Archives de catégorie : Feu aux prisons

Lettre de Mara Kanté, l’un des 42 engeôlés de Villiers-le-Bel innocenté après 29 mois de taule


SARCELLES, le 22 JANVIER 2011. Interpellé il y a 4 ans jour pour jour suite aux émeutes de Villiers-le-Bel, Mara Kanté, innocent, a perdu 2 ans de sa vie en détention.

SARCELLES, le 22 JANVIER 2011. Interpellé il y a 4 ans jour pour jour suite aux émeutes de Villiers-le-Bel, Mara Kanté, innocent, a perdu 2 ans de sa vie en détention.

VERBATIM : la lettre envoyée au président

Monsieur le président,

J’ai l’honneur de vous adresser la présente, les questions que je me pose justifient qu’elles soient posées au Président de tous les Français.

Je m’appelle Mara KANTE, je suis le fils de Boubou KANTE qui a travaillé pour vous lorsque vous étiez Maire de Neuilly-sur-Seine, et qui a été décoré deux fois par la ville, j’ai 25 ans et j’ai été victime d’une terrible erreur judiciaire, qui a complétement détruit ma vie et celle de ma famille.

Le 23 février 2008, j’étais mis en examen pour tentatives de meurtre sur personnes dépositaires de l’autorité publique et placé sous mandat de dépôt criminel, alors même que je clamais mon innocence.
Je n’avais jusqu’alors jamais eu affaire ni à la police ni à la justice, j’avais 20 ans et je pensais avoir un bel avenir devant moi.

Parce qu’il s’agissait des émeutes de Villiers-le-Bel, ma famille a été piétinée, ma maison saccagée.
Parce qu’il s’agissait des émeutes de Villiers-le-Bel, j’ai été écroué à la maison d’arrêt de Fresnes et placé en isolement médiatique pendant 11 mois.
Comme cela ne suffisait pas, j’ai ensuite été transféré à la maison d’arrêt de Villepinte en tant que détenu particulièrement surveillé, et ce pendant 19 mois et un 1 à la maison d’arrêt d’Osny. Dans les trois cas toute activité m’était interdite formation, école, travail, sport en groupe,
J’ai eu beau continuer à clamer mon innocence, à dire que le dossier contre moi était vide, je perdais pourtant des années précieuses en détention.

J’étais finalement renvoyé devant la Cour d’Assises, une première fois en 2010, où alors que le dossier apparaissait encore plus vide, le Procureur demandait 15 ans contre moi et que j’étais finalement acquitté des tentatives de meurtre mais condamné à la peine de trois années d’emprisonnement pour détention, port et transport d’armes de 1ere et 4eme catégorie correspondant quasiment jour pour jour au temps que je venais de passer en prison. Faits pour les quels je clamais mon innocence,

Le Parquet, pourtant, relevait appel de cette condamnation et j’étais jugé une seconde fois en 2011, où cette fois-ci, la souveraineté populaire décidait de m’acquitter sur l’ensemble des faits qui m’étaient reprochés.
C’est peut être en homme libre que je sortais de la Cour d’Assises des Hauts de Seine le 21 octobre 2011, mais en homme amère que je vis aujourd’hui.

Depuis cette terrible affaire, je n’avance plus dans la vie.

J’avais 20 ans quand j’ai été enfermé comme un animal, n’ayant que ma voix, alors inaudible, pour crier haut et fort, du fond de mon trou, en vain, mon innocence.
Je n’ai pas été entendu.

J’avais 20 ans et j’aspirais à vivre de ce que je savais faire de mieux, le football, et on me disait talentueux.
Trois années passées derrière les barreaux ont mis un terme à ce rêve, ont mis à mal tous mes espoirs, je ne serai jamais footballeur.

Je dois aujourd’hui réapprendre à vivre alors que mon nom fait peur, mon origine fait peur, l’histoire que je traine comme un boulet fait peur.
Je dois réapprendre à vivre, alors que ma jeunesse a été volée, que ma liberté m’a été volée, que ni mon égalité ni ma fraternité n’ont été respectées.
Chaque jour est un dur combat pour subvenir à mes besoins.

Je suis fier d’être français, fier d’être de Villiers-le-Bel, fier d’être noir.
La seule chose qu’il me reste aujourd’hui est ma détermination;

Parce que vous êtes le Président de tous les Français, je m’adresse à vous pour savoir ce que mon pays fait face à cette situation, ce que le Président de tous les Français peut dire à un jeune homme comme moi, brisé par une machine judiciaire aveugle, sourde, et toujours irresponsable, ce que le Président de tous les Français peut faire pour un jeune homme comme moi, ce que le Président de tous les Français peut faire pour éviter que des hommes comme moi, vivent ce que j’ai vécu, et perdent tout comme j’ai tout perdu.

Tiré d’un article du Parisien du 18 février 2012

Une nouvelle médaille pour l’institution carcérale

Une nouvelle médaille pour l’institution carcérale

65’999 détenus dans les prisons françaises, nouveau record

Le nombre de détenus dans les prisons françaises a atteint le 1er février un nouveau record historique, avec 65’699 personnes incarcérées, selon les statistiques mensuelles de l’administration pénitentiaire (AP) publiées vendredi. Le précédent record était de 65’262 détenus au 1er décembre 2011.

+ 6,4% en un an. Le nombre de 65’699 personnes incarcérées au 1er février représente une hausse de 6,4% sur un an (61’771 au 1er février 2011) et de 1,4% sur un mois (64’787 au 1er janvier 2012).

114,8% de taux d’occupation. Il y a au 1er février 57’213 places de prison disponibles, ce qui représente un taux d’occupation de 114,8% (113,2% au 1er janvier).

Le nombre de personnes prévenues (en attente de jugement) s’élève à 16’463, soit le quart des personnes incarcérées. Les mineurs détenus sont 723 au 1er février, en hausse de 1,5% par rapport au mois précédent (712).

Leur presse (Agence Faut Payer, 17 février 2012)

vu sur le Jura Libertaire le 19 février 2012

ndPN : médailles… et décorations ? – pour rappel, cette photo de la boutique Bouygues (chopée sur « pourquoi pas poitiers »)

« Affaire » de Labège : la dernière engeôlée est sortie, la lutte continue !

Et de quatre

Ce jeudi 16 février, la dernière des mises en examen encore incarcérée a été remise en « liberté », elle aussi, sous contrôle judiciaire !!!

Labège : on en est où ?

Pourlaliberte, 17 février 2012

ndPN : Pour rappel sur Poitiers, cet après-midi du samedi 18 février aura lieu à 14h une manifestation de solidarité, devant le palais d’injustice. Un concert de soutien aura aussi lieu le 3 mars au Plan B.

[Tunisie] Témoignage d’un français emprisonné sous Ben Ali

Torturé sous Ben Ali, gracié après la révolution tunisienne, un Français raconte

Condamné pendant l’ère Ben Ali sur la base d’aveux extorqués sous la torture, le Français Fabien Neumann, gracié par le nouveau régime, vient de rentrer chez lui après trois ans de prison en Tunisie. Il doit sa liberté au combat acharné de sa mère et à la révolution tunisienne.

Photo d'archives non datée de  Fabien Neumann et de sa mère Martine

Photo d’archives non datée de Fabien Neumann et de sa mère Martine

« Je me sens redevable envers la révolution », dit à l’AFP ce brun de 30 ans, Assis aux côtés de sa mère Martine et de sa soeur au domicile familial, en Rhône-Alpes.

Début février, après le premier anniversaire de la chute de Ben Ali, le président Moncef Marzouki a ordonné par décret la libération de Fabien et de deux autres détenus français condamnés pour trafic de stupéfiants et victimes de sévices, a confirmé le Quai d’Orsay, exprimant « sa satisfaction quant à leur libération ».

« Je veux remercier le président Marzouki et l’ambassadeur (de France) Boris Boillon de m’avoir sorti de prison », insiste Fabien. « J’ai fait une bêtise, c’est clair, mais j’ai payé trop cher », déclare-t-il.

En octobre 2008, cet éducateur jeunesse au casier vierge est arrêté près de Tunis en possession d’une cargaison de haschich. Sa première expérience de « passeur » tourne au cauchemar. Il avoue, mais cela ne suffit pas.

Les douaniers le torturent pendant plusieurs jours. « Ils croyaient que j’étais Algérien », dit-il. « Le premier soir, ils m’ont frappé pendant des heures, ils me disaient +on va tout te faire+, +on va te faire disparaître+. J’ai cru qu’ils allaient me tuer », raconte-t-il. « Ils m’ont électrocuté au genou avec une batterie, ils me frappaient à coups de bâton. Dans la salle d’interrogatoire il y avait du sang sur les murs ».

« A trois heures du matin un Gars est venu les engueuler et les a mis dehors. Il m’a dit de me rhabiller, m’a offert une cigarette. Je me suis dit +c’est terminé+. Mais après dix minutes, il m’a dit: +tu vas dire la vérité+. A lui tout seul il m’a frappé plus que les cinq autres réunis ». « A six heures du matin, la femme de ménage est arrivée, elle m’a craché dessus », se rappelle-t-il.

Alerté le surlendemain, le consulat intervient: les tortures cessent. Mais à l’époque, « les autorités françaises se sont gardées de dénoncer le traitement infligé à leur ressortissant », affirme l’ONG Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (Acat).

Fabien signe des aveux en arabe, y compris sur des faits qu’il n’a pas commis. Il est condamné à 40 ans de prison, puis à dix en appel. Il passera plus de trois années à la prison de Mornaguia, près de Tunis.

« Moi j’ai toujours été bien traité en prison grâce à ma nationalité. Et puis je me suis adapté pour éviter les ennuis ».

Mais les récits de mauvais traitement sont légion parmi les détenus.

« J’ai vu quelqu’un qui avait les genoux percés. Des gamins se font arracher les ongles pour une barrette de shit. La corruption, les tabassages dans les commissariats, c’est normal là-bas. Un détenu qui s’est fait violer, il ne s’en cache pas », assure Fabien. « J’ai failli craquer », avoue-t-il. « Parfois je n’avais pas de parloir pendant deux mois. Mon moteur, c’était ma mère », qui, jusqu’à l’épuisement, frappera à des dizaines de portes pour le faire sortir.

Libre depuis quelques jours, Fabien est pressé de tourner la page, de trouver du travail, « peut-être dans une association d’aide aux détenus ».

« J’étais content de sortir, mais malheureux aussi de laisser derrière moi des gens qui n’ont pas la chance comme moi d’être Français », dit-il. Il pense aussi à la « cinquantaine de binationaux encore derrière les barreaux » pour qui il espère une grâce.

L’avocate tunisienne de Fabien, Radhia Nasraoui, a porté plainte fin 2011 contre ses tortionnaires. « J’aimerais qu’ils fassent une longue peine. Mais même s’ils vont en prison ils n’y resteront pas longtemps, déclare Fabien. Et ces pratiques vont durer encore un moment. Les policiers sont restés les mêmes après Ben Ali ».

AFP, 17 février 2012

[Palestine] Manifestations pour Khader Adnane

ndPN : Nous évoquions il y a deux jours le rejet par la « justice » militaire israëlienne de la demande d’appel du prisonnier Khader Adnane, en grève de la faim depuis maintenant 60 jours (contrairement aux 30 jours mentionnés dans la légende de la photo de l’AFP dans l’article ci-dessous). Adnane, très affaibli, est détenu dans des conditions ignobles, attaché à son lit. Les Palestiniens sont descendus dans la rue aujourd’hui et se sont frottés aux forces de répression israêliennes. Les grèves de la faim solidaires se multiplient. Libération de Khader Adnane !

Pavillon Noir, 15 février 2012

Manifestations pour un détenu palestinien en grève de la faim

Des manifestations se déroulaient mercredi en Cisjordanie et à Gaza en solidarité avec un membre du mouvement radical palestinien emprisonné en Israël, en danger de mort après 60 jours de grève de la faim.

Des Palestiniens manifestent en solidarité avec Khader Adnane, en grève de la fin depuis 30 jours, en Cisjordanie, le 15 février 2012

Des Palestiniens manifestent en solidarité avec Khader Adnane, en grève de la fin depuis 30 jours, en Cisjordanie, le 15 février 2012

Khader Adnane, 34 ans, a été autorisé à recevoir mercredi la visite de sa famille dans un hôpital de Safed, dans le Nord d’Israël, où il est en détention administrative, a-t-on appris auprès de son épouse et de l’administration pénitentiaire.

Détenu sans inculpation, il a été arrêté en décembre par l’armée israélienne près de Jénine dans le Nord de la Cisjordanie occupée, où il était porte-parole du Jihad islamique. Il est en grève de la faim depuis le 18 décembre.

Des rassemblements de solidarité sont organisés devant la prison militaire israélienne d’Ofer en Cisjordanie et les sièges du Croissant-Rouge dans toutes les villes palestiniennes, ainsi que des grèves de la faim ponctuelles, selon le président de la commission pour la défense des prisonniers, Amine Chomane.

Près d’un millier de personnes, essentiellement des jeunes, se sont rassemblées devant la prison d’Ofer, près de Ramallah. Des heurts ont éclaté, les manifestants lançant des pierres et les forces israéliennes tirant des gaz lacrymogènes et des balles caoutchoutées, selon un photographe de l’AFP et des témoins.

A Hébron, dans le sud de la Cisjordanie, des centaines de personnes observaient un sit-in en présence de responsables, dont le ministre palestinien des Prisonniers, Issa Qaraqaë.

Les manifestants brandissaient des photos du détenu et des banderoles sur lesquelles on pouvait lire « Non à la détention administrative arbitraire ».

« Khader Adnane est devenu un symbole national, arabe et international, de défense de la dignité des hommes libres dans Le Monde entier », a déclaré le ministre à l’AFP.

« Le Monde doit forcer Israël à rendre leurs droits aux prisonniers palestiniens et à les traiter comme des prisonniers de guerre et non pas comme des criminels », a-t-il ajouté.

Des rassemblements similaires se tenaient dans l’ensemble des Territoires palestiniens, notamment à Gaza, où un appel à une grève de la faim en solidarité avec le détenu de 08H00 à 18H00 locales a été lancé.

L’avocat de Khader Adnane, Jawad Boulos, a annoncé à l’AFP son intention de saisir la Cour suprême israélienne en raison de la dégradation de l’état de santé du détenu, dont la demande de remise en liberté a été rejetée lundi par un tribunal militaire.

L’avocat, qui lui a rendu visite mardi, a affirmé que le détenu avait les mains et les pieds menottés à son lit d’hôpital dans des « conditions inhumaines ».

L’association Médecins pour les droits de l’Homme-Israël (PHR-Israel) a souligné dans un communiqué que « ces derniers jours, M. Adnane avait été examiné par un médecin indépendant, un bénévole de PHR-Israel, qui a affirmé: ‘L’heure tourne' ».

« M. Adnane est toujours enchaîné à son lit d’hôpital, en violation de l’éthique médicale, des réglementations du ministère de la Santé et même de celles de l’administration pénitentiaire israélienne », selon le texte.

Selon la loi israélienne, héritée du mandat britannique, un suspect peut être maintenu jusqu’à six mois sans inculpation en détention administrative, renouvelable indéfiniment.

AFP, 15 février 2012