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John Holloway – Nous sommes la crise du Capital et nous en sommes fiers !

« Nous sommes la crise du capital et nous en sommes fiers ! »

Intervention de John Holloway (New York le 18 mars 2012).

C’est pour moi une vraie joie d’être ici, mais cela me fait peur, parce que, en réalité, c’est la première fois que je prends la parole dans le cœur de l’Empire du mal. Je tiens également à remercier expressément les gardes de l’aéroport pour m’avoir laissé entrer dans le pays et vous rendre visite, dans cette terre de la « liberté », pour m’avoir permis de venir vous voir, ici, dans votre prison. Peut-être qu’ils m’ont laissé entrer parce qu’ils n’ont pas réalisé l’existence d’une mutinerie dans la prison, une rébellion dans le cœur de l’Empire.

Nous sommes ici pour célébrer 2011, qui inonde la nouvelle année, 2012. Une année pleine de révoltes glorieuses dans le monde entier, parce que grâce à notre désobéissance, il est clair que nous sommes, nous, la crise du capital. Nous sommes la crise du capital et nous en sommes fiers. Assez, assez de dire que ce sont les capitalistes les coupables et la faute des banquiers. Le sens même de ces mots est non seulement absurde mais aussi dangereux, car elle nous constitue en victimes. Le capital est une relation de domination. La crise du capital est une crise de la domination : les dominants ne sont plus en mesure de nous dominer de manière efficace. Alors, nous sommes allés dans les rues pour manifester en déclarant que c’était de leur faute. Mais que disons-nous exactement ? Qu’ils devraient nous dominer de manière plus efficace ? Il est préférable de prendre l’explication la plus simple et dire ceci : si la relation de domination est en crise c’est parce que les dominés ne sont pas assez dociles, parce qu’ils ne se prosternent pas suffisamment. L’insuffisance de notre soumission est la cause de la crise.

Le capital n’est pas seulement un système d’injustice, c’est un système qui accélère l’exploitation, qui intensifie la destruction. Cela peut être théorisé de multiples manières, à travers la loi de la valeur, la formation de la valeur et son temps nécessaire, selon les sociétés, ou les théories de la baisse tendancielle des profits. Cependant, ce qui importe c’est que le capital est dans une dynamique d’attaque. Il y a un mouvement sans fin d’accélération, une éternelle transformation de ce qu’est le travail capitaliste. Cela ne signifie pas seulement une intensification du travail dans les usines, mais aussi une soumission croissante, tous les jours, de tous les aspects de la vie à la logique du capital.

L’existence même du capital consiste à serrer constamment la vis et la crise est tout simplement la manifestation de ce que la vis n’est pas serrée aussi vite qu’elle le devrait, qu’il y a une résistance quelque part. Résistance à travers les rues et les places, peut-être, résistance organisée, bien sûr, mais aussi peut-être la résistance des parents qui veulent jouer avec leurs enfants, des amoureux qui veulent rester une heure supplémentaire dans leur lit, des étudiants qui pensent qu’ils ont besoin de plus de temps pour la réflexion critique, des humains qui rêvent encore d’être humains. Nous sommes la crise du capital, nous qui ne nous soumettons pas assez, nous qui ne courons pas assez vite.

En réalité, la crise a deux issues. La première consiste à nous excuser, à demander pardon pour notre manque de soumission, et ensuite à demander plus de travail. « S’il vous plaît, exploitez-nous plus et nous travaillerons plus dur et plus rapidement, nous allons soumettre tous les aspects de nos vies au capital, nous allons oublier toutes les bêtises infantiles du jeu, de l’amour et de la pensée. » C’est là la logique du travail aliéné, la logique inefficace de la lutte à travers le travail, ce qui se conçoit comme la lutte du travail aliéné contre le capital. Le problème de cette issue est que non seulement nous perdons notre humanité, mais aussi nous reproduisons le système qui nous détruit. Si, au final, nous parvenons, chose très improbable, à contribuer à surmonter la crise du capital, alors le capital continuera plus vite, plus vite, plus vite à soumettre chaque forme de vie. Et puis viendra une autre crise, et puis une autre, et encore une autre, et ainsi de suite, mais pas ainsi pour toujours, car il se peut que nous ne soyons pas loin de l’extinction de l’humanité.

L’alternative, parce que je pense que c’est la seule alternative, consiste à déclarer ouvertement que non, désolés, nous sommes la crise du capital et nous n’allons pas nous mettre à genoux, nous n’allons pas accepter ce que nous fait le capital, nous sommes fiers de notre manque d’obéissance et de notre refus de nous soumettre à la force désastreuse du capital. Nous sommes fiers d’être la crise du système qui nous détruit.

Regardez la Grèce, l’épicentre de la crise économique et du crédit aujourd’hui. Là-bas, la crise est tout à fait une crise de la désobéissance. Les capitalistes et les politiciens disent que les Grecs ne se soumettent pas beaucoup, qu’ils ne travaillent pas assez dur, qu’ils aiment bien faire la sieste et sortir le soir et qu’ils doivent maintenant apprendre ce que signifie d’être un vrai travailleur capitaliste. Et en donnant une leçon aux Grecs, ils ont aussi l’intention d’en donner une aux Portugais, aux Espagnols, aux Italiens, aux Irlandais et à tous les désobéissants du monde.

Et dans une telle situation, il y a deux options. La première, c’est de dire non, non, nous sommes des bons travailleurs, nous voulons juste plus d’emplois et nous allons prouver combien nous pouvons bien travailler, nous allons reconstruire le capitalisme en Grèce. Et l’autre consiste à dire, oui, vous avez raison, nous sommes paresseux et nous allons nous battre pour notre droit à la paresse. Nous allons nous battre pour pouvoir faire les choses à notre rythme, de la manière que nous pensons correcte, nous allons nous battre pour notre sieste, pour sortir le soir. Alors, nous disons non au capital et au travail capitaliste, parce que nous savons tous que le travail capitaliste a littéralement détruit la terre, qu’il détruira les conditions de l’existence humaine. Nous devons construire une nouvelle forme de vie sociale.

La première solution, dire que nous sommes de bons travailleurs, semble plus simple, plus évidente, mais peut-être ne sera-t-elle qu’une illusion, car la plupart des commentateurs disent que la récession en Grèce durera de nombreuses années, quel que soit le niveau de la conformité des Grecs.

Si vous voulez savoir à quoi ressemble la prorogation de l’échec du capital, sans aucun espoir de changement radical, regardez au-delà de la frontière de votre pays, la tragédie au Mexique, ou plus près, regardez, regardez vos centres-villes… L’autre option, celle qui consiste à dire non au capital et établir une relation sociale différente, c’est ce que beaucoup de Grecs essaient maintenant, par choix ou par nécessité. Si le capital ne peut pas fournir la base matérielle de la vie, alors nous devons la créer d’une autre manière, en créant des réseaux de solidarité, en proclamant « aucune maison sans électricité » et en formant des équipes d’électriciens pour reconnecter le courant aussitôt qu’il a été coupé, à travers le mouvement « Je ne paie pas » les hausses d’impôts ou les péages, à travers le « mouvement des patates », par lequel les agriculteurs distribuent directement leurs pommes de terre et légumes en ville à des prix très bas, à travers des marchés d’échanges, par la création de jardins communautaires et le retour à la campagne. Et en outre, par la récupération des entreprises, d’un hôpital et d’un journal. Il s’agit d’une manière complexe et très expérimentale d’aller de l’avant, où il n’y a pas de ligne politique juste ni aucune pureté révolutionnaire. Très probablement, ces formes préfigurant une nouvelle vie sociale ne sont pas encore assez fortes pour assurer notre survie et des engagements sont encore nécessaires. Mais c’est clairement la direction dans laquelle nous devons pousser — clairement la direction dans laquelle nous poussons et sommes poussés nous-mêmes.

Le monde que nous essayons de créer est un monde sans réponses, un monde où nous marchons en interrogeant, le monde d’une expérimentation. Mais nous sommes guidés par notre « non » à l’inhumanité, à l’obscénité et au caractère destructeur du système capitaliste. Guidés aussi par une étoile utopique distillée à partir des espoirs et des rêves de siècles de lutte.

La crise, donc, nous confronte à ces deux options. Soit nous prenons la grande route de la subordination à la logique du capital, avec la pleine connaissance que cela mène directement à l’auto-extinction de l’humanité. Soit nous empruntons les chemins hasardeux — de nombreux chemins — de l’invention de mondes différents ici et maintenant, à travers les fissures que nous créons dans la domination capitaliste. Et à mesure que nous inventons de nouveaux mondes, nous chantons haut et fort que nous sommes la crise du capital. Nous sommes la crise de la ruée vers la destruction de l’humanité… et nous en sommes fiers. Nous sommes le monde nouveau en train de surgir et qui dit : « Capital, dégage ! »

John Holloway New York, 18 mars 2012

ndPN : rendez-vous à Poitiers pour un cortège contre l’esclavage salarié, le 1er mai à 11H, au Clos-Gaultier (Trois Cités).

[Ingrandes – 86] Fonderie :  » Maintenant on va se battre sur la prime  »

Fonderie :  » Maintenant on va se battre sur la prime « 

Soixante postes doivent être supprimés à la Fonderie du Poitou. Pour éviter les licenciements contraints, les syndicats vont se battre sur la prime de départ.

Le calendrier va être extrêmement serré pour les négociateurs afin que l’arrivée de Saint-Jean Industries, le 18 mai prochain, ne commence pas par une grève dure. – (Archives photo)

Deux réunions extraordinaires du comité d’entreprise hier, à la Fonderie du Poitou d’Ingrandes. La première, très formelle pour informer officiellement les représentants des salariés de la décision du tribunal de commerce. La seconde, nettement plus importante pour évoquer les modalités du plan de sauvegarde de l’entreprise (PSE) qui doit se mettre en place d’ici le 18 mai prochain comme la loi le stipule en pareil cas. « Avec deux grands week-ends au milieu, il va falloir faire vite », assure Patrice Mochon, délégué du personnel CGT.

 » Renault doit accepter nos demandes « 

Depuis hier, en effet, les fondeurs savent que 37 personnes en production (des ouvriers) et 23 autres venues des « structures » (cadres, techniciens ou administratifs) doivent quitter l’entreprise pour ramener l’effectif de 455 salariés à 395 comme le prévoit le dossier de reprise. Dès hier, donc, la discussion s’est engagée sur les modalités de ce plan de sauvegarde. « Le 2 mai, un questionnaire va être adressé au salarié pour savoir qui est volontaire au départ. Le 10 mai, ce courrier doit être renvoyé, explique le syndicaliste. Seulement, personne ne sera candidat au départ si la prime supra-légale est à la hauteur de celle proposée aujourd’hui. Il nous faut donc une réponse rapide sur ce point. Renault, qui va payer, doit accepter nos demandes. Sinon, le 18 mai, la loi obligera l’administrateur à procéder à des licenciements contraints et là, c’est sûr, on repart en bagarre. Ce qui pourrait bien amener Saint-Jean Industrie à revoir sa position… » Pour l’intersyndicale, l’épreuve de force, c’est donc maintenant. « C’est pour cela que nous demandons une rencontre en urgence au ministère du Travail. Le principe semble en être accepté déjà. Reste à voir le calendrier. » En terme de prime supra-légale, l’offre faite aujourd’hui semble totalement inacceptable aux salariés de la Fonderie. « On nous propose 13.000 € + 7.000 € possibles pour un plan de formation. Nous, nous considérons que le contexte de cette lutte, le préjudice que nous a causé Montupet et la position de Renault dans le conflit nous permettent de demander et d’obtenir 50.000 €. C’est là-dessus qu’on va se battre. » Quelques semaines de lutte supplémentaires ne semblent pas effrayer les syndicalistes de la Fonderie. « Et le premier round, il aura lieu le 1er mai, au défilé des travailleurs à Châtellerault ! » La population locale devrait entendre l’appel.

Nouvelle République, Laurent Pinot, 28 avril 2012

Le premier mai, faisons sa fête au travail !

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Le premier mai, faisons sa fête au travail !

« travail » : du latin tripalium, instrument de torture à trois pieux destiné à punir les esclaves

À la veille du deuxième tour, les deux candidats à notre gouvernance, défenseurs d’un modèle capitaliste et étatique de société qui nous accable, nous parlent de retour à la croissance – à condition de toujours plus de sacrifces, d’austérité et de confance aveugle. En cette période de confusion idéologique, ils nous appellent même à célébrer le « travail » le premier mai ! Il nous semble indispensable de rappeler brièvement quelques faits historiques.

Le salariat, c’est l’exploitation et la dépossession

Le capital se constitue historiquement par une dépossession armée des populations : guerres, expropriations de paysan.ne.s, esclavagisme, travail forcé dans les premiers bagnes industriels, génocide amérindien, colonialisme et néo-colonialisme… L’État est le médiateur principal de cette dépossession : par le concours de ses forces armées, par la création de monnaie permettant l’impôt et quantifant les capitaux, par la production de « lois » légitimant le racket des populations (principe de la propriété, privée ou d’État), par le cirque électoral consistant à susciter le consentement chez les populations au fait que l’État décide de tout à leur place.

En contexte de guerre économique, le capital doit s’investir et croître, sous peine d’être dévalué par l’inflation. Le seul moyen de cette reproduction est le recours au travail salarié. Le capital est investi dans une activité productive : moyens de production d’une part (terres, usines, services, technologie) et la main-d’oeuvre d’autre part. Les moyens de production ne dégagent aucun profit : c’est sur la rémunération variable de la main-d’oeuvre, dépendant du bon vouloir de l’employeur (privé ou étatique), qui décide de tout au nom de son titre de « propriété », que peut être extorquée un « profit », une « plus-value » sur le dos des travailleur.euse.s, permettant d’investir dans de nouveaux moyens de production.

Pour que le capital s’accroisse, ce taux d’extorsion doit s’accroître, et c’est ce que l’on nomme la « croissance ». L’institution salariale est donc fondée aussi bien sur le vol des travailleur.euse.s que sur leur absence de décision sur l’outil de travail.

Le salariat, fuite en avant dans la destruction sociale et écologique

Mais ce système d’exploitation bien huilée de l’homme par l’homme a ses contradictions :

– plus la part du capital grandit dans le partage des richesses, plus la part relative des salaires baisse et plus la pauvreté se développe, plombant la demande, d’où crise de surproduction.

– avec la concurrence, il y a course à la technologie (machines-outils, robotique, informatique), et donc réduction massive du nombre d’employé.e.s. La fin du travail des enfants (scolarité obligatoire) et la création d’emplois tertiaires n’ont pas endigué cette hémorragie. D’où crise du chômage, qui certes a permis de tirer les salaires vers le bas, mais a aussi engendré une baisse tendancielle du taux du profit car la plus-value n’est issue que du travail humain.

– la croissance de l’activité productive suppose le défrichement toujours plus large de ressources naturelles, menant à une raréfaction et un renchérissement des ressources… d’où crise écologique massive (mort des terres arables, pollution, déforestation, réchauffement climatique, …).

Pour pallier toutes ces contradictions, se traduisant par des « crises » toujours plus fortes où le capital ne trouve plus à s’investir, le capitalisme a historiquement recouru à l’impérialisme (travail forcé de populations extérieures, nouvelles ressources à moindre prix), à des guerres de masse (relance de l’industrie par l’armement, destruction de la main-d’oeuvre en surplus, marché de la reconstruction), à l’État-providence (qui prend à sa charge une part de l’entretien des salarié.e.s, ouvre des marchés juteux par des grands travaux stimulant par ailleurs pour un temps la consommation), à la promotion de nouveaux « besoins » par de grandes campagnes publicitaires (électro-ménager, voiture puis informatique ont relancé pour un temps l’économie), au crédit bancaire et aux produits fnanciers (qui ne sont qu’une spéculation sur la plus-value future), et enfn au capitalisme vert et au « développement durable » (« l’éco-citoyen.ne », de plus en plus fliqué.e dans sa productivité, est sommé.e de réduire encore plus ses besoins et de financer de grands plans de sauvegarde de la planète… gérés par les mêmes multinationales privées qui la détruisent).

Ces palliatifs ne sont qu’une fuite en avant dans l’accumulation de pouvoir et d’argent d’une part, la catastrophe sociale et écologique d’autre part.

De la lutte contre le salariat à la « fête du travail »

Impulsée à Chicago en 1886, principalement par des anarchistes, la journée du 1er mai pour la réduction du temps de travail a été le symbole de l’offensive des exploité.e.s et des dominé.e.s contre le salariat et l’État. Malgré la répression féroce de l’État et du patronat (licenciements, briseurs de grèves armés, fusillades, condamnations à mort d’anarchistes), cette journée de lutte s’est étendue au monde entier. Face aux luttes sociales, le pouvoir a répondu par le fascisme, qui a détourné le sens originel du 1er mai : le léninisme en fait une journée chômée en 1920. Le nazi Goebbels en fait une « fête nationale du travail » en 1933. Le collabo Pétain en fait une « fête du travail et de la concorde sociale » en 1941. Ce travestissement odieux est aujourd’hui repris par tous les régimes « démocratiques » : les bureaucraties syndicales réclament plus de travail et de croissance et négocient la destruction des droits sociaux chèrement acquis ; les partis appellent à la relance de la croissance et de l’industrie. Le président-candidat sortant appelle même à une « fête du vrai travail » (sic) !

Pour l’action directe

Pour abolir le capitalisme et l’État, il nous faut poursuivre la lutte résolue contre le travail salarié. Les vieux mots d’ordre anarchistes du syndicalisme des origines valent toujours : réduction des cadences et sabotage ; boycott des entreprises qui broient leurs salarié.e.s ; désobéissance aux consignes hiérarchiques ; grèves reconductibles et occupations, en vue de la réappropriation des lieux de production. Le syndicalisme combatif existe toujours, mais avec l’extension du chômage, de la précarité, de la « flexibilité », du flicage au travail et de la répression syndicale, ce mode de lutte est de plus en plus difficile à mettre en oeuvre.

C’est pourquoi il nous faut aussi lutter sur le front de l’autonomie dans notre vie quotidienne. De même que les ouvrier.ère.s du siècle dernier pouvaient compter sur leurs jardins et leurs savoir-faire pour engager des grèves longues, il nous faut aujourd’hui dépendre le moins possible du salariat, devoir le moins possible nous vendre comme du bétail. La réappropriation offensive de terres, de logements et de savoirs-faire et la défense contre la répression sont indispensables pour reconquérir une autonomie de vie et la confance en notre propre force, pour redonner un sens à l’activité humaine et en extirper l’idéologie mortifère de la servitude volontaire, du travail, du sacrifice et du rendement.

Contre l’atomisation sociale, voulue par le pouvoir politique et par le marché, il nous faut réinventer et tisser partout des liens, des relations solidaires et libres, des organisations horizontales, des réseaux d’échanges de biens, de pratiques et de savoirs échappant aux lois du marché et de la domination sociale.

Les valeurs du vieux monde s’effondrent, la catastrophe est en cours. Nous croyons qu’il est possible de ne pas nous effondrer avec lui. Partout, des collectifs se constituent, des complicités et des solidarités se tissent. Il ne tient qu’à nous de poursuivre et d’étendre la lutte, de traduire nos rêves et nos paroles en actes concrets. C’est ce à quoi nous vous invitons ce premier mai, comme chaque jour des temps à venir.

Groupe Pavillon Noir (Fédération anarchiste de la Vienne) – pavillon-noir@federation-anarchiste.org – fa86.noblogs.org

Des individu.e.s

Gérard Filoche – Le « vrai » travail ?

Le « vrai » travail ?

Le “vrai” travail ? celui des 650 accidents mortels, des 4500 mutilés du travail ? Celui des droits violés et des heures supp’ impayées ?

Le « vrai travail » ?  Celui des maladies professionnelles, amiante, TMS, surdité, cancers, qui augmentent, sont sous-déclarées, sous réparées.

Le “vrai” travail ? 150 000 accidents cardiaques et 100 000 accidents vasculaires par an dont entre 1/3 et 50 % liés au travail…

Le “vrai” travail ? Ce jeune ascensoriste de 26 ans écrasé par l’engin qu’il réparait, à cause de la compétition sauvage entre OTIS et KONE

Le “vrai” travail ? Et les milliers d’ouvriers désamianteurs qu’il laisse en ce moment mourir sans protection par refus d’un moratoire ?

Le “vrai” travail ? Celui des mini-jobs, des stages, des emplois saisonniers atypiques, des 3 X 8, des 4 X 8, des intérims et CDD répétés ?

Le « vrai » travail ? Celui des millions de travailleurs pauvres qui n’arrivent pas à vivre avec leurs salaires ?

Le « vrai » travail ? Celui du milliard d’heures supplémentaires non déclarées, non majorées, non payées attribuées à ceux qui ont un boulot au détriment de ceux qui n’en ont pas ?

Le « vrai » travail ? Celui des femmes qui gagnent 27 % de moins que les hommes ?

Le « vrai » travail ? Celui des jeunes à 25 % au chômage et à 80 % en CDD ?

Le « vrai » travail ? Celui des immigrés, forcés à bosser sans droits et sans papiers par des esclavagistes et marchands de sommeil franchouillards ?

Le « vrai » travail  ? Celui des seniors licenciés, 2 sur 3 a partir de 55 ans et qui ne peuvent cotiser que 35 annuités alors que 42 sont exigés dorénavant pour une retraite décente ?

Le « vrai travail » ? Celui des restaurateurs dont 1 sur 4 utilisent des clandestins, non déclarés dans le fond de leur cuisine ?

Le “vrai” travail ?  Celui des exploitants agricoles qui tuent des inspecteurs du travail pour pouvoir abuser d’immigrés clandestins ?

Le “vrai” travail ? Celui des beaufs de la CG-PME, des cadres casques oranges de chez Bouygues, des marchands de manœuvre appelés « viande » ?

Le “vrai” travail ? « La vie, la santé, l’amour sont précaires pourquoi le travail ne le serait-il pas? » (Parisot/Sarkozy)

Le “vrai” travail contre le droit du travail ?  Le pauvre exploité qui sue et se tait, la dinde qui vote pour Noël !

Le “vrai” travail « sans statut » ? « La liberté de penser s’arrête là où commence le Code du travail » selon Mme Parisot et… M Sarkozy

Le “vrai” travail sans syndicat ? Sans syndicat pas de Smic, pas de durée légale, pas de congés payés, pas de sécurité sociale, pas de droit

Le “vrai” travail ? Celui qui ne fait jamais grève, qu’on ne voit jamais manifester, qui n’est pas syndiqué, qui piétine son collègue ?

Le « vrai » travail ? Celui sans délégué du personnel, sans comité d’entreprise, sans CHSCT, sans institution représentative du personnel ?

Le “vrai” travail ? à France Télécoms, des dizaines de suicides, faute inexcusable du patron de combat qui licencie, stresse, vole, tue

Le “vrai” travail ? Parlons en ! Stress, risques psychosociaux, harcèlement, suicides, chantage à l’emploi, heures supp’ impayées ?

Le “vrai” travail ? Les travaux les plus durs sont les plus mal payés, bâtiment, restauration, nettoyage, transports, entretien, industries

Le “vrai” travail ? Qu’est ce qu’il y connaît ? Dans le bâtiment, 1,1 million bossent surexploités, maltraités, mal payés, accidentés, meurent sans retraite

Le « vrai » travail ? Celui des 900 000 foutus dehors par « rupture conventionnelle » de gré à gré sans motif et sans mesure sociale ?

Le « vrai » travail ? Celui des auto-entrepreneurs, un million en théorie, la moitié en réalité, qui se font exploiter comme faux salariés, à bas prix et sans protection sociale ?

Le “vrai” travail ? celui qui bosse dur pour survivre misérablement ou celui qui exploite dur les autres pour vivre dans des palais dorés ?

Le “vrai” travail ? celui des actionnaires, des rentiers, des riches, des banksters du Fouquet’s qui gagnent 600 SMIC par an en dormant ?

Le « vrai » travail, celui de Maurice Levy patron qui se ramasse 16 millions d’euros d’argent de stocks option de poche pillés sur les richesses produites par les salariés.

Le « vrai » travail ? celui de Molex, de Sea France, de Gandrange et Florange, de Continental, de Lejaby, de Pétroplus, des Fonderies du Poitou, de toutes celles et ceux qui ont du se battre pour le garder ?

Le “vrai” travail ? Qu’est ce qu’il y connaît ce cul doré de Sarkozy ? N’a jamais passé la serpillière dans une cantine ni poussé un chariot.

Gérard Filoche, inspecteur du travail