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Le Monde Libertaire n° 1703 (du 11 au 17 avril 2013)

NdPN : le ML hebdo sort en kiosques aujourd’hui. Vous pouvez aussi vous le procurer à prix libre en nous écrivant. Un exemplaire sera laissé en libre consultation au Biblio-Café (rue de la Cathédrale à Poitiers), ou vous trouverez aussi les Monde Libertaire gratos 8 pages. Trois articles sont d’ores et déjà en ligne sur le site du Monde Libertaire (voir les liens dans le sommaire ci-dessous). Bonne lecture !

Le Monde Libertaire n° 1703 (du 11 au 17 avril 2013)

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«Combien faut-il d’électeurs pour changer une ampoule ? Aucun. Les électeurs ne peuvent rien changer.» – David Graeber

Sommaire du Monde Libertaire n° 1703 (du 11 au 17 Avril 2013)

Actualité

Les anars face à l’ANI, par Fabrice, page 3

La valse des rabots, par Justhom, page 5

Vous avez dit « indigne ! », par R. Duffour., page 5

La météo syndicale de J.-P. Germain, page 6

Clin d’oeil coréen, par N. Potkine, page 7

La chronique frénétique de Rodkol, page 8

International

Le mur des Brics, par J. Bedeau, page 9

Histoire

Ça bardait le 19 juillet 36, par R. Pino, page 11

Arguments

Saleté numérique, par le groupe de Martigues, page 15

Des ânes et des fauves, par E. Zaporija, page 18

Expressions

Saprés luddites, par A. Bernard, page 19

Sapré Léo, par P. Salcedo, page 21

Mouvement

Radio et vie du mouvement, page 22

L’agenda anar, page 23

Illustrations

Aurelio, Jhano, Kalem, Krokaga, La Sala, Nemo, Riri

Editorial

Ce qui est bien, quand on a un président normal – à défaut d’être socialiste –, c’est qu’on a les ministres qui vont avec : normaux. Ainsi Cahuzac, ci-devant ministre délégué au Budget.
Son boulot, c’était donc de ficeler le budget de l’État français. C’est sa faute, à lui, quand on supprime des postes utiles dans la fonction publique. C’est sa faute quand on garde les soldats et les bombardiers. C’est sa faute quand on rajoute des flics. C’est lui qui trouve les ronds pour les cadeaux aux patrons. C’est lui qui répète aux salariés qu’ils sont un poids pour le pauvre monde.
Quand vous attendez aux urgences à l’hôpital, criez : « Merci Cahuzac ! » Quand la TVA grimpe et que tout est plus cher : « Merci Cahuzac ! » Radié de Pôle emploi ? « Vive Cahuzac ! » Pour tout ce qui tient au budget de l’État, c’est lui le responsable pour tout 2013. C’est aussi sa faute, incidemment, quand on poursuit peu et mal la fraude fiscale.
Eh bien ce Cahuzac normal trouve normal de cacher tout ce qu’il peut de son argent (et il en a beaucoup) dans des paradis fiscaux pour ne pas payer ses impôts. Il fait comme tout le monde – tout le monde riche. Cela fait, il s’en va au travail, faire ce pour quoi on le paye. Normal.
Celui-là même qui imposait l’austérité soustrayait à l’effort ses propres possessions. Normal, quand les décideurs politiques du monde entier ont choisi de défendre avec les dents et d’imposer avec les armes les théories meurtrières du néolibéralisme triomphant, comme un salafiste brandit son Coran ou un marxiste son Capital.
Nous vivons dans un monde de riches salopards qui se moquent presque ouvertement des valeurs qu’ils prétendent inculquer aux pauvres : respect des lois, bien commun représenté par l’État, solidarité. Dès lors, la question se pose : pourquoi ceux d’en bas continueraient-ils à jouer le jeu, à se conduire en dupes ? Qu’avons-nous à gagner à subir sans cesse la morgue de ces parasites ? Pourquoi ne jetterions-nous pas toute cette fange au rebut ?

[Poitiers] Journée de grève du 9 avril

NdPN : rendez-vous pour le rassemblement contre l’ANI à 14h30 aujourd’hui, Porte de Paris. Entre autres grévistes, les territoriaux, chapeau à elles et à eux !

Voici le texte que nous diffuserons :

Quelques journées éparses ne suffiront pas

L’économie est en pleine restructuration. Oui, au cas où vous n’auriez pas fait le lien, la galère que nous vivons nous et nos infortuné-e-s congénères est une conséquence de l’actuelle restructuration du capitalisme, aussi appelée « La Crise » et de la politique d’austérité qui l’accompagne. Le manque de thune, les prix qui augmentent, les salaires qui n’augmentent pas, les subventions qui baissent, le flicage de Pôle Emploi, les dégraissages et délocalisations. Tout ça on le prend en pleine gueule, parce que nous ne sommes pas une valeur sur laquelle le gouvernement souhaite investir. Investir pour renflouer les banques, ça c’était une valeur sûre, mais nous, nous sommes trop risqué-e-s. Trop habitué-e-s aux largesses du système social français. Mais ça va « changer » nous dit-on !

L’actuel gouvernement « écolo-socialiste », dans la continuité du précédent, cherche tous les moyens pour réduire les dépenses de l’État et pour obtenir de nouvelles rentrées d’argent. Point de « changement » là-dedans, il s’agit de gérer la misère capitaliste sous des dehors humains, parce que quand même, la gauche, Mitterrand, Blum, Jaurès, … Et puis créer de l’emploi bordel ! Même du taf de merde, on s’en fout, l’important c’est qu’on puisse taxer les entreprises (mais pas trop, sinon elles délocalisent) et surtout les salarié-e-s (autant qu’on veut, seul-e-s les plus fortuné-e-s se délocalisent).

Dans ce contexte, l’ANI est un gage de bonne volonté accordé au patronat. Une preuve de soumission de la gauche cogestionnaire, pour bien montrer qu’elle est compatible avec l’économie de marché (mais qui en doutait encore ?). Cet accord, signé par la première organisation patronale (le MEDEF) et trois centrales syndicales assez peu réputées pour leur combativité (CFDT, CFTC, CFE-CGC) est aussi une preuve que la France prend la mesure de la gravité de la « crise » et s’organise en conséquence pour tenter de faire repartir la croissance. Chouette…

Voyons un peu où l’on nous dirige. On nous fait bien comprendre que le « modèle social français » c’est terminé, que maintenant, crise oblige, il va falloir être flexible, compétitif. Un mini plan d’ajustement structurel, « auto-imposé » dirons-nous. C’est là que la chose est raffinée. Contrairement à ce qui se passe en Grèce par exemple, puisqu’ici la situation est jugée moins problématique, ce n’est pas la Troïka (FMI, Commission Européenne et Banque Centrale Européenne) qui opère. Nous n’avons donc pas le sentiment d’être soumis-e-s à la domination d’un envahisseur venu démanteler l’État social et nous grappiller le peu de miettes qui tombaient encore du gâteau. Non, ça se passe entre français-e-s. D’où peut-être une opposition moindre à cette politique de précarisation qui ne dit pas son nom.

Pourtant cette attaque n’est pas la première et s’inscrit dans la lignée des précédentes tentatives réussies (2003, 2007, 2010) ou échouées (1995) de réforme des régimes de retraite, ou de créer des contrats de merde toujours plus précaires (CIP en 1994, CPE/CNE en 2006). Et elle en appelle d’autres. Nous pensons que, face à cela, nous devons nous donner les moyens d’une résistance concrète et durable. Une force capable de se défendre face à de pareilles attaques, mais aussi (soyons dingues) de se donner les moyens de se voir concéder toujours plus de miettes, et pourquoi pas d’obtenir le gâteau tout entier.

Nous souhaitons en conséquence appeler à la tenue d’une assemblée contre l’austérité et la précarité.

Quelques prolétaires

Plus d’info bientôt sur :

fa86.noblogs.org – epinenoire.noblogs.org – nidieuxnimaitreenpoitou.wordpress.com

NdPN – Mise à jour : nous avons distribué 200 tracts. Plus d’infos à venir. Loi votée à l’Assemblée, comme prévu… Sinon, deux comptes-rendus de la journée par la NR : à Poitiers, et à Châtellerault.

Poitiers : Contre l’accord interprofessionnel

Hier, Porte de Paris à Poitiers, on pouvait voir des barrages de police et des drapeaux rouges, blancs, jaunes brandis par 200 manifestants prêts à se diriger vers la préfecture. La CGT et Force Ouvrière, avec le soutien de la FSU et Solidaires, appelaient en effet les salariés du public et du privé à manifester contre le vote par les députés de l’Accord national interprofessionnel (ANI).

130 licenciements par mois en 2011

Catherine Giraud, secrétaire à l’union départementale CGT Vienne, s’est fait porte-parole de ses camarades : « L’objectif de l’ANI est soit disant de lutter contre le chômage. Or le vote de cet accord ne fera qu’augmenter les sous-emplois à travers des CDI intermittents. On obligera les salariés à être mobiles sous peine de licenciement  ». En outre, les représentants des syndicats présents déplorent une augmentation des licenciements : « 130 par mois en 2011 et 1.525 ruptures conventionnelles de contrats de travail dans la Vienne ». Force Ouvrière, à travers son secrétaire général Alain Barreau, dénonce : « Cet accord va rendre les salariés malléables, sans contraintes pour les patrons et sans hausse de salaires. En signant cet accord, le Parti Socialiste, le patronat, la CFDT, la CFTC et la CGC portent sur leurs épaules le poids d’une régression sociale à venir ». Les revendications des syndicats opposés à l’ANI ? « Nous voulons une augmentation des salaires, des retraites, des pensions, des allocations et des minima sociaux. La situation des salariés ne cesse d’empirer. Le chômage est en hausse depuis 22 mois et 8 millions de personnes en situation de précarité sont actuellement sur le marché du travail », martèle Alain Barreau. Les syndicats se disent prêts à poursuivre leurs actions le 1er mai prochain si « le gouvernement poursuit sur sa lancée, dangereuse pour les salariés ».

en savoir plus

500 salariés du public (mairie, hôpitaux…) et privé (Fonderies, Coop…) ont manifesté hier matin dans les rues de Châtellerault pour protester contre l’ANI. Les deux Fonderies (Fonte et Alu) ainsi que la Snecma ont appelé à 24 heures de grève, a annoncé Alain Delaveau, secrétaire de l’UL-CGT.

Aurore Ymonnet, 10 avril 2013

Châtellerault : Cinq cents manifestants dans la rue

A l’appel de la CGT et FO, 500 salariés du public (mairie, hôpitaux…) et privé (Fonderies, Coop…) ont manifesté dans les rues de Châtellerault pour protester contre l’ANI, cet Accord national interprofessionnel signé le 11 janvier entre les organisations patronales et trois syndicats (CFDT, CFTC et CFE-CGC), et, en cours d’examen au Parlement. (*)

 » Chantage à l’emploi  »

Ils demandent le retrait de ce projet de loi, « ex-accord de compétitivité emploi sous Nicolas Sarkozy », qui reste un « texte de régression sociale », du « chantage à l’emploi ». Un texte que les affiches et autres banderoles brandies résument ainsi : « Travailler plus, gagner moins et loin de chez soi. » Les deux fonderies (Fonte et Alu), ainsi que la Snecman ont appelé à 24 heures de grève, annonce Alain Delaveau, secrétaire de l’UL CGT. « À la Fonte, on commence déjà à nous mettre de la flexibilité avec la mise en place de séances de travail supplémentaires obligatoires. La colère gronde dans les entreprises même si elle n’est pas forcément exprimée dans la rue. » Dominique Gougeon, de la CGT hôpital Camille-Guérin, estime que « cet accord va créer soit des fermetures d’usine soit une dégradation des conditions de travail, en envoyant par exemple des salariés travailler à l’autre bout de la France. » Il craint une « précarisation du travail » : « On pourra faire baisser les salaires pendant 2-3 ans sous prétexte de productivité. » Autrement dit, résume un autre manifestant : « Les pauvres travaillent pour l’argent, l’argent travaille pour les riches. »

(*) L’ANI prévoit plus de flexibilité pour les employeurs (accords de maintien dans l’emploi, mobilité interne, refonte des procédures de licenciements…) contre de nouveaux droits pour les salariés (accès élargi aux mutuelles, droits rechargeables au chômage, formation…).

Denys Frétier, Nouvelle République, 10 avril 2013

[DAL 86] La vente des locaux de l’ex-foyer de l’Etape : une vraie provocation à l’égard des sans logis et mal logés

NdPN : voir aussi la vidéo de France 3

La vente des locaux de l’ex-foyer de l’Etape : une vraie provocation à l’égard des sans logis et mal logés

Alors que de nombreuses familles et personnes seules sont à la rue ou dans des conditions de logement très précaires, alors que la situation de l’hébergement d’urgence est dramatique : l’accueil inconditionnel et continu n’est pas assuré, les places manquent, les locaux sont vétustes et indignes,la Ville de Poitiers a décidé de vendre l’ancien foyer l’Étape qui lui appartient.

Ces locaux qui font au minimum 800 m², pourraient certainement accueillir plus d’une cinquantaine de personnes soit autant que l’accueil d’urgence actuel géré par la Croix Rouge qui est passé de plus de 200 places à 50 places. Ils permettraient aussi de mieux respecter les lois, ce que les locaux actuels ne permettent pas : des chambres individuelles (et non dortoirs) avec la possibilité d’avoir un hébergement conforme à la dignité humaine (et d’avoir par exemple son chien avec soi), possibilité du couvert alors que le CHUS ne sert pas à manger…

La Ville de Poitiers dont le service municipal du logement après avis du maire, peut proposer au représentant de l’Etat dans le département de procéder, par voie de réquisition, à la prise de possession partielle ou totale des locaux à usage d’habitation vacants, la Ville de Poitiers dont le Maire a le pouvoir de réquisitionner lui même des logements, non seulement a laissé vacants durant deux ans des locaux adéquats qui peuvent servir immédiatement à l’hébergement d’urgence mais n’a pas pensé les proposer à l’Etat pour que la Croix Rouge mène à bien la mission qui lui incombe.

Plus fort encore, la Ville de Poitiers, en acceptant que l’architecte François Pin puisse dénoncer l’acquisition s’il n’a pas trouvé la moitié des acquéreurs pour les seize habitations avant le 30 novembre de cette année, décide cyniquement de laisser vacants durant encore 7 mois, des locaux qui manquent cruellement aujourd’hui à l’hébergement d’urgence. Et ce, pour un projet nébuleux et assez improbable vu la crise.

DAL86 est atterré par tant d’hypocrisie, de cynisme et de provocations.

Alors que l’ÉTAT SOCIALISTE par sa ministre du Logement EELV, Cécile Duflot, montre sa volonté de régler rapidement et durablement les problèmes de logement y compris en évoquant les réquisitions, la REPRESENTANTE DE L’ETAT SOCIALISTE, la préfecture, non seulement ne prend pas en charge les sans abri et mal logés qui le nécessitent mais travaille à fabriquer des sans logis, et la VILLE DE POITIERS SOCIALISTE déniant qu’il y ait des problèmes de logement, non seulement ne réquisitionne pas des logements vacants, non seulement ne met pas à disposition de la préfecture des logements et des locaux qui pourraient servir immédiatement à l’hébergement d’urgence, mais la VILLE DE POITIERS à vendu ces précieux locaux à un architecte privé pour un projet très aléatoire.

Deux familles, 7 personnes dont 3 enfants de 1 à 5 ans et une femme enceinte, étant à la rue donc en état de nécessité voire en danger, sont entrées par la porte ouverte de cette maison le 2 avril dernier soit depuis 5 jours. Aujourd’hui dimanche 7 avril, 3 autres familles soit 10 autres personnes dont 5 enfants de 2 ans à 13 ans et une femme enceinte, sont venus les rejoindre. Si on compte la dizaine de militants du DAL86 qui les soutiennent, une trentaine de personnes dont 8 enfants et 2 femmes enceintes sont présentes sur les lieux.

Aussi, DAL86 a décidé d’apporter tout son soutien à ces familles et personnes en état de nécessité qui se sont mises à l’abri dans ces locaux, qui se sont protégées elles-mêmes et leurs enfants, et qui ont fait ce que ni la préfecture, ni la mairie ne font pour elles alors que la loi les y oblige. Dal86 appelle à un soutien massif.

Halte à l’hypocrisie, mise à disposition des logements et locaux vacants des collectivités, réquisitions des logements privés vacants.

Un logement est un droit avec ou sans papiers

DAL86dal86@free.fr – 06 52 93 54 44 / 05 49 88 94 56

Permanences : tous les samedis matin de 11h à 12h et tous les mardis soirs de 17h à 18h Maison de la Solidarité 22 rue du Pigeon Blanc Poitiers

Vu sur DAL 86, 7 avril 2013

Le Monde Libertaire n° 1702 (du 4 au 10 Avril 2013)

NdPN : Le Monde Libertaire n° 1702 est en kiosques ce jeudi. Vous pouvez aussi vous le procurer à prix libre en nous écrivant. Un exemplaire est laissé en consultation libre au Biblio-Café (rue de la Cathédrale à Poitiers). Trois articles d’ores et déjà en ligne sur le site du ML (voir liens ci-dessous). Bonne lecture !

Le Monde Libertaire n° 1702 (du 4 au 10 Avril 2013)

ml 1702

« L’oppresseur ne se rend pas compte du mal qu’implique l’oppression tant que l’opprimé l’accepte.» – Henry David Thoreau.

Sommaire du Monde Libertaire n° 1702

Actualité

Drôle de justice, par J.-M. Destruhaut, page 3

La droite dans l’gaz, par E. Vanhecke, page 5

La météo syndicale, par J.-P. Germain, page 6

Néo-socialisme, par J. page 7

La Chronique néphrétique de Rodkol, page 8

Des nouvelles des PSA, par S. Larios, page 9

Cochon de Maurice, par Justhom, page 10

International

L’Europe démasquée, par J. Bedeau, page 11

Nouvelles des anarchistes espagnols, page 14

Expressions

La boisson qui tue, par N. Potkine, page 15

Une Histoire de France pour les nuls, par P. Schindler, page 16

Le cinéma par M. Topé, page 17

Michel Foucault instrumentalisé, par Pavillon noir, page 18

Manuel d’anthropologie, par M. Silberstein, page 19

Mouvement

La prostitution selon Y. Guignat, page 20

La prostitution selon Solange, page 21

La vie du mouvement et la Radio, page 22

L’agenda libertaire, page 23

Illustrations

Aurelio, Jhano, Kalem, Krokaga, Nemo, Schoëvaërt

Editorial

Un président placide, désabusé, passait sans trop y croire à la télé ce 28 mars. On en a tous été relativement saturés par les médias, fidèles à eux-mêmes et bien plus encore à leurs financeurs. On ne vous infligera donc pas tous les méandres de la laborieuse démonstration du président pour n’en retenir que quelques éléments saillants. Un « oubli » de taille tout d’abord, le passage sous silence des promesses électorales concernant la « renégociation du Traité européen » pour « l’emploi et la croissance » et puis la curieuse discrétion à propos des fermetures d’usines à répétition, autant de démentis à ses imprudents engagements. Ensuite, des décisions – souvent déjà prises avant son discours – bien faites pour choquer les personnes éprises de justice sociale : 20 milliards de crédits d’impôts offerts sans contrepartie aux entreprises (qui finiront en placements boursiers comme d’hab’), apologie de l’accord de flexisécurité, l’exécrable ANI, présenté comme une avancée sociale alors qu’il va surtout permettre aux employeurs de baisser les salaires, d’augmenter le temps de travail et de réduire les délais de recours aux prud’hommes, poursuite de la casse du service public et pour finir retraites revues à la baisse et durée des cotisations à nouveau allongée (pan dans les emplois pour les jeunes et dans le pouvoir d’achat des autres !). Face à ce serrage de ceinture populaire, on a évidemment eu droit à l’irréaliste promesse « d’inverser la courbe du chômage fin 2013 » et aux titatas et saupoudrages pas chers, habituels dans ce genre de prestation, comme le gentil conte de la « boîte à outils », le « choc de simplification » pour les petits chefs d’entreprise qui savent pas lire (les gros se payent de chouettes avocats, merci) et une formation professionnelle (payante, on le craint) en deux mois au lieu de quinze. Va falloir réveiller au clairon les dirlos des agences Pôle emploi. On retiendra de ce filandreux fatras les tares récurrentes à la doxa capitaliste de la droite comme de la gauche sociale-traître : mettre tous les problèmes sur le dos de la Crise, cette crise suscitée et amplifiée par les erreurs et la voracité des financiers qu’elles soutiennent, feindre de croire au mirage – qui recule quand on avance – d’une onirique croissance définitivement irréalisable dans un climat de concurrence mondialisée et de diminution du pouvoir d’achat, se soumettre servilement aux diktats d’austérité de l’Europe des riches, bref croire dur comme fer à la main invisible du marché.