Feu vert définitif à l’encadrement de type militaire des mineurs délinquants
Le Parlement a adopté jeudi le texte du député UMP Eric Ciotti instaurant un encadrement de type militaire des mineurs délinquants qui sera lancé dès le mois de février, une loi que l’opposition juge « superflue » et taxe « d’affichage ».
Une voie « nouvelle entre la rue et la prison ». C’est ainsi qu’Eric Ciotti, chargé de la sécurité à l’UMP, a défendu à l’Assemblée son texte, directement inspiré d’un rapport qu’il avait remis au chef de l’Etat avant l’été sur l’éxécution des peines pénales.
Par un ultime vote, les députés ont donc adopté jeudi le texte que le Sénat avait rejeté, le rendant définitif. Les mineurs de plus de 16 ans, s’ils l’acceptent, pourront faire un service « citoyen », d’une durée de 6 à 12 mois au sein d’un Etablissement public d’insertion de la Défense (Epide).
Pour le garde des Sceaux, Michel Mercier, cette mesure va permettre « d’enrichir la palette des réponses à la délinquance des mineurs » et « renforcer les moyens de lutte contre la récidive ».
Il a précisé que « dès février, l’accueil pourra débuter dans 12 centres et sera progressivement étendu à trois autres établissements » à l’horizon de juin. Il a évoqué « un séjour moyen de 10 mois » et promis « des moyens renforcés » pour les Epide, ces établissements qui accueillent déjà depuis 2005 des majeurs au titre du dispositif « Défense deuxième chance ».
Le choix des Epide a en effet fait grincer des dents dans les milieux proches des militaires, comme en a témoigné le rejet du texte par la commission de la Défense de l’Assemblée, dans un mouvement d’humeur inédit depuis dix ans.
Mais, pour M. Ciotti, il n’y a aucune inquiétude. La « démarche a été construite avec les Epide et non contre les Epide comme la gauche a voulu le faire croire », a-t-il affirmé. « Les Epide sont très motivés », a-t-il insisté.
Aucun député du Nouveau Centre, dont certains s’étaient interrogés sur ce texte lors des lectures précédentes, ne s’est exprimé jeudi.
L’opposition a continué de dénoncer un texte qu’elle considère comme « une énième loi d’affichage ». Pour Marc Dolez (Parti de Gauche), il est même « inutile » et « dangereux ». Marietta Karamanli (PS) l’a taxé de « superflu », d' »inutile » et de loi qui « se veut spectaculaire ».
Le Sénat, à nouvelle majorité de gauche, a rejeté ce texte au cours de la navette parlementaire, mais l’Assemblée a le dernier mot. Jacques-Alain Bénisti UMP) a d’ailleurs qualifié d' »irresponsable » l’attitude des sénateurs.
Plusieurs syndicats du monde judiciaire (Syndicat de la Magistrature, le Syndicat des avocats de France, la CGT de la Protection judiciaire de la jeunesse, SNPES et FSU, l’Association française des magistrats etc) ont aussi marqué leur opposition.
Ce texte comprend aussi une modification de la justice des mineurs, pour se conformer à une récente décision du Conseil constitutionnel.
Ce sujet de la délinquance des mineurs va vite revenir sur le devant de la scène. L’Assemblée examinera en effet début janvier un projet de loi sur l’exécution des peines créant 20.000 places de prisons supplémentaires et comprenant des mesures relatives aux mineurs, à l’évaluation de la dangerosité et à la récidive.
La présentation de ce projet, le 23 novembre en conseil des ministres, avait pris un relief particulier, une semaine après l’émoi suscité par le meurtre en Haute-Loire d’Agnès, avoué par un lycéen déjà poursuivi pour un viol en 2010.
AFP, 15 décembre 2011