[Notre histoire] 12 avril 1913 : l’hôtel de ville de Paris investi par des sans-logis pour « le droit au logement pour tous »

ndPN : Le 12 avril 1913, des milliers de manifestants sans-logis investissent l’hôtel de ville de Paris, pour le droit au logement pour tous. L’occasion de rappeler aujourd’hui l’histoire de Georges Cochon… et de se rendre à 11H30 aujourd’hui à Poitiers sur la place du marché, avec le collectif des sans-logis et mal-logés de Poitiers et le DAL 86, pour une conférence de presse !

Georges Cochon (1879-1959)

 Très populaire, G. Cochon, fut avant la Première Guerre mondiale secrétaire et président de l’union syndicale des locataires puis  de la Fédération des Locataires au temps où le « proprio » était Monsieur Vautour et où certains locataires pratiquaient les déménagements « à la cloche de bois ».

En décembre 1909, Georges Cochon, qui avait passé trois ans aux Bataillons d’Afrique pour objection de conscience, était le trésorier de l’Union syndicale des locataires ouvriers et employés, qui était une résurgence d’un premier syndicat confédéré de locataires créé en 1903 par l’anarchiste Pelletier. En 1911 il devenait le président de l’union  qui comptait alors un demi millier d’adhérents parisiens et dont le pogramme reposait sur l’insaisissabilité du mobilier, le paiement à terme échu et la taxation des loyers. Le 13 décembre 1911, il organisait le déménagement public de son propre logement, 52 rue de Dantzig, menacé de saisie. Après que sa concierge ait appelé la police, il se barricadait chez lui et déployait à la fenêtre un drapeau rouge et la banderolle « Respectueux de la loi violée par la police au service du propriétaire, je ne sortirai que contraint par la force ». Assiégé par la police, ravitaillé par les voisins pendant cinq jours, il faisait constater la violation de son domicile par huissier et obtenait une première victoire, le tribunal des référés ordonnant la levée du siège policier. Le 7 janvier 1912, il enchainait aussitôt avec une action de relogement d’une famille et de leur huit enfants dans le jardin des Tuileries  où des compagnons du syndicat des charpentiers avaient assemblé en quelques minutes une baraque de fortune. Cette action entrainera le vote par le conseil municipal de Paris d’un emprunt de 200 millions pour la construction de logements économiques.

Il avait eu l’idée de créer une fanfare, le fameux « raffût de Saint-Polycarpe » : « Les pauvres gens qui ne pouvaient payer leur loyer et étaient menacés d’expulsion étaient déménagés — par la porte ou par la fenêtre —, les compagnons entassaient le mobilier dans des charrettes à bras, et, aux accents d’une fanfare hétéroclite, tandis que des compagnons secouaient à tour de bras une énorme cloche de bois, les commandos de Georges Cochon partaient gaiement à l’assaut des logements vides ». (May Picqueray, Le Réfractaire, mars 1979). Le chansonnier libertaire Charles d’Avray avait composé pour ces occasions  la chanson  La marche des locataires.

C’est ainsi que par l’action directe et en fanfare, il n’allait cesser d’investir logements libres et lieux publics dont : le 10 février 1912 la cour de la préfecture de police, en mars la cour de la Chambre des députés, le 12 avril 1913 avec plusieurs milliers de sans-logis l’Hôtel de ville, puis le 24 prenait d’assaut l’église de la Madeleine. Ces actions étaient bientôt suivies par l’occupation de la  caserne du Chateau d’eau pour y loger 50 familles et leurs  enfants et en juillet 1913 l’occupation boulevard Lannes de l’hôtel particulier de La Vérone avec la complicité de leur occupant, le  Comte de La Rochefoucauld, et où étaient relogées huit familles et trente six enfants.

En 1912 G. Cochon collaborait au journal anarchiste bruxellois Le Combat Social (n°1, 2 avril à n°3, 2è quinzaine d’avril 1912) où avec Georges Schmickrath et Léon de Wreker il alimentait la rubrique « Sus aux vautours » contre les propriétaires. Toutefois , en 1912, une scission se produisait dans l’union syndicale des locataires, G. Cochon s’étant présenté aux élections municipales dans le quartier du Père Lachaise, il était exclu de l’Union et créait alors la Fédération des locataires.

En 1913 il fit plusieurs conférences en province, notemment à Marseille en août où, après une imposante manifestation dans les rues de la ville, il réunissait plus de 4000 auditeurs au Palais de Cristal.

Au début de la guerre, Cochon fut mobilisé au 29e régiment d’infanterie territoriale et participa à la bataille de la Marne, puis, en janvier 1915, il fut détaché aux établissements Renault à Billancourt (Seine). Renvoyé à son dépôt, il déserta le 16 février 1917. Arrêté en août, il fut condamné, le 17 décembre suivant, par un conseil de guerre, à trois ans de travaux publics. Selon A. Kriegel, op. cit., il aurait publié pendant la guerre, à Maintenon (Eure-et-Loir), à une date non précisée (1917) , un journal,  Le Raffût , dont la parution fut sans doute éphémère. Une nouvelle série (année IV) allait paraître à Paris du 13 novembre 1920 au 30 décembre 1922 (92 n°), date à laquelle le siège du journal et du syndicat des locataires était transféré 189 faubourg Poisonnière dans le 9è arrondissement.

Pendant la guerre, l’Union fédérale des locataires était devenue l’Union confédérale des locataires (UCL) dont l’emblème était deux mains qui se serrent, L’Union par la force. L’UCL deviendra en 1946 la Confédération nationale des locataires (CNL) proche du Parti communiste. G. Cochon participait encore au mouvement des Locataires en 1925-1926. Ses activités le firent comparaître devant le tribunal de simple police de Paris le 21 avril 1926.

Retiré avec sa compagne Tounetteà Pierres, une commune limitrophe de Maintenon (Eure-et-Loire) , il vint à Paris, dans les années cinquante, pour évoquer ses souvenirs dans l’émission de J. Mollion « Les rêves perdus ». À cette occasion Louis Lecoin, May Picqueray réunirent autour de lui quelques vieux militants libertaires. G. Cochon est mort le 25 avril 1959, dans sa maison de la rue des grandes Cours à Pierres.

Son fils avait repris le flambeau et dans les années 1970 était encore actif dans un syndicat de locataires.

OEUVRE : Ses Mémoires ou le raffût de Saint-Polycarpe, par Casimir Lecomte (le journaliste André Wurmser), ont paru dans L’Humanité à partir du 17 novembre 1935. G. Cochon avait également été l’auteur du petit traité « 39 manières de faire râler son concierge ».

Un grand nombre de chansons concernant Cochon et la lutte des locataires ont été recensées dont : La Cochonette, Donnez des logements, Papa Cochon, C’est Cochon, V’la Cochon qui déménage de Montehus, Le chant des locataires de Robert Lanoff et La marche des locataires de Charles d’Avray.

R. Bianco a recensé d’autre part plus de trente cartes postales émises par la fédération des locataires et représentant Cochon et ses diverses actions.

Dictionnaire des militants anarchistes

[Poitiers] Grève à la plateforme industrielle courrier

Grève à la plateforme du courrier de Poitiers-Auxances

Le syndicat CGT de la FAPT (Fédération des activités postales et de télécommunications) de la Vienne, FO, Sud et CFDT, ont déposé un préavis de grève de 24 heures pour ce jeudi concernant les personnels de la plateforme industrielle courrier -Pic) de Poitiers-Auxances. Un rassemblement est organisé ce matin devant l’établissement. Ce préavis s’inscrit dans la démarche nationale de l’intersyndicale CGT, Sud, FO, CFDT, CGC, UNSA, CFTC de La Poste.

« En vue d’adapter les régimes de travail des personnels aux flux d’approvisionnement du courrier, les dirigeants de la Pic ont dénoncé l’accord de 2009 sur les régimes de travail signé par le syndicat CGT majoritaire », explique le représentant du syndicat départemental Didier Ferron. « Les propositions de la direction visent à organiser le travail à partir d’horaires atypiques, au risque de dégrader les conditions de travail et d’accentuer un mal vivre au travail », ajoute-t-il. Dans une déclaration commune les organisations syndicales ont rappelé que « l’amélioration des conditions de vie et de travail des postiers et du service public postal passe avant tout par l’arrêt ou le gel des restructurations, des réorganisations, de la destruction de l’emploi… ».

Centre Presse, 12 avril 2012

[Poitiers] Les élèves, variable d’ajustement du Rectorat

La mise en réseau de trois lycées contestée

Un projet de mise réseau des effectifs des classes de première et de terminale de trois lycées poitevins inquiète parents, enseignants et élèves. Explications.

A défaut d’être confidentielle, l’information reste très discrète. « Cette mise en réseau est tout juste évoquée à mots couverts », expliquait hier soir cette représentante de parents d’élèves. Et c’est bien ce déficit d’information (*) que le comité local FCPE du lycée Camille-Guérin comptait combler hier soir lors d’un point presse commun avec des enseignants FSU et des élèves des trois établissements concernés.

Les élèves, variable d’ajustement

Selon les délégués FSU, « supprimer une cinquantaine de postes d’enseignants dans les lycées pour la rentrée prochaine est l’objectif à atteindre dans l’académie. Le rectorat a pour consigne de prendre des mesures en faisant preuve d’imagination. » Et c’est « une mise en réseau essentiellement comptable » que contestent les représentants FCPE. « A Poitiers, le rectorat envisage de cumuler les effectifs d’élèves entre les lycées de Camille-Guérin, du Bois d’Amour et de Victor-Hugo pour réduire le nombre de classes et celui des enseignants, indique la FCPE, les élèves deviennent une variable d’ajustement entre trois établissements qui perdent chacun une classe en première et une en terminale. » Toute l’inquiétude des parents d’élèves et des représentants des élèves des trois établissements concernés est bien là : le projet produit l’équivalent d’une population de six classes à segmenter et à redistribuer pour conforter les prévisions globales. La perspective d’un changement de lycée à la fin de la seconde ou de la première pour bon nombre élèves en fonction des places disponibles pose de nombreux problèmes. « Nous n’avons aucune idée des critères pour faire déménager les lycéens », a expliqué en outre la FCPE. Les élèves concernés risquent de surcroît de se heurter à des problèmes de conditions de transports dégradées, voire d’hébergement. « Il était important pour nous d’alerter la population sur ce projet avant les vacances et les élections. Nous avons rendez-vous avec Alain Claeys sur le sujet avant la fin du mois. »

(*) Les différentes demandes d’explications de la rédaction au sujet de ce projet académique auprès du Rectorat sont restées hier sans réponse.

Nouvelle République, Dominique Bordier, 12 avril 2012

[Poitiers] Conférence de presse sur la question du logement

Le maire de Poitiers a déclaré sur France 3 suite à l’expulsion brutale et sans préavis du campement de sans logis et mal logés devant Notre Dame « ce matin restaient des sans-domicile fixe, la police les a délogés de cet emplacement, voilà. Je crois que c’était normal, il n’y a pas de manque de logement pour ces personnes à Poitiers » (http://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=DInUCsTmQZw      ) “La municipalité estime qu’il y        aurait suffisamment de structures d’accueil à Poitiers pour        héberger toutes les personnes sans abris” France 3  http://www.youtube.com/watch?feature=player_embedded&v=qgs1hMNMSAY

Jean-Claude Servouze, le président de l’Entraide sociale poitevine a déclaré dans Centre Presse : « Le logement social [sic] n’est pas en tension sur la ville. Il y a des solutions pour chacun ». http://dal86.fr/2012/04/05/logement-social-il-y-a-des-solutions-pour-chacun-centre-presse-05042012/

De qui se moque-t-on ? Outre les confusions entretenues entre hébergement d’urgence, CHRS, logement social et logement, pour ce qui est de l’hébergement d’urgence, le 115 nous a avoué qu’il pouvait refuser jusqu’à 15 personnes le soir et cela fait plusieurs jours qu’on appelle et que c’est complet. Voir      http://youtu.be/5TwgYK3ksXk et pour ce qui est des CHRS, par exemple pour le foyer Carrefour, on nous a dit la semaine dernière qu’il y avait une liste d’attente, mardi dernier il a été refusé un hébergement à quelqu’un qui en attendait un (voir :      http://www.youtube.com/watch?v=Azg8RKtmyWo&feature=player_embedded ) et la personne du 115 a affirmé que « A Carrefour, ça fait au moins 3 semaines qu’il n’y a pas de place » Voir la fin de http://youtu.be/5TwgYK3ksXk      .

Afin d’éclaircir cette différence entre les déclarations de la municipalité et la réalité, nous vous invitons à une conférence de presse demain jeudi 12 avril à 11h30 place du Marché parvis de Notre Dame ou sous l’auvent des halles s’il pleut.

Collectif des sans logis ou mal logés de Poitiers ; DAL86

Mailing 11 avril 2012

« Réindustrialisons » : quand « Là-bas si j’y suis » défend le cancer français

« Réindustrialisons » : quand « Là-bas si j’y suis » défend le cancer français

En campagne pour Jean-Luc Mélenchon, l’émission Là-bas si j’y suis de Daniel Mermet sur France Inter diffusait, mercredi 4 et jeudi 5 avril 2012, un reportage de François Ruffin intitulé « Arkema et les vautours ». Où l’on apprend que le premier groupe chimique français s’apprête à céder, pour un euro symbolique, son « pôle vinylique » et les 2000 salariés qui vont avec, à un financier américain. Et François Ruffin d’accompagner les syndicalistes d’Arkema dans les QG de campagne des candidats à la présidentielle pour les « interpeller » sur ce scandale économique, et pour défendre l’idée en vogue dans cette campagne : la réindustrialisation de la France.

Pas un mot, durant ces deux émissions, sur l’activité du pôle vinylique d’Arkema et sur cette production qu’il s’agit de maintenir française. L’emploi n’a pas d’odeur, pas même celle du chlore qui sert à produire le chlorure de vinyle. Le chlorure de vinyle ? C’est un message, laissé sur le répondeur de l’émission ce jeudi 6 avril, qui renseigne l’auditoire :

« Merci à François Ruffin pour ce reportage intéressant, mais il me semble utile d’ajouter un complément d’information, pour préciser ce que fabrique le pôle vinylique d’Arkema. Celui-ci produit du chlorure de vinyle, connu par le grand public sous le nom de PVC. Le PVC est un produit classé cancérigène par l’Union européenne et par le Centre international de recherche sur le cancer. Il est notamment en cause dans l’apparition de cancers du foie. Il présente aussi des caractères mutagènes et reprotoxiques. Ceci concerne bien sûr les travailleurs des usines chimiques, dont beaucoup, en France ou aux Etats-Unis notamment, souffrent de cancer du foie, mais aussi tous ceux qui sont exposés à la pollution, entre autres par l’eau de boisson, à cause des déchets du PVC. On peut lire à ce sujet la note éditée par l’Ineris (Institut national de l’environnement industriel et des risques) sur le chlorure de vinyle.

Le PVC est souvent associé aux phtalates pour rendre le plastique souple – pour les jouets ou nombre de produits de consommation courante. Les phtalates sont cancérigènes, mutagènes et responsables d’anomalies de la reproduction masculine.

Enfin l’incinération du PVC génère des dioxines, qui rendent malades et tuent les voisins des incinérateurs, comme à Gilly-sur-Isère en Savoie, ou près de Besançon – y compris avec des incinérateurs de nouvelle génération. C’est cela, aussi, que défendent les salariés d’Arkema, et qui n’était pas mentionné dans le reportage. »

Ayant diffusé ce message à l’antenne, Daniel Mermet juge utile de le faire suivre d’un autre message d’auditeur qui vante, lui, « le savoir-faire et la dignité » de ces ouvriers menacés de délocalisation. Le producteur enchaîne sur « l’essentiel, l’essentiel (rire), qui est évidemment l’emploi et le chômage et la destruction de l’industrie dans ce pays, la désindustrialisation qui (…) est l’essentiel dans cette campagne ».

Bref, produisons des cancers français. Pour l’emploi, produisons du nucléaire français, des OGM français, des pesticides français, des nanotechnologies françaises. Ça tombe bien, Arkema est leader dans la fabrication des nanotubes de carbone, sous la marque GraphiStrength, avec son unité de production des Pyrénées-Atlantiques d’une capacité de 400 tonnes par an. Les nanotubes de carbone sont ces nanoparticules dont les effets sur les poumons rappellent ceux de l’amiante. Mais pour les syndicalistes comme pour les partisans du Front de Gauche et Là-bas si j’y suis, « l’essentiel, c’est l’emploi », autrement dit : « Nos emplois valent plus que nos vies ».

C’est ça, leur prétendue « planification écologique ». Quant à nous, libertaires et luddites, nous disons : brisons les machines à produire le cancer.

Pièces et main d’œuvre, Grenoble, le 6 avril 2012

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Défense du cancer français : séquelles

Vendredi 6 avril 2012, nous avons publié un texte intitulé « « Réindustrialisons » : quand « Là-bas si j’y suis » défend le cancer français ». Celui-ci pointait l’angle mort d’un reportage consacré à la cession du pôle vinylique d’Arkema à un « vautour » américain : l’absence de toute mention du caractère homicide de la production de ce pôle. Cette lacune étant évidemment liée aux positions politiques du producteur, du journaliste et des intervenants de cette émission, qu’on n’insultera pas en disant que, syndicalistes, militants du Front de gauche ou journalistes engagés, ils font actuellement la campagne présidentielle de Jean-Luc Mélenchon. On n’étonnera non plus personne – ni eux-mêmes – en rappelant que le Parti communiste, le Parti de gauche, la CGT et Là-bas si j’y suis soutiennent le parti de l’industrie et de l’emploi à tout prix.

De toutes les réactions suscitées par notre texte, nous avons choisi de répondre à celle qui nous paraissait la plus poignante et la plus instructive, celle peut-être qui permet pour une fois d’aller au vif du sujet. Ce message d’un syndicaliste ouvrier nous est parvenu indirectement, via une liste de discussion du Front de gauche. Nous préservons l’anonymat de son auteur.

« Aux libertaires et luddites qui écrivent « Mais pour les syndicalistes comme pour les partisans du Front de Gauche et Là-bas si j’y suis, « l’essentiel, c’est l’emploi », autrement dit : « Nos emplois valent plus que nos vies ».

Je suis syndicaliste CGT mais avant tout un homme et j’ai envie de vous hurler à la figure les 52 morts de la polymérisation du CVM (et pas du PVC soyez précis !!!), les dizaines de morts du rein et de la vessie, les morts de l’amiante de l’usine Atofina Brignoud

que ces camarades ont bien été assassinés non pas au nom de l’emploi mais au nom du seul profit capitaliste

vous hurler que les salariés qui sont en 1° ligne ne sont pas des kamikazes … ils ont été gazés par des patrons qui savaient le danger

vous hurler qu’une fibre d’amiante suffit qu’un seul ppm de gaz suffit pour donner la mort !!!

vous hurler que l’amiante comme la polymérisation du CVM tuent à retardement 30 à 40 ans après l’exposition

alors comment pouvez vous reprocher à ceux qui meurent aujourd’hui, 30 ans après leur exposition, d’avoir feint d’ignorer le danger afin de préserver leur emploi

Savez vous seulement libertaires et luddites notre impuissance non pas à sauver nos emplois mais notre combat

pour faire reconnaître nos expositions, classer nos sites, et que nos veuves et enfantsaient une juste compensation

connaissez vous seulement la peur qui plane sur nos têtes à chaque visite médicale

savez vous seulement la peur de l’annonce de la maladie (amiante ou cancer du foie), la peur de mourir asphixié (amiante), la peur de mourir en pourrissant de l’intérieur (angiosarcome du foie)

savez vous seulement, bien penseur de PMO ce qu’est mourir du cancer du CVM, de l’amiante et autres saloperies que nous avons respiré

savez vous seulement la gifle que nous ressentons lorsqu’un de nos camarades est touché ….le dernier…. Jacques …….est parti il y a 15 jours !!

Que connais tu de nos souffrances et de celles de nos familles devant notre agonie

à vous libertaires et luddites je dis faîtes vous connaître prenez une part active dans notre combat pour la vie et luttez pour que nos usines continuent à produire en préservant la santé de ses salariés et des populations environnantes

Nos vies comme les vôtres dépendent du succès de nos luttes actuelles

Aidez nous à briser les conditions de travail qui produisent les cancers

Aidez nous dans notre lutte devant le Tribunal Administratif de Grenoble pour qu’enfin le site d’AtofinaBrignoud soit classé Amiante

Aidez nous devant les tribunaux à chaque comparution de famille d’Atofina Brignoud réclamant justice ou bien Respectez nous !! »

Si ce message apporte une confirmation, c’est bien que le PVC (même nommé chlorure de vinyle monomère) tue. Il tue même plus encore que ce que nous avions écrit, à l’usine Atofina de Brignoud (aujourd’hui Arkema), dans la cuvette grenobloise. Il tue atrocement. Et il est aussi assassin que nombre de produits dont nous gratifient les 19 sites Seveso de l’agglomération, et l’industrie en général. Qu’elle soit chimique, nucléaire, automobile, agro-alimentaire ou électronique. Ces assassinats concluant d’ailleurs des existences entières privées de vie, dans l’enfermement de l’usine.

Aux chiffres que fournit notre interlocuteur concernant les travailleurs, il faut ajouter les morts invisibles, jamais additionnées, des riverains et de toutes les victimes d’un environnement empoisonné (eau, air, sols, alimentation). Ceux-là ne sont pas même payés, tout juste ont-ils la satisfaction de contribuer à l’augmentation du PIB et de la croissance.

Soyons précis, comme dit notre syndicaliste : on sait depuis 1906 que l’amiante est dangereuse. Celle-ci a été totalement interdite en France en 1996. Neuf décennies d’assassinat industriel. Les patrons n’étaient pas les seuls à savoir le danger. Si les ouvriers de 1906 l’ignoraient, ceux de 1976 et de 1986 le savaient. C’étaient « les risques du métier ». Comme la silicose des mineurs ou les cancers des intérimaires du nucléaire. Comme aujourd’hui la maladie de Parkinson des paysans qui continuent de répandre des pesticides. Qui défend le monstrueux chantier du TGV Lyon-Turin, avec ses millions de mètres cubes d’amiante et de poussières radioactives à extraire de la montagne, sinon la CGT ? Puisque c’est bon pour l’emploi.

Ce n’est pas le seul profit capitaliste qui a assassiné des générations d’ouvriers, mais la société industrielle, et le parti industriel – scientifiques, patrons, ouvriers et techniciens confondus. Un parti qui s’enkyste dans le déni, y compris face à la réalité la plus brutale. Voyez les travailleurs de Fessenheim applaudissant aux promesses de Sarkozy de prolonger leur centrale, un an après la catastrophe de Fukushima.

À toi, syndicaliste, nous disons : encore un effort dans le combat pour la vie. Vous, qui mourez en première ligne, encore un effort de cohérence pour tirer les conséquences de ce que vous savez. Le chlorure de vinyle tue ? Supprimons-le. Même communiste, autogéré, verdi, responsable, durable et citoyen, il n’y a pas de PVC propre et il ne peut pas y en avoir. Parce que nous sommes cohérents et que nous tirons des conséquences, nous refusons le PVC, quels que soient ses usages : le prix à payer est trop cher. Et ce qui vaut pour le PVC vaut pour toutes les saloperies industrielles et nuisibles.

Justement parce qu’on vous respecte, on trouve indigne de vous voir réclamer « une juste compensation » à ce qui n’a pas de prix, la vie d’un homme. Respectez-vous vous-mêmes.

Savez-vous seulement à quoi ont renoncé ceux qui depuis des décennies font la grève perpétuelle ? Ceux qui ont refusé de plier, d’entrer en usine ou au bureau, de prendre des crédits, de faire 2,1 enfants, d’acheter un pavillon, une bagnole, une télé, des téléphones portables, de revendiquer du « pouvoir d’achat ». Ceux que vous nommez « marginaux », qui subissent les diktats du parti industriel et qui tâchent, à la mesure de leur faiblesse et de leur imagination, de ménager le peu de vivant que vous n’avez pas encore détruit. Ceux que vous n’avez pas eu le cran d’imiter, parce que, tout de même, une vie entière volontairement sous le seuil de pauvreté, c’était pas votre choix.

Pour nous, luddites, il y a plus de décence à tâcher d’être maîtres de son existence et de son travail – quitte à vivre de peu – qu’à se soumettre à la machine destructrice et à mendier des conditions d’esclavage supportables. En fin de compte, une société luddite lèguerait aux fameuses « générations futures » une Terre en meilleur état que la société industrielle. Mais bien sûr, cela irait contre « le sens de l’Histoire ».

Pour finir, syndicaliste, tu es bien hardi de nous croire ignorants du cancer et de ses horreurs. Grâce à ton activité et à celle de tes collègues, c’est en réalité aujourd’hui l’une des choses du monde les mieux partagées.

Pièces et main d’oeuvre, Grenoble, le 10 avril 2012

Rectificatif – Après diffusion de ce texte, le syndicaliste cité nous informe qu’il s’est trompé en tapant le nombre de morts du CVM à Brignoud : il faut lire 32 morts et non 52.