Les dommages collatéraux de la LGV Poitiers-Limoges
L’État propose de supprimer des trains sur l’actuelle ligne ferroviaire Paris-Orléans-Toulouse pour rentabiliser le futur barreau à grande vitesse Poitiers-Limoges. Tollé dans la région Centre.
La lettre adressée par le directeur général des infrastructures du ministère de l’Écologie aux membres du comité des financeurs des études de la ligne ferroviaire à grande vitesse Poitiers-Limoges*, le 25 janvier dernier, a fait l’effet d’une bombe le long de l’actuelle ligne POLT qui Paris à Toulouse, via Orléans et Limoges. Pour « maximiser les circulations sur le projet de LGV », Réseau ferrée de France propose en effet de réduire les services sur l’axe POLT en passant de sept allers-retours par jour dans le précédent projet à quatre, contre onze actuellement.
» Une hypothèse scandaleuse «
S’il reconnaît que ce schéma permettrait d’améliorer le bilan socio-économique du barreau Poitiers-Limoges, le fonctionnaire du ministère prévient que cela aurait aussi des conséquences entre Paris et Toulouse puisque les trains restants ne pourraient « plus assurer de desserte semi-directe comme cela avait été envisagé » ; autrement dit, ils s’arrêteraient dans toutes les gares comme des omnibus. « Le taux de rentabilité du projet de LGV Poitiers-Limoges s’avérait trop faible pour être économiquement acceptable », rappelle la Coordination des riverains et impactés qui s’oppose au projet. « Le comité des financeurs a donc demandé à RFF de réaliser une contre-expertise […] afin de déterminer les pistes possibles d’optimisation. » En l’occurrence, la réduction du trafic sur la ligne POLT sur laquelle les financeurs des études du projet de LGV sont appelés à se prononcer avant la fin du mois pour permettre le lancement de l’enquête publique. « Cette hypothèse est scandaleuse ; elle consiste à casser l’existant au profit d’une ligne toujours à l’état de projet ! », dénonce le président du conseil général de l’Indre. « C’est une provocation inacceptable ; il y a une volonté de tuer la fréquentation de la ligne POLT », ajoute son collègue de la Creuse. Etonnament, le vice-président de la Région Centre en charge des Transports voit plutôt un bon signe dans la lettre du ministère. Selon lui, la proposition de RFF qui présente un « risque d’enclavement » avec la disparition des dessertes d’Argenton-sur-Creuse et d’Issoudun, serait à ce point inenvisageable qu’elle plaiderait contre la LGV. « On connaît les arguments des pour et des contre, je ne veux entrer dans aucune polémique », réagit Alain Claeys, le député-maire de Poitiers. « Ce que je souhaite maintenant, c’est que l’enquête publique puisse être lancée au premier semestre. » Le courrier du ministère de l’Écologie en témoigne : les services de l’État y travaillent activement.
* Le comité des financeurs appelé à se prononcer rassemble les représentants de l’État, des Régions Poitou-Charentes et Limousin, des Départements de la Vienne, de la Haute-Vienne et de la Corrèze et des agglomérations de Poitiers, Brive et Limoges.
Baptiste Bize, Nouvelle République, 16 février 2013