[Notre-Dame des Landes] Infos du dimanche 4 novembre.

NdPN : Un article sur la situation relativement calme du week-end, et un vieil article de Sud-Ouest donnant l’avis de pilotes sur le projet de deuxième aéroport.

Les forces de l’ordre abandonnent NDDL pour le week-end

Pour tout le week-end, la préfecture a décidé de stopper les opérations d’expulsion sur la ZAD, l’aire prévue pour le projet aéroportuaire à Notre-Dame des Landes. Une trêve bienvenue après l’intervention policière hier au Tertre, dans une atmosphère très tendue.  Officiellement, il s’agit de préserver la sécurité des intervenants sur le site, tant des forces de l’ordre que des agents administratifs et des sociétés qui déblaient les routes ou assurent les démolitions. Explication pour masquer un flottement politique ou préparer une opération surprise? L’avenir seul nous le dira.

En fait, les forces de l’ordre sont tombées sur un os. Ou plutôt des arbres. Les militants ont pris l’habitude, pour retarder la progression des forces de l’ordre, d’abattre des arbres sur les bordures de la D 281 (route des Ardilières à la Paquelais) et de la D81 (route des Ardilières à Vigneux, au centre de la ZAD), barrant ainsi ces routes.  Chaque fois que cela se produit, la Préfecture fait appel aux services du Conseil Général, qui déblaient les voies. Puis de nouveaux arbres sont abattus, ou des barricades érigées, et ça recommence indéfiniment.

La démesure de l’évacuation de la ZAD fait réagir

Or, hier, les agents de la DDE sont intervenus dans une atmosphère hyper-tendue, à plusieurs reprises dans la journée. Un des agents aurait, d’après la préfecture de Loire-Atlantique, reçu un projectile. « Les agents ont donc demandé à leur hiérarchie de lever le pied, en faisant valoir leur droit de retrait, et d’espacer leurs interventions. En accord avec les services du Conseil Général, nous avons décidé de ne pas dégager les routes D81 et D281 ce week-end. Elles le seront à nouveau à la reprise des opérations d’évacuation des lieux occupés illégalement lundi. », nous explique Patrick Lapouze, directeur du cabinet du Préfet de Loire-Atlantique.  Par conséquent, « si les routes sont barrées, ce ne sera pas le fait des forces de police, mais des opposants ». En semaine, à partir de cinq à sept heures du matin, le périmètre de la ZAD est entièrement bouclé à l’extérieur, pour les grands axes, par la police.

Cependant, si une occupation illégale est constatée dans le week-end, les forces de l’ordre se fraieront un passage pour « faire cesser le trouble et rétablir la légalité républicaine », déclare P. Lapouze. Une occupation illégale… comme hier au Tertre, maison dont la destruction prévue pour le 15 novembre a été avancée par le Préfet sur le conseil de P. Lapouze « pour éviter de mettre en danger les gendarmes et les opposants », les forces de l’ordre étant intervenues deux fois sur le site au cours de la journée.

Sept interpellations ont été faites dans la soirée d’hier, pendant la démolition du Tertre. Quatre personnes ont été relâchées vers 23h30 par la gendarmerie de Blain, une un quart d’heure plus tard au même endroit. Un a été libéré par Blain ce matin et un dernier, transféré à St Nicolas de Redon, est ressorti libre et exempté de poursuites à midi. Les autorités tant civiles (préfecture) que judiciaire tiennent à calmer le jeu : moins il y a de tension autour de NDDL et moins il y a de couverture médiatique, et plus cela sert les expulsions.

Malgré les affirmations de la préfecture, un trouble s’installe. Cette trêve semble arrachée aux forces de l’ordre par l’obstination des opposants à l’aéroport et pourrait dénoter un flottement politique de la part d’Ayraultbespierre. La démesure de l’opération de l’évacuation de Notre-Dame des Landes apparaît de plus en plus crûment dans les médias nationaux et locaux, qui, les uns après les autres, rompent le black-out et se saisissent de l’affaire Notre-Dame des Landes, dans un contexte général très défavorable au gouvernement.

La Préfecture dément toute hésitation. Imperturbable, Patrick Lapouze déclare d’un ton décidé « nous interviendrons partout où il faudra rétablir la légalité, faire appliquer les décisions du peuple français, notamment de faire l’aéroport ». Et même si cela prendra des mois ? « Nous prendrons le temps qu’il faut et userons de tous les moyens légaux sans exception pour mettre fin aux occupations ». Une belle détermination qui risque de prendre fin à la première grosse bavure. En attendant, pendant deux jours, les salamandres peuvent bronzer tranquilles. Le troisième aéroport de Paris prend du retard, mais Notre-Dame des Landes plage, c’est maintenant.

Breizh journal, 3 novembre 2012

Des pilotes : un nouvel aéroport pour quoi faire ?

Entretien

Ces deux commandants de bord appartiennent à une compagnie aérienne basée à Nantes. L’un d’eux est représentant du personnel. Ils ont souhaité garder l’anonymat.

Que pensent les pilotes du projet d’aéroport à deux pistes parallèles envisagé à Notre-Dame-des-Landes, au nord de Nantes ?

Ça ricane. On se moque des hommes politiques décidés à construire un projet pharaonique, un grand aéroport de l’Ouest à quatre millions de passagers, dans un contexte où, au mieux, hors crise, le trafic en Europe ne progresse que de 1 %. Contrairement à l’Asie, qui fait des scores à 5 % et plus.

Pourquoi ces moqueries ?

Parce qu’à Londres-Gatwick, le dixième aéroport du monde, qui accueille 34 millions de voyageurs, il n’y a qu’une piste, comme à Nantes, où on n’en a que 2,7 millions. Et ne parlons pas de Genève, où l’on n’a qu’une piste et du relief autour.

Que répondez-vous à ceux qui avancent le danger du survol de Nantes ?

Pourquoi cet argument aujourd’hui, alors qu’on survole Nantes depuis trente ans sans incident, hormis cette histoire de charter perdu (1) ? Lorsqu’on se pose à Londres, on longe la Tamise. On survole aussi Amsterdam, Paris, Toulouse…

Construire un nouvel aéroport, c’est quand même diminuer les risques, non ?

Si on veut dépenser des sommes folles pour cette seule raison du survol de Nantes, alors c’est légitime, car on ne peut, pour l’instant (mais la technique évolue vite), éviter la ville avant l’atterrissage.

Nous nous posons toutefois des questions : pourquoi ne nous permet-on pas de faire une approche à vue par beau temps ; ça éviterait de survoler toute la ville ? Pourquoi l’aéroport actuel ne s’est-il pas équipé d’un deuxième ILS, un instrument électronique très précis de navigation pour l’atterrissage, qui nous permettrait une approche de précision et une sécurité béton en survolant Nantes ?

Notre-Dame-des-Landes n’offre-t-il pas l’occasion de drainer une nouvelle clientèle dans l’Ouest et au-delà ?

Allons, ce n’est pas un nouvel aéroport qui nous donnera une liaison régulière Nantes-San Francisco ! On réduit la toile partout. Le trafic ne va pas redémarrer comme en 14… On n’est pas dans une crise passagère, comme celle de l’après-11 Septembre. Et on pourrait bien avoir Notre-Dame-des-Landes et les compagnies à bas coûts, comme Ryanair, ailleurs, car elles ne voudront pas payer les taxes aéroportuaires. Et que deviendra l’aéroport de Rennes avec cette concurrence nouvelle ? Et l’aéroport d’Angers, qui n’accueille même pas une seule compagnie aérienne régulière ?

Les deux pistes ne sont-elles pas une chance de développement économique ?

Deux pistes, c’est du délire ! Le trafic ne le justifie pas. Il y a plein d’endroits où les pistes moisissent. À Bordeaux, on n’utilise plus la deuxième piste. À Metz-Nancy, on a une piste magnifique créée il y a quinze ans, mais personne n’y va.

Et que répondez-vous aux riverains de Nantes-Atlantique qui souffrent du bruit et veulent le transfert ?

Les avions font du bruit. Mais il y aurait moins de problèmes si on n’avait pas laissé construire autour de Nantes-Atlantique. D’ailleurs, qui peut garantir que ça ne recommencera pas à Notre-Dame-des-Landes, où la pression foncière et immobilière se fait déjà sentir ? Pour l’heure, seules certitudes : on va gâcher un énorme espace agricole. Et ça va coûter très cher : 600 millions d’euros, un milliard, deux milliards… on ne sait pas. Mais pour quelle véritable utilité ?

Recueilli parGaspard NORRITO, Ouest-France, 6 octobre 2009