Une nouvelle convention collective signée dans le dos des aides à domicile

Le nouvelle Convention collective unique pour la branche aide à domicile, réunissant quatre conventions collectives en une seule, a suscité la colère des travailleuses dans la Vienne (nous le rapportions ici et ) : perte de nombreux congés, complémentaire santé obligatoire même pour les salarié-e-s déjà couverts ailleurs, non-prise en compte des absences dans l’ancienneté, suppression de la prime de déménagement, de la majoration jours fériés, mais surtout perte de 40% sur les frais kilométriques, ce qui pénalise grandement les salarié-e-s en milieu rural. Le seul « avantage » : une majoration du travail le dimanche, et le « choix » parmi plusieurs mutuelles. La belle jambe ! Les seules gagnantes dans cette histoire sont ces mutuelles de santé (comme AG2R) , bénéficiant d’une manne providentielle…

Comme convention collective, on a vu mieux. C’est qu’avec la réforme de la « représentativité » syndicale, il a suffi que seuls deux syndicats signent (pour ne pas les nommer : UNSA et CFDT… tiens donc). Dans un milieu professionnel très peu syndiqué, les salarié-e-s ont la nette impression que tout s’est joué dans leur dos et reçoivent cette « convention collective » avec colère. Espérons que leurs luttes paieront.

En attendant, on lira avec consternation la défense de la CCU dans la presse locale par un syndicaliste (CFDT…). (1)

Pavillon Noir, 14 février 2012

(1) L’article en question : en gros le mec « comprend » que ça touche les salariées de plein fouet, mais elles n’ont qu’à se débrouiller pour améliorer leurs droits… via leurs organisations syndicales.

On peut mieux faire

Les aides à domicile ont découvert que leur nouvelle convention collective peut être moins avantageuse. Un syndicaliste explique pourquoi il la défend.

Jean-Philippe Loiseau défend la CFDT qui a signé l'accord instituant cette convention collective des aides à domicile qui fait débat chez certaines d'entre elles.

 

Jean-Philippe Loiseau défend la CFDT qui a signé l’accord instituant cette convention collective des aides à domicile qui fait débat chez certaines d’entre elles.

Secrétaire départemental CFDT personnels « santé-sociaux » de la Vienne, Jean-Philippe Loiseau, trouve paradoxal que la nouvelle convention collective qui s’applique aux aides à domicile les rende mécontentes. Il comprend que certaines mesures posent localement des problèmes mais fait de cette convention la base d’une amélioration globale.

Qui cette convention collective concerne-t-elle ?

Dans la Vienne, cela concerne notamment les ADAPA et ADMR. Au niveau national, ce champ d’activité regroupe environ 220.000 salariés.

Comment est-elle née ?

Le secteur était régi auparavant par quatre conventions collectives. Tout le monde s’est mis d’accord pour les harmoniser en une seule. Toutes les organisations d’employeurs ont signé cette nouvelle convention. Du côté des salariés, seules l’UNSA et la CFDT l’ont signée. Les autres organisations syndicales ont fait valoir leur droit d’opposition qui n’a pas été retenu. Cette convention collective étendue concerne désormais tous les salariés de la branche.

«  Elle contient des avancées qui méritaient qu’on la signe  »

Les aides à domicile ont-elles été consultées ?

Ce secteur est somme toute assez neuf et regroupe beaucoup de gens dans la précarité. Le niveau de syndicalisation y est très faible et elles peinent à se reconnaître dans les organisations syndicales. Mais la loi est ainsi faite que les organisations syndicales représentatives seules peuvent avoir droit au chapitre. Je trouve paradoxal que les employés se retournent vers leurs employeurs. Je crains vraiment que certains appliquent cette convention au rabais et travestissent son contenu.

Certaines aides à domicile dénoncent de nouvelles conditions moins avantageuses…

Effectivement, cette convention fixe le remboursement des frais kilométrique du trajet domicile-premier usager à 60 %. On ne peut que convenir qu’il s’agit d’une perte. Mais il n’est pas interdit de faire mieux que ce plancher. La pratique d’indemnisation des associations peut être maintenue par des accords d’entreprise. Une convention collective n’est pas un texte figé. Les négociations sont quasi perpétuelles. Charge aux organisations syndicales de la faire évoluer et c’est bien notre objectif. Nous l’avons signée parce qu’elle contient des avancées qui méritaient qu’on la signe.

comment fera-t-on demain ?

Même s’il souhaite faire évoluer cette convention collective et appelle les salariées à obtenir de leur employeur des accords d’entreprise qui maintiennent leurs conditions actuelles les plus avantageuses, Jean-Philippe Loiseau ne peut nier le contexte. « Le contexte de restriction budgétaire est tel que le premier problème à poser n’est pas tant l’indemnisation kilométrique que les réductions d’horaires imposées. J’aimerais voir les employés et les employeurs se battre pour que les temps d’intervention ne soient pas réduits. La priorité ne doit pas forcément être de faire payer les salariés par de mauvaises conditions financières. Ce n’est pas en les précarisant encore que la situation va s’améliorer. C’est aussi pour cela qu’il y avait urgence à signer cette convention. Certaines aides à domicile ont un temps de travail tellement partiel qu’elles font des ménages de gré à gré voire par chèque emploi service sans aucune mesure de protection (couverture prévoyance, formation, accès à une mutuelle…). »

Nouvelle République, 14 février 2012

Une réflexion sur « Une nouvelle convention collective signée dans le dos des aides à domicile »

  1. Je m’adresse à vous tous afin que chacun puisse relayer l’information autour de lui et communiquer sur le devenir des services d’aide à domicile qui sont essentiels pour tout à chacun.
    Je suis salariée à la Fédération Admr du Finistère qui est en procédure judiciaire depuis 2 ans ½. Nous arrivons semble t il au terme de cette procédure avec un licenciement important de 78 salariés sur 115 (tout au moins d’en un premier temps). Une procédure qui aura été douloureuse pour les salariés, notamment par un manque total de communication et de bienveillance de la part de la gouvernance et pour le désastre qui en résulte. Je rappelle juste que les valeurs Admr sont le lien social, l’écoute et la solidarité (je n’oserais dire humanistes).
    La situation du Finistère n’est malheureusement pas unique en France et pour plus d’informations je vous conseille le blog d’une journaliste du Télégramme- Karine Joncqueur
    http://lactudeladmr29.blogs.letelegramme.com
    Mon interrogation aujourd’hui concerne la pérennité de ces services et l’avenir de ces salariés qui sont trop souvent des sans voix et des anonymes.
    Les médias et les politiques ne s’intéressent guère à ce secteur, il n’est pas médiatique et ne fait pas le buzz. On préfère parler de Sea France , 800 salariés, que des problèmes des associations d’aide à domicile qui, pourtant, représentent des milliers de salariés (3000 sur le Finistère, faites le compte sur la France).
    On peut se poser la question, pourquoi les pouvoirs publics qui ont comme compétence la dépendance, « grande cause nationale » ne s’impliquent pas plus dans l’étude et la résolution de ces problèmes : intérêts politiques et financiers ? Ces services sont ils promis à la société marchande ? L’argent public, notamment les aides des Conseils Généraux au titre de la dépendance doivent il servir à financer des entreprises à but lucratif et à enrichir des fonds de pensions, ou au contraire à favoriser les structures non lucratives, maintenir le lien social et pérenniser les emplois de proximité dans le respect des salariés?
    Qui sont les gouvernants des associations Admr ? des bénévoles , et il y en a de très bien, mais quelle est la place du bénévolat dans une organisation professionnelle ?.
    Certains ont d’importantes influences politiques locales ou régionales et dirigent leur association comme des hobereaux avec des accents de paternalisme, d’affectivité, et un manque criant de professionnalisme.
    Pour exemple, sur les secteurs géographiques de ma connaissance (malheureusement ce ne sont pas les seuls) jusqu’en 2008, les salariés pouvaient travailler 13 jours sur 14, sans congés hebdomadaires, payés à l’heure sans respect du contrat conclu, des salaires variables selon les mois, ceci pour répondre aux besoins de l’activité, sans prise en compte des heures supplémentaires. La gestion des salariés était hors cadre légale et conventionnel. Et ceci n’indignait personne !!!
    Qui d’entre nous au cours de sa vie professionnelle aurait accepté des conditions semblables ?
    Après avoir restructuré ces services depuis 2006, aujourd’hui la désorganisation de notre activité, va entraîner une nouvelle précarité de ces salariés et par voie de conséquence un service déliquescent auprès des usagers, public souvent très fragilisé.
    Une nouvelle Convention Collective vient d’être mise en application, celle-ci est moins favorable aux salariés, bien sur ceux-ci avaient beaucoup trop d’avantages acquis !!!!!
    Le but des décisionnaires est il atteint ?
    Nous sommes tous de près où de loin concernés par ces services, pour nos parents, pour nous-mêmes.
    L’organisation professionnelle d’une meilleure prise en charge de la dépendance et du maintien à domicile est un choix de société.
    Merci de m’avoir lu jusqu’au bout.
    Fraternellement,

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