Nouvelle traduction de Lucy Parsons, une petite compilation d’extraits d’articles de journaux de l’époque :
La voix du peuple se fera encore entendre
Paroles et écrits de Lucy Parsons – traduction par Jean (groupe Pavillon Noir, Fédération Anarchiste 86)
Le vingtième anniversaire du 11 novembre, qui vient d’être commémoré à Chicago, a été un grand succès à de nombreux égards, notamment quand au nombre croissant de jeunes gens qui y ont pris part…
Avec ces années si vite passées, les vies de nos camarades sont mieux comprises ; leur grande oeuvre pour le bonheur de l’humanité comprise et reconnue. Comme cela fut toujours le cas des martyrs de toutes les époques…
« La voix du peuple » se fera encore entendre.
The Demonstrator, 20 novembre 1907
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Voilà maintenant 18 mois que j’ai publié les Discours célèbres des martyrs d’Haymarket. Durant tout ce temps, j’ai voyagé de Los Angeles, Vancouver état de Washington et Vancouver en Colombie Britannique, à New York, à deux reprises. J’ai consacré toutes mes énergies à rendre visite à tous les gens de la Fédération Américaine du Travail. J’ai toujours reçu d’eux l’accueil le plus courtois, partout où je me suis rendue. Quelques-uns des organismes les plus connus de ce pays m’ont témoigné leur attention, y compris l’Union fédérale centrale de New york. J’ai frappé sans relâche aux portes des gens de chaque coin, qui m’ont reçu et acheté les Discours. Résultat, j’en ai vendu 10.000 exemplaires et suis sur le point de passer commande pour une sixième édition de 12.000 exemplaires.
Je considère ces Discours comme le plus grand volet de la littérature de propagande qui subsiste ; et suis convaincue qu’en circulant parmi les travailleurs organisés, ils porteront leurs fruits.
The Agitator, 15 décembre 1911
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Le rassemblement d’Haymarket se réfère historiquement à « l’émeute des anarchistes d’Haymarket ». Il n’y a eu aucune émeute à Haymarket, si ce n’est une émeute policière. Le maire Harrison s’est rendu au rassemblement d’Haymarket, et a pris position au procès des anarchistes, pour leur défense, et non pour l’Etat.
La grande grève de Mai 1886 fut un événement historique de première importance, dans la mesure où ce fut… la première fois que les travailleurs eux-mêmes se mobilisaient pour obtenir une journée du travail plus courte par une action unie, et simultanée… cette grève fut la première action véritabement directe sur une large échelle…
Bien entendu, la journée de huit heures peut aujourd’hui sembler désuète, ainsi même que les corporations syndicales. Aujourd’hui, nous devrions lutter pour une journée de travail de cinq heures.
The Industrial Worker, 1er mai 1912
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Le Onze Novembre est devenu une journée d’envergure internationale, chère aux coeurs des amoureux sincères de la Liberté, comme un jour de martyre. Ce jour-là furent sacrifiés à la potence des martyrs aussi sincères pour leurs idéaux qu’on ne le fût jamais à toute autre époque…
Nos camarades ne furent pas assassinés par l’Etat pour avoir eu le moindre rapport avec la bombe, mais parce qu’ils étaient actifs dans l’organisation des esclaves du salariat. La classe capitaliste n’avait pas l’intention de trouver le lanceur de la bombe ; cette classe avait la bête croyance qu’en livrant à la mort les esprits vifs du mouvement des travailleurs de l’époque, elle pourrait terroriser la classe ouvrière au point de la faire retomber dans l’esclavage.
The Agitator, 1er novembre 1912
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Parsons, Spies, Lingg, Fischer and Engel : bien que tout ce qui était mortel en vous repose désormais sous le beau monument du Cimetière de Waldheim, vous n’êtes pas morts. Vous commencez seulement à vivre dans les coeurs de tous les amoureux sincères de la Liberté. Car à présent, après ces quarante années passées depuis votre départ, des milliers de gens qui n’étaient alors pas encore nés désirent ardemment apprendre de vos vies et de votre martyre héroïque, et plus les années passent, plus brillants sont vos noms, plus vous êtes reconnus, et aimés.
Ceux qui vous ont au contraire si abjectement assassinés, sous les prétextes d’une loi – une loi assassine – dans une cour de prétendue justice, sont à présent tombés dans l’oubli.
Reposez en paix, camarades, reposez en paix. Tous les lendemains sont les vôtres !
The Labor Defender, novembre 1926
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Une fois encore ce 11 novembre un rassemblement pour la mémoire se tiendra pour commémorer la mort des martyrs d’Haymarket de Chicago. 1937 est le cinquantième anniversaire, et ce rassemblement s’annonce véritablement bien plus large que tous ceux des quarante-neuf années précédentes…
En ce sombre matin du 11 novembre 1887, j’ai emmené nos deux enfants à la prison pour tenter de dire adieu à mon mari bien-aimé. J’ai trouvé la prison fermée par de lourdes chaînes. Des policiers avec des pistolets patrouillaient dans l’enceinte.
Je leur ai demandé de nous permettre de retrouver celui que nous aimions une dernière fois, avant qu’ils ne l’assassinent. Ils ne répondirent rien.
Alors je dis, « laissez au moins ces enfants dire aurevoir à leur père ; laissez-les recevoir ses bénédictions. Ils ne peuvent faire aucun mal. »
En quelques minutes un fourgon cellulaire arriva et nous fûmes enfermés dans un commissariat de police, pendant que l’acte infernal était perpétré.
Oh, Misère, j’ai bu ta coupe de chagrin jusqu’à la lie, mais je suis toujours une rebelle.
The One Big Union Monthly, novembre 1937
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Source : Roediger, Dave, et Franklin Rosemont, éditions Haymarket Scrapbook. Charles H. Kerr Publishing Co., Chicago, 1986.
http://www.lucyparsonsproject.org/writings/voices_of_people.html