Archives de catégorie : Ni patrie ni frontière

[Françafrique] Le changement, c’est pas maintenant

Blaise Compaoré à Paris : la Françafrique fait sa rentrée à l’Élysée !

Deux mois après le gabonais Ali Bongo et alors que l’on annonce la visite prochaine à Paris du tyran tchadien Idriss Déby, le président burkinabè Blaise Compaoré est à son tour reçu par François Hollande ce mardi 18 septembre. Un criminel de plus à l’Élysée, une promesse de moins de tenue : celle d’en finir avec la Françafrique.

Après la réception du dictateur Ali Bongo début juillet, qui a permis aux autocrates gabonais de se revendiquer du soutien du Parti socialiste [Voir le communiqué de Survie du 28 août 2012, « Régime gabonais : le Parti socialiste et le gouvernement doivent se positionner fermement »], c’est au tour du criminel Blaise Compaoré d’être reçu par François Hollande. En prétendant coordonner ou « faciliter » l’émergence d’une solution à la crise malienne, les autorités françaises cherchent une fois de plus à faire passer des vessies pour des lanternes et des dictateurs pour des hommes de paix. Salué pour sa « gouvernance » et ses « médiations », Blaise Compaoré cumule l’absence complète de légitimité démocratique et une implication dans les pires conflits et crises d’Afrique de l’Ouest, mais il est le meilleur défenseur des intérêts françafricains dans la sous-région.

Arrivé au pouvoir la même année que le tunisien Ben Ali, que le Parti socialiste a trop tardivement rangé au rang de tyran, Blaise Compaoré se maintient depuis 25 ans à la tête du Burkina Faso. D’abord par la terreur et les assassinats impunis, dont ceux de son prédécesseur Thomas Sankara en 1987 [Thomas Sankara, qui dérangeait beaucoup d’intérêts dont ceux de la Françafrique, a été assassiné le 15 octobre 1987. Une pétition déjà signée par plus de 10’000 personnes demande que les autorités françaises fassent toute la lumière, 25 ans après, sur l’implication des services secrets français dans cet assassinat. Lire à ce sujet la Lettre de Mariam Sankara à François Hollande après l’annonce de la réception de Blaise Compaoré à l’Élysée prévue le 18 septembre 2012.] et du journaliste Norbert Zongo en 1998 [En décembre 1998, ce journaliste et ses compagnons furent mitraillés dans leur véhicule, ensuite incendié. Les émeutes qui ébranlèrent le pays obligèrent le pouvoir à admettre qu’il s’agissait d’un assassinat, pour lequel les burkinabè attendent toujours justice : symbole de l’impunité générale, le dernier procès des inculpés, membres de la sécurité présidentielle, s’est traduit par un non lieu.], puis par un tripatouillage constitutionnel et des élections truquées à répétition : le scrutin de novembre 2010, qui l’a prétendument reconduit dans ses fonctions avec 80% des suffrages, en est la dernière caricature [Voir le communiqué de Survie du 26 novembre 2010, « Burkina Faso : des imposteurs valident la nouvelle imposture électorale de Blaise Compaoré »]. Après avoir fait voter une loi d’amnistie pour se protéger, il semble pousser son frère François Compaoré au rang de successeur potentiel, craignant sans doute d’autres réactions populaires s’il modifiait à nouveau la constitution pour rester au pouvoir. Quelques semaines après sa prétendue réélection triomphale, une explosion de colère avait en effet traversé toutes les principales villes du pays pendant plusieurs mois. Protestant contre la mort de plusieurs collégiens dans des violences policières, la jeunesse envahissait régulièrement les rues, brûlant au passage tous les symboles du pouvoir : villas des dignitaires du régime, bâtiments administratifs, locaux de la police, etc. Mais le plus désastreux pour ce pouvoir s’appuyant sur une grande partie de l’armée, est que de nombreux militaires en sont également venus à se mutiner, se livrant à des viols, des pillages et des tirs à armes lourdes, montrant toute l’étendue de la décomposition de l’État Compaoré.

Corruption, appropriation d’une bonne partie de l’économie par le clan Compaoré, spoliation de terres au profit des dignitaires pour l’agro-industrie, paupérisation de la population, telle est la sombre réalité d’un régime honni par son peuple pour qui sait regarder au-delà des apparences.

Mais Blaise Compaoré, cité par Robert Bourgi en septembre 2011 comme un des fournisseurs de valises de billets à destination des politiques français, est aussi sans conteste le pilier de la Françafrique dans la sous-région, qu’il a souvent contribué à déstabiliser. Son ami Charles Taylor vient d’être condamné à 50 ans de prison par le tribunal spécial pour la Sierra Leone, à l’issue d’un procès fleuve où Blaise Compaoré a été maintes fois cité, au côté de Kadhafi, pour leur implication dans ce conflit et celui du Liberia. Ces guerres civiles se sont traduites par « le meurtre, le viol et la mutilation de 500’000 personnes en Sierra Leone et de près de 600’000 au Liberia » [Bilan annoncé par M. Crane, ancien procureur du Tribunal spécial des Nations unies pour la Sierra Leone (TSSL)]. Le reste du bilan international de cet « ami de la France » est tout aussi terrifiant : trafic de diamants au profit de l’UNITA [Mouvement rebelle dirigé par Jonas Savimbi, impliqué dans la guerre civile qui a dévasté l’Angola jusqu’en 2002] dans les années 90, soutien aux rebelles qui ont embrasé la Côte d’Ivoire depuis 10 ans, et plus récemment exfiltration du chef du MNLA [Mouvement National de Libération de l’Azawad, qualifié abusivement de « mouvement touareg » impliqué dans les conflits au Nord Mali et qui revendique la sécession et la création d’un État laïc, qui a subi d’importants revers militaires face aux mouvements se revendiquant du Djihad. L’information sur l’exfiltration du chef du MNLA avec l’aide des autorités burkinabè a été largement reprise dans la presse africaine.] qui vient de tenir son congrès à Ouagadougou, alors que le journal Jeune Afrique, citant des sources françaises, évoque la livraison d’armes au MUJAO dans le nord du Mali via le Burkina [Une information démentie depuis par les autorités burkinabè]. Pourtant, Blaise Compaoré est régulièrement propulsé comme médiateur des conflits de la région, au point d’être invité à expliquer son expérience en la matière devant la cour pénale internationale, devant laquelle il devrait plutôt comparaître.

Il ne doit cette bienveillance internationale qu’à son allégeance aux puissances occidentales. Longtemps décrié par les États-Unis, Blaise Compaoré a su gagner leur soutien grâce à leur obsession de la lutte contre le terrorisme, en les laissant installer des bases d’où partent les drones américains pour surveiller la région. Les Français ne sont pas en reste : soucieux de maintenir leur présence au Sahel et leur exploitation de ses richesses, dont les mines d’uranium du proche Niger, ils disposent également d’une base au Burkina Faso où sont cantonnées les troupes d’élite françaisesdu COS [Commandement des Opérations Spéciales].

C’est cet hôte criminel que François Hollande s’apprête à recevoir, pour discuter ensemble d’une « sortie de crise » au Nord Mali. Il est également de plus en plus question que l’Élysée reçoive le dictateur tchadien le mois prochain, au même prétexte. La France, le Tchad d’Idriss Déby et le Burkina Faso de Blaise Compaoré au chevet du Nord Mali : c’est l’armée des pompiers pyromanes qu’on envoie éteindre l’incendie sahélien.

L’association Survie exige à nouveau que le président et le gouvernement français mettent fin à toute compromission diplomatique et à toute coopération militaire et policière avec ces régimes.

Un rassemblement est organisé ce lundi à Paris pour protester contre la réception de Blaise Compaoré par François Hollande, à 18h30 à la Fontaine des Innocents.

Survie, 17 septembre 2012 (repris par le Jura Libertaire)

[Hongrie] Pogroms anti-roms

NdPN : Les destructions de campements et expulsions de Roms menées par le gouvernement français sont l’occasion de rappeler leur situation tragique en Hongrie, d’où des milliers de Roms ont fui ces derniers mois à cause de la menace fasciste. Le jobbik, parti d’extrême-droite allié au gouvernement, organise en effet des parades paramilitaires dans des campements, violemment attaqués. En début d’année, nous relations ici et la fascisation du gouvernement au pouvoir en Hongrie… nos inquiétudes se confirment.

Des pogroms anti-Roms organisés en Hongrie

De violentes attaques contre la minorité Rom en Hongrie se poursuivent sans relâche. Il est de plus en plus évident que le gouvernement droitier dirigé par le premier ministre Victor Orban, et qui collabore étroitement avec le parti néo-fasciste Jobbik provoque délibérément de telles attaques afin de détourner l’attention de l’énorme crise économique et des problèmes sociaux que connaît le pays.

Le 20 août, des membres de la « Garde hongroise » paramilitaire ont défilé contre des familles Roms dans la ville de Cegled, au Sud-Est de la capitale Budapest. Plus de 400 d’entre eux, principalement des gardes en uniforme et leurs partisans, ont défilé à travers des campements de Roms dans les environs de la ville forte de 40.000 habitants. Ils ont hurlé des slogans tels « Sales tsiganes, vous allez tous crevez. » Les stations de radio de droite et des portails Internet ont publié des appels pour que les fascistes viennent à Cegled pour participer à cette action.

Les médias ont rapporté les récits de témoins oculaires faisant état d’intimidation des résidents de la ville. Il semblerait également que des coups de feu ont été tirés. Tout ceci s’est passé en présence de la police qui était sur place et qui a permis aux fascistes de commettre des actes d’intimidation avant que ces derniers ne se retirent.

Des journalistes de l’hebdomadaire HVG ont rapporté que dans une ferme avoisinante plusieurs centaines d’extrémistes de droite avaient accueilli un député parlementaire du parti d’extrême droite Jobbik qui avait exprimé son soutien à la mobilisation fasciste. La « Garde hongroise » est considérée être un bras paramilitaire de Jobbik et a à plusieurs reprises été mobilisée contre les Roms. Début août, environ un millier de fascistes ont défilé à travers le village de Devecser à l’Ouest de la Hongrie.

Dans ce contexte de nombreux Roms ont décidé qu’ils n’avaient pas d’avenir en Hongrie. Au cours de ces six derniers mois environ un millier de Roms hongrois ont demandé l’asile politique rien qu’au Canada.

L’élément immédiat qui a déclenché cette récente chasse aux sorcières contre les Roms a été le meurtre en juillet de la psychologue Kata Bandy travaillant pour la police. Un Rom sans emploi a été arrêté dans le cadre de ce meurtre. Il vivait dans des conditions extrêmement précaires, il avait précédemment été condamné pour vol et avait passé plusieurs années en prison. Les organes des médias proches du gouvernement ont immédiatement dénoncé le suspect de « meurtrier tsigane. » Des appels furent lancés pour « une solution finale pour la question tsigane, » tout en incitant délibérément à la violence contre les Roms.

Le militant Rom Jeno Setet a résumé le sentiment des Rom : « Le meurtre de Kata Bandy est terrible, mais plus terrible encore est le fait que nous avons été collectivement déclaré coupables et les institutions de l’Etat ne font rien pour nous protéger, nous citoyens de ce pays. »

Lors d’une conférence de presse, les parents de Kata Bandy ont expressément lancé un appel aux médias et aux cercles politiques de s’abstenir « d’utiliser le nom de notre fille comme un prétexte pour inciter à la haine ou pour réintroduire la peine capitale » – mais en vain.

Le Jobbik tout comme le parti dirigeant Fidez se sert du meurtre de Bandy pour réclamer l’introduction de la peine de mort. Jobbik, qui avait remporté les élections en 2010 avec 17 pour cent des votes, a organisé une importante campagne en faveur de la peine de mort. Le dirigeant de Jobbik, Gabor Vona, a justifié la demande pour la peine capitale en affirmant faussement que 90 pour cent de tous les meurtriers étaient des « Tsiganes, » tandis que 100 pour cent de toutes les victimes étaient des Hongrois.

Un certain nombre de politiciens du parti au pouvoir Fidesz ont aussi demandé l’introduction de la peine de mort qui contreviendrait à la Constitution hongroise et au droit communautaire. La question doit maintenant être débattue début septembre par la faction du Fidesz.

Les attaques ainsi que l’intimidation à l’encontre des Roms ont lieu depuis plusieurs années en Hongrie. En 2008-2009, un nombre de Roms hongrois ont été blessés et six ont été tués, dont un enfant en bas âge, dans une série de pogroms meurtriers. A chaque fois les meurtres se sont produits après les défilés par la Garde hongroise à travers des campements Roms. Le procès de quatre membres de la Garde soupçonnés d’être impliqués dans les meurtres dure depuis plus d’un an.

Dans un cas plus récent, des groupes fascistes avaient terrorisé l’année dernière des mois durant les Roms vivant dans le village de Gyöngyöspata.

Le Fidesz au pouvoir compte de plus en plus souvent sur l’extrême droite. Le premier ministre Orban a déclaré que les campagnes anti-Roms sont inacceptables mais il a aussitôt insisté en disant que les Roms étaient obligés de s’intégrer.

Suite à une motion déposée par le Jobbik, le parlement hongrois a amendé dernièrement le Code criminel du pays pour rendre passible d’un an de prison toute calomnie de la « Sainte couronne » et des symboles d’Etat tels l’hymne et le drapeau national ainsi que les armoiries. Le Fidesz dispose d’une majorité des deux tiers au parlement.

L’augmentation de la violence droitière, tolérée et/ou soutenue par le parti au pouvoir, est une réponse à la crise économique et sociale qui ne cesse de s’aggraver en Hongrie. Le pays est en proie à la récession et est confronté à une inflation en hausse. En juillet, le taux d’inflation était de 5,8 pour cent, bien au-dessus des attentes des experts. La principale cause de l’inflation élevée est l’augmentation spectaculaire des prix des denrées alimentaires.

Les conditions de vie de la majorité des Hongrois sont de plus en plus intolérables en raison des coupes drastiques imposées par le gouvernement Orban et de l’inflation élevée. Selon les données émanant fin juin de la Banque nationale hongroise, 16,3 pour cent de tous les prêts détenus par les ménages étaient jugés « non performants », ce qui signifie que les débiteurs sont en retard de paiement d’au moins 90 jours pour au moins une tranche. Il y a un an ce chiffre était de 11 pour cent.

Les principales raisons avancées par la Banque nationale hongroise pour cette augmentation de « mauvaises créances » sont un chômage élevé et la baisse du revenu disponible pour la plupart des débiteurs. Ce revenu a baissé en raison de la hausse de l’impôt, de l’impact du taux d’imposition uniforme pour les faibles revenus et la hausse de l’inflation. Si le forint continue de chuter face à l’euro, la situation continuera d’empirer.

Wsws, Markus Salzmann, 11 septembre 2012 (article original paru le 5 septembre)

[Jouhet – 86] Un artiste menacé d’expulsion

NdPN : Décidément, le changement c’est pas pour maintenant ! L’Etat continue à briser des vies et des familles entières. Le site de soutien à Keith et la page sur comment l’aider, où se trouve aussi son mail. Courage à lui et à ses proches. Solidarité avec tou-te-s les expulsables !

Le peintre Keith Donovan menacé d’expulsion de France

Installé à Jouhet, l’artiste-peintre canadien Keith Donovan est sous le coup d’un arrêté d’expulsion. Il conteste cette mesure qu’il peine à comprendre.

Keith Donovan et sa compagne Mila Weissweiler dans son atelier à Jouhet. Installé en Europe depuis trente ans, il n’a plus de famille au Canada.

La vie de Keith Donovan vient de basculer dans un autre monde. Cet artiste peintre installé dans le village de Jouhet peut, théoriquement, être arrêté, placé en rétention administrative et expulsé vers son pays d’origine, le Canada.

Une situation qui relève du cauchemar pour cet homme paisible de 60 ans, arrivé en Suisse il y a trente ans, installé en France depuis 1997. À l’époque, ses œuvres avaient été remarquées par la Fondation de France qui l’avait invité à travailler à la Cité des arts. Deux ans plus tard, le peintre avait décidé de poser ses valises à Paris. En 2004, il achète une maison et installe son atelier à Jouhet, avec son épouse britannique d’alors. Son activité est inscrite au registre du commerce, il vit de la vente de ses œuvres. « J’avais appelé la préfecture de la Vienne pour demander un titre de séjour, mais on m’a répondu que ce n’était pas nécessaire, compte tenu de ma nationalité, de mon mariage et de ma situation fiscale. » En 2007, le couple se sépare. Keith reste à Jouhet en attendant la vente de la maison, qui n’arrive pas. Mais en décembre 2008, le ciel lui tombe sur la tête, lors d’un voyage en Angleterre : « J’allais passer Noël chez une amie ». A l’aéroport de Stansted, son passeport canadien est refusé : « Leurs règles venaient de se durcir : je n’avais pas de titre de séjour pour prouver que j’étais en règle en France ». Aujourd’hui encore, il en parle la gorge serrée : « J’ai passé la nuit dans une sorte de prison, sans même avoir le droit de prendre un cachet d’aspirine. » Il est refoulé dès le lendemain. A son retour en France, sa mésaventure n’intéresse guère les douaniers. Keith entreprend les démarches pour se mettre en règle. Sa première demande, en janvier 2009, est acceptée. Mais un an plus tard, le renouvellement du titre de séjour est refusé, faute de communauté de vie avec son épouse. Le divorce est d’ailleurs impossible, « la procédure étant suspendue à l’obtention d’un titre de séjour. » Le 24 août dernier, il reçoit un arrêté préfectoral qui l’oblige à quitter le territoire dans les 30 jours. Le Canada, c’est le rêve de milliers de candidats à l’émigration. Mais Keith n’y a plus d’attaches : « Mes parents sont décédés il y a dix ans, toute ma vie est ici ».

«  Toute ma vie est ici  »

Une décision incompréhensible pour son amie Mila Weissweiler : « La préfecture ne reconnaît pas sa présence en France avant 2004 car son passeport n’avait pas été tamponné entre la Suisse et la France en 1997 ». Elle a le sentiment d’être victime de leur bonne foi : « Si on n’avait pas fait de demande de titre, ils ne seraient jamais venus le chercher ! » L’avocate de Keith Donovan va contester l’arrêté devant le tribunal administratif. Le couple se raccroche aujourd’hui à cette procédure et à l’espoir d’obtenir enfin un titre de séjour. En attendant, Keith va essayer de se remettre au travail : un tableau commandé pour le hall d’un immeuble à Genève.

réactions

Nombreux messages de soutien

Près de 70 personnes ont signé la pétition en ligne sur le site www.soutenir-keith.com. De nombreux messages de soutien ont été écrits, parmi lesquels les trois suivants. Jacques Bouloux, maire de Jouhet. « Keith Donovan s’est parfaitement intégré et fait l’unanimité autour de lui. Il participe à la vie associative et n’hésite pas à aider et donner de son temps aux personnes âgées qu’il côtoie et à l’occasion sert d’interprète auprès d’autres résidents anglophones. Je souhaite que l’ordre d’expulsion du territoire français émis à son encontre soit annulé et que son dossier de demande de carte de séjour soit réexaminé. » Fabrice Granger, voisin. « Je connais Keith Donovan depuis son installation dans le village en 2004. En qualité de voisin, d’ami et je pourrais quasiment ajouter de parent tant il est proche de ma mère et moi-même. Outre le fait qu’il ait été présent lors de moments tragiques de nos existences, nous apportant son soutien moral, il égaie nos vies, comme celles de bon nombre de voisins ou de gens de tous horizons, avec sa joie de vivre, son goût pour la bonne table, son immense amour pour l’art et son érudition. Il porte haut les couleurs de la France qui devrait se vanter d’avoir en son sein quelqu’un de bien. » Claude-Hubert Tatot, enseignant à la Haute école d’art et de design de Genève. « Être artiste ne donne aucun droit supplémentaire au regard de la loi, pourtant par sa présence sur le territoire et par son travail Keith Donovan contribue à l’enrichissement et au rayonnement d’une nation qui se disant attentive aux arts et aux lettres devrait aussi être attentive à une requête aussi légitime que simple à satisfaire : laisser Keith Donovan faire ce qu’il fait depuis tant années, vivre et travailler en France. »

Nouvelle République, Sébastien Kerouanton, 11 septembre 2012

[Québec] La lutte paye

Québec : le printemps érable l’emporte

La nouvelle chef du gouvernement québécois, Pauline Marois, a annoncé mercredi l’annulation de la hausse des frais de scolarité et le retrait de la loi spéciale 78, limitant le droit à manifester. Membre du Parti Québéquois (PQ) et élue ce mardi 4 septembre, elle avait fait campagne sur ces sujets.

Rassurés Une annonce qui rassure les étudiants québécois. Pauline Marois n’ayant pas remporté la majorité, elle avait d’abord laissé entendre que ces deux engagements seraient durs à tenir.

DÉCRET Pour éviter cette difficulté, la chef de gouvernement n’est pas passée par le Parlement. Elle a donc annulé la hausse des droits de scolarité… par décret ministériel.

Paola Schneider, Streetpress, 6 septembre 2012

NdPN : En parallèle, Léo Bureau-Blouin devient quant à lui, à 20 ans, député de l’assemblée nationale pour le PQ (parti québécois). Il se propose de  » ramener la paix sociale au Québec, ramener le consensus« , tiens donc…

On constate qu’une fois de plus la bourgeoisie, face à un mouvement social qui la déborde et qui se radicalise, adopte une position de « décompression », pour employer le mot de Vaneigem. D’une part, faire des concessions (ici sur la revendication initiale principale du mouvement), pour ne rien avoir à lâcher sur les revendications plus radicales nées du mouvement. D’autre part, mettre sur les rails de la cogestion et du pouvoir des « leaders » identifiés appelant au retour au calme, afin d’étouffer le mouvement lorsqu’il devient trop menaçant pour le pouvoir lui-même.

Les revendications n’aboutissent, une fois de plus, que par une lutte déterminée et un rapport de force réel. Reste, et c’est là tout le rôle des organisations anarchistes, à rappeler que le pouvoir a toujours été et sera toujours le tombeau des mouvements révolutionnaires.

Que deviennent les Roms expulsés ?

Que deviennent les Roms expulsés ?

L’évacuation de trois campements de Roms début août près de Lyon a lancé une polémique politique sur le sort de ces populations. Et a inauguré une longue série d’autres expulsions.

Que deviennent-ils ? Début août, trois campements de l’agglomération lyonnaise regroupant quelque 270 Roms sont évacués. L’un à Vaulx-en-Velin, lundi 6 août et deux à Villeurbanne, mardi 7 août. Quelques jours plus tard, face à un début de polémique, le ministre de l’Intérieur Manuel Valls affiche sa fermeté et justifie ces évacuations dans une tribune publiée par Libération. Les évacuations n’ont cessé depuis, au rythme des décisions de justice.

Pour les Roms de ces premières évacuations de l’été, la situation demeure incertaine. Aucune solution de relogement, même temporaire, n’a pu être trouvée que ce soit dans des hôtels ou dans des centres d’hébergement d’urgence. «Nous avions beau appeler le 115, ils n’avaient plus de place et nous répondaient d’attendre le mois d’octobre et le début du plan froid pour pouvoir espérer placer des familles», raconte Gilberte Renard, militante du collectif Classes (Collectif lyonnais pour l’accès à la scolarisation des enfants des squats).

Installés sur d’autres terrains

Faute de mieux, une grande partie de ces populations s’est donc installée sur d’autres terrains. C’est le cas des Roms évacués le 6 août du camp de La Rize à Vaulx-en-Velin. Selon le collectif Roms, sur les quelque 114 personnes qui vivaient sur cet emplacement, une majorité est aujourd’hui dispersée sur des terrains jusque là inoccupés dans le huitième arrondissement de Lyon, à Villeurbanne et à Saint-Fons (sud de Lyon).

Sur ce dernier terrain, on trouve également les populations expulsées mardi 7 août de l’avenue Léon Blum à Villeurbanne. Sur les soixante personnes évacuées ce jour-là, une quarantaine aurait rejoint le terrain de Saint-Fons, selon les estimations de l’association. «Les terrains rejoints sont également le lieu d’une grande précarité», constate Aurélie Neveu, coordinatrice de Médecins du monde à Lyon. «Le fait de bouger sans cesse les fragilise. Beaucoup ont perdu leurs affaires lors du démantèlement du camp et, bien souvent, ils n’en sont pas à leur première évacuation», explique-t-elle. Maisons délabrées, terrains non occupés, les Roms se rendent alors où ils peuvent.

Les nouvelles installations sont pourtant rendues difficiles. «Après les évacuations, ils errent mais la police les suit et les évacue de nouveau dès qu’ils tentent de s’installer», a pu observer Gilberte Renard. Car lorsqu’un terrain n’est squatté que depuis moins de 48 heures, son occupation est illicite.

A la rue

Du coup, «les Roms se cachent de plus en plus», remarque Aurélie Neveu, ce qui ne facilite pas la tâche des associations. Certains se réfugient ainsi dans des endroits isolés, comme ces trois familles retrouvées cachées dans les buissons par le collectif de Gilberte Renard. Il est difficile de chiffrer le nombre de Roms vivant à la rue mais la militante a déjà croisé plusieurs familles dont les visages lui étaient familiers : «le jour ils font la manche, la nuit, ils dorment dans les jardins publics avec presque rien», relate-t-elle.

Parmi les trois camps de Roms évacués début août dans l’agglomération lyonnaise, la centaine d’occupants du terrain de la rue Roger Salengro, à Villeurbanne, n’a pas été retrouvée par les associations. «Le plus inquiétant, c’est que leur situation était des plus déplorables. Eux n’avaient même pas construit d’abri de fortune. Les enfants marchaient pieds nus», raconte Gilberte Renard.

Dans des charters

Le 9 août, le collectif Roms estime que 240 personnes ont quitté le territoire français pour la Roumanie dans un vol charter. Ces Roms roumains avaient été pris en charge dans quatre bus, trois à Lyon et un à Saint-Etienne. Un retour qualifié alors d’«expulsions déguisée» par les associations.

Difficile de savoir précisément si une partie des Roms des trois camps évacués les 6 et 7 août étaient dans cet avion. Toujours est-il qu’en six mois au moins dix personnes du site de Vaulx-en-Velin ont reçu une OQTF (Obligation de quitter le territoire français), selon Gilberte Renard du collectif de soutien aux Roms.

Une population qui revient ensuite rapidement sur le territoire français. Gilberte Renard le constate : «nous retrouvons sur l’agglomération des personnes parties quelques jours plus tôt pour la Roumanie ou la Bulgarie. Cela concerne surtout les femmes avec enfants».

Mercredi, des experts des Nations unies ont mis en garde le gouvernement français, rappelant que les évacuation collectives sont interdites dans le droit international et appelant à la mise en place d’alternatives en matière de relogement.

Marlène Quintard, Libération, 31 août 2012

NdPN : voir aussi sur Rue 89 les directives données dans ce petit manuel administratif pour une expulsion réussie