[Wukan] Un Sidi Bouzid chinois

[Wukan] Un Sidi Bouzid chinois

Il existe en 2011 un village peuplé d’irréductibles Chinois. Située au sud de la Chine, dans la province industrielle du Guangdong, la localité côtière de Wukan est, depuis plusieurs semaines, le théâtre d’une lutte pour le moins inédite. D’après le New York Times, près d’un millier de policiers encerclent le village de 13’000 habitants, devenu en quelques semaines le symbole du combat des paysans chinois contre leur gouvernement. Tout commence en septembre dernier, lorsque les habitants de ce village de bord de mer se voient confisquer leurs terres par Pékin, pour être ensuite revendues à de riches promoteurs immobiliers.

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http://pix.toile-libre.org/upload/original/1323954644.jpgManifestation de mercredi

Un procédé d’autant plus illégal qu’il n’est suivi de la moindre compensation. Furieux du sort qui leur est réservé, des milliers de « Wukanois » descendent alors dans la rue. Mais les manifestations dégénèrent. Des voitures de police sont détruites, des immeubles gouvernementaux saccagés. Après deux journées d’émeutes sans précédent, la police est déployée, et la révolte étouffée. Or, fait rare dans l’empire du Milieu, les autorités vont néanmoins accepter de négocier avec les villageois, à condition qu’ils nomment un groupe de 13 représentants. Parmi eux, Xue Jinbo, un boucher de 42 ans.

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http://pix.toile-libre.org/upload/original/1323965604.jpgLe portrait du martyr Xue Jinbo sur le portail du commissariat déserté

Or la proposition gouvernementale n’était qu’un leurre. Très vite, un responsable local accuse les nouveaux représentants de complicité avec « des forces étrangères cherchant à créer des divisions entre le gouvernement chinois et ses villageois ». Les manifestations reprennent de plus belle. Mais, une nouvelle fois, Pékin a tout prévu. Pour éviter toute contamination de la gronde sociale au reste du pays, la police dresse un blocus autour du village, tandis que d’autres de ses membres en civil parviennent à s’infiltrer à l’intérieur du village.

http://pix.toile-libre.org/upload/original/1323954997.jpgDes traces des exactions policières de septembre

L’assaut est lancé, et cinq représentants, dont le boucher Xue Jinbo, sont enlevés. Deux jours plus tard, c’est avec effroi que les paysans apprennent son décès. D’après l’agence officielle Chine nouvelle, l’un des seuls médias à évoquer les troubles, le villageois est mort d’une « défaillance cardiaque », d’autant plus qu’« aucune trace apparente de violence » n’a été constatée sur son corps. Des proches affirment pourtant avoir retrouvé la victime avec des contusions sur les genoux, des narines maculées de sang et des pouces cassés.

« Nous supposons que les menottes ont laissé des marques sur ses poignets, et que les légères contusions sur les genoux sont dûs au fait qu’il était agenouillé », s’est contenté de répondre le chef adjoint du centre de médecine légale de l’université Zhongstan, selon Chine nouvelle. Une version qui n’a pas convaincu la population de Wukan, qui a immédiatement repris son mouvement de protestation, déterminée à aller jusqu’au bout. « Nous voulons que le gouvernement central (à Pékin) s’occupe de notre problème. Nous n’abandonnerons pas la lutte, nous voulons que les cadres corrompus soient arrêtés », a annoncé un manifestant, qui a requis l’anonymat, à l’AFP. D’après le New York Times, les frondeurs s’attelleraient désormais à dresser des barricades et se défendraient avec des armes « made in Wukan » [“villagers had stockpiled crude weapons, including steel-tipped bamboo spears”].

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http://pix.toile-libre.org/upload/original/1323955285.jpgLe blocus policier du village mercredi

Mais, face à eux, les autorités ont décidé d’employer les grands moyens. Pour « assurer la stabilité », la police, les forces anti-émeute ainsi que les pompiers sont désormais déployés autour du village avec des canons à eau. Pékin compte ainsi affamer sa population, pour la forcer à se rendre. Mais celle-ci peut néanmoins compter sur les dons de nourriture en provenance de villages voisins. Dès lors, le gouvernement a annoncé que le corps du boucher décédé ne serait remis à sa famille que lorsque les protestations cesseront. Totalement isolé du reste de la Chine, le village rebelle l’est également sur Internet. En effet, il n’existe sur la Toile chinoise aucune trace de Wukan.

Leur presse (Armin Arefi, Le Point, 14 décembre 2011)

[Poitiers] Comme d’habitude…

A l’appel de l’intersyndicale qui s’était mise d’accord sur le principe d’une grève (sauf le SGEN-CFDT), a eu lieu aujourd’hui à Poitiers une manifestation d’enseignants. Entre trois-cent et quatre-cent personnes ont défilé dans les rues, du pont Saint-Cyprien au Rectorat. Un chiffre relativement faible, eu égard au fait que la grève semble quant à elle plutôt bien suivie.

La prise de parole devant le Rectorat a, comme d’habitude, été monopolisée par les délégué-e-s des syndicats, sans invitation à débattre, à proposer, tout simplement à s’exprimer. Les permanents, les « représentants », les spécialistes, savent à notre place…

Ces dernier-e-s ont rappelé leurs revendications, légitimes mais comme d’habitude, limitées à la corporation (réévaluation des salaires, refus de la nouvelle notation par le chef d’établissement, refus de la mise en concurrence des profs et des établissements, refus des fermetures de CIO…)… pas un mot sur l’évolution du contenu et la forme mêmes de l’enseignement, pourtant toujours plus empreints d’une idéologie de sélection, de hiérarchie, bref de propagande étatiste et marchande ; rien sur le volet des réformes allant dans le sens du contrôle social des élèves, pourtant tout aussi concerné-e-s que les personnels d’éducation (fichage numérique/évaluation par compétences/changements dans les programmes…). Rien d’étonnant à cela, puisque les (rares) prises de parole des centrales syndicales sur ces sujets se cantonnent généralement au fait de déplorer l’absence de moyens… pour appliquer ces horreurs.

Elleux ont signalé qu’elleux n’avaient pas demandé d’audience, cette fois-ci, à la Rectrice de Poitiers (« cela ne sert à rien », la Rectrice ne les « entend pas »). Mais au lieu de proposer de rentrer ensemble dans ce Rectorat sourd et muet, et d’occuper les lieux pour instaurer un rapport de force, ce que le nombre aurait permis…  la manif se disperse rapidement devant le Rectorat, après la prise de parole syndicale qui clôt comme d’habitude la mobilisation.

Non sans avoir invité, comme d’habitude, à la poursuivre ultérieurement, avec une énième journée de mobilisation – courant janvier. Super.

Mais sans doute ce pédalage dans la semoule s’explique-t-il par le fait qu’elleux ont comme d’habitude, critiqué « ce gouvernement »… pour mentionner « l’échéance » de 2012.

Si elleux ont remercié la FCPE locale de se joindre à la mobilisation ici à Poitiers, elleux ont déploré l’absence de nombreux-euses grévistes, sans penser un instant, comme d’habitude… que les grévistes absent-e-s en ont peut-être assez de ces mobilisations parfaitement inefficaces, n’instaurant ni rapport de force réel, ni débat public, ni projet global de changement social.

Des gens du collectif antirep 86, ne perdant pas espoir sur la nécessité de rassembler contre toutes les formes de répression étatique à l’encontre des mouvements sociaux, ont néanmoins profité de cette manifestation pour diffuser le tract de solidarité avec les inculpé-e-s de Toulouse, avec appel à rassemblement ce vendredi à 18H devant le palais d’injustice de Poitiers.

Des policiers en civil de la BAC, sans bandeau pour se signaler tels, ont comme d’habitude suivi de près ces personnes pendant toute la manif. L’un des bakeux a insisté pour prendre un tract, en faisant un trait d’esprit : « on sait pas lire, on a même pas le BEPC ».

Encore une journée de mobilisation… comme les autres

 

 

 

Un « enseignant », le 15 décembre 2011

Saccage ta cage – tract en solidarité avec les inculpé-e-s de Toulouse

Saccage ta cage !

Tract en solidarité avec les inculpés de Toulouse

Partout, chaque jour, des multitudes de personnes de tous âges sont jugées ingérables et inadaptées à la société et sont enfermées dans toutes sortes de bagnes. Des hôpitaux psychiatriques aux foyers, des maisons de retraite aux centres de rétention, des prisons aux camps de réfugiés… Les plus jeunes d’entre nous n’échappent pas à ce traitement : Établissements Pénitentiaires pour Mineurs, Centres Éducatifs Fermés, Établissements de Réinsertion Scolaire, Centres Éducatifs Renforcés, foyers pour « mineurs délinquants », gérés indifféremment par l’Éducation Nationale, l’Administration Pénitentiaire, la Protection Judiciaire de la Jeunesse (PJJ), la DDASS ou encore l’Église. Loin de constituer une mesure d’exception, l’enfermement fait déjà partie intégrante du processus éducatif et normatif dont le but est de former les individus à devenir au choix citoyens, supplétifs de la police, soldats parmi les soldats de la grande armée du travail, domestiques au service des riches, etc.
Dans tous les cas, des esclaves.

On trouve déjà à l’école les conseils de discipline, les sanctions et les punitions, les exclusions, les bulletins de notes, les surveillants, la carotte et le bâton, les balances, les heures de colle, la hiérarchie, la morale, les grillages, les caméras et les haut-parleurs. La fausse opposition qu’on veut nous faire avaler entre éducation et enfermement des mineurs, entre écoles et prisons pour mineurs n’est qu’une carotte idéologique, une de celles qui sont vitales au bon fonctionnement de la domestication démocratique et capitaliste. Instruction et répression sont les deux faces du même dressage social.

Pas étonnant, face au sombre horizon imposé par la puissance normative de cette pédagogie autoritaire, qu’il se trouve des réfractaires à cette mise au pas. C’est ce qui s’est passé, parmi de nombreux exemples, en mai 2011 à la prison pour mineurs (EPM) de Lavaur (Tarn), où la quasi-totalité des détenus s’est mutinée et a commencé à saccager les cages avec rage. En appui à cette révolte à l’intérieur, à l’extérieur un groupe de personnes a décidé deux mois plus tard de se rassembler pour saccager les locaux de la PJJ (gestionnaire des EPM conjointement avec l’Administration Pénitentiaire) pour lui rendre un peu de sa violence.

Le 15 novembre, les sbires du pouvoir ont perquisitionné et saccagé en retour plusieurs logements à Toulouse à la recherche des auteurs de cette visite ravageuse. Quatre personnes ont été incarcérées dans le cadre de l’instruction. Qu’ils soient innocents ou coupables est le dernier de nos soucis, il est évident que le pouvoir a voulu frapper des personnes déjà connues pour avoir manifesté leur hostilité à ce système de mort. Ce qui importe, c’est de continuer la lutte, celle des mineurs enfermés comme celle de ceux qui tentent de la propager à l’extérieur. Ce qui importe, c’est de détruire cette société qui a besoin d’enfermer.

Feu à toutes les prisons
Solidarité avec les révoltés de la prison sociale
Dedans comme dehors.

Des anarchistes

[Tract trouvé dans les rues de Paris, décembre 2011]

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Documents joints

Base de données anarchistes, 14 décembre 2011

[Indonésie] Camp de rééducation par la charia pour les punks

[Punk not dead] Anarchie en Indonésie

NO FUTURE – En Indonésie, on rééduque des punks selon la charia

Plus de soixante punks participant à un concert de rock ont été arrêtés et placés en « rééducation » dans la province indonésienne d’Aceh, où la loi islamique est en vigueur, a-t-on appris mercredi 14 décembre de sources officielles.

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La police en charge de l’application de la charia a interpellé 64 punks, 59 hommes et 5 femmes, qui participaient samedi soir à un concert de rock destiné à lever des fonds pour des orphelins, dans la capitale provinciale Banda Aceh, dans l’extrême nord de l’île indonésienne de Sumatra.

« Nous craignons que leurs actions ne viennent perturber l’application de la charia », a expliqué Illiza Sa’aduddin Djamal, maire adjoint de Banda Aceh. Les punks ont été transférés à une soixantaine de kilomètres de là, à Seulawah, où ils ont entamé mardi un stage de « rééducation » de dix jours, sous contrôle policier, a-t-elle précisé, ajoutant : « Nous espérons qu’ils se repentiront. »

http://pix.toile-libre.org/upload/original/1323953915.jpgLes jeunes hommes et femmes ont été immédiatement tondus à leur arrivée au centre de rééducation, faisant disparaître crêtes et chevelure peroxydée, avant d’être forcés à se baigner dans un lac naturel. Ils ont, par la suite, été vêtus d’habits neufs plus conformes à la charia, en lieu et place des tee-shirts vantant l’anarchie ou un groupe de rock, puis ont été contraints de participer à une séance de prières.

« Le but est de les arracher à leur comportement déviant… On doit les réhabiliter afin qu’ils aient un comportement convenable. Un traitement sévère est nécessaire », a indiqué le responsable provincial de la police, Iskandar Hasan. Une militante locale des droits de l’homme, Evi Narti Zain, a condamné l’arrestation. « Être punk est un mode de vie et les punks vivent de par le monde sans porter préjudice à qui que ce soit », a-t-elle déclaré.

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La province d’Aceh a adopté la charia en 2001, quand une autonomie lui a été accordée afin de mettre un terme à un mouvement séparatiste meurtrier. Le reste de l’Indonésie, plus grand pays musulman de la planète avec 240 millions d’habitants, pratique très majoritairement un islam modéré.

Leur presse (Le Monde.fr, 14 décembre 2011)

[Hongrie] L’extrême-droite veut détenir les Roms dans des camps

L’extrême-droite hongroise veut détenir les Roms dans des camps

En plein débat sur les Roms, l’extrême-droite hongroise joue la surenchère. Le Jobbik a proposé de créer des camps de haute sécurité pour y enfermer les Roms, qu’il qualifie de menace publique. A l’approche des élections municipales du 3 octobre, le parti affiche ostensiblement ses thèses xénophobes. Et le candidat Gabor Staudt de citer d’autres pays en exemple “L’instauration de camps de protection publics résoudrait le problème du manque de places dans les prisons”, explique-t-il. “Je voudrais rappeler que tous les pays représentés au groupe du Parti populaire européen ont déjà concrétisé ces idées. Permettez-moi de mentionner M. Sarkozy en France, M. Berlusconi en Italie, ou un autre exemple approprié en Finlande.”

Pour le Jobbik, les tentatives d’intégration ont échoué et l’heure de la ségrégation est venue. Consterné, l‘élu de l’opposition socialiste Attila Mesterhazy accuse le centre-droit au pouvoir de ne pas riposter  “Ce que dit le Jobbik est inacceptable. Et le pire, c’est que le Fidesz au pouvoir n’a pas pris ses distances avec ces propos xénophobes. J’appelle donc le gouvernement à se démarquer plus clairement de ce genre de déclarations et idéologies.” Les Roms constituent la plus importante minorité dans l’Union européenne. Environ 700.000 vivent en Hongrie, pour la plupart dans des conditions insalubres.

Groupe de Béthune (Fédération Anarchiste), 15 décembre 2011