Archives de catégorie : Riposte athée

Habent papam…

Habent papam…

Le nouveau pape, « François Ier », a été élu ce mercredi soir. Il s’agit du cardinal Jorge Bergoglio. L’Eglise catholique, après avoir imposé un pape Benoît XVI, très conservateur, a donc choisi un pape sud-américain, un argentin plus précisément.

Bergoglio est un homme réputé d’origine modeste et au train de vie modeste ; nombre de médias se complaisent à clamer qu’il vit dans un appartement, qu’il se déplace en métro et qu’il fait sa cuisine tout seul. Si cela suffit à le rendre saint, alors les milliards de prolos que compte la planète sont une armée de saints… Bref Bergoglio, qui annonce vouloir « lutter contre la pauvreté », est annoncé par les médias comme humble et proche des pauvres. Le nom même de « François », que Bergoglio s’est choisi, se rapporte d’ailleurs au fondateur de l’ordre des franciscains, ordre de moines mendiants fondé au Moyen-Âge. Nombre de chefs d’Etat ont donc, comme il se doit salué cette élection (dont Hollande, comme nous le verrons plus loin). Les médias ont évoqué un tournant possible au sein d’une Eglise passablement passéiste.

Mais l’Eglise a-t-elle vraiment décidé de tourner la page du conservatisme en nommant un sud-américain ? On peut en effet y voir aussi un enjeu stratégique, pour récupérer une population sud-américaine délaissant de plus en plus l’Eglise catholique, pour se tourner vers les églises protestantes qui pullulent. Cette préoccupation se traduit bien chez ce nouveau pape, qui avait vitupéré dès septembre dernier contre les prêtres refusant de faire baptiser les jeunes enfants nés hors-mariage.

En réalité, le parcours de ce jésuite n’est pas franchement celui d’un réformateur. Le nouveau pape se traîne même de sacrées casseroles !

Si celui-ci se déclare contre le libéralisme, il a de fait toujours combattu (tout comme son prédécesseur Benoît XVI) la théologie de la libération, un courant progressiste et « social » de l’Eglise catholique sud-américaine, inspiré en partie par le marxisme. « L’apolitisme » de la compagnie de Jésus, revendiqué par Bergoglio, est à géométrie très variable…

Ce n’est pas tout. Pendant la dictature des généraux en Argentine, ayant fait 30.000 morts, Bergoglio n’a jamais dénoncé les crimes des généraux… à l’image de l’institution catholique argentine, qui fut clairement complice de la dictature. Un autre Jorge, le général dictateur Videla, a pourtant frappé un certain nombre de prêtres engagés dans la théologie de la libération, dont des gens que Bergoglio connaissait. Botus et mouche cousue : apolitisme on vous dit ! Il faut dire que Videla déclarait vouloir restaurer  » la civilisation catholique occidentale ». Ca valait sans doute bien quelques dizaines de milliers de tortures et d’assassinats… les desseins de Dieu sont impénétrables, rendez à César ce qui est à César, tout ça tout ça.

Même devenu évêque, Bergoglio a refusé de dénoncer la complicité flagrante de l’institution catholique. Pire, il a affirmé que les procès intentés contre des évêques catholiques accusés d’avoir participé aux séances de torture, étaient une « campagne de calomnie menée contre l’Eglise ».

L’histoire ne s’arrête pas là. Un bouquin paru en 2005, El Silencio, révèle que Bergoglio aurait retiré sa protection à deux prêtres jésuites travaillant dans les bidonvilles, et donné son feu vert en 1976 à l’armée pour les enlever… Entendu comme témoin par des juges dans cette affaire, Bergoglio a parlé de « diffamation », et affirmé vouloir parler sans tabous de l’Eglise sous la dictature. Pour lui, l’Eglise n’aurait rien à se reprocher, à part quelques individus isolés complices du pouvoir.

Bergoglio n’est pas un complice des fachos que sur le plan du positionnement politique. Sur le plan des libertés des homos et des femmes, ce n’est guère mieux. En 2010, Jorge Bergoglio a ainsi déclaré que l’homosexualité était « un démon infiltré dans les âmes« , et que les marches pour le mariage gay étaient de « la main du diable« … Diantre !

Bergoglio ne s’arrête pas à de simples déclarations. C’est lui, en personne et avec une virulence toute particulière, qui a mené la fronde contre la loi légalisant le mariage homosexuel en Argentine. Ainsi que contre le droit donné aux transsexuel-le-s de changer de sexe pour l’état civil. Ou encore contre le développement de l’éducation sexuelle… De fait, le cardinal a pris la tête d’un véritable affrontement de l’Eglise catholique argentine contre Cristina Kirchner (présidente de centre-gauche). Dans cette fronde, Bergoglio (cet « ami des pauvres ») n’a d’ailleurs pas hésité à s’afficher officiellement avec les partis les plus réacs, ainsi qu’avec les patrons et les milieux d’affaires !

On ne s’étonnera pas non plus qu’il se soit toujours farouchement opposé aux droits des femmes. Notamment à la contraception et au droit à l’avortement, toujours interdit en Argentine… sous la pression de l’Eglise.

Tout cela n’empêche pas un autre François, le très laïque président Hollande, de proclamer dans un communiqué : « J’adresse au Pape François 1er mes félicitations les plus chaleureuses et mes voeux très sincères pour la haute mission qui vient de lui être confiée à la tête de l’Eglise catholique pour faire face aux défis du monde contemporain« . « La France, fidèle à son histoire et aux principes universels de liberté, d’égalité et de fraternité qui fondent son action dans Le Monde, poursuivra le dialogue confiant qu’elle a toujours entretenu avec le Saint-Siège, au service de la paix, de la justice, de la solidarité et de la dignité de l’homme« .

Une belle leçon de solidarité entre hommes de pouvoir.

Juanito, Pavillon Noir (FA 86), 14 mars 2013

NdPN : notons que pas un mot sur ces points noirs du nouveau pontificat n’a été signalé, ni par l’archevêque de Poitiers, ni par la Nouvelle République. Alleluia !

Benito Seizième démissionne

Joseph Ratzinger, aka le pape Benoît XVI, a donc annoncé sa démission, qui a entraîné une vague de réactions de politicards soucieux de lui témoigner leur « respect ».

BenoitXVI

Pour rappel, Joseph Ratzinger était devenu préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi (dont l’ancien nom était l’inquisition). Il avait alors condamné de nombreux théologiens, notamment parmi ceux qui dénonçaient la trop forte hiérarchie de l’Eglise ou encore la misère dans le monde (accusés de soutenir une conception « marxiste » du « prolétariat »), suscitant la consternation chez nombre d’intellectuels catholiques. Droit dans ses bottes, il avait canonisé des prêtres morts pendant la guerre civile d’Espagne… au même moment où Zapatero reconnaissait les combattants républicains contre la dictature fasciste de Franco.

Proche de l’extrême-droitière Opus Dei dont il admire le fondateur, le franquiste Josemaría Escrivá de Balaguer, il est soucieux de rapprocher l’Eglise catholique de sa branche intégriste scissionniste, en réhabilitant quatre prêtres excommuniés, dont un négationniste. Il dira regretter ce geste, de même qu’il se défendra d’avoir attaqué l’islam lors de son discours de Ratisbonne en citant Manuel II : « Montrez-moi donc ce que Mahomet a apporté de nouveau. On ne trouvera que des choses mauvaises et inhumaines ». Force est de constater que le « Panzerkardinal » a maintenu une ligne très conservatrice.

Il s’est ainsi opposé à toute évolution de la doctrine concernant par exemple la laïcité (dénonçant le « laïcisme »), le célibat des prêtres, les prêtres femmes, la contraception (l’usage de la capote selon lui « aggrave le sida ») et l’avortement – y compris dans les cas où la santé de la femme est en jeu… Rappelons aussi que Benoît XVI avait validé, par la voix du préfet de la congrégation pour les évêques, l’excommunication de la mère d’une fillette de neuf ans violée par son beau-père, pour avoir aidé sa fille à avorter.

Suivant sa résolution à combattre la « morale dissolue », il a aussi condamné l’homosexualité, tout en affirmant dans le même temps que les homos avaient droit au respect. Il a fait interdire que des homos ou des hommes promouvant la « culture gay » entrent en séminaire. Il a aussi qualifié l’homosexualité « d’injuste ». Il n’a pas démenti les assertions du cardinal Bertone, selon lesquelles il y aurait un lien entre homosexualité et pédophilie. Au contraire, le Vatican les a reprises, alors même que le pontificat de Benito XVI fut éclaboussé par le scandale de la pédophilie au sein de l’Eglise catholique. Promoteur du mariage de l’homme et de la femme, il va jusqu’à dire, évoquant en creux le mariage homo, que « les politiques qui portent atteinte à la famille menacent la dignité humaine et l’avenir même de l’humanité » (!)

Le seul mérite de ce pape aura été d’avoir un peu plus vidé les bancs des églises par ses déclarations odieuses. Mais l’influence de l’Eglise sur les sociétés, notamment en matière d’homophobie et de rejet de droits des femmes, demeure hélas bien trop forte. Il nous faut continuer de lutter pied à pied contre la domination religieuse sur les esprits et les corps.

Pavillon Noir, 11 février 2013

[Poitiers] Homophobie tranquille dans une ville bonhomme

Aujourd’hui à Poitiers, un millier de manifestant-e-s environ se sont rassemblé-e-s, venant de tout le département de la Vienne, contre le mariage pour tou-te-s. Ces personnes dénient ainsi l’égalité des droits des homosexuel-le-s en termes juridiques (droits de succession, questions de parentalité), et refusent la reconnaissance de situations déjà existantes d’homoparentalité, maintenant jusqu’à présent les enfants concernés dans une situation de déni social (en arguant qui plus est avec cynisme que ce serait pour le bien des enfants).

70 contre-manifestant-e-s ont répondu présent, militant-e-s homos, militant-e-s d’organisations politiques, et un certain nombre d’anti-autoritaires, malgré le relai très faible car tardif de l’information dans les réseaux militants (voir notre appel ici).

Plusieurs choses à noter :

– Comme d’hab, les flics ont empêché les contre-manifestant-e-s de s’approcher, faisant un cordon et discutant avec le service d’ordre des réacs. Comme d’hab, ils nous ont filmé-e-s avec insistance (notamment les anti-autoritaires). Comme d’hab, ils nous ont menacé-e-s quand nous tentions de nous approcher. En revanche, ils ont laissé sans problème passer des gens du rassemblement homophobe, venant tenter de nous convaincre.

– Les manifestant-e-s contre le mariage homo ont tenu des propos sexistes à répétition, affirmant la différence de l’homme et de la femme, qui auraient des rôles « complémentaires », reniant ainsi le fait évident que les genres sont des constructions culturelles. Ils ont aussi bien évidemment tenu des propos homophobes inacceptables. Entre autres slogans entendus, à plusieurs reprises : « Mariage homo, mariage OGM ». Quand on sait que l’homosexualité a longtemps été considérée comme une maladie, subir de tels propos se référant à un fléau social d’une part et à la génétique d’autre part, aujourd’hui sur la place publique, sous l’oeil bienveillant des autorités, a de quoi nous mettre en rage.

– Les manifestant-e-s contre le mariage homo ont disposé d’une véritable tribune, avec micros, table sono et enceintes crachant leurs propos déplorables… sur le parvis même de la mairie, à hauteur de la porte de la mairie. Le bâtiment communal avait à ses pieds une foule d’un millier de personnes déblatérant leur homophobie avec une grosse sono en plein coeur de la ville. De fait la préfecture et la mairie (cette dernière se prétendant pourtant « socialiste » et en tout cas favorable à l’adoption du mariage pour tou-te-s), ont offert éhontément, aujourd’hui, une tribune à la haine homophobe.

Il n’est hélas guère étonnant, dans un système marchand où tout se vaut, que ce gouvernement considère qu’il est « légitime de débattre de façon citoyenne »… entre égalité des droits d’une part et homophobie d’autre part. Un peu comme lorsque des cathos intégristes manifestent contre le droit à l’avortement sous la protection des flics, en comparant publiquement l’avortement à un génocide, au nom d’une « liberté d’expression » à sens unique, où ce sont les contre-manifestants défendant les libertés qui sont filmés, repoussés et parfois réprimés (voir aussi la répression récente de manifestant-e-s antifascistes, lors de la pièce de Castellucci).

Cette triste manifestation de haine sur la place publique par des gens prétendant nous interdire quoi faire de nos vies montre une fois de plus que nous n’avons rien à attendre de quelque gouvernement que ce soit contre la domination patriarcale, et que nous devons nous organiser. Les libertés ne se demandent pas, elles se prennent.

Pavillon Noir, 2 février 2013

NdPN : vidéo de la NR ici, article ici sur les autres manifs ayant eu lieu dans des villes proches.

[Poitiers] Contre les homophobes, rassemblons-nous le 2 février place d’armes

Ce samedi 2 février aura lieu à 15h, place d’armes, une « manif pour tous » [sic] contre le mariage homo. Les homophobes remettent donc le couvert.

Ca s’était pas trop bien passé pour eux à Poitiers les dernières fois, du fait d’une grosse présence de gen-te-s contre l’homophobie et pour l’égalité des droits. Alors remettons ça !

Une page facebook propose un « kiss-in » avec bisous entre nanas et entre mecs : chouette ! Soyons présent-e-s en nombre pour ne pas les laisser polluer nos rues avec leurs slogans homophobes moisis.

Fachos curetons hors de nos fions.

Pavillon Noir

 » Les mêmes propos homophobes qu’à l’époque du Pacs « 

 » Les mêmes propos homophobes qu’à l’époque du Pacs « 

Les pro-mariage pour tous manifestaient hier à Angoulême. Avec eux, David Allizard qui revient sur les dernières semaines de débat dans la rue.

David Allizard, président de l’association « En tous Genres », milite pour une loi sur le mariage pour tous et plus généralement, contre les discriminations et l’homophobie.

Avez-vous été surpris par la manifestation anti-mariage pour tous de la semaine passée et de certaines remarques qui ont pu y être tenues ?

« Pas vraiment. Ce sont les mêmes idées ou les mêmes propos homophobes qu’à l’époque du débat sur le Pacs. Ces dernières années on entendait moins ce genre de propos, mais c’était latent. Un événement comme la manifestation de la semaine dernière n’a fait que les remettre sur la scène publique. On est toujours sur une opposition essentiellement religieuse. Même si on a vu l’UMP rejoindre le FN sur ce terrain… »

Rien n’a vraiment changé depuis le Pacs ?

« Globalement, l’opinion publique a évolué sur l’homosexualité. D’ailleurs, bon nombre de Français sont favorables à ce projet de loi. Bien plus qu’à l’époque du Pacs. Et chez les opposants, plus personne ne veut être taxé d’homophobe. Il faut croire qu’on trouvait ça moins choquant hier qu’aujourd’hui… Là aussi on évolue mais ça s’arrête à l’étiquette, les propos homophobes sont toujours là. »

Quelles sont les réactions en région ?

« A Poitiers, ça se passe plutôt bien. Quand on distribue des tracts, on est bien accueillis. Ce n’est pas le cas partout. A Angoulême, nos affiches sont systématiquement arrachées et il y a quelques jours, des militants ont été pris à partie… »

Comment réagissent à ce débat les personnes homosexuelles que vous accueillez à l’association ?

« Les semaines sont rudes pour les jeunes qui se découvrent en ce moment une orientation sexuelle. Et imaginez ce que peuvent ressentir des enfants qui grandissent actuellement dans des familles homoparentales ? Cette réalité est souvent niée par les opposants, mais dans les faits, les familles homoparentales existent déjà ! Les parents et grands-parents de personnes homosexuelles souffrent aussi du regard qui peut être porté sur leur proche. On ne peut pas rester insensible quand on entend comme je l’ai entendu, son enfant se faire traiter de zoophile, de pédophile ou de polygame ! C’est aussi pour ça que nous manifestons, pour montrer qu’il n’y a pas que ça, que la France n’est pas rétrograde à ce point. »

Comment voyez-vous l’avenir ?

« A court terme, ces attaques mettent toutes ces familles en difficulté mais si le projet de loi aboutit, ça leur permettra d’avancer dans un monde plus égalitaire. Et les blessures du moment s’effaceront, comme ce fut le cas après le Pacs. »

Hier, ils étaient 1.000 à Angoulême (selon les organisateurs). Dimanche prochain, des bus seront affrétés depuis Poitiers pour se rendre à la manifestation parisienne pour le mariage pour tous.

Propos recueillis par Delphine Noyon, Nouvelle République, 20 janvier 2013