[Poitiers] Manif des salarié.e.s de CEIT Loudun
CEIT Loudun : vers une probable reprise
Rien n’est fait. Le tribunal de commerce rendra son jugement vendredi en début d’après-midi. La société loudunaise ne devrait pas être mise en liquidation.
La moitié des salariés de la Compagnie pour équipement intérieur des transports (CEIT) – environ 110 personnes – a fait le déplacement, hier, à Poitiers, pour attendre, en vain, le jugement du tribunal de commerce qui sera rendu publique vendredi à 14 heures.
A l’ordre du jour de l’audience de mardi, le gros dossier CEIT, une entreprise créée en 1996 à Loudun, spécialisée dans les intérieurs des wagons voyageurs, des métros, tramways et RER, en proie à une gestion catastrophique qui l’a conduite à une mise en redressement judiciaire le 4 avril dernier.
Création d’une tôlerie à Loudun
Trois repreneurs étaient en lice : Finaero, Compain et Barat Group, un concurrent direct, installé à Saint-Aignan (Loir et Cher). Les deux premiers ont jeté l’éponge, estimant que les conditions n’étaient pas réunies pour une bonne reprise. Restait Barat Group, équipementier dans le domaine ferroviaire, une holding de cinq filiales, dirigé par Christian Provost. Reposent sur ce dernier une partie de la survie de CEIT Loudun et le jugement du tribunal de commerce. Cette instance a le choix entre la solution loir et chérienne et la liquidation judiciaire.
Il semblerait que l’on se dirige vers une reprise selon Sylvain Huguet, représentant des salariés pour CEIT SAS et CEIT Engenering (bureau d’études), qui a assisté à l’audience : « 83 salariés sur les 215 seraient repris, a-t-il confié à la sortie du tribunal, le repreneur bénéficierait des brevets. Il garderait les bâtiments à Loudun en reprenant le crédit-bail dans l’objectif de devenir propriétaire des locaux. »
Christian Provost « créerait une tôlerie à Loudun dans le cadre de cette reprise pour internaliser la sous-traitance », a-t-il ajouté.
Le P-DG de Barat Group, qui s’est exprimé dans la cour du tribunal de commerce devant les salariés, n’a pas caché « la difficulté » du dossier CEIT, rappelant qu’il avait réussi « à passer de 65 à 83 salariés ». Mais il a prévenu : « Ma grande préoccupation est de boucler l’année 2017, ce sera très dur car nous n’avons aucune commande de clients actuellement. Si je n’en reçois pas en juillet 2015, je ne pourrais pas assurer du travail en 2017. » Une salariée alors l’interpelle : « Vous pensez à votre société mais avez-vous pensé à nos emplois ? Nous avons travaillé dur dans cette entreprise. » Christian Provost s’est engagé à mettre « tout en œuvre » avant d’expliquer « qu’il y a des risques que je ne peux pas prendre. Je suis responsable et ne peux pas aller au-delà de mes engagements auprès des banques. Il faut arriver à l’équilibre. »
« 83 personnes, c’est mieux que rien. »
Du côté de la CGT, on ne comprend pas, Isabelle Prévost, déléguée syndical, rappelle un carnet de commandes rempli pour « 30 millions d’euros ». La syndicaliste, qui rejette sur les différentes directions CEIT des fautes de « gestion de la trésorerie et d’organisation du travail – nous avons obtenu des gros marchés à perte », souhaite, à titre personnel, une liquidation judiciaire « pour ne pas faire le jeu des magouilles du repreneur ».
Une ligne qui n’est pas celle du syndicat CFE CGC, déplorant la seule offre et l’absence de choix malgré les nombreuses rencontres avec les représentants de l’État et les politiques mais affiche leur soutien au nouveau repreneur : « 83 personnes, c’est mieux que rien. » Mais l’UD CGT n’en démord pas ; « Barat est venu chercher le carnet de commandes », estime Catherine Giraud.
Réponse vendredi.
Anarchie intime (un texte de Anne Archet)
Ou huit leçons sur l’amour apprises à la dure, écrites sous forme de bilan après (encore une autre) pénible rupture
L’amour est abondant et chaque relation est unique
L’amour doit être détaché de la notion économique de rareté. L’amour n’est pas une ressource limitée; il est faux de croire que l’amour véritable est exclusif et limité au couple. J’ai la capacité d’aimer plus qu’une seule personne. J’ai la capacité d’entretenir plus qu’une seule relation. L’amour que je ressens pour une personne ne diminue pas celui que je ressens pour une autre. Je veux éviter de comparer les personnes et les relations; je veux chérir tous les individus et le lien que je crée avec eux. Je n’ai pas besoin d’élire une personne «partenaire principal» pour être amoureusement comblée. Chaque relation que j’entretiens est indépendante et toutes ces relations sont entre individus autonomes.
L’amour et le respect au lieu du devoir
Je ne baserai plus mes relations sur le négoce. L’amour n’est pas un échange, mais un don. Je ne veux plus que mes relations soient basées sur le devoir, mais plutôt sur le respect mutuel de l’autonomie et de l’indépendance. Mes sentiments pour une personne, l’histoire et l’intimité que nous partageons ne me donne aucun droit de contrôler cette personne ou de la contraindre à se soumettre à ce que la société, la culture et même moi-même considérons comme étant «normal» ou «allant de soi» dans une relation. Je veux que chaque relation soit une exploration de nos limites communes, une expérience des manières de s’aimer sans violer notre intégrité individuelle et nos convictions intimes. Plutôt que de chercher des compromis, je veux laisser mes amoureuses et mes amoureux choisir d’eux-mêmes leur propre voie, celle qui préservera leur intégrité, sans que ça ne soit vécu comme une crise. Je suis convaincue que se délester du devoir et de ses exigences est la seule façon de savoir si l’amour est réellement mutuel. L’amour n’est pas plus fort ou plus vrai quand les individus font des compromis uniquement parce que «c’est ce qu’il faut faire dans un couple».
Je veux mieux définir quelles sont mes valeurs amoureuses fondamentales et y rester fidèle
Comment est-ce que je veux être traitée par les autres? Qu’est-ce que je veux qu’une relation amoureuse m’apporte? Avec quel genre d’homme et de femme est-ce que je désire partager ma vie? Comment est-ce que je voudrais que mes relations amoureuses fonctionnent? Je crois avoir une meilleure idée de tout cela. Ce que je veux maintenant, c’est me délester de l’idée délétère que faire des exceptions à ces attentes est une preuve d’amour, une démonstration que ma partenaire ou mon partenaire est «spécial» ou que c’est «le vrai et le grand amour».
Je dois continuer de construire ma carapace comme l’hétérosexisme
Je ne dois jamais oublier que je vis dans une culture où les relations amoureuses sont puissamment normées. Ces normes ont pour elle la force de la tradition et me dictent – souvent inconsciemment – ce qu’est l’amour véritable et comment il doit être vécu. Je veux être blindée contre la remise en question continuelle de la validité de mes relations amoureuses, car je sais qu’on ne cessera pas de le faire puisque je n’ai dorénavant aucune intention de me contraindre à suivre les normes sociales de l’amour acceptable. Je veux trouver avec ceux et celles que j’aime des façons de déjouer ou de contrer cette pression sociale. Surtout, je ne veux plus que la honte ou la peur se manifestent dans mes relations amoureuses.
Je ne veux plus que l’amour soit un arrangement économique
Je ne veux plus former un ménage. Je ne veux plus servir à l’établissement de l’indice des prix à la consommation. Je ne veux plus que mes relations soient un travail, comme dans l’infâme expression «travailler sur son couple». Je veux que chaque relation soit libre et spontanée, qu’elle n’ait d’autre but que la rencontre et l’exploration mutuelle. Je ne veux pas d’objectifs, de bilans, d’évaluations de rendement. Je veux que rien de productif n’émane de mes relations amoureuses. Je veux qu’elles soient un jeu, une folle dépense d’énergie, un potlatch perpétuel. Ça ne veut pas nécessairement dire que je veux isoler mes relations des contingences du monde matériel (et réel) ou que je rejette toute forme d’engagement. Ça veut plutôt dire que l’engagement ne va pas de soi, qu’il n’y a aucune étape naturelle ou de passage obligé. Je veux de l’entraide et du soutien mutuel, pas d’obligations contractuelles sous forme de partenariat d’affaires.
Je dois choisir l’abandon et la confiance
À partir de tout ce que j’ai dit précédemment, je choisis de prendre pour acquis que mes partenaires n’ont aucune intention de me faire du mal. Ce faisant, je choisis une voie positive plutôt qu’une voie négative : celle de la méfiance, qui mène éventuellement à la jalousie. Je ne veux plus vivre dans l’insécurité – la mienne comme celle de mes partenaires. Je ne veux plus avoir à constamment confirmer que mes partenaires sont toujours amoureux de moi et réciproquement. Les individus vivent souvent des situations où ils n’ont ni la force, ni l’énergie de démontrer leur amour ou même prendre soin de leur partenaire. Je veux que mes relations soient bâties de manière à ce que lorsque l’un des partenaires devient distant ou carrément absent, cette désaffectation soit facilement comprise, pardonné et même aidée. Je veux laisser tout l’espace nécessaire à mes partenaires pour s’exprimer, mais aussi pour être silencieux et distants quand le besoin se fait sentir. Je veux que cet espace soit mutuel et que mes partenaires s’abandonnent et me fassent confiance. Je crois que c’est la seule façon de prendre à la fois soin de moi-même et de ceux et celles que j’aime.
Je veux que la communication serve à autre chose que régler des problèmes
N’ayant plus du tout envie de me plier aux normes et aux règles qui régissent la «vie de couple», je n’ai d’autre choix que de baser mes relations amoureuses sur la communication, sinon je finirai toujours par me rabattre sur la normalité. La communication et l’action commune et concertée est la seule façon de se libérer du carcan social qui a tant nui à mes amours. J’ai eu la fâcheuse tendance jusqu’à présent à ne communiquer qu’en cas d’urgence, que pour «régler des problèmes» et «vider des abcès». Je veux pouvoir me livrer entièrement et pouvoir accueillir entièrement mes partenaires tels qu’ils et elles sont. Nous sommes si habitués à ne pas vraiment dire ce que pensons vraiment et ce que nous ressentons (et je m’inclus dans le lot, ainsi que tous les anarchistes et esprits libres que j’ai pu croiser au cours de ma longue existence) que nous en sommes presque toujours réduits à lire entre les lignes et extrapoler pour comprendre ce que les autres désirent. Je ne veux plus que mes expériences passées tordent la perception que j’ai des intentions de mes partenaires. Je veux vivre en pleine lumière avec mes amoureux et mes amoureuses, je veux des questions claires et des réponses explicites. Je ne veux plus vivre dans la peur des mots.
Je veux être aussi indulgente envers moi-même qu’envers mes amoureux et amoureuses
Je ne veux pas que tout ce qui précède soit considéré comme une éthique ou une morale. Je ne veux pas remplacer les normes amoureuses en vigueur par une nouvelle série de normes tout aussi contraignantes. Je ne veux pas avoir des amants, des amoureuses, un couple ou quelque forme d’arrangement non-conventionnel ou radial parce que c’est la chose à faire, parce qu’il faut abattre le patriarcat, parce que c’est une stratégie pour le changement social, parce que c’est ce qui fera advenir la révolution et l’anarchie, parce que c’est le genre de chose qu’on s’attend d’une femme comme moi. Je veux entrer en relation parce que tel est mon désir. Je veux que mes désirs soient les seuls critères auxquels je me soumets. Si j’éprouve des sentiments que je n’aime pas – comme la jalousie, la possessivité, le désir de contrôle ou l’envie détestable de me conformer et de meubler mon nid d’amour avec des meubles en kit – je ne dois pas les refouler, mais plutôt les accueillir comme ils sont, les verbaliser et tâcher, avec l’aide de mes partenaires, de les comprendre et les surmonter. Je ne veux plus ressentir de culpabilité d’aucune sorte. Je n’exige pas de mes partenaires qu’ils soient parfaits; je dois cesser d’exiger la perfection de moi-même.
Anne Archet sur son Blog Flegmatique, 14 juillet 2014
[Chasseneuil-du-Poitou] Federal Mogul : dix-huit salariés convoqués devant la justice
NdPN : malgré des options de lutte relativement sages vue la gravité de leur situation (tractages et manifs pacifiques, demande répétée d’un dialogue social), les salarié.e.s de Federal Mogul menacés de licenciement avec indemnités ridicules ont vu 18 d’entre eux condamnés par la justice pour l’occupation pacifique (et très temporaire) de l’usine d’Orléans, qui n’a d’ailleurs rien donné… alors qu’il ne s’agit plus pour les salariés que de demander une prime supra-légale. On peut penser ce qu’on veut de l'(in)utilité sociale des pistons et des automobiles, de certains slogans douteux du type « produire français », de certaines réactions plus que limite vis-à-vis de routiers polonais croisés sur le chemin de Paris… reste qu’on ne peut que se sentir solidaire avec la colère de ces salariés, traités ni plus ni moins que comme de la merde. Le mépris de classe qu’ils se prennent en pleine poire de la part des instances privées et publiques finira-t-il par les acculer à d’autres méthodes de lutte ? On voit bien que le blocage de la production est ce qui fait réellement peur à la direction !
Federal Mogul : dix-huit salariés convoqués devant la justice
Les deux journées de jeudi et vendredi derniers passées à Orléans pour les salariés de Federal Mogul se sont soldées par un échec. Dix-huit d’entre eux ont été convoqués par la justice.
La visite n’était pas de courtoisie. Quatre-vingts salariés du site poitevin de Federal Mogul sont allés, jeudi et vendredi derniers, investir les locaux de l’établissement du groupe américain dans le Loiret, à Saint-Jean-de-la-Ruelle, près d’Orléans, où est également implanté le siège de l’entreprise. Motif de ce rendez-vous de la dernière chance : bloquer les coussinets (l’entreprise fabrique des pistons de moteurs diesel) pour empêcher les commandes de partir. Et, surtout, faire pression sur la direction générale afin d’obtenir la prime supra légale de 60.000 € plus 2.000 € par année d’ancienneté.
Le directeur Europe du groupe, alors à Lyon, n’a pas adhéré à cette sortie par le haut : « Il nous a proposé de venir à Orléans et d’entrer en négociation avec les instances représentatives du personnel », raconte un syndicaliste.
« Pas eu le temps de préparer notre défense »
Or, selon cet ouvrier, « cette réunion avait lieu en même temps que la convocation en référé devant le tribunal d’instance de dix-huit de nos camarades : ils ont été assignés, vendredi 13 heures, pour l’audience de 14 heures. Nous n’avons pas eu le temps de préparer notre défense ni de choisir un avocat. » Résultat : les dix-huit salariés ont été condamnés à 100 € par injonction et par personne s’ils ne quittaient pas les lieux du site orléanais. « Nous sommes partis officiellement du site à 15 heures », rapporte ce salarié syndiqué à la CGT.
La direction de Federal Mogul propose, elle, quatre mois de salaires aux futurs licenciés. « Nous allons nous battre pour obtenir cette prime supra légale, assure le syndicaliste. Aujourd’hui, les instances représentatives du personnel seront à Chasseneuil-du-Poitou en présence d’experts que nous avons demandés. »
[Poitiers] Les réfugiés espagnols sortent de l’oubli
Les réfugiés espagnols sortent de l’oubli
Il ne faut pas oublier. Partout la même phrase résonne dans la foule. Hier matin, une cinquantaine de personnes se sont rendues à l’ancienne route de Limoges, là où s’érigeait le camp d’internement des juifs et des Tsiganes en 1939. La stèle rappelle désormais la présence des réfugiés espagnols républicains, ceux qui ont construit les baraquements de leurs mains. Leurs drapeaux rouge, jaune et violet rappellent leur combat.
Huit cents réfugiés espagnols
Il ne faut pas oublier qu’à la place de la stèle, huit cents réfugiés se sont rassemblés ici, il y a plus de 70 ans. Montserrat Nadal y était. « Je suis arrivée à 9 ans à Poitiers. Ma famille et moi voulions échapper au régime de Franco. On m’a arraché des bras de mon père », raconte-t-elle.
Un épisode marquant dans la vie d’une petite fille.
Pour son neveu, Sylvain Nadal, l’évènement est important. « Il ne faut pas oublier que l’Espagne a connu la République avant le régime franquiste. Nos parents se sont battus et ont dû se réfugier ici. C’est un devoir de mémoire », affirme-t-il.
En 1940, après le départ des Espagnols, les Allemands prennent officieusement l’autorité du camp. Là, des juifs, des Tsiganes et des résistants y seront parqués. Ils savaient ce qui les attendait : Dachau, le camp d’extermination dans l’Allemagne nazie.
José-Luis Munoz, gérant des « Bacchantes » à Poitiers, l’affirme : « Il faut des évènements comme celui-ci pour rappeler les horreurs de la guerre et faire en sorte que la paix soit sauvegardée. »