Quinze prisons françaises étaient touchées, mardi 14 août, par des grèves de la faim ou « refus de plateau » de détenus membres du groupe armé basque ETA, en solidarité avec un prisonnier en Espagne qui réclame sa libération conditionnelle pour raisons de santé, selon l’administration pénitentiaire.
Selon Gabi Mouesca, porte-parole d’Herrira – un mouvement né en février en Espagne et en France pour la libération des prisonniers politiques basques et le retour des réfugiés dans le cadre du processus de paix –, « quatre-vingt-onze prisonniers basques étaient mobilisés lundi dans vingt-trois prisons françaises ».
Le mouvement a commencé la semaine dernière dans des prisons d’Espagne et de France. Les détenus veulent montrer leur solidarité avec Iosu Uribetxeberria, condamné en 1998 à trente-deux ans de prison pour l’enlèvement d’un fonctionnaire pénitentiaire espagnol, qui avait été retenu en otage pendant cinq cent trente-deux jours. Iosu Uribetxeberria, qui est détenu en Espagne et souffre d’un cancer, a entamé une grève de la faim mercredi pour obtenir une libération conditionnelle « en raison de la gravité de son état », selon Herrira.
SITUATION DE FIN DE VIE
Le mouvement de détenus revendique désormais la remise en liberté de quatorze prisonniers incarcérés en Espagne dont le pronostic vital est engagé. « Nous ne demandons que l’application de la loi. Les textes pour gérer ce genre de situation de fin de vie existent en droit français, en droit espagnol et en droit européen. Ils prévoient la libération des prisonniers dont le processus vital est engagé et dont les conditions de détention sont incompatibles avec leur état de santé », ajoute M. Mouesca, un ancien membre d’Iparretarrak, emprisonné pendant dix-sept ans pour activités terroristes au Pays basque français, et président de 2004 à 2009 de l’Observatoire international des prisons (OIP).
Colette Capdevielle, député (PS) des Pyrénées-Atlantiques et membre de la commission des lois à l’Assemblée nationale, a indiqué qu’elle entendait « demander des explications aux autorités espagnoles sur la situation de ce détenu. (…) Il faut qu’il y ait une juste proportion entre la maladie et la détention à partir du moment où il n’y a pas de risque de trouble à l’ordre public », a ajouté cette avocate de profession.
Frédérique Espagnac, sénatrice (PS) des Pyrénées-Atlantiques, a quant à elle déclaré qu’en tant que participante aux discussions d’Aiete – conférence internationale d’octobre 2011 pour une résolution de paix au Pays basque –, elle demande « que soit prise en compte la situation de Iosu Uribetxebarria ».
LES AMNISTIES, CONDITIONS DU DÉSARMEMENT
Des rassemblements à l’appel d’Herrira se tiendront mercredi en milieu de journée à Saint-Jean-Pied-de-Port (Pyrénées-Atlantiques) et à Saint-Sébastien (Espagne), auxquels doivent participer des députés français et espagnols.
Euskadi Ta Askatasuna (ETA, « Pays basque et liberté » en basque) avait annoncé le 20 octobre 2011 qu’il mettait fin définitivement à la violence. Mais il fait de l’amnistie pour les prisonniers la condition d’un éventuel calendrier de désarmement, qu’il se refuse à envisager pour le moment. Les gouvernements espagnol et français, au contraire, réclament la dissolution sans conditions du groupe.
ETA est tenu pour responsable de la mort de huit cent vingt-neuf personnes, durant plus de quarante années de lutte armée pour l’indépendance du Pays basque et de la Navarre.
Presse carcérale (lemonde.fr), 14 août 2012