Après avoir lâché Bozizé qu’elle avait contribué à placer au pouvoir, revoilà l’intervention française… Le sinistre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a annoncé aujourd’hui l’envoi d’un millier de soldats français en Centrafrique pour « six mois à peu près », en « appui » d’une force africaine. Les arguments sont toujours les mêmes. Il s’agirait de maintenir l’ordre, de contrer le terrorisme et de protéger les ressortissants français. Le pays serait, selon François Hollande et Laurent Fabius, en situation « pré-génocidaire ». Il s’agit surtout d’une intervention une fois de plus stratégique, pour maintenir l’influence française dans cet Etat situé en plein cœur de l’Afrique.
La République Centrafricaine, Etat issu de la « décolonisation » mais resté sous l’ombre d’une ingérence française éhontée, est l’un des pays les plus pauvres du monde, à l’industrie sinistrée, croulant sous une dette imposée par les institutions internationales. Et ce, malgré (ou à cause de) ses ressources importantes en or, diamants, pétrole, bois précieux et… en uranium. La majorité de la population survit misérablement de l’agriculture, principalement vivrière, et elle est en proie aux exactions des rebelles du Séléka aussi bien que des troupes gouvernementales.
On notera que l’entreprise Areva (exploitant l’uranium dans le monde entier pour l’industrie nucléaire française) est implantée à Bakouma, pour l’exploitation des gisements d’uranium dont elle est en grande partie propriétaire, même si l’entreprise joue un peu au yoyo avec ses salarié-e-s sur place. Areva a longtemps parlé d’un gisement prometteur et d’une bonne qualité de l’uranium pour évoquer finalement une suspension de son engagement (le cours du minerai étant plus bas sur le marché), et plus récemment de désengagement, suite à l’attaque du site par des rebelles.
La position d’Areva est à l’image d’un interventionnisme français en yoyo sur le plan politique, tirant les ficelles mais laissant les populations aux prises avec le chaos militaire, conséquence désastreuse de sa politique cynique. L’Etat français a contribué largement à la misère et à l’instabilité du pays, avec une véritable valse de coups d’état qui ont ponctué toute l’histoire centrafricaine depuis « l’indépendance ». Et ce, avec le soutien du Tchad, le puissant allié voisin lui aussi soutenu par la France.
A l’évidence, la situation tragique en Centrafrique, dont la France est largement co-responsable depuis toujours, ne s’améliorera pas avec une énième intervention militaire de l’Etat français…
Voir cet article sur Survie, qui date déjà mais est toujours aussi intéressant pour comprendre la situation complexe du pays.
Pavillon Noir, 26 novembre 2013