Archives de catégorie : Désinformation bourgeoise

[Poitiers] « Marginaux » pour qui ?

Une fois n’est pas coutume, deux articles bien dégueulasses sur les « marginaux » du centre-ville de Poitiers sont parus ce matin dans la presse quotidienne régionale. Il s’agit de personnes – avouons-le, pour la plupart des potes-ses – n’ayant pas toujours les signes extérieurs de la réussite sociale, qui passent du temps ensemble, dehors dans la rue, et qui discutent volontiers avec qui veut bien se joindre à elles pour passer un bon moment, partager les galères et les bons plans, rire, boire un coup et pourquoi pas, refaire le monde.

Voilà qui est insupportable pour les chantres d’un centre-ville charcuté par l’opération « coeur d’agglo », aseptisé de toute relation qui ne passe pas par leur magnanime autorisation. Tout bon citoyen se doit de passer par l’octroi de quelques pièces de monnaie pour échanger avec les autres : payer son parking ou son ticket de bus d’abord, boire un coup ensuite, mais à condition de le faire assis  dans le périmètre de la terrasse d’un limonadier pour l’aider à payer sa patente à la mairie (ou d’être membre de la confrérie des alcoolo-machos Bittards, à qui l’on remet les clés de la mairie, car c’est la tradition).  Se loger oui, à condition de ne pas occuper l’un des nombreux logements vacants d’une mafia immobilière, et d’avoir un travail d’esclave docile pour payer le loyer. Se promener oui, mais selon le parcours touristique des rues pavées de coeur d’agglo, à l’ombre des enseignes marchandes et des affiches publicitaires, l’esprit disponible à l’achat ou à l’esclavage salarié, le porte-monnaie généreusement ouvert. Faire la fête oui, mais à l’occasion des journées du calendrier « culturel » décrété par la mairie. Utiliser les salles municipales oui, à condition d’avoir une étiquette d’association subventionnée déclarée en préfecture, ou de se présenter aux élections citoyennes. Diffuser des tracts oui, à condition de ne pas mettre le mot anarchiste dedans. Manifester oui, mais à condition de demander un coup de tampon du préfet, d’exprimer des demandes aux « élu-e-s du peuple », et de poser tout sourire pour les caméras des bons vigiles en uniforme bleu marine.

Opération « peace maker » sur coeur d’agglo 

Entre la convivialité et les bons moments d’un côté, et la volonté de transformer le centre-ville en dispositif marchand, où seuls les vendeurs-euses et les consommateurs-trices sont admis-es, le choix est vite fait pour les pouvoirs locaux (préfet, flics, mairie, journalistes…).

Ces pouvoirs qui prétendent décider à notre place de tout ce qui doit se passer sur l’espace où nous vivons et qu’ils désirent contrôler, réclament toujours plus de répression de nos mouvements, de nos activités et de nos relations. C’est cette volonté mortifère qui se traduit dans les pavés carrés de coeur d’agglo, dans les rubriques carrées des torchons de la presse locale, dans les façades carrées des institutions de pouvoir, dans les sucettes carrées de Decaux. Cette volonté morbide de tout enfermer, qui relaie la complainte des marchands et des flics, alors même que ne cesse de s’intensifier le harcèlement policier (contrôles d’identité des mêmes, plusieurs fois par jour ; flicage de l’assistance sociale, des juges et autres services d’insertion et de probation  ; arrestations suivies de gardes à vue voire de peines de prison). Cette « purification sociale » est dénoncée entre autres par Démocratie réelle maintenant 86, par le Comité poitevin contre la répression des mouvements sociaux, par le DAL 86… mais leur voix est évidemment ignorée ou calomniée par la presse et la mairie. La  propagande des croquemorts en uniforme, en écharpe tricolore ou à carte de presse, a de beaux jours devant elle, si nous ne réagissons pas ensemble pour occuper les lieux où nous vivons ensemble.

Pavillon Noir, 12 juin 2012

La présence des marginaux agace les commerçants

La tension monte chez les commerçants du centre-ville face à la présence de plus en plus forte de marginaux sur fond d’alcool et de chiens qui divaguent.

Les commerçants du centre-ville de Poitiers sont déboussolés et de plus en plus agacés. La présence accrue de groupes de marginaux escortés de leurs chiens sur la voie publique concentre les critiques.

A chaque pas-de-porte, entre la place Notre-Dame et l’îlot des Cordeliers, c’est le même refrain qui revient en boucle. En centre-ville, c’est le sujet qui fâche. Et en mairie, c’est le casse-tête qui fait phosphorer.

«  Les arrêtés municipaux, qui les applique ?  »

« Certains soirs, on se retrouve avec dix personnes et leurs chiens qui sont juste à côté de la terrasse. Les personnes mendient, agressent verbalement les clients qui ne veulent pas donner. J’ai constamment des dégradations sur ma terrasse le vendredi matin et le samedi matin. Je suis même obligé d’attacher les pots de fleurs », réagit Damien Chevalier, du bar le Picto. « Le soir, ils font fuir la clientèle. Les vendeuses qui travaillent aux Cordeliers, préfèrent aller prendre le bus à Boncenne plutôt que de tomber sur eux à Notre-Dame. C’est un vrai problème, on le ressent clairement sur notre activité. » Un peu plus haut, rue des Cordeliers, le coiffeur Éric Soulard à l’enseigne «  Différence  » s’énerve contre ces groupes qui déambulent bière en main dès le matin. « En fin de journée, ils sont dans le square ou juste devant et ils bloquent le passage, les chiens divaguent et ils demandent de l’argent. Tout le monde est gêné. Je reviens de Bordeaux, ils n’en sont pas là. Je croyais qu’il y avait des arrêtés municipaux à Poitiers (1). Qui est-ce qui les applique ? » « J’aimerais bien savoir combien de procédures sont dressées pour ivresse publique ? », renchérit un voisin en rappelant les différents arrêtés anti-alcool pris par le maire de Poitiers. Des patrons de bar s’énervent carrément d’avoir eu à subir les foudres de procédures visant leur commerce ou leurs clients quand, dans le même temps, d’autres pourraient s’alcooliser tranquillement sur la voie publique. Les autorités contestent qu’il y ait le moindre deux poids deux mesures en la matière. Au tabac presse le Brazza, Philippe Desbourdes, enregistre lui aussi une baisse d’activité le soir. « A partir de 19 h, on a beaucoup moins de monde à cause de leur présence. Là où on faisait cent clients en une heure, entre 19 h et 20 h, on n’en fait plus que quarante. Nous, en plus on habite au dessus. On ne dort pas la nuit. C’est souvent des bagarres, ils tapent dans les grilles, ça déclenche l’alarme. Et les gens qui n’osent plus rentrer dans Notre-Dame parce qu’ils restent tout le temps devant l’entrée. » En plus des démarches individuelles de commerçants excédés, la Fédération des acteurs économiques a écrit au maire pour demander l’organisation d’une réunion. Elle doit avoir lieu très prochainement.

(1) En 2008, Alain Claeys étendait l’arrêté interdisant la consommation d’alcool sur la voie publique. Elle est sanctionnée par une amende de 11 €. Fin mai 2012, c’est la vente d’alcool à emporter, après 21 h, qui était interdite.

Nouvelle République, Emmanuel Coupaye, 12 juin 2012

La mairie cherche la bonne réponse

Si la question du rassemblement des marginaux en plus grand nombre agace les commerçants, il embarrasse aussi la Ville. « Il nous faut trouver un juste milieu », concède Jean-Claude Bonnefon, conseiller municipal délégué à la tranquillité publique. « On nous a reproché il y a quelques années qu’il y avait trop de policiers, et maintenant on serait laxistes ! » L’élu réfute le sentiment exprimé par les commerçants, selon lequel les policiers municipaux ou nationaux ne feraient rien contre les groupes de chiens qui divaguent ni contre la consommation répétée d’alcool sur la voie publique. Deux infractions qui tombent sous le coup d’arrêtés municipaux. « On discute en permanence de cette question en ce moment avec la police mais aussi avec la préfecture. Une réunion interne est prévue jeudi en mairie avec la police, les services sociaux… Elle était déjà programmée avant que la FAE nous écrive. J’ai demandé une note au CCAS pour savoir d’où viennent toutes ces personnes car, ce qui est certain, c’est qu’ils sont beaucoup plus nombreux. » Quelle réponse apporter à la situation actuelle ? « On va voir. Je ne dis pas qu’il ne se passe rien. Il faut peut-être accentuer les patrouilles. A un moment, c’est sûr, on ne peut plus être dans le traitement social. »

Nouvelle République, 12 juin 2012

[Poitiers] Bourrage de crâne lycéen par l’armée française à l’école de l’Etat

Un article aussi consternant qu’instructif est sorti aujourd’hui dans la presse régionale, relatant l’intervention au lycée Victor Hugo de Poitiers… de trois bidasses galonnés (deux de la 9e Brigade légère brigade d’infanterie de marine, un de l’état-major de la légion de gendarmerie).

Précisons que cette intrusion de l’armée française au lycée Victor Hugo de Poitiers s’est faite sur l’initiative… d’un professeur d’histoire-géographie-éducation civique du lycée. Ce fonctionnaire zélé justifie cette horreur par le « programme ». S’il est vrai que l’évolution des programmes d’histoire-géo-éducation civique est toujours plus réactionnaire, il y a tout de même une différence entre enseigner le rôle de l’armée française (qui devrait être condamnée par toute personne ayant ne serait-ce que quelques notions d’histoire sociale), et inviter des bidasses à faire de la pub pour leur sale besogne auprès d’élèves !

Passons sur le « rappel historique » du journaliste, sur les « attentats du 11-novembre » 2001 (sans doute voulait-il parler du 11 septembre 2001…) qui auraient justifié l’intervention en Afghanistan. Ha, ha, ha.

L’éducation militaire civique au service de l’Etat, ça donne aussi de magnifiques phrases d’un cynisme achevé. Sur la mission de tuer des êtres humains si le gouvernement l’ordonne, qui est l’essence même du militaire  : « Au bout du bras du soldat, c’est la France ».

Nous ne donnerons pas tort à ce propos du bidasse. En effet, l’Etat français s’est historiquement construit… au bout du bras du soldat ! Par des conquêtes, des massacres, des pillages, des expropriations de paysans et la mise des populations sous coupe réglée de l’Etat, avec le racket de l’impôt. C’est ainsi que se constitue tout Etat (et, pourrait-on ajouter, ainsi que se s’initie aussi la mise en circulation de la monnaie).

A la question : « Qu’est ce qu’une violence légitime ? », un lieutenant-colonel enfonce le clou, en répondant que « l’État a le monopole de la violence légitime« .

Là non plus, on n’aurait pas dit mieux. Nous ne savons pas si le professeur d’histoire-géographie a rappelé quelques glorieux faits d’armes de l’armée française, comme en Algérie ou encore au Cameroun à l’époque des guerres de décolonisation, en Françafrique jusqu’à nos jours…

Nul besoin de rappeler ici aux lecteurs-trices de ce blog ces crimes de sinistre mémoire, couverts par la « légitimité » de l’Etat. Le journal Libération a d’ailleurs récemment révélé quelques nouvelles boules puantes sur les responsabilités de l’armée française dans le génocide rwandais, perpétré par l’armée rwandaise (formée par la gendarmerie française depuis 1975). L’Etat génocidaire rwandais aurait possédé 15 missiles Mistral au moment du déclenchement du génocide. De plus, le capitaine Paul Barril aurait été présent au moment de l’attentat contre Habyarimana en 1994, déclencheur du génocide.

Les trois militaires venus vanter les mérites de l’armée aux lycéen-ne-s rappellent cyniquement que l’Etat se définit par le monopole de la violence armée, et qu’il la justifie toujours en se construisant une « légitimité ». Cette légitimité est fondée sur la construction d’un « droit » (dont le piler est la protection armée de l’accaparement bourgeois des moyens de production). Sur les « droits de l’homme » (… et surtout de l’homme riche, puisqu’ils légitiment la propriété et sa défense armée). Sur les institutions inter-étatiques (mettant le monde entier sous la coupe du capitalisme).

A celles et ceux qui s’indigneraient encore de la présence de bidasses dans l’enceinte d’une école, rappelons quelques éléments historiques.

L’école d’Etat, celle du raciste colonialiste Jules Ferry, par ailleurs bourreau des Communards, a été notamment fondée dans le but d’enterrer l’éducation populaire florissant dans le mouvement ouvrier, encore imprégné de l’expérience de la Commune de Paris. Jules Ferry avait ainsi justifié son projet devant le conseil général des Vosges, en 1879 :

“Dans les écoles confessionnelles,… on exalte l’Ancien Régime et les anciennes structures sociales. Si cet état de choses se perpétue, il est à craindre que d’autres écoles se constituent, ouvertes aux fils d’ouvriers et de paysans, où l’on enseignera des principes… inspirés… d’un idéal socialiste ou communiste emprunté… par exemple à cette époque violente et sinistre comprise entre le 18 mars et le 24 mai 1871… Non, n’en déplaise aux sophistes de la liberté à outrance,… le remède qui consiste à opposer aux menées de l’Internationale noire (*) celle de l’Internationale rouge n’en est pas un : ce serait la fin de la France… ce serait la liberté de la guerre civile.”

(*) ndPN : « l’internationale noire » était l’internationale anti-autoritaire, anarchiste, proclamée un an après la commune de Paris, qui avait mis en oeuvre nombre d’idées anarchistes.

Et voici les objectifs de l’école d’Etat que Jules Ferry se montre satisfait de voir accomplis, en 1889 devant l’assemblée nationale :

« Le parti républicain a voulu trois choses : d’abord, il a voulu refaire l’armée ; puis, refaire le gouvernement sur les bases du suffrage universel, c’est-à-dire la République. Mais il a voulu aussi refaire l’âme nationale par l’école nationale. Nous estimions qu’il n’y a pas de rénovation sociale, de rénovation nationale, il n’y a pas même de rénovation militaire sans une grande rénovation morale. Et cette rénovation morale, nous avons voulu la faire par l’école. »

Voici enfin une adresse de Jules Ferry aux enseignants de la Sorbonne, en 1892 :

“Vous n’êtes pas seulement, messieurs les professeurs, des maîtres de langue, d’arithmétique ou de technologie, vous êtes, vous devez devenir des éducateurs. (…) Oh ! Alors ne craignez pas d’exercer cet apostolat de la science, de la droiture et de la vérité, qu’il faut opposer résolument, de toutes parts, à cet autre apostolat, à cette rhétorique violente et mensongère, (…) cette utopie criminelle et rétrograde qu’ils appellent la guerre de classe !”

Jules Ferry était le chantre de l’armée républicaine, celle qui massacra les révolutionnaires et les populations colonisées. Et le chantre de l’école d’Etat.

Cette école de Jules Ferry n’est pas notre école et ne le sera jamais.

Juanito, Pavillon Noir (FA 86)

[Ingrandes – 86] 150 emplois menacés

Ingrandes : lourdes menaces sur la Coop Atlantique

A peine un peu éclairci, le ciel s’assombrit de nouveau dans le Châtelleraudais. Cette fois, ce sont les 150 emplois de la Coop qui sont menacés.

La reprise de la Fonderie du Poitou Alu par le groupe Saint-Jean Industrie vient tout juste d’être officialisée, avec son cortège de satisfactions, pour les uns et les autres, que de nouvelles menaces sur l’emploi se font jour dans un Châtelleraudais qui n’a pourtant guère besoin de cela. Et c’est une nouvelle fois de la zone industrielle d’Ingrandes que viennent les nuages noirs.

Voici quelques jours, en effet, au cours d’un CCE au siège du groupe Coop Atlantique, à Saintes, devaient être abordées « des questions relatives à la réorganisation de la logistique » selon le document officiel. « On envisageait des décisions portant sur le matériel utilisé ou sur l’organisation, pas sur ce qui nous est tombé sur la tête. »

«  Nous étions presque trois cents  »

Christian Triphose, secrétaire du comité d’établissement, est encore abasourdi de la façon dont se sont passées les choses. « Et là, on nous a présenté plusieurs scénarios quant à une réorganisation complète de l’entreprise. Dans le premier cas, la Coop Atlantique se sépare de 4 de ses cinq entrepôts pour les confier à Système U qui est notre «  partenaire  » désormais, depuis que nous avons quitté Carrefour. Dans un autre, tous les entrepôts seraient regroupés en un seul, beaucoup plus central, situé à Ruffec ou alors, les cinq entrepôts actuels (Limoges, Saintes, Infrandes et deux à La Rochelle) sont agrandis et modernisés. » Des scénarios que Thierry Fockedey a bien été obligé de confirmer lui-même avant-hier matin à Ingrandes où les 150 salariés ont débrayé en apprenant sa venue à une réunion de CHSCT. « Il a bien confirmé, assure Christian Triphose. Quant aux différents scénarios possibles, on n’y croit pas. C’est juste pour qu’on se tienne tranquilles. L’hypothèse la plus probable c’est la construction d’un grand entrepôt à Ruffec et de la casse partout ailleurs. » D’ailleurs, pour le syndicaliste, il y a bien longtemps qu’on parle de la fermeture de l’entrepôt ingrandais créé en 1969 mais régulièrement fragilisé ces dernières années. « Nous étions presque 300, nous ne sommes déjà plus que la moitié. » Et à quelle date cette fermeture envisagée ? « On nous parle de fin 2014. Mais, là aussi, on est tous persuadés que tout ira plus vite ! »

Contactée, la direction de Coop Atlantique a indiqué qu’elle n’avait pas de commentaire à faire sur le sujet.

Nouvelle République, Laurent Pinot, 8 juin 2012

[Notre-Dame des Landes] Du « moratoire sur l’aéroport »

« Moratoire sur l’aéroport » : une farce qui ne nous fait pas rire

Quelques analyses au sujet de l’accord du 8 mai 2012 après la grève de la faim

On a beaucoup entendu parler ces derniers temps de l’accord obtenu le 8 mai 2012 à la suite d’une grève de la faim de 28 jours menée par des agriculteurs/trices en lutte contre le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes. Certain⋅e⋅s fantasment cet accord comme un « moratoire sur l’aéroport » (Anne-Sophie Mercier : Moratoire sur l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes dans Le Monde du 9 mai 2012) et beaucoup crient victoire.

De notre côté, nous éprouvons le besoin de préciser ce que cet accord change vraiment et surtout ce qu’il ne change pas. Nous tentons quelques pistes d’analyse de la situation dont il provient et de celle qu’il fait naître.

Commençons par des faits. Les responsables des collectivités locales PS s’engagent à ce qu’il n’y ait pas d’expulsions pour les onze exploitants agricoles installés sur la zone concernée et qui ont refusé l’accord amiable avec Vinci. Ils s’y engagent jusqu’au rendu des recours déposés avant le 4 mai 2012 auprès des juridictions françaises (Conseil d’État et Cour de Cassassion). Après un coup de gueule du comité de soutien aux grévistes de la faim, les responsables concernés répondent sur une feuille volante, sans signature (et donc sans valeur officielle), que l’accord concerne aussi « les habitants de la zone de la DUP [Déclaration d’Utilité Publique] installés sur la zone avant le déclaration d’utilité publique, ayant refusé à ce jour [du 4 mai] les procédures amiables ». Il ne précise pas de durée de gel des expulsions pour ces habitant⋅e⋅s. L’accord ne concerne pas les recours déposés par les opposant⋅e⋅s devant le tribunal administratif ni ceux devant les juridictions européennes. Il n’arrête pas les procédures d’expropriations des propriétaires : la machine est en marche et les élus PS ne donnent qu’un sursis d’exécution. L’accord ne concerne pas les occupants sans droit ni titre. Au final, cet accord s’appliquerait uniquement à environ un tiers des habitant⋅e⋅s de la zone. Selon la version optimiste, portée par les grévistes de la faim et leurs soutiens, la suspension de ces expulsions vaudrait jusqu’en 2014.

Pour le comité de soutien aux grévistes de la faim, c’est « notre première victoire » et « une immense victoire idéologique et médiatique » (Geneviève : Face aux erreurs et à l’intox : ce qui a été obtenu par les 28 jours de grève de la faim et de mobilisation du comité de soutien, blog des soutiens de grève de la faim, http://parolesdecampagne.blogspot.fr/). Pour l’autre partie, les pontes PS locaux : « nous avons fait un geste réel concernant le traitement humain de l’étape délicate des expulsions, étape ultime des expropriations légales. Mais passés les quelques recours engagés, la construction de l’aéroport se poursuivra » (Jacques Auxiette, président de région Pays de la Loire et signataire de l’accord, dans Presse Océan du 12 mars 2012). Ils précisent en outre que « les procédures à l’encontre des occupants très récents, – je pense aux squatteurs –, ne seront pas ralenties. »

Il nous semble que par cet accord, le pouvoir concède un « geste » uniquement symbolique. C’est bien sûr un répit appréciable pour certain⋅e⋅s. Mais suspendre les expulsions des exploitant⋅e⋅s agricoles et des habitant⋅e⋅s légaux sur la zone concernée par la DUP même jusqu’en 2014 ne gène en rien les prévisions de l’État et d’AGO. D’après le planning en notre possession, les seuls gros travaux prévus avant cette date concernent les échangeurs du barreau routier, qui ne sont pas situés sur ce périmètre. Les travaux prévus sur la zone de la DUP consistent en forages, fouilles archéologiques, études environnementales, etc. Bref, les mêmes « travaux préliminaires » qu’ils font depuis des années, malgré la présence des habitant⋅e⋅s qui ne constitue pas un obstacle puisqu’à grand renfort de gendarmerie mobile ils ne se privent pas pour envahir la zone ou ravager les terres. Somme toute un accord qui ne remet en cause ni les gros travaux, ni les études préliminaires, ni les expropriations qui continuent à être menées, ni la majorité des expulsions.

Par contre il nous semble que cet accord sert les intérêts du PS. Il peut ainsi se montrer à l’écoute du peuple qui l’a élu sans pour autant se fâcher avec ses petits amis patrons, que ce soient ceux de Vinci (concessionnaire de l’aéroport) ou ceux des nombreuses entreprises qui voient dans ce projet une source de profit. Mais surtout, il nous semble qu’il s’agit d’une manœuvre pour tenter d’intégrer la contestation pour mieux la museler. Reprenant sa stratégie habituelle, la gauche au pouvoir tente d’intégrer les éléments « raisonnables » de la contestation pour les identifier comme des « partenaires sociaux ». En faisant cela, elle cherche à établir la différence entre les « bon⋅ne⋅s opposant⋅e⋅s », celles et ceux avec qui on peut discuter puisqu’on fait semblant de les entendre, et les « mauvais-es », celles et ceux qu’on peut réprimer allègrement parce qu’on les a dépeint aux yeux de tout⋅e⋅s comme des éléments perturbateurs. Le but est clair : briser une solidarité des opposant⋅e⋅s, afin de ne plus risquer de se trouver face à un bloc uni par un intérêt commun. Cet accord n’est pas une concession mais une manœuvre politique : alors que la droite se place généralement dans l’affrontement direct et clame haut et fort qu’elle ne cédera rien, il est de bon ton à gauche de montrer que l’on fait des « efforts » de compréhension, qu’on entend le petit peuple dans ses revendications et qu’on est prêt à s’asseoir autour de la table pour en parler, entre gens respectables. À nos yeux, il s’agit uniquement d’une manière pour le pouvoir de reprendre la contrôle de la situation : « si vous êtes bien gentil⋅les⋅s et que vous ne faites pas de vagues, peut être pourrons nous concéder quelques miettes ».

Nous conclurons en criant que la farce ne nous fait pas rire. Il est certain que cet accord tombe à pic pour le PS : commencer un mandat par une grève de la faim, de surcroît dans le fief du premier ministre, c’est mauvais pour l’image de marque. Malgré le sursis accordé à certain⋅e⋅s, nous restons dans la même situation de tension qu’auparavant face à ce projet imposé par la gauche. Si le PS s’est retiré cette épine du pied, celle qui est dans le notre est encore bien plantée.

Hors pistes

un groupe en luttes contre l’aéroport et son monde né dans le mouvement d’occupations

Juin 2012

Indymedia Nantes, 7 juin 2012

Contre les idées fausses sur les pauvres

Les idées fausses, ça suffit ! [atd-quart-monde]

Nous vous invitons à déconstruire des préjugés et des stéréotypes répandus sur la pauvreté et les pauvres, afin que ceux-ci cessent d’être les boucs émissaires des maux de nos sociétés et qu’ils deviennent au contraire des partenaires à part entière dans la construction d’un monde plus juste.

Voici quelques-unes de ces idées reçues. Diffusez-les autour de vous, réagissez, participez au débat.

En quatre pages

En une page

Indymedia Lille, 20 mai 2012