Deux militants de Greenpeace jugés à Privas pour intrusion dans une centrale
Après le procès des neuf militants de Greenpeace à Troyes, deux de leurs camarades ont comparu mardi en correctionnelle à Privas pour s’être introduits en décembre 2011 dans la centrale nucléaire de Cruas, en Ardèche, soutenus à l’extérieur du tribunal par quelque 200 sympathisants.
Deux militants de Greenpeace au tribunal de Privas, où ils sont jugés pour s’être introduits dans une centrale nucléaire, le 24 janvier 2012
Comme lors du procès de Troyes, une peine de quatre à six mois de prison avec sursis et 1.000 à 1.500 euros d’amende ont été requis à l’encontre de Julien André, un informaticien de 39 ans, et Vincent Roquelore, un photographe de 34 ans.
Le jugement a été mis en délibéré au 28 février.
Acclamés par des « merci » de sympathisants, à leur entrée dans le palais de justice, les deux militants sont poursuivis pour « violation de domicile et locaux professionnels » et « dégradation de biens publics en réunion », délits passibles de 7 ans de prison.
Une peine encourue plus lourde que celle de leurs camarades de Troyes, pour qui le parquet n’avait pas retenu la dégradation de « bien d’utilité publique ».
Le 5 décembre dernier à l’Aube, après avoir coupé le grillage, tous deux s’étaient introduits dans la « zone de stockage des déchets » de la centrale, qui ne fait pas partie de la « zone protégée ». Ils s’étaient dissimulés dans des sacs de stockage, après avoir diffusé sur internet trois courtes vidéo attestant de leur action, et avaient été découverts 14 heures plus tard, à 19H25.
« Je voulais interpeller les autorités sur la sécurité des centrales après Fukushima », a déclaré d’une voix assurée Julien André, qui voulait dénoncer « le risque d’intrusion terroriste et d’actes de malveillance ».
« Avec une action comme celle-ci, (le Premier ministre François) Fillon a demandé un rapport à ses ministres sur la sécurité », a-t-il dit.
« On a testé le temps pendant lequel n’importe qui pouvait entrer dans la centrale avant de se faire interpeller et on considère que ça a réussi, car onze jours après, la sécurité a été étendue, le gouvernement nous a donné raison », a déclaré à son tour Vincent Roquelore, pour qui « les moyens classiques utilisés » auparavant par Greenpeace « n’ont pas permis d’en arriver là ».
Déplorant le fait que ses clients soient considérés comme des « délinquants de droit commun », l’avocat de Greenpeace, Me Alexandre Faro, a réclamé leur relaxe.
« Si vous deviez les traiter comme des terroristes, alors que ce sont des militants, ça voudrait dire qu’on n’est pas dans un Etat démocratique », a-t-il plaidé, dénonçant le fait que le préfet de la Drôme ait à l’époque réclamé une « peine exemplaire » à l’encontre des prévenus.
« Ce qu’ils ont fait, c’est de la désobéissance civile, qui fait partie de la démocratie, pour attirer l’attention des pouvoirs publics sur quelque chose qui ne fonctionnne pas », a poursuivi l’avocat en demandant au tribunal de « tenir compte » qu’ils n’ont pas agi dans « des conditions crapuleuses ».
« Nous n’avons pas affaire à des délinquants ayant des intentions agressives » et « leurs convictions sont respectables », a reconnu Me Jean-Pierre Mignard, l’avocat d’EDF, partie civile.
Rappelant que « la sûreté » était « la préoccupation constante d’EDF », il a jugé « disproportionnées » ces actions de Greenpeace qui font courir des « risques pour les militants et la centrale ».
« EDF ne considère pas que ces intrusions de militants de Greenpeace constituent des menaces, c’est pourquoi elles sont traitées avec discernement par les forces de sécurité », a-t-il fait valoir, soulignant que, du coup, elles « ne démontraient rien ».
Quelque 200 militants et sympathisants de Greenpeace ou du Réseau Sortir du Nucléaire s’étaient rassemblés à partir de midi sur Les marches du palais pour apporter leur soutien au deux prévenus.
AFP, 24 janvier 2012