Après avoir atteint en septembre un niveau inégalé depuis douze ans, le nombre de chomeurs a encore battu un record en octobre. Avec une hausse de 1,2% sur ce mois et cumulant depuis le 1er janvier une augmentation de 4,9%, le nombre de personnes n’ayant pas travaillé du tout atteint des sommets. Ces calculs qui sont proportionnels à la population qui travaille sont un peu abstraits, c’est vrai. Alors, voilà: en additionnant les diverses catégories de sans emplois, on atteint un chiffre de 4 459 400 personnes qui sont au chômage. Ce qui me parle davantage encore, c’est que ces « personnes au chômage », sont des hommes et des femmes, jeunes et moins jeunes, que je cotoie -comme vous- et qui sont peut-être nos voisins, nos enfants ou nos amis, vous et moi, nous tous et toutes qui dépendont du salariat, c’est à dire de notre seule force de travail pour vivre, payer le loyer, acheter à manger et de quoi s’habiller, envisager l’avenir, se soigner, s’éduquer…
Dès le 3e trimestre, des visionnaires avaient déjà prédit la catastrophe sociale et humaine: la création d’emplois fléchissait nettement par rapport au 2e trimestre, et surtout, les plans sociaux et les réduction d’effectifs se multipliaient. La création nette d’emplois ne suffisait plus à compenser les pertes de postes.
Et la situation ne devrait pas s’améliorer. Grands princes pour eux mêmes, les porte voix du gouvernement estiment déjà que les objectifs affichés par Matignon en matière de lutte contre le chômage ne seront pas atteints, à cause de la crise. J’en connais à qui çà va faire une belle jambe. Tartuffes.
Ces hausses du chomage touchent fortement les seniors -entre autres- pour qui l’augmentation du non-emploi est de plus de 15% depuis le 1er janvier. Or, avec une moyenne de 39,7% du taux d’emplois des 55-64 ans (plus de 70% en Suède !), la France déroule un tapis rouge vers la précarité et la misère à ceux dont l’âge serait un facteur défavorable. Blanchir sous le harnais est donc un risque sérieux pour un salarié, en économie soit-disant organisée par l’Etat providence. Nos patrons ont besoin de jeunes loups aux dents longues et au sang frais, et d’allègements des coûts du travail, parait-il…
Les prévisions semestrielles de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économique), parues le 28 novembre, ne nous aideront pas à retrouver le sourire. Avec des économies en récession, ils nous annoncent un niveau de chomage de 10,3% dans la zone euro fin 2012 et un pic de 10,4% pour l’Hexagone (9,2% fin 2011).
Pendant ce temps, les prélèvements opérés par les 62% de ménages français (environ 24 millions de personnes) possesseurs d’assurances vie sont massifs, pour le deuxième mois consécutif. En septembre puis octobre, les retraits étaient largement supérieurs aux dépôts: 1,8 puis 1,4 milliards d’euros ont été récupérés par les français pour faire face à la situation. Une première depuis dix ans. Quand on sait que ces assurances vies sont envisagées par leurs détenteurs comme des épargnes pour les coups durs, on fait vite le lien avec le chomage de masse.
Mais cette semaine, nous avions au moins deux raisons de ne pas désespérer. Les 25 et 26 novembre, en France, le réseau des banques alimentaires a collecté auprès des clients de supermarchés de quoi fournir 25 millions de repas pour l’hiver, soit un million de plus que l’an dernier. C’est inattendu en temps de crise qui s’approfondit. Et à travers tout le Royaume Uni, une grève, le 30 novembre, a rassemblé des centaines de milliers de grévistes dans une journée de protestation inédite depuis 1978-79, sous l’ère Thatcher. Il s’agit aujourd’hui de s’opposer à une autre vague de restrictions sociales et budgétaires du gouvernement de David Cameron.
Ces deux faits isolés de l’actualité de cette semaine indique bien que, par crainte de l’avenir, ou par solidarité de classe, des populations ont toujours capacité à s’entraider, et à lutter. C’est important, par ces temps où la misère croissante et le chômage qui dure s’intensifient. Même si la peur du lendemain n’est pas la même pour tous, selon qu’on est salarié ou boursicoteur. Mais le jour où l’on se débarrassera de ceux qui exigent que nos vies empirent au nom de valeurs boursières viendra bien, non ? Et pour çà, il y a du travail pour tout le monde ! Allez, au turbin !
Daniel (Groupe Gard Vaucluse de la FA), 14 décembre 2011