Crédit Immobilier de France : silence, on coule
Les manifestants ont défilé hier à Poitiers avant un pique-nique place d’Armes.
Environ 150 salariés du Crédit Immobilier Centre-Ouest ont défilé hier matin à Poitiers. Pour manifester contre la disparition programmée de l’entreprise.
Humour noir. Sur la pancarte du manifestant, un portrait de François Hollande. Une croix barre le mot « changement ». Remplacé par « licenciements ». Ce qui donne : « Les licenciements, c’est maintenant. »Les oreilles du président de la République ont sifflé hier dans les rues de Poitiers. Car c’est bien le gouvernement qui était la cible des salariés du Crédit Immobilier de France Centre-Ouest (CIF) dont l’emploi est menacé. Céline Robin, analyste et élue au comité d’entreprise, fait le point.
« Les licenciements c’est maintenant »
Comment en est-on arrivé là ?
Nous œuvrons pour aider à l’accession à la propriété des ménages les plus modestes. On prête de l’argent emprunté sur les marchés financiers mais depuis que l’agence de notation Moody’s a dégradé le CIF, l’accès aux marchés nous est fermé. Et faute de liquidités, nous n’avons plus les moyens de produire des crédits.
Vous êtes soutenus par l’État ?
Il nous a apporté sa garantie mais la contrepartie, c’est de gérer seulement les prêts en cours. Si on ne peut plus accorder de nouveaux prêts, on n’a plus d’activité et on ne peut pas payer les gens à ne rien faire.
Combien d’emplois sont en jeu pour le Centre-Ouest ?
144 sur les trois régions Poitou-Charentes, Centre et Limousin. Rien qu’au siège administratif de Poitiers, nous sommes une soixantaine de salariés. En France, ce sont 2.500 personnes au total qui pourraient se retrouver sur le carreau.
Quel est l’état d’esprit des salariés ?
Nous sommes un peu abattus mais on essaie de mobiliser tout le monde. On ne comprend pas qu’un gouvernement de gauche prenne cette initiative. Quand nos délégués syndicaux ont été reçus à Bercy vendredi, on leur a dit qu’il n’y avait pas d’avenir pour le CIF. Curieusement, aucune chaîne de télé n’a parlé de notre manifestation ce jour-là. TF1 a pourtant tourné un sujet, il n’est pas passé… Interrogé dimanche à la radio, Pierre Moscovici, le ministre de l’Économie, a botté en touche. Et Cécile Duflot, qui s’occupe du logement, qu’est ce qu’elle fait de la question sociale ? En attendant, lundi, on doit être reçu par Alain Claeys, le maire de Poitiers…
repères
CIF – Stade Volley, même combat…
Le Crédit Immobilier de France a toujours été un des principaux partenaires du Stade Poitevin Volley-Ball. A la grande époque du club, le logo « Crédit Immobilier Rural de la Vienne » figurait en bonne place sur le maillot des All Blacks. Cet été, le SPVB a été rayé de la carte du haut niveau. A son tour, le CIF pourrait connaître le même sort funeste.
Nouvelle République, Jean-François Rullier, 19 septembre 2012
Brigitte : » Jean-Pierre Raffarin ne nous répond pas «
« Je suis l’ancêtre… » Forte de ses 35 années de présence au Crédit Immobilier de France, Brigitte, tout en marchant avenue de la Libération, a du vague à l’âme. « C’est Jean-Raffarin qui a créé en 1956 le Crédit Immobilier Rural de la Vienne qui allait devenir le Crédit Immobilier de France Centre-Ouest. Et Jean-Pierre Raffarin a été notre président durant une dizaine d’années à partir de 1978. On cherche à le joindre, on n’a pas de réponse… soupire cette chargée de clientèle. J’ai vu le CIF grandir et de nous voir dans cette situation, c’est triste. Tout le monde a le droit de vouloir acheter son logement et nous étions un des seuls prêteurs à ne pas exiger un apport personnel. Comment feront les gens aux modestes revenus désormais ? Comme j’ai commencé à travailler à 19 ans, je pourrai partir à la retraite courant 2013. Mais jamais je n’aurais pensé que la société serait dans un tel état au moment de la quitter. Ça me navre car nous pouvions aider des gens en difficulté. »
Nouvelle République, 19 septembre 2012