Archives de catégorie : La rue grogne

[Roissy] Résistance des passagers d’un vol à une expulsion

Une journée banale sous le ministère de Claude Guéant

Paris, aéroport Charles-de-Gaulle. Une « reconduite aux frontières » comme beaucoup d’autres. À l’arrière de l’avion, un homme menotté crie et se débat. Au silence et à la honte des passagers succède leur révolte. Résistance interdite, répliquent les CRS, qui traquent dans l’avion ceux qui ont osé se lever et prendre la parole. Derrière les chiffres proclamés par le ministère de l’Intérieur, la réalité.

Ce 20 janvier, le décollage est prévu à 10 h 30 depuis l’aéroport Charles-de-Gaulle. À l’embarquement, le personnel de bord est fort prévenant et ne signale aucune particularité sur le vol. À l’arrière de l’avion, pourtant, un homme hurle. « Laisse-moi, je veux descendre ! J’ai pas volé, j’ai pas tué, moi je suis pas esclave. » Il est entouré par quatre hommes et une femme, dont les brassards indiquent « police aux frontières ». « Je veux partir pour moi-même, je veux emmener le mot liberté avec moi. » En réponse à ses cris, il y a d’abord le silence des passagers. Et un terrible sentiment d’impuissance et de honte.

« Je n’aime pas non plus assister à ça, dit un steward. Mais on n’a pas le droit de s’en mêler. Mieux vaut peut-être pour lui qu’il soit là que dans un charter. Ici, au moins, on est là, on voit leurs pratiques, et on est avec lui. » Prière donc aux passagers de se montrer sourds, muets et consentants. Mais l’avion a du retard, et l’homme, malgré le tranquillisant injecté dans son bras, se débat toujours autant. Dans sa bouche, les mêmes mots reviennent en boucle. « Ne vous inquiétez pas, ça va finir par se calmer », assure le steward. En fond sonore, la voix du personnel : « Nous sommes heureux de vous accueillir sur ce vol Air France à destination de Conakry. »

L’heure tourne, les visages se crispent, l’indignation marque les regards. Soudain, un homme se lève : « Je n’ai aucune envie de voyager dans ces conditions-là. » Malgré l’appel au calme immédiat lancé par le personnel de bord, d’autres passagers se lèvent à leur tour. « C’est vrai, on ne peut pas accepter ça, c’est pas normal. » La peur recule à mesure que de plus en plus de passagers se lèvent et appellent à rester debout. « Si cet avion partait pour les États-Unis, vous imposeriez ça aux passagers ?, s’insurge un autre homme. C’est parce que l’on part en Afrique ? » « Pourquoi l’attacher comme un chien ? Qu’est-ce qu’il a fait ? »

« Entrave à la circulation d’un aéronef et rébellion »

L’homme menotté, voyant les gens se lever, se met à taper encore plus fort avec ses pieds. La panique gagne à bord. L’avion, lui, commence à partir. « Arrêtez l’avion », hurlent les gens. Les enfants pleurent, des passagers cognent contre les coffres à bagages. « Je vous garantis qu’il va se calmer », répond l’agent de la PAF. En fond sonore, la voix du commandant de bord : « C’est la dernière chance que je vous donne pour que l’avion puisse partir, restez tranquilles à vos sièges. » Agents de police et passagers filment tour à tour la scène. Des passagers exigent de parler au commandant de bord, la sécurité à bord n’étant pas respectée. La sanction tombe finalement à 12 h 30, deux heures après l’embarquement : « À cause du comportement de la majorité des personnes qui sont à bord, le vol est annulé. »

« Ça veut dire qu’il n’y a personne qui va partir, vous êtes contents ? », lâche le gars de la PAF. « Et vous, là, vous allez descendre avec nous », en pointant ceux qui ont désapprouvé haut et fort la scène dont ils étaient témoins. L’appareil est renvoyé au parking. En bas de l’avion, une fourgonnette arrive dont descendent une quinzaine de CRS. Une fois l’expulsé débarqué, la stratégie d’intimidation se met en place. Un homme de la PAF passe dans les rangées, pointe par les numéros de siège les personnes qui ont exprimé verbalement leur indignation. « Nous avons le n° 38. Madame, prenez vos affaires et descendez s’il vous plaît. » Les gens cachent leur visage par peur d’être reconnus, certains revêtent leurs lunettes de soleil. « On vous cherchait monsieur, vous vous cachiez ou quoi ? » Et l’inspection se poursuit.

Avec ceux qui refusent de descendre, la seule méthode employée est celle de la violence. Dans les travées de l’avion surgissent des CRS casqués, matraque et bouclier à la main, défilant en file indienne. Ils viennent chercher un passager de force, accroché à son siège. Au total, huit passagers sont débarqués, poursuivis pour entrave à la circulation d’un aéronef et rébellion. Le personnel est sollicité par la police pour connaître les noms de ceux qui ont été débarqués. Ils seront finalement relâchés trois heures plus tard, sans avoir écopé d’amende. En attendant les bus ramenant les passagers au terminal, un homme témoigne : « Ces expulsions sont monnaie courante sur les vols en direction de l’Afrique. Ce qui a fait réagir les gens, c’est lorsque l’homme a parlé d’esclavage. Voir quatre type blancs menotter un gars dans l’avion et l’expulser, ça évoque tout de suite la traite négrière. On n’a pas oublié le discours de Dakar de monsieur Sarkozy. »

Basta mag, Sophie Chapelle, 27 janvier 2012

[Chasseneuil – 86] Débrayage contre le gel des salaires et les augmentations de cadences

Débrayage à Fédéral Mogul

Les employés refusent le blocage des salaires.

 Les employés refusent le blocage des salaires.

Hier, à Chasseneuil, les syndicats CGT et FO de Fédéral Mogul ont appelé à un débrayage de deux heures, après l’annonce faite en négociations annuelles obligatoires (NAO) de geler les salaires durant l’année 2012. L’entreprise qui a subi un plan social en 2009 compte aujourd’hui 260 salariés et parmi ceux-ci un certain nombre d’emplois précaires. Pour le secrétaire général CGT Gwénael Autexier, « le personnel restant a subi les augmentations de cadence associées à un changement d’horaires. Avec le blocage des salaires on perd du pouvoir d’achat et les patrons gagnent plus par rapport aux profits dégagés. A Fédéral Mogul il y a de l’argent » poursuit le secrétaire général, « mais il faudrait qu’il soit mieux réparti sur les créateurs de richesse… »

Selon les responsables syndicaux, « ce mouvement est un succès puisque les débrayages deux heures avant fin de poste ont été suivis à 100 % en ce qui concerne les équipes nuit et matin (usinage, contrôle final et fonderie), l’équipe d’après-midi devait suivre le mouvement dans les mêmes proportions ». A Orléans où se tenait hier la seconde réunion NAO le personnel était également en grève.

Fédéral Mogul possède trois sites situés à Chasseneuil-du-Poitou, Garenne et Orléans.

Nouvelle République, Alain Chauveau, 27 janvier 2012

[Poitiers] Salarié-e-s de la territoriale contre la mairie

Territoriaux : la CGT veut l’oreille du maire

 Poitiers. Le syndicat, qui se bat notamment pour l’obtention d’une prime de 100 euros, reproche toujours à son employeur, le maire, de ne pas être assez à l’écoute.
Thierry Benaïssa, Franck Bugeaud et Patrick Amand, secrétaires de la CGT des Territoriaux.

 Thierry Benaïssa, Franck Bugeaud et Patrick Amand, secrétaires de la CGT des Territoriaux.

Quelque 80 agents CGT de la ville ont répondu hier après-midi à l’invitation de leur syndicat. L’occasion de faire le point sur la situation des uns et des autres dans la collectivité. Pour les responsables, le constat est clair. Depuis la journée « Poitiers ville morte » organisée le 8 avril 2011, rien n’a vraiment bougé. « Le choix des élus, c’est l’investissement, pas le fonctionnement, donc la priorité n’est pas le personnel », regrette Franck Bugeaud, le secrétaire général.

 Manque de dialogue

Dans ces conditions, le syndicat n’entend pas changer de cheval de bataille. Comme il y a quelques mois, il demande une prime de 100 € et la prise en charge par l’employeur d’une partie de la mutuelle. « Il y a une enveloppe déterminée de 360.000 euros pour la protection sociale, remarque Patrick Amand, secrétaire général adjoint, C’est ridicule quand on connaît le prix d’une mutuelle ! La ville ne fait pas d’efforts ». Très remontés, les agents CGT (280 syndiqués à la ville) regrettent aussi un certain manque de dialogue, voire un manque certain… « Il n’y a pas de réelle négociation, renchérit par ailleurs Franck Bugeaud, il y a un échange avec les responsables administratifs mais pas de dialogue avec les politiques. Où est la discussion ? Le malaise est toujours là. Dans les services, les arrêts maladie sont en constante augmentation ». Pour faire le point d’une manière plus large et envisager d’éventuels prolongements à ses revendications, le syndicat organisera une nouvelle assemblée générale, le vendredi 10 février, salle des Castors, à Buxerolles.

Nouvelle République, Jean-Michel Gouin, 27 janvier 2012

[Rouen] La police s’attaque aux client-e-s d’un café

Arrestations à Rouen: « Sale pute de gauchiste, on va te niquer »

Le Stardust, café populaire de la place du Vieux-Marché, à Rouen. Vendredi soir, c’est soirée électro. Quatre DJ locaux doivent s’y succéder. Musique numérique et bières belges au programme. Tout commence bien. Il est environ 20h00. Jusqu’à 23h30, rien à signaler. Le bruit est limité, les gens profitent de leur week-end. La soirée va pourtant dégénérer.

Vers 23h30, deux clients sortent du bar pour uriner sur une place située en face. Un premier véhicule de police arrive sur les lieux et interpelle dans le calme les deux contrevenants. «Vous êtes en train d’uriner sur le site historique de Jeanne d’Arc », annonce l’un des policiers. Les papiers d’identité sont confisqués, les deux fauteurs de trouble attendent de recevoir leur amende. Les flics font durer le plaisir.

Pendant une demi heure, les deux clients fautifs « poireautent »… D’autres clients du bar se rapprochent de la scène, demandent des explications. Le contrôle s’éternise. A ce moment, deux autres véhicules de police arrivent. Les forces de l’ordre annoncent qu’ils interpellent les deux « pisseurs » pour ivresse manifeste sur la voie publique. Tollé général. Les deux fautifs sont embarqués.

Une dizaine de clients se placent en face d’une des voitures, pour l’empêcher de repartir. Sans violence ni insulte. Mais les policiers sont nerveux. Ils sortent du véhicule et gazent à bout portant plusieurs personnes. Présent au concert, je me retrouve moi-même, après m’être manifesté comme journaliste auprès des policiers, pris dans les effluves de lacrymo. Une fois le « ménage » accompli, les voitures repartent avec les deux délinquants. Fin de l’histoire ? Pas encore…

Plusieurs véhicules restent en faction à 100 mètres du bar, tous feux allumés. Vingt minutes plus tard, sans raison apparente, l’assaut reprend : une vingtaine de policiers en tenue de « Robocop » arrivent en trombe sur la terrasse du café. Matraques, chiens, lacrymos… c’est reparti.

Sans distinction, des gens sont frappés, un jeune homme a le crâne en sang. Des grenades sont tirées. Un client du bar, rageur, jette une bouteille sur l’une des fourgonnettes de police. Au bout d’une heure, c’est le seul acte violent à déplorer côté fêtards. Les policiers, de leur côté, frappent les quelques femmes venues leur parler pour que cessent les violences. Ils éructent des insultes sexistes : « Bande de morue, salopes… »

Un des DJ qui repartait avec son matériel est poussé dans le dos par un policier. Il s’étale au sol avec ses affaires. Une jeune femme est violemment interpellée, traînée par terre, son pull et son tee shirt déchirés. Un policier lance : « Sale pute de gauchiste, on va te niquer. » La place est finalement « nettoyée ». Il est presque deux heures du matin.

Bilan de l’opération : trois personnes interpellées pour ivresse manifeste sur la voie publique (aucun taux d’alcoolémie n’a été communiqué aux contrevenants, aucune amende n’a été dressée pour cette infraction). Deux autres personnes devront répondre de dégradation de bien public, outrage, rébellion et violence sur agent de la force publique.

Contacté lundi, le commissariat principal de Rouen explique sommairement que «les policiers ont été pris à partie et ont du faire usage de la force». L’officier en charge de la communication n’a pas eu connaissance d’éventuelles violences et insultes policières.

Les deux principales victimes, après constatation d’un médecin légiste du CHU de Rouen, devaient rencontrer un avocat mercredi. Elles présentent des hématomes, des brulures au visage et une entaille au crâne. Une ITT (incapacité totale de travail) de trois jours a également été retenue. De leur côté, les deux « pisseurs » ont écopé d’une amende de 68 euros pour miction sur les ruines de la place du Vieux-Marché. Jeanne d’Arc peut donc reposer en paix.

les Inrocks, Manuel Sanson, 26 janvier 2012

[Australie] La première ministre dégagée par des manifestants aborigènes

[Australie] La première ministre dégagée par des manifestants aborigènes

Australie : la première ministre prise à partie

Julia Gillard a dû fuir une foule composée de manifestants pro-aborigènes en colère contre une déclaration du chef de l’opposition sur leur combat.

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Grosse frayeur pour la première ministre australienne Julia Gillard. La chef d’État a dû quitter précipitamment une cérémonie dans le cadre de la fête nationale australienne et rejoindre de toute urgence sa voiture. Escortée par une cinquantaine de policiers, Julia Gillard a rejoint son véhicule accrochée à son garde du corps, tandis qu’un autre membre des services de sécurité protégeait la première ministre d’éventuels projectiles avec un bouclier. Dans la cohue, la chef d’État a perdu une de ses chaussures.

Alors que Julia Gillard et le chef de l’opposition Tony Abbott procédaient à une cérémonie de remise de prix à l’ancien Parlement de Canberra, les deux personnalités politiques ont été prises à partie par une foule de 200 manifestants pro-aborigènes. Les deux personnalités politiques se sont alors retranchées dans un restaurant attenant. Visiblement remontés, les manifestants ont hurlé « honte à vous » et « racistes », tout en frappant contre les vitres de l’établissement. Après vingt minutes de tumulte, et l’arrivée d’une dizaine de policiers supplémentaires, Julia Gillard et Tony Abbott ont décidé de quitter le restaurant sous bonne escorte.

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« Provocation » vis-à-vis des aborigènes

La foule s’était réunie près de « l’ambassade aborigène », un ensemble de tentes regroupant des activistes luttant pour les droits de cette minorité. Non-reconnue officiellement par le gouvernement, cette « ambassade » fête actuellement ses 40 ans. Alors que l’ambiance était déjà tendue — les aborigènes et les activistes les soutenant considérent la fête nationale comme le « Jour de l’Invasion » —, les manifestants estiment que Tony Abbott a mis de l’huile sur le feu. Le chef de l’opposition avait expliqué plus tôt dans la journée qu’il comprenait pourquoi cette ambassade avait été construite, mais qu’il estimait qu’il était temps que les activistes « passent à autre chose ».

Les manifestants demandent à Tony Abbott de clarifier sa position, et de dire s’il souhaite oui ou non la fin de l’ambassade. « Ici, nous avons 1000 personnes qui manifestent de manière pacifique. Alors faire une déclaration comme quoi l’ambassade doit disparaître, c’est de la folie », a expliqué le fondateur de ladite ambassade, Michael Anderson, pour justifier la violence des manifestants.

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Leur presse (LeFigaro.fr), 26 janvier 2012.