Archives de catégorie : La rue grogne

[Poitiers] C’est fini pour les salarié-e-s du Printemps. Au maire : « Vous êtes le fossoyeur du commerce du centre-ville ! »

Poitiers : pour le Printemps le rideau est tombé

La “ veillée funèbre ” du Printemps a réuni une centaine de salariés et clients du magasin hier soir lorsque ses portes se sont fermées. Définitivement.

Le rideau de fer du Printemps vient de tomber. Les messages de soutien y affluent déjà.

 Le rideau de fer du Printemps vient de tomber. Les messages de soutien y affluent déjà. – (Photo Marie-Catherine Bernard)

Cette fois, c’est bien fini. Ce samedi soir, il n’est pas encore 19 heures lorsque les salariés, majoritairement des femmes, mais aussi les derniers clients du Printemps, sortent du magasin. On allume des bougies, des regards sont déjà embués. Sous la lumière des caméras, la foule s’épaissit peu à peu jusqu’à compter entre 100 et 150 personnes. Les salariés, bien sûr, des clients solidaires, mais aussi des retraités du Printemps venus soutenir leurs anciens collègues. Le maire, Alain Claeys, s’avance à son tour : « C’est mon devoir de maire d’être là ce soir. La mairie accompagne les salariés dans le cadre de la convention de revitalisation pour que leurs droits soient respectés… »

  «  On aurait pu fêter les 50 ans en 2015…  »

Un peu plus tard, des voix discordantes vont se faire entendre, agressant verbalement Alain Claeys : « Vous êtes le fossoyeur du commerce du centre-ville ! » lance un homme. Quelques personnes applaudissent, d’autres se scandalisent. « Ce n’est pas l’endroit pour ça, on est là pour le Printemps ! » Entourée de ses collègues, la secrétaire du comité d’entreprise, Chantal Choisy, prend la parole : « Le couperet est tombé le 17 mai, nous l’avons tous très mal vécu. Le Printemps a apporté une vie commerciale intense au centre-ville depuis 1965. Nous aurions pu fêter les 50 ans en 2015… » Elle dénonce la stratégie du groupe Borletti : « Depuis le rachat, tout est décidé par Paris, on a favorisé les grands magasins et laissé tomber les petits. Lorsque j’avais fait part début 2010 de mes inquiétudes au P-DG Paolo de Cesare, il m’avait répondu : «  Ayez confiance en l’avenir  »… » Chantal Choisy se tait. En pleurs, elle n’arrive plus à lire sa feuille.

Ses collègues la soutiennent : « Allez Chantal ! » Elle reprend : « On nous dit que Poitiers mettait le groupe en danger alors qu’il se gave de chiffres d’affaires… On nous a culpabilisés en ne faisant aucun investissement… » L’émotion est décuplée lorsqu’elle indique que les salariés sont ce soir « doublement effondrés après le décès brutal, mercredi dernier, de Pascal », un de leurs collègues… Évelyne, salariée du Printemps depuis 29 ans, arrive au bout de cette ultime journée de sa carrière professionnelle qu’elle redoutait tant : « Des clientes sont venues encore aujourd’hui pour nous dire au revoir, avec un petit mot gentil… Mais c’est vraiment dur… » Il est 19 heures et le rideau de fer du Printemps tombe pour une dernière fois. Une page de l’histoire du centre-ville de Poitiers vient de se tourner. Dans la douleur.

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Nouvelle République, Frédéric Delâge, 29 janvier 2012

Les données personnelles de 541 policiers de FO Police piratées par des Anonymous

Les données personnelles de 541 policiers piratées

Cela ressemble fortement à une vengeance. Après l’arrestation et la mise en examen vendredi de deux membres présumés du mouvement Anonymous et alors que des manifestations à l’appel des Anonymous ont lieu dans toute la France ce samedi, une mystérieuse liste, simplement intitulée «police», a fait son apparition sur un site internet de partage de dossiers. Cette liste révèle les noms, prénoms, adresses mail, mots de passe, téléphone portable et département d’affectation de 541 policiers en service… Facilement téléchargeable, elle a été «uploadée» le vendredi 27 janvier.

Selon nos informations, il s’agirait en fait d’une liste constituée à partir du fichier des adhérents du syndicat Unité-Police SGP-FO, le premier syndicat de gardiens de la paix. Le site internet de ce syndicat aurait en effet connu une attaque informatique vendredi matin. «Il y a eu des centaines de demandes d’information en même temps sur notre site, explique Nicolas Comte, secrétaire général de Unité-Police SGP-FO. Ces données, qui ne sont pas forcément très récentes ni mises à jour, sont celles de nos délégués ou de fonctionnaires abonnés à notre newsletter». 

Nicolas Comte poursuit son propos en précisant qu’«évidemment, nous allons renforcer la sécurité de notre site, même si nous savons très bien qu’ils sont très difficiles à contrer, étant donné les précédents sites, autrement plus sécurisés que le nôtre, qu’ils ont réussi à pirater». Le syndicat envisage également de déposer plainte et se demande pourquoi il a «été pris pour cible».

«En représaille aux basses méthodes de l’Etat, nous vous divulguons les informations confidentielles de 541 policiers»

Qui, donc, est derrière cette liste piratée ? Le site DataSecurityBreach.fr a mis en ligne samedi après-midi un message que des membres des Anonymous lui aurait fait parvenir, accompagné de cette fameuse liste de policiers: «À l’heure où nous écrivons ces mots, le monde sombre dans la censure. (…) Actuellement, Internet est une plate-forme mondiale pour le peuple et la liberté d’expression : il est inconcevable que cet outil soit muselé»

Pourquoi ce syndicat particulier ? Principalement pour l’exemple, semble-t-il: «Pour que vous compreniez l’importance de la vie privée et de la liberté, en représaille aux basses méthodes de l’Etat, nous vous divulguons les informations confidentielles de 541 policiers. Notez bien que ce n’est qu’une portion de ce que nous avons et que nous nous réservons le droit d’en diffuser un plus grand nombre», continue le communiqué.

Le site DataSecurityBreach.fr n’a pas souhaité diffuser le lien qui permet de télécharger cette liste. Ce samedi vers 17 heures, aucun site ne l’avait fait.
 
*Nous ne communiquerons pas le nom du site en question. Le fait de divulguer, proposer, mettre à disposition ce type d’information est pénalement répréhensible.

 LeParisien.fr, Antonin Chilot et Stéphane Sellami, 28 janvier 2012

[Davos] 200 manifestant-e-s, 5.000 flics…

Quelque 200 manifestants à Davos prônent la résistance au capitalisme

Quelque 200 manifestants, cantonnés sur une petite place de la station alpine Suisse de Davos, loin du Centre de congrès où se déroule le Forum économique mondial (WEF), ont dénoncé samedi ce rendez-vous de la finance, prônant « la résistance à ceux qui veulent dominer Le Monde ».

« Ne les laissez pas décider pour vous ! », proclament les pancartes d’Occupy WEF dont les militants côtoient des syndicalistes, des écologistes, des membres d’associations altermondialistes et une poignée de jeunes radicaux masqués.

« Personne avec quatre as dans son jeu ne veut un changement », ironise Savino en ne croyant pas une seconde au slogan officiel du WEF, « The great transformation » (« Le grand changement »).

« Nous voulons un monde pour tous, un monde qui ne connaît pas la faim, où tout Le Monde bénéficie de la protection sociale », crie au micro Katharina Prelicz-Huber, présidente du Syndicat des services publics (SSP).

Des tracts circulent citant l’économiste Kenneth Boulding : « celui qui croit que la croissance exponentielle peut continuer pour toujours est soit un fou, soit un économiste ».

« Burn out WEF ! » (Brûlez le WEF), proclament ceux du Front révolutionnaire zurichois.

Un homme arborant un masque cadavérique aux dents bien aiguisés, couvert de dollars et portant une valise au nom d’une célèbre banque Suisse, jette parcimonieusement de la menue monnaie au public.

Le maire de Davos Hans-Pieter Michel est venu s’assurer que tout se passe dans le calme. Il n’hésite pas à faire reculer, tout seul au milieu de la rue, les jeunes gens masqués qui font mine de s’approcher des barrages de police solidement gardés bloquant l’avenue principale et paralysant la circulation des véhicules.

Le ministre australien du Commerce Craig Emerson, arrivé de ce fait en retard au Forum, aura ce commentaire : « Occupy WEF n’est pas encore totalement convaincu des bienfaits du libre-échange ».

Les manifestants n’ont pas été autorisés à se déplacer dans la station et resteront à plusieurs centaines de mètres du massif palais de béton brut qui abrite le Forum, dont l’enceinte est entièrement protégée par moult barrières, grillages et quelque 5.000 policiers ou militaires. Seuls les participants au Forum, dûment badgés, peuvent y pénétrer après les contrôles électroniques d’usage.

 

Le maire explique à l’AFP que depuis 2003, date de son élection, il autorise les manifestants venus pour la plupart de Zurich à atteindre la station. Auparavant, pendant le Forum, ils restaient bloqués dans la vallée et des incidents très violents éclataient au contact des forces de l’ordre.

Dans la manifestation, ce samedi, personne ne semble avoir entendu parler de l’arrestation dans la matinée de trois militantes du mouvement protestataire ukrainien Femen qui se sont partiellement dénudées tout près du Centre des congrès pour dénoncer les « gangsters » du Forum économique mondial.

AFP, 28 janvier 2012

[Davos] Femen contre le forum économique mondial

Les militantes aux seins nus de Femen dénoncent les « gangsters » de Davos

Des militantes du mouvement ukrainien Femen, dont les membres ont acquis leur notoriété en défilant les seins nus, ont brièvement manifesté samedi à Davos, où elles ont protesté contre les « gangsters » du Forum économique mondial (WEF).

Les trois Ukrainiennes sont arrivées habillées à l’entrée du WEF et ont dénudé leur buste devant le poste de contrôle, a constaté un photographe de l’AFP.

Ne portant que des jeans, elles ont ensuite brandi des pancartes avec les inscriptions « la crise est faite à Davos ! » et « Pauvres à cause de vous ! ».

Les jeunes femmes avaient également peint des slogans sur leurs corps, sur lesquels on pouvait lire « la fête des gangsters de Davos ».

Après avoir escaladé les grillages, elles ont été arrêtées par les forces de l’ordre.

Femen, qui revendique 300 militantes à Kiev, est devenu en trois ans un phénomène en Ukraine, mais aussi à l’étranger.

A moitié déshabillées ou en tenues légères, les membres du mouvement multiplient les actions publiques pour dénoncer la prostitution, le tourisme sexuel ou le harcèlement dont sont victimes les jeunes femmes en Ukraine et ailleurs dans le monde.

Les militantes de Femen s’étaient déjà rendues fin octobre 2011 en Suisse pour une tournée européenne, qui les a notamment conduites devant le domicile parisien de l’ex-directeur général du FMI, Dominique Strauss-Kahn, et sur la Place Saint-Pierre au Vatican où une des militantes s’était partiellement dévêtue juste après l’Angélus du pape.

AFP, 28 janvier 2012

[Tunisie] Manif contre les salafistes

Tunisie: des milliers de manifestants pour dénoncer la pression salafiste

Des filles à qui l’on « conseille » de porter le foulard, des jeunes refoulés d’une mosquée, des enseignants anxieux de voir débarquer à leur cours une étudiante en niqab… Ils ont manifesté samedi à Tunis leur inquiétude face à des incidents qui ont selon eux tendance à se multiplier.

Ce sont deux petites dames aux cheveux blancs, souriantes, agitant avec énergie leur drapeau tunisien: Sarah Moalla et Oum Kalthoum Bradai, retraitées. Elles sont venues participer au défilé pour « la défense des libertés » organisé par des partis de gauche et des associations.

« On était enseignantes, on a passé notre vie à éduquer. Et aujourd’hui certains veulent nous ramener 14 siècles en arrière ? », dit l’une des deux septuagénaires. « Les salafistes sont bouchés, ils ne comprennent rien », renchérit son amie.

La marche a été organisée après une série d’incidents violents impliquant des radicaux de cette mouvance, très minoritaire en Tunisie, mais qui ne cesse de faire parler d’elle depuis la victoire des islamistes d’Ennahda aux élections.

Dans des universités, où les partisans du port du niqab (voile islamique intégral) font pression, jusqu’à entraîner la fermeture d’une fac. Devant la justice, où ils vouent aux gémonies une chaîne de télévision accusée d’avoir diffusé un film blasphématoire. Dans des manifestations, où des Journalistes et militants ont été pris à partie, voire molestés.

Mais au-delà de ces incidents spectaculaires, les enseignants, les étudiantes, les artistes venus manifester évoquent des pressions insidieuses, des événements anecdotiques mais qui se répètent trop souvent à leur goût.

« L’épicier m’a dit l’autre jour: vous ne me plaisez pas avec votre jean. Je lui ai rétorqué qu’il ne me plaisait pas avec sa barbe », raconte Leila Katech, une anesthésiste à la retraite, qui « en a assez de voir la religion devenir la seule référence ».

A travers ce prisme, « tout devient un problème: aller voir un gynécologue, parler, s’habiller », déplore-t-elle.

A quelques mètres, deux jeunes femmes s’époumonnent: « La Tunisie est libre, non aux esprits arriérés! » « Ce n’est pas parce qu’on est musulman qu’on est islamiste. J’en ai assez que l’Islam soit utilisé contre nous », explique Nadia, une jeune cadre voilée.

Rym, elle, est en cheveux, malgré son père, qui voudrait qu’elle se couvre. « Les barbus essayent de tout contrôler », dit la jeune femme, qui a eu une altercation récente avec des salafistes alors qu’elle voulait montrer à des amis touristes une mosquée de la médina de Tunis.

Les enseignants sont venus en nombre. Aslam Jelouli, professeur à la faculté des Sciences de Tunis, s’angoisse à l’idée qu’une étudiante revêtue du niqab Vienne un jour à son cours.

« Regardez ce qui s’est passé à la Manouba » (une fac de Lettres près de Tunis perturbée pendant deux mois par des étudiants et salafistes voulant imposer le port du niqab en cours).

« Le gouvernement n’a rien fait, il a tenté de ménager la chèvre et le chou, mais ce n’est pas possible, on va finir par se faire manger », s’énerve-t-il.

Tiraillé entre ses propres faucons et ses Colombes, soucieux de ne pas s’aliéner la partie radicale de sa base, le parti islamiste Ennahda, qui domine le gouvernement tunisien, a réagi timidement aux incidents, voire est resté silencieux.

« Ce gouvernement n’est pas complice, mais il est complaisant, à tout le moins », dénonce le fondateur du Parti Démocrate Progressiste (PDP), Ahmed Nejib Chebbi, présent à la manifestation.

« Aujourd’hui le poids des salafistes ne m’inquiète pas mais le phénomène peut se développer à la faveur de la crise sociale et de l’instabilité », met-il en garde.

« Ils peuvent devenir une menace réelle si on ne les arrête pas », estime de son côté le juriste Yadh Ben Achour, tandis que la chef du PDP, Maya Jribi, dit faire confiance au peuple tunisien, « profondément modéré et tolérant ».

AFP, 28 janvier 2012