Circulaire Guéant : « une honte, une stupidité, une infamie »

Parrainages d’étudiants étrangers contre « l’infamie » de la circulaire Guéant

Une cérémonie publique de parrainages d’étudiants étrangers, auxquels il a été refusé de travailler en France, a été organisée mardi dans un amphithéâtre bondé de l’université Panthéon-Sorbonne, pour aider des étudiants victimes de la circulaire Guéant, considérée comme « une infamie ».

« Cette circulaire, même ravalée, c’est une honte, une stupidité, une infamie », a déclaré Pierre Rosanvallon, professeur au collège de France, en parrainant le Guinéen Souleymane Salma Diallo dont le refus de permis de travail, contre lequel il a déposé un recours, a été suivi d’un ordre d’expulsion.

« Je trouve cette histoire absolument stupide, c’est contre la raison et inique. Il n’y a pas à hésiter, il faut être absolument contre et engagé », a affirmé l’historienne des femmes Michelle Perrot, en parrainant Zeinab Benslimane, une Marocaine de 24 ans qui a perdu un emploi décroché dans les assurances.

« Tous ces étudiants sont des victimes qui ont besoin d’être aidées dans leurs démarches », a résumé Fatma Chouaieb, porte-parole du collectif du 31 mai, à l’origine de ces parrainages avec des universitaires et chercheurs signataires d’une pétition contre la circulaire.

Les autres parrains sont notamment le prix Nobel de physique Albert Fert, l’actrice et réalisatrice Tonnie Marshall, les présidents d’université Vincent Berger (Paris-7 Diderot), Patrice Brun (Bordeaux-3) et Yves Lecointe Nantes) ou encore l’essayiste Caroline Fourest, très applaudie.

Faute d’emploi, les étudiants étrangers parrainés ont, pour beaucoup, évoqué des problèmes de ressources.

« Je viens de lâcher mon logement fin décembre, je suis hébergé chez mon cousin en attendant… je ne sais pas bien quoi », a témoigné Adama Baba Corera, Mauritanien et consultant en informatique, parrainé par le mathématicien Michel Broué.

Les présidents d’universités présents ont particulièrement relevé « l’incohérence » de la circulaire avec la politique d’enseignement supérieur menée par le gouvernement.

Des étudiants ne peuvent rester travailler en France alors que certains présidents d’universités vont bientôt défendre devant un jury international leur projet d' »initiative d’excellence » (Idex), ces futurs campus de taille mondiale dont un des critères est justement « l’attractivité internationale », a relevé M. Berger.

« On vit une époque schizophrène », a ajouté le président de Paris-7, parrain de la Russe Ekaterina Tyunina qui avait décroché un emploi dans une grande banque.

Les présidents de Bordeaux-3 et Nantes ont eux rappelé que la loi LRU d’autonomie de 2007 avait donné comme nouvelle mission aux universités l’insertion professionnelle.

« Or cette circulaire scélérate interdit désormais aux étudiants étrangers d’avoir cette insertion professionnelle. On est là dans l’incohérence absolue », a commenté M. Brun.

Les ministres concernés ont proposé la semaine dernière un nouveau texte pour « lever les malentendus » de la circulaire Guéant, mais universités, grandes écoles et étudiants n’en sont pas satisfaits.

AFP, 10 janvier 2012