L’homophobie ordinaire de certains maires de la Vienne

NdPN : « Veux-tu être ma propriété privée ? » On peut bien entendu critiquer l’institution du mariage, tout comme dénoncer l’illusion du droit de vote en pseudo-démocratie, ou dénoncer les devoirs et interdits issus des religions, frappant invariablement les femmes… Ces institutions relèvent en effet d’une idéologie de soumission. Cela n’empêche pas de voir dans des luttes, certes réformistes, pour l’égalité des droits (mariage des homosexuels, droit de vote des étrangers, fin des discriminations étatiques à l’encontre des musulmans et notamment des femmes voilées) des dynamiques ouvrant des perspectives pour aller plus loin dans le combat contre les inégalités, et tout ce qui tente de les légitimer. Ce point de vue se confirme quand on lit la réaction de certains maires de la Vienne, sur leur future obligation à marier des gays et lesbiennes… ils le feront, mais uniquement par obéissance à l’Etat, et non sans déverser de petites tirades homophobes ! (voir les passages en gras dans l’article ci-dessous). Alors, en attendant d’abolir le mariage et de construire une autre vision de l’amour, nous sommes pour le droit des homos à se marier comme les hétéros. De même que nous sommes pour le droit de vote aux étrangers et contre les lois répressives et discriminatoires  d’Etat visant à condamner le port du voile. C’est aux premiers concernés eux-mêmes qu’il revient s’ils le décident de s’émanciper du mariage, de la pseudo-démocratie et des oppressions religieuses, et pour cela, encore faut-il qu’ils gagnent la liberté de pouvoir le faire !

Mariage homosexuel : les maires seront légalistes

Si la loi autorise prochainement le mariage homosexuel, les maires  de la Vienne devront évidemment l’appliquer. Sont-ils prêts ?

Le projet de loi sur le mariage pour tous sera présenté en Conseil des ministres le 24 octobre. Nous avons interrogé plusieurs maires de la Vienne (*) pour connaître leur sentiment en cas de légalisation du mariage homosexuel. « Je suis contre, assure Jean Bibault à Magné. Mais si c’est voté, je les marierai. J’ai déjà fait des baptêmes républicains, même si ça ne me plaît pas. » La perspective n’enchante pas non plus Brigitte de Larochelambert, à Liniers, dont « la conscience de catholique » est opposée à l’union de deux personnes du même sexe. « Je ne vous dis pas que ça me fera plaisir, mais j’appliquerai la loi évidemment, précise-t-elle. Mais je demanderai d’abord à mes adjoints s’ils veulent le faire à ma place. C’est déjà ce que je fais pour les baptêmes républicains, parce que ça ne correspond pas au sens que je donne au mot baptême. »

«  Je ne vous dis pas que ça me fera plaisir  »

A Champigny-le-Sec, Robert Leduc appliquera la loi « d’accord ou pas », sans état d’âme mais avec le sens de la formule en plus : « On n’aime pas forcément rouler en dessous de 90 km/h, mais on le fait quand même, non ? » « Pas de problème métaphysique sur le sujet », pour Dominique Grémiaux, maire de Beaumont qui se dit « attaché à la liberté individuelle ». « J’ai l’habitude de faire 95 % des mariages de la commune, explique-t-il. Ça ne changerait pas avec une loi sur le mariage homosexuel, qui serait un acte d’état civil générateur de droits. » Même chose pour Claude Foucher, à Sainte-Radegonde : « S’il y a une loi, pourquoi pas ? » « Il va falloir que je m’y habitue, mais je ne me débinerai pas si la loi passe, assure Joël Bizard, à Marigny-Brizay. C’est difficile de se faire une idée sur le sujet, on est tributaire de son éducation chrétienne. » Le maire de Montmorillon, Yves Bouloux, ne cache pas que « ça fera un drôle d’effet » et confirme que quelques-uns de ses collègues lui « ont avoué leur gêne » face à cette éventualité. « Je peux comprendre les cas de conscience, mais la société bouge et c’est difficile de stopper le mouvement. » Le dernier mot est pour le maire d’Antran, Alain Pichon pour qui la loi ne poserait pas de souci : « Le mariage est une institution, mais il faut savoir évoluer sur les questions de société. C’est pour ça que c’est aux parlementaires de prendre la décision, après un débat ouvert. »

(*) Un seul maire nous a demandé de lui assurer l’anonymat, après s’être dit favorable au mariage gay, « parce qu’il y a des religieuses dans ma commune ».

Nouvelle République, Philippe Bonnet, 10 octobre 2012