Archives de catégorie : Désinformation bourgeoise

Deux communiqués à propos de l’offensive israëlienne et de la manifestation de soutien aux Palestiniens

Vu sur Atlasinfo, 11 juillet 2014

A bas l’occupation ! Arrêt immédiat des bombardements ! Solidarité avec le peuple palestinien !

samedi 19 juillet 2014, par rennes info

Groupe La Sociale de la Fédération Anarchiste. Rennes

Ce qui se passe encore une fois à Gaza est une tragédie dont les États-Unis et l’Europe sont en grande partie responsables, par le soutien inconditionnel qu’ils apportent à la politique israélienne et par l’application du principe de deux poids deux mesures qui est fait du traitement de l’information. Lorsqu’un président exprime « la solidarité de la France face aux tirs de roquettes en provenance de Gaza », lorsqu’il « rappelle que la France condamne fermement ces agressions », lorsqu’il déclare qu’il « appartient au gouvernement israélien de prendre toutes les mesures pour protéger sa population face aux menaces [et] de prévenir l’escalade des violences », pourquoi n’évoque-t-il pas les morts des civils à Gaza ?

Le président français ne dit pas un mot sur l’enfer vécu par les familles palestiniennes, les enfants, les femmes, les civils de l’autre côté de ce qui est appelé la « barrière de sécurité » ? Sans doute considère-t-il que toute la population palestinienne, femmes et enfants compris, est constituée de « terroristes ». On passe sous silence les centaines de morts et de blessés parmi la population palestinienne, les maisons, les écoles, les coopératives agricoles détruites après le largage de 400 tonnes de bombes et de missiles durant les trois premiers jours de l’opération militaire israélienne sur la Bande Gaza.

Ce qui se passe à Gaza représente un danger permanent pour toutes les populations, un risque énorme pour la région, une injustice flagrante qui perdure depuis 1948… Pourtant, en France, les nombreuses analyses, faites par les hommes politiques ou les médias sont souvent à la fois un tissu complexe de mensonges, de propagande, de déni et d’informations erronées.

La question n’est pas le contraste entre des bandes armées et une armée suréquipée disposant de drones, de forces aériennes et navales qui bombardent un territoire où la population est l’une des plus denses au monde. La question réside dans les motivations qui poussent les responsables de ces groupes armés et ceux d’une armée suréquipée à s’affronter malgré l’énorme déséquilibre des rapports de forces.

Consciente ou non, il y a une sorte de complicité entre les deux parties en présence, qui ont intérêt, pour des raisons différentes, au maintien de l’état actuel des choses : côté israélien leur politique d’expansion territoriale, d’implantation de colonies de peuplement dans les territoires palestiniens et le maintien d’un état de guerre permanent ; côté Hamas le contrôle politique et religieux sur la population de la Bande de Gaza prise en otage, et le refus de toute alliance avec les autorités palestiniennes civiles.

Une chose cependant est certaine : la violence en boucle est nourrie de part et d’autre par l’occupation. La situation est engendrée par le blocus, par l’arrêt des négociations qui n’aboutissent à rien, sinon à créer plus de misère et d’humiliation, à terroriser la population civile palestinienne, littéralement enfermée dans un territoire qui est une prison à ciel ouvert. Dans une interview qu’elle accorda à Radio Libertaire le 6 juillet 1991, Arna Mer-Khamis déclara : « il n’y a pas de pire terreur que l’occupation, et il n’y a pas de pire occupation que l’occupation israélienne. »

Aujourd’hui, Gaza permet de tester les armes nouvelles produites par l’industrie militaire israélienne en plein essor. Après chaque intervention militaire, les ventes des armes israéliennes se chiffrent en milliards de dollars. Dans les foires internationales aux armements, les armes estampillées « combat proven » (ayant subi l’épreuve du feu) se vendent beaucoup mieux.

Les négociations avec les Palestiniens n’aboutiront pas tant que les Israéliens seront motivés par la volonté d’occuper un maximum de territoires palestiniens. Les autorités israéliennes ne veulent pas de la paix. Le maintien d’un État de guerre permanent est, pour elles, une condition nécessaire à leur politique d’annexion territoriale. Une paix effective avec les Palestiniens serait une catastrophe car elle aurait deux effets totalement indésirables :
- 1. Elle mettrait fin à l’annexion de territoires palestiniens ;
- 2. Elle libérerait les énormes contradictions sociales de la société israélienne qui ne seraient plus comprimées par la menace de guerre.

Si les fondamentalistes religieux palestiniens sont une des causes de l’échec des négociations de paix, la cause principale de cet échec réside dans la volonté frénétique des autorités israéliennes d’annexer un maximum de territoires palestiniens et de maintenir la population palestinienne dans des espaces aussi restreints que possible.

Le fond du problème reste donc l’occupation israélienne de territoires palestiniens et la politique israélienne d’annexion permanente de territoires palestiniens. C’est pourquoi la fin de l’occupation reste un préalable pour que cesse cette violence en boucle.

René Berthier, d’après l’émission Chroniques rebelles de Radio Libertaire – 18 juillet 2014

contact@farennes.org

Les flics du PS n’ont pas réussi à museler la rue !

Manuel Valls ne voulait pas de manifestation de soutien à la Palestine à Paris ? Il en a eu plusieurs !

Le gouvernement Valls a voulu interdire la manifestation parisienne prévue ce samedi 19 juillet en soutien à la Palestine occupée. La raison ? De prétendus « débordements » à la précédente manifestation parisienne qui, pourtant, ont été directement provoqués par la Ligue de défense juive (LDJ), un groupe de combat d’extrême droite. La vérité est, qu’en réalité, ce gouvernement a choisi son camp : celui des bourreaux.

Mais on ne peut empêcher la solidarité de s’exprimer. Métro Barbès, ce samedi, à l’heure dite, des milliers de personnes étaient au rendez-vous. Dans la foule, aux côtés de très nombreux drapeaux palestiniens, flottaient des drapeaux du NPA, d’Alternative libertaire et d’Ensemble. L’Union syndicale Solidaires était là aussi, ainsi que des militants de la FA et les principaux groupes de soutien à la cause palestinienne (GUPS, Génération Palestine…).

Face à nous, des hordes de robocops interdisant le départ en manifestation.

Lasse d’être ainsi immobilisée, la foule est alors partie en manifestation à rebours, en remontant le boulevard Barbès. A peine avait-elle fait quelques dizaines de mètres que la foule était de nouveau bloquée par la police, à hauteur du métro Château-Rouge. Les premiers tirs de grenades lacrymogènes n’ont pas tardé. Mais celles-ci n’ont réussi qu’à provoquer le départ de plusieurs petites manifestations dans les rues adjacentes.

Alternative libertaire a, pour sa part, marché avec plusieurs centaines de personnes qui ont gravi Montmartre, jusqu’à atteindre le Sacré-Cœur à quelques centaines. Les rues de la butte ont résonné tout du long des slogans pour la Palestine libre ! Depuis le Sacré-cœur, les anticolonialistes ont ensuite redémarré une manifestation sauvage que la police, malgré ses efforts, s’est avérée incapable de stopper.

Remontée bientôt à 2000 personnes environ, la manif s’est vue de nouveau bloquée par les CRS. Elle a alors emprunté les boulevards de Magenta, de Strasbourg et de Sébastopol, gonflant jusqu’à 3000 personnes, dans une ambiance vindicative et sereine à la fois. Elle ne s’est dispersée qu’une fois parvenue aux Halles-Châtelet. Autant dire que nous avons fait largement passer notre message de solidarité, sans doute même davantage que si la préfecture nous avait accordé le traditionnel parcours Bastille-Nation !

Pendant ce temps, à Barbès, où quelques militants d’AL étaient restés, cela tournait à l’émeute, avec jets de projectiles, tirs policiers au Flash-ball, poubelles incendiées et affrontements jusque dans la soirée. Trente-trois interpellations sont à déplorer.

A ce stade, il est important d’apporter une précision : aussi bien à Barbès que dans la manifestation sauvage, les saillies antisémites ont été rares et bien isolées. L’intelligence collective de la foule, son autodiscipline dans une situation pourtant tendue, ont été impressionnantes. Ici, une ahurie brandissant un ananas [1], avant d’être interpellée ; là un exalté clamant « Allahu akbar » sans que personne ne le suive ; là encore, un jeune faisant une quenelle provoquant aussitôt l’intervention de manifestant.e.s lui expliquant le sens réel de son geste, et pourquoi il n’avait rien à faire ici.

Dans le reste de l’Hexagone, la solidarité s’est exprimée également dans la rue puisque des milliers de personnes ont manifesté à Marseille, Tours, etc.

Plus que jamais, exprimons notre solidarité avec les palestiennes et les Palestiniens. Exigeons l’arrêt des offensives israéliennes contre la Bande de Gaza !

Plus que jamais, dénonçons l’attitude complice du gouvernement français vis-à-vis des crimes du gouvernement israélien !

Des manifestant.e.s d’Alternative libertaire, le samedi 19 juillet

[1] L’ananas est le symbole de la chanson Shoah nanas, créée par Dieudonné pour tourner le génocide juif en dérision. C’est devenu un signe de reconnaissance de l’extrême droite dieudonniste.

NdPN Mise à jour : voir aussi ce témoignage d’un membre du groupe Regard Noir de la FA.

Réponse à l’article de 7 à Poitiers concernant les « marginaux »

NdPN : Il y a un mois est paru un article de 7 à Poitiers (journal dit « gratuit », largement diffusé à Poitiers), concernant les gens de la rue. Tout simplement à vomir ! Nous avons reçu un article d’une certaine Anne Bonny, apportant un autre point de vue.

Réponse à l’article d’o-presse Les marginaux, reparlons-en ! de Nicolas Boursier

7 à Poitiers n°220, du 4 au 10 juin 2014, page 4

http://www.7apoitiers.fr/enquete/1250/les-marginaux-reparlons-en (l’article incriminé)

http://www.7apoitiers.fr/enquete/853/poitiers-est-elle-marginale (le 1er article)

Attention, relents de marée brune ! Nicolas Boursier, rédacteur en chef de 7 à Poitiers et pourfendeur de marginaux remet le couvert. En plus de prendre clairement parti pour la répression, il offre une tribune abjecte et mensongère aux autorités, riverains et commerçants les plus obtus.

Audacieux, l’article est rédigé dans la rubrique « droit de suite », terme qui dans le jargon journalistique désigne l’opportunité pour un journaliste d’écrire un article sur un sujet déjà abordé, afin par exemple de mettre une personne précédemment interrogée face à ses contradictions. Alors que le premier papier donnait la parole à l’un des dits marginaux – comme si un témoignage suffisait à représenter la réalité du milieu, tandis que la partie adverse avait tout loisir de se défouler – ce second article est tout simplement un lynchage public qui ne laisse place à aucune défense.

L’article débute en nous parlant « d’un phénomène de marginalisation dans le centre-ville de Poitiers ». L’emploi du mot marginalisation est amusant. En effet, il est utilisé ici pour exprimer l’accentuation de la présence des dits marginaux dans le centre-ville, comme on parlerait d’embourgeoisement ou de gentrification pour désigner un espace qui est investi par les plus riches et se transforme à leur profit (d’ailleurs, c’est davantage ce phénomène que j’aurais souligné à Poitiers). En réalité, marginalisation désigne le fait d’écarter une personne ou un groupe de la norme et de la société. Si ce phénomène existe à Poitiers, il est donc du fait de fantasmes populaires, d’ailleurs entretenus par la régularité de ce genre d’article. Mais 7 à Poitiers n’est pas le seul à blâmer, Centre-République-Nouvelle-Presse est maintenant passé maître dans l’acharnement anti-zonard. Poitiers c’est cela. D’une seule et même voix, les médias locaux dressent des portraits de flics sans peur et sans reproche, se font tribune de l’équipe municipale façon cirage de pompe, offrent une vitrine gratuite aux commerces nantis de Coeur d’Agglo, et se soutiennent mutuellement dans un processus d’épuration sociale.

Bref. Parler de marginaux pose plusieurs problèmes. D’abord parce que c’est enfermer un ensemble d’individus sous un terme commun, alors qu’il ne reflète aucune identité commune. On identifie un groupe par les caractéristiques qui lient ses membres (culture, comportements, sentiment d’appartenance, etc). Or, lorsqu’on désigne ces gens comme étant marginaux, les seules particularités qu’on veut bien leur accorder sont l’alcool, la drogue, la violence, les chiens, les incivilités, le bruit et l’odeur. Il en est de même lorsqu’on parle de punks à chiens, alors que tous ne se réclament pas du mouvement punk et n’ont pas tous des chiens. Ces généralisations peuvent paraître anodines, mais alors que le politiquement correct nous conduit à la retenue lorsqu’il s’agit de caractériser des groupes minoritaires (handicapés ou immigrés par exemple) nous n’hésitons pas à stigmatiser les personnes vivant dans la rue, déniant leur individualité et la dignité qui devrait incomber à n’importe quel être humain. Pour illustrer cette discrimination décomplexée, saluons la déclaration de Christian Petit adjoint délégué au maire à la prévention, la sécurité, la police municipale, l’hygiène publique, et moult autres choses : « Individuellement, leur comportement ne pose pas de problème. Le hic, c’est lorsqu’ils se regroupent ». Remarquez le pastiche grossier de Brice Hortefeux à propos des arabes.

Le second problème avec le terme marginaux est qu’il n’a aucun sens. Le clergé catholique français est un groupe restreint, partageant une culture commune, et vivant à une distance relative de la société. Parle-t-on pour autant de marginaux ? Non. Ce mot veut en fait stigmatiser. Désigner quelqu’un comme en marge, c’est refuser de lui reconnaître une quelconque appartenance à notre société. On cherche donc à l’exclure symboliquement. Il a pour but de créer une ségrégation en asseyant la peur et le repli. On n’hésite pas à présenter ces personnes « démunies » comme un poids pour la société dont elles profiteraient, fainéantes qu’elles sont, délinquantes, sans volonté, et rendez-vous compte, ils maltraiteraient leurs chiens ! Un démenti évident est d’ailleurs à faire sur l’allégation d’un commerçant sûrement alcoolisé, qui affirme avoir « compté jusqu’à 40 chiens réunis ». Divisons sans crainte ce chiffre par 3 ou 4.

On y apprend aussi le ras-le-bol de la mendicité forcée, expression encore maladroite puisqu’elle désigne l’exploitation de personnes, souvent d’enfants, forcés à faire l’aumône dans la rue au profit de réseaux organisés de traite. Dans notre cas, les mendiants sont volontaires, et n’imposent pas le don, il n’y a donc pas contrainte. On pourrait, au pire, parler dans certains cas de mendicité insistante. Mais si les passants se sentent obligés de donner à chaque demande et se culpabilisent de ne pas vouloir ou pouvoir le faire, je les invite à apprendre à refuser gentiment et à passer à autre chose.

Et Monsieur Petit de surenchérir : « Socialement et médicalement […] la vingtaine de marginaux sédentaires qui fréquentent le plateau sont très bien suivis ». Le contrôle social classique quasi vétérinaire appliqué à toute déviance (malades mentaux, délinquants, et peut-être bientôt simples électrons trop libres ?). Pis, faute d’arriver à intégrer de force l’individu au système ou de l’y faire adhérer de lui-même, il convient de le surveiller d’une manière ou d’une autre pour anticiper et repérer toute velléité contestataire, et réprimer les comportements déviants sous prétexte de sécurité. Malheureusement, pour ces personnes, le harcèlement est quotidien (fouilles, insultes, contrôles, amendes, interpellations), autant de techniques visant à épuiser la mauvaise graine et lui montrer qui possède et décide en ces lieux.

Bien sûr, ne faisons pas d’angélisme, la situation des gens de la rue est souvent précaire, qu’elle soit choisie ou non. Et des problèmes y existent, mais dans des proportions semblables à ce qui peut exister dans la sphère privée. Ce qui dérange finalement, c’est la pauvreté visible, ce pourquoi il conviendrait de « leur trouver un coin bien à eux, où ils pourraient se réunir sans gêner la population » (dixit un commerçant de Poitiers Le Centre).

La peur qu’inspire les gens de la rue, et donc leur exclusion sociale, est finalement davantage liée à la doxa (aux préjugés populaires) plus que par les comportements en eux-mêmes. Et la mafia mairie-commerces-médias s’engouffre dedans la tête la première pour justifier sa politique plus blanc que blanc. Le premier article était limpide à ce sujet : « À l’heure où le centreville se refait une beauté, la marginalisation de la rue fait parfois tache dans le décor et dérange à plus d’un titre riverains et commerçants. ». Les marginaux, sont donc des boucs-émissaires mais utiles. De parfaits alibis pour mettre en place des politiques hygiéniste et prohibitionniste, qui donnent aux autorités les moyens d’imposer un savoir-être, un « bien vivre ensemble » en centreville, et qui permettent de le rendre plus attractif, de le valoriser et d’attirer une population plutôt aisée où seuls les comportements consuméristes y sont privilégiés. L’occasion également pour Alain Claeys d’installer enfin la vidéo-surveillance autrement injustifiable dont il a toujours rêvé. Vient une question : jusqu’où se limitera la municipalité dans cette ingérence de nos vies publiques ? Qui est-elle pour décider de qui dispose du droit de cité en centre-ville ?

Quoi qu’il en soit, il serait sage de mettre le holà sur cet acharnement, et de commencer tous et toutes à considérer les « gens de la rue » comme nos pairs. Des êtres sensibles comme vous et moi, ici estimables et là imparfaits. Remarquez qu’ils sont souvent prompts à la discussion, pour peu que vous les respectiez – n’en est-il pas de même pour vous ? Leurs expériences et leurs histoires personnelles sont souvent intéressantes et enrichissantes. Il serait honnête de constater que leurs chiens sont particulièrement bien traités, aimés, et toujours nourris avant leurs maîtres eux-mêmes. Il vous surprendrait d’observer que bien souvent, alors que personne ne bouge jamais d’un pouce, les plupart des gens de la rue interviendront lors d’une agression et ne laisseront pas passer quelques comportements déplacés. Alors avant de vous laisser intimider par la vision prémâchée qu’on vous offre à voir, allez leur parler de faites-vous votre avis. Un grand combat d’ouverture d’esprit et de dépollution mentale est encore à gagner !

Anne Bonny

mail reçu il y a quelques jours

La grande dévalorisation. Pourquoi la spéculation et la dette de l’État ne sont pas les causes de la crise

La grande dévalorisation. Pourquoi la spéculation et la dette de l’État ne sont pas les causes de la crise

À qui incombe la faute de la crise financière et économique qui maintient en haleine la planète entière depuis l’année 2008 ? Aux « banquiers cupides » ? Ou alors aux « États drogués à la dette » ? Ni aux uns ni aux autres, selon Ernst Lohoff et Norbert Trenkle, du groupe Krisis.

Les causes en sont bien plus profondes. Ils interprètent l’énorme gonflement des marchés financiers au cours des trente dernières années comme une conséquence de la crise structurelle fondamentale du mode de production capitaliste, dont les prémices doivent être cherchées dans les années 1970. La troisième révolution industrielle qui se mit en place à ce moment-là entraîna une éviction accélérée de la force de travail hors de la production, sapant ainsi les bases de la valorisation du capital au sein de l’« économie réelle ». La crise structurelle de la valorisation du capital ne put être ajournée qu’en ayant massivement recours, sous la forme du crédit et de la spéculation, à la saisie anticipée de valeur future. Mais l’accumulation de « capital fictif » parvient aujourd’hui à ses limites, parce que toujours plus de vieilles créances ont été amassées, qui ne peuvent plus être « honorées ».

Le concept de « capital fictif » – telle est la thèse des deux auteurs – est fondamental pour comprendre le procès de crise actuel. Ils exposent donc, dans la deuxième partie de leur livre, tout d’abord les bases théoriques permettant de comprendre cette sorte de capital et son rôle dans le procès d’accumulation capitaliste. La troisième partie analyse ensuite l’évolution de la fonction du capital fictif dans le développement historique du mode de production capitaliste. Si au temps de la révolution industrielle il n’avait qu’une importance secondaire, il joua un rôle essentiel, déjà à l’époque du fordisme, pour donner une impulsion et aider au démarrage de l’accumulation. Mais tandis que cette saisie pouvait encore être convertie dans une production de valeur effective, cela n’est plus possible à l’âge de la troisième révolution industrielle. Le capital fictif se transforme lui-même en moteur de l’accumulation, ce qui ne peut fonctionner qu’à travers une saisie toujours plus large de l’avenir.

Après la crise de 2008, l’effondrement catastrophique du système capitaliste mondial n’a pu être empêché qu’au moyen d’une intervention massive sans précédent des États et des banques centrales. Maintenant, si les conséquences de la crise sont imposées à la société, sous la forme de la dette de l’État et de la « politique d’austérité », cela ne prouve aucunement que nous aurions vécu « au-dessus de nos moyens » et que nous devrions nous « serrer la ceinture ». Bien au contraire, la société vit largement en dessous des possibilités, que les nouveaux potentiels de productivité ont développées, qui se transforment de plus en plus, dans les conditions du capitalisme, en forces destructives. La société, telle est la thèse finale du livre, est trop riche pour le capitalisme.

L’analyse non orthodoxe de la crise développée dans ce livre est fondée sur une lecture de la théorie marxienne qui s’oppose diamétralement, à de nombreux égards, au marxisme traditionnel et à l’actuelle « renaissance de Marx ». Ici, Marx n’est pas le théoricien de la lutte des classes mais celui qui développa une critique radicale d’une société fondée sur la production de marchandises et qui se heurte à ses propres contradictions internes. Les auteurs renouent avec cette pensée, la développent et l’étayent de manière conséquente en faisant appel à des matériaux empiriques.

Le résultat en est une analyse de la crise qui s’oppose à tout ce qui se vend actuellement sur le marché des idées.


La grande dévalorisation. Pourquoi la spéculation et la dette de l’État ne sont pas les causes de la crise (Post-éditions, mai 2014)


Voir le site la critique de la valeur (Wertkritik)
http://palim-psao.over-blog.fr

Vu sur le site de la CNT-SO, 31 mai 2014

[Poitiers] Quand la liberté d’expression passe en procès

NdPN : soutien inconditionnel au camarade blogueur de Ni dieux ni maîtres en Poitou ! Décidément à Poitiers, la liberté d’expression fait l’objet d’un matraquage en règle. On ne compte plus les intimidations minables, les contrôles d’identité piteux et les procès grotesques pour rassemblements, chansonnettes, slogans en manif, tractages, banderoles, diffusion de journaux, dès qu’il s’y trouve la moindre connotation anti-autoritaire ! Si ça continue, péter près d’un flic pourrait bien être considéré comme un outrage aux organes olfactifs ! On remarquera une fois de plus l’acharnement, trois ans après les « faits » (à savoir le simple relai d’une vidéo mixant des images et des propos de… journalistes, interprété comme une « menace de mort [sic] !), de la part des pouvoirs policier, judiciaire et médiatique, contre ce que ces spécialistes de l’intimidation, de la répression et de la désinformation appellent les « anarchistes », afin de stigmatiser les prolétaires en lutte . Le vocabulaire employé ne trompe pas : une fois de plus, il s’agit d’un procès éminemment politique. Cette énième attaque contre le militantisme poitevin témoigne d’un travail de sape sur le long terme visant bien évidemment à décourager l’auto-organisation des opprimé.e.s. Verdict le mois prochain.

le pape hinault

La vidéo constitue-t-elle une menace de mort ?

Une vidéo mettant en cause nommément le directeur de la Police de Poitiers avait été relayée par un blogueur. Il est poursuivi pour menaces de mort.

Le montage vidéo est une succession de photos (qui débute par celle d’un poulet rôti) retouchées pour certaines et de documents visuels et sonores des événements du 10 octobre 2009 lors du festival des Expressifs (*). Certaines images ont été publiées dans la presse, la voix off est également constituée de répliques de films et de propos journalistiques choisis. Le « clip » s’intitule « Poitiers street duel ». Il est très orienté et vise principalement Jean-François Papineau, directeur départemental de la sécurité publique, à travers des photos et citations de tags menaçants bombés sur les murs de la ville, mettant également en cause sa façon de traiter les anarchistes à Poitiers.

Blogueur mais pas auteur

A la lecture du dossier, Mme la présidente explique que le montage a d’abord été hébergé par Dailymotion, a été partagé sur d’autres réseaux sociaux puis un lien s’est retrouvé – deux ans après les faits entre le 26 février et le 30 novembre 2011, sur le blog « Ni Dieu, ni maître en Poitou » –, administré par Jacques, blogueur poitevin âgé de 30 ans.
Hier, à la barre du tribunal correctionnel de Poitiers, Jacques devait être jugé pour incitation à la haine et menace de mort à l’encontre de Jean-François Papineau. Même si le blogueur n’est pas l’auteur de la vidéo, tout le débat porte sur sa responsabilité en tant qu’animateur.
Ponctuant toute ses fins de phrase d’un Mme le juge discipliné, le jeune syndicaliste et militant qualifié « d’extrême gauche » explique au tribunal sa volonté « de parler de l’actualité militante sur Poitiers et de la répression… sans prendre partie » avant d’ajouter qu’il « ne considérait pas cette vidéo comme un outrage en soi mais comme une œuvre artistique ».
Le conseil de la partie civile insiste sur la fonction de son client qui doit avoir « une attitude d’exemplarité ». Seulement, « du fait de sa mission de service publique, il est aussi une personne exposée, investie et qui n’a pas l’air de plaire à un certain nombre de justiciables… » et d’un homme émotionnellement touché par les propos véhiculés dans la vidéo. Face au prévenu qui n’est pas l’auteur du montage, Me Bethume de Moro pose néanmoins : « Il est le facilitateur, le diffuseur, celui qui concourt à la publicité. »
Le procureur abonde et fait un parallèle avec une affiche que l’on garde sous le coude ou que l’on colle sur un mur, qu’il soit réel ou virtuel, pour en diffuser le message. Selon lui, les propos comme « Papineau, on aura ta peau » lus trois fois par une voix off, le titre du blog qui véhicule la notion de duel donc de mise à mort, la technique qui consiste à trouver une cible à pilonner sont autant de manœuvres provocantes utilisées par les anarchistes et sont « des éléments matériels de menaces de mort caractérisés ». Et requiert « une peine de principe » de 300 euros.

«  Mon client n’est pas anarchiste  »

Me de La Rocca, pour la défense, avertit : « Je ne suis pas l’avocat des anarchistes, tout comme mon client n’est pas anarchiste. » Elle constate que le directeur de la Police a « des difficultés avec l’opposition, la contestation, la libre expression ». Selon l’avocate, « il ne viendrait à l’idée de personne de poursuivre les journaux pour avoir relayé des propos ou tags ». Et estime que son client est a été mis en examen « à cause et en raison de ses idées » puisqu’il n’a jamais apporté aucun commentaire en marge de la vidéo. Le jugement est mis en délibéré au 26 juin.

(*) Ce jour-là une manifestation anti-carcérale avait dégénéré dans les rues de Poitiers. Plus de 200 casseurs avaient brisé des vitrines et s’étaient opposés violemment aux forces de l’ordre.

M-L A, Nouvelle République, 16 mai 2014

[Châtellerault] De la « martélothérapie »

NdPN : les propos de l’adjoint municipal d’Abelin (maire de Châtellerault) sur la « sécurité » valent leur pesant de caca chouette. Nous avons souligné les termes les plus éloquents de l’ancien bidasse, qui semble prendre très à cœur son rôle de gestionnaire de la répression.

Philippe Mis :  » Je ne ferai pas de câlinothérapie « 

La mission de Philippe Mis, déjà adjoint lors du premier mandat de Jean-Pierre Abelin, a été recentrée sur la sécurité. Interview.

Ancien chef d’état-major de l’École de gendarmerie, Philippe Mis, 64 ans, est de nouveau adjoint de Jean-Pierre Abelin mais avec une mission recentrée sur la sécurité. Interview.

Vous avez hésité à vous représenter en mars. Pourquoi ?

« Ma première expérience était une belle expérience mais, vu mon âge, je pensais que ça pouvait s’arrêter là. »

Qu’est-ce qui vous a fait changer d’avis ?

« Jean-Pierre Abelin m’a convaincu. J’ai accepté avec beaucoup de plaisir parce que c’est très excitant. Et puis c’est dans ma nature. Il faut que ça bouge. »

Votre mission, qui comprenait auparavant aussi l’action immobilière et l’urbanisme, a été recentrée sur la sécurité. Pourquoi ?

« Dans la répartition des nouvelles délégations, Madame Lavrard a lâché la culture. Elle avait le patrimoine, il me semble que c’était un package relativement correct de faire urbanisme-patrimoine. Ça faisait le package complet. La deuxième approche, c’est que la sécurité était mon cœur de métier et, qu’à l’heure actuelle, ça fait partie des préoccupations de nos concitoyens. »

Quelle est votre feuille de route ?

« C’est d’essayer de remettre un petit peu en route ce qui avait été largement travaillé au premier mandat par Véronique Abelin sur le Contrat local de sécurité pour la prévention de la délinquance, sur la stratégie… »

«  A l’heure actuelle, il y a une certaine dérive  »

Plus personnellement, quel est votre objectif ?

« Avec tous les acteurs sociaux, je souhaiterais que nous puissions essayer de cadrer au mieux ce qui se passe. A l’heure actuelle, il y a une certaine dérive. On souhaite que les gens soient remis dans le droit chemin. Je traiterai tout ce que j’ai à traiter avec pragmatisme, sans angélisme. Je ne ferai pas de câlinothérapie. De temps en temps, il fait [NdPN : sic] faire de la martélothérapie. Quelquefois, les gens comprennent mieux. »

Vous allez augmenter le nombre de policiers municipaux ?

« Ils sont six. Je pense qu’entre 8 et 10, on serait dans un volume intéressant. »

Avant les élections, Jean-Pierre Abelin envisageait d’installer des caméras de vidéoprotection sur une quinzaine de sites. Le projet en est où ?

« A l’heure actuelle, nous sommes encore en phase de pré-étude sur les emplacements. Tout n’est pas encore finalisé. »

Une fois qu’elles seront installées, vous en ferez quel usage ?

« Pour le moment, on ne parle pas de centre de recueil. On n’en est pas là. On récupérera, on regardera ce qui s’est passé et on prendra ce qui est intéressant. On n’aura pas le direct. »

Propos recueillis par Alain Grimperelle
Nouvelle République, 12 mai 2014