où la législation est plus souple.

[11] Au sujet du masculinisme, on peut se référer au texte Contre le masculinisme. Petit guide d’autodéfense intellectuelle, Grenoble 2012.

[12] « Les femmes passent trois fois plus de temps que les hommes à faire le ménage, la cuisine, les courses ou s’occuper du linge et deux fois plus à s’occuper des enfants ou d’un adulte à charge à la maison. », lire les résultats de l’enquête de l’observatoire des inégalités sur la répartition des tâches.

Vu sur Indymedia Grenoble, 21 août 2013

[Poitiers] Trois femmes passent à l’acte contre leurs compagnons

NdPN : nous avons mis en gras un passage.

Trois Poitevins blessés par leurs compagnes

Ce week-end, trois disputes familiales ont dégénéré en coups portés par des jeunes femmes. L’un des hommes est grièvement atteint à l’abdomen.

Entre samedi et dimanche matin, en un peu plus de 24 heures, les policiers de Poitiers ont été confrontés à pas moins de trois agressions d’hommes par leurs compagnes, dont deux étaient armées d’un couteau.

Le plus grave de ces événements s’est produit samedi vers 7 h 40 du matin dans un appartement de la rue Le Pelletier, dans le quartier de Saint-Éloi. Une jeune femme de 21 ans a porté un coup de couteau au ventre à son compagnon, âgé de 20 ans. Le couple, originaire de l’île de Mayotte, département français d’Outre-Mer, est connu dans le quartier pour ses nombreuses disputes. Mais la jeune femme, toujours en garde à vue à l’heure actuelle, n’a pas d’antécédents judiciaires. Le parquet, à qui elle sera présentée ce matin, a décidé d’ouvrir une information judiciaire.

Deux couteaux et un arbrisseau arraché

La victime a été hospitalisée dans un état jugé sérieux, le foie ayant peut-être été atteint par la lame mais ses jours ne sont apparemment pas en danger. Le jeune homme a d’ailleurs pu être entendu une première fois dimanche matin. Trois heures plus tard, à 10 h 40, la police a été appelée dans un appartement de l’avenue des Quatre-Vents à Buxerolles, où venait de se terminer une soirée très arrosée. Un homme de 34 ans avait d’être blessé superficiellement par sa compagne, de deux ans sa cadette, d’un coup de couteau. Selon les premiers éléments de l’enquête, la jeune femme n’aurait pas supporté d’avoir été giflée plusieurs fois par son compagnon au cours de la soirée, qui se déroulait chez des amis. Présentée au parquet hier, elle a été laissée en liberté sous contrôle judiciaire et sera jugée le 17 octobre devant le tribunal correctionnel. Enfin, dimanche matin, les policiers se sont rendus rue de Montbernage où une querelle entre anciens époux venait de dégénérer. Pas de couteau cette fois : l’arme utilisée par la dame était… un arbrisseau qu’elle venait d’arracher et avec lequel elle a assez légèrement blessé son ex-compagnon. La femme a elle aussi été brièvement placée en garde à vue au commissariat de police.

Nouvelle République, Vincent Buche, 19 août 2013