La semaine dernière, Bruxelles a interdit trois funestes pesticides néonicotinoïdes , responsables entre autres méfaits du déclin effrayant des abeilles : le clothianidine, l’imidaclopride et le thiaméthoxame.
Victoire ? En réalité, cette interdiction ne vaut que pour quatre types de cultures (colza, coton, maïs et tournesol). De plus, elle n’est valable qu’à partir de décembre prochain, et pour deux ans seulement. Ce qui ne résout d’ailleurs en rien la question des résidus… qui attaquent les insectes pollinisateurs durant de longues annés, même après l’interdiction des produits.
De plus, il ne s’agit que de trois substances parmi un grand nombre d’autres pesticides, qui continueront donc à faire leurs ravages sur les humains et l’environnement : en l’occurrence, les abeilles ne sont pas menacées que par ces troix substances toxiques, mais aussi par le chlorpyriphos-éthyl, la cyperméthrine et la deltaméthrine, le fipronil (à l’échelle européenne)…
Disons enfin et surtout que l’interdiction même de tous ces insecticides (on peut toujours rêver) ne suffirait sans doute pas à favoriser le retour des pollinisateurs. Nos chers insectes (les abeilles ne sont pas les seuls pollinisateurs) sont en effet affaiblis par de nombreux autres facteurs, liés aux structures mêmes de la production agro-industrielle. Il faudrait aussi revenir à une véritable biodiversité des biotopes et à des écosystèmes favorables, tels que polycultures, jardins, haies, jachères florales…
Mais c’est compter sans les impératifs du capitalisme, qui hormis le lobbying des monopoles agrochimiques qu’il suscite, imposera toujours un minimim de main-d’oeuvre agricole pour le maximum de profit, sur des monocultures tueuses de biodiversité, avec des sols complètement asphyxiés du point de vue microbiologique.
Nombre d’apiculteurs-trices amateurs dénoncent d’ailleurs, à travers cette décision récente de Bruxelles, une intention sous-jacente de favoriser les grosses fermes apicoles, en laissant crever la masse des abeilles sauvages.
Pour sauver les pollinisateurs, indispensables à 35% de la production de nourriture mondiale pour les êtres humains, cette mesurette ne suffira donc évidemment pas. Les luttes et les pratiques alternatives doivent aller au-delà du seul cadre de l’obtention de rustines juridiques qui, lorsqu’elles sont concédées par le système capitaliste, ne sont de toute évidence destinées qu’à valider la perpétuation de son ravage structurel des terres et des humains.
Juanito, Pavillon Noir, 7 mai 2013