NdPN : constat accablant dressé par cet article de Bastamag. Manquent néanmoins quelques explications plus fines que l’appel à une « répartition égalitaire des richesses », car ces fameuses richesses ne proviennent que de l’exploitation de l’homme par l’homme, et la valeur-monnaie n’est que l’évaluation de ladite exploitation.
Paradoxe : les êtres humains, dont les Français, n’ont jamais été aussi riches !
Les inégalités ne cessent de croître. Pourtant la richesse monétaire des individus, à l’échelle mondiale, a doublé en une décennie ! Qui détient ces fortunes ? Quels sont les pays qui tirent leur épingle du jeu ? Quelle serait la richesse de chaque Français si on répartissait l’argent de manière égalitaire ? Réponses.
La richesse globale – ce que possède en valeur monétaire l’ensemble des 4,7 milliards d’êtres humains adultes – a battu un nouveau record historique en 2013 : 241 000 milliards de dollars (241 trillions), selon le rapport annuel sur la « richesse globale », publié début octobre par le groupe Crédit suisse, l’une des principales banques mondiales [1]. Malgré un affaissement en 2008, suite à la crise des subprimes, depuis 2000, cette richesse monétaire a doublé !
Pour calculer cette richesse individuelle, le Crédit suisse, s’appuyant sur les données nationales des 197 Etats, prend en compte les actifs financiers – compte épargne, portefeuille d’actions, fonds de pension privés, participations au capital – et le patrimoine non financier – immobilier principalement – de chaque individu, puis en soustrait la dette. Les actifs et les dettes détenues par l’Etat, « qui ne peuvent être facilement attribués à des particuliers », sont exclus de ce calcul, ainsi que les versements liés aux politiques sociales publiques, comme en France les pensions retraite de l’assurance vieillesse.
70% de pauvres
En moyenne, chaque adulte détient en théorie 51 600 dollars. Jamais les êtres humains n’ont été aussi fortunés, précise la banque ! Tout cela est bien sûr virtuel. Car le Crédit suisse dresse un panorama de la répartition de cette richesse. Et le fossé des inégalités est toujours aussi abyssal. Moins de 1% de la population possède à elle seule 40% des richesses mondiales. Et 83% de cette richesse est détenu par un relatif petit groupe de 400 millions d’individus (qui possèdent plus de 100 000 dollars chacun). Soit un peu plus de 8% de la population de la planète, résidant en Amérique du Nord, en Europe de l’Ouest, dans quelques émirats du Golfe, en Australie ou au Japon. Sûrement parce que ce sont les seuls à véritablement créer de la richesse…
Tout en bas de la pyramide, près de 70% des habitants – 3,2 milliards de personnes, principalement en Afrique subsaharienne et en Inde – se partagent 3% des richesses, soit moins de 10 000 dollars par individu. Entre les deux, une « classe moyenne » mondiale, rassemble les 23% de la population qui disposent d’un patrimoine de 10 000 à 100 000 dollars. Pour illustrer ces chiffres globaux, imaginez 12 individus qui doivent se partager 12 dollars. Au vu du mode de répartition actuel, un seul individu récupèrera 10 billets, les 11 autres se contentant des deux restant. Un modèle de fraternité…
La France, un éden de riches
Si la richesse globale augmente, la moitié de l’Humanité n’en bénéficie qu’à hauteur de 1%, rappelle le Crédit Suisse. Cette augmentation est aussi inégale selon les pays. Le Japon est le grand perdant, avec une baisse de 20% de sa richesse par individu, suivi par l’Argentine, le Brésil et la Russie. A l’inverse, les États-Unis ont engrangé 8 000 milliards de dollars cette année. Loin devant la Chine et l’Allemagne.
Et la France dans tout ça ? En matière de richesse globale, elle se porte bien, merci. Malgré le « pilonnage fiscal » dénoncé par la droite et l’extrême droite, et le manque de « compétitivité » des salariés claironnée par le Medef, la France est le 4ème pays où les individus se sont le plus enrichis en 2013, juste derrière l’Allemagne et la Chine. Si cette richesse était répartie de manière totalement égalitaire, chaque citoyen adulte disposerait d’environ 225 000 euros. Avec les Luxembourgeois, les Français seraient ainsi les citoyens les plus fortunés de la zone euro, devançant largement l’Allemagne (150 000 euros par adulte). Évidemment, il n’en est rien.
Une classe moyenne déclassée ?
Malgré « la haine des riches » qui sévit (à en croire la Une d’un news magazine), ceux-ci continuent d’accroître leur fortune. La France décroche même la médaille de bronze mondiale du nombre de millionnaires, derrière les États-Unis et le Japon, avec 2 210 000 millionnaires (en dollars), soit 4,6% de la population adulte [2]. Vient ensuite une grosse classe moyenne relativement aisée au vu de la situation mondiale : 51% de la population française possède entre 100 000 et un million de dollars. Une richesse générée en grande partie par la valeur de l’immobilier. Enfin une classe moyenne « inférieure » (entre 10 000 et 100 000 dollars) et « populaire » (moins de 10 000 dollars) représente chacune un peu plus de 20% de la population.
Richesse par adulte dans les pays de la zone euro :
« L’Europe dans son ensemble représente 34% des individus dans le top 1% des détenteurs de la richesse mondiale, et la France à elle seule constitue près d’un quart du contingent européen. Cela reflète non seulement la richesse nette moyenne élevée des ménages français, mais aussi une plus grande inégalité financière que celle observée dans la plupart des autres pays de l’Union européenne », commente le Crédit Suisse. Une tendance qui se confirme depuis au moins dix ans, au vu de l’impressionnante progression du niveau de vie des 0,01% des Français les plus riches (voir ici). Les think tanks néo-libéraux hurleront sans doute à la manipulation marxiste ! L’oligarchie hexagonale rétorquera probablement qu’en nombre de méga riches – les individus possédant plus de 50 millions de dollars –, la France n’est qu’en 7ème position, derrière les indépassables États-Unis, suivi de loin par la Chine, l’Allemagne, la Suisse, le Royaume-Uni et le Japon. Triste sort !
Ivan du Roy
Infographie : CC Mathieu Lapprand / Basta ! Photo : CC Surat Lozowick
Ivan du Roy, Bastamag, 16 octobre 2013