Archives de catégorie : Questions de genres

[Poitiers] Rassemblement de solidarité avec les femmes espagnoles

Rassemblement de solidarité avec les femmes espagnoles

Le gouvernement espagnol Rajoy vient d’annuler ce vendredi 20 décembre la loi autorisant l’avortement, sous couvert d’une loi organique de « protection de la vie et des droits de la femme enceinte ». Pour rassurer sa base électorale et consolider sa position de fervent défenseur des valeurs traditionalistes et fondamentalistes religieuses, il fait ainsi passer au second plan les problèmes économiques qui touchent de plein fouet les espagnolEs

Au mépris des recommandations des textes internationaux de l’OMS et ONU, le conseil des ministres espagnol est revenu sur une avancée majeure pour les femmes : la loi de 2010 qui légalisait l’avortement jusqu’à 14 semaines de grossesse – 22 pour raison médicale -.

En renouant avec des pratiques déniant la liberté de choix, c’est le mépris des droits humains fondamentaux des femmes et des couples à maîtriser leur fécondité et à décider de leur vie que le gouvernement espagnol vient de signer. Il annonce clairement son projet de société : maintenir les femmes dans un statut social étroit et de soumission !

Après l’offensive des opposants aux droits des femmes contre le rapport Estrela, rejeté le 10 décembre dernier au Parlement européen, cette démarche du gouvernement espagnol vient s’inscrire dans le mouvement européen réactionnaire et conservateur qui n’a toujours pas accepté le droit des femmes à de disposer de leur corps, et les considère comme des sous citoyennes incapables de décider par elles-mêmes.

Le combat des forces démocratiques et associatives espagnoles pour ce droit fondamental est le nôtre, et nous le soutiendrons ici et ailleurs, car il est le combat de celles et ceux qui veulent l’égalité entre les femmes et les hommes.

Soyons nombreux et nombreuses à Poitiers pour manifester notre soutien aux femmes espagnoles !

11 H – PLACE DU MARCHE NOTRE DAME

SAMEDI 11 JANVIER – POITIERS

Vu sur le site du NPA 86, 7 janvier 2014

Une étude sur le sexisme dans les catalogues de jouets pour enfants.

Jouets pour enfants : quelques chiffres pour mesurer le sexisme

D’un côté, des fers à repasser roses, des costumes de princesse, des jeux d’intérieur. De l’autre, des perceuses et des marteaux, les tenues de super-héros, les jeux d’extérieur… Noël revient avec ses catalogues de jouets sexistes, dont les images prétendent reproduire le monde des adultes.

Une jeune sociologue, Mona Zegaï, travaille depuis quelques années sur le sujet. Elle a montré que, contrairement à une idée reçue, la différentiation très nette garçons/filles dans les catalogues de jouets est assez récente : avant les années 90, elle n’était pas aussi marquée (lire son étude en PDF).

Selon elle, cette nouvelle présentation est portée par une « idéologie de la différence des sexes » où les filles sont invitées à cultiver l’intime et le relationnel, alors que les garçons se voient attribuer la place active dans la société.

Si les stéréotypes sexistes que ces catalogues inculquent aux enfants sont régulièrement dénoncés, ils sont rarement mesurés. Astrid Leray, qui a monté un cabinet d’études sur les questions d’égalité entre les genres, Trezego, s’est attelée à la tâche (lire le document ci-contre).

Elle a épluché dix catalogues de jouets parus pour Noël 2013 (quatre grandes surfaces, cinq enseignes de jouets, un magasin bien-être & loisirs), soit un total de 1 580 pages. Sa conclusion : « En mettant en scène un univers extrêmement genré et stéréotypé, les spécialistes du jouet sont un des rouages de l’intériorisation des inégalités femmes-hommes. Ainsi, à la lecture des catalogues de Noël, non seulement certaines dichotomies seraient aussi genrées qu’irréconciliables (intérieur/extérieur, sécurité/danger ou coopération/compétition) mais garçons et filles n’auraient pas les mêmes potentiels. »

Lire la suite, avec pas mal de visuels et de graphiques très parlants, sur Rue 89

La ségrégation professionnelle hommes-femmes s’accroît

NdPN : une étude du ministère du Travail démontre, s’il était encore besoin, que la ségrégation sexiste sévit au travail… de plus en plus ! Les chiffres traduisent aussi combien ce sexisme, dans la répartition des emplois, est d’origine culturelle : le privé est ainsi plus touché que le public où bon gré mal gré et quoi qu’on en pense, les luttes féministes se sont traduites par des textes de lois. L’éducation joue aussi évidemment un grand rôle : les femmes se voient toujours plus orientées vers des filières littéraires et tertiaires… constatons d’ailleurs que le niveau d’études atténue la répartition sexiste des emplois. Notons qu’au même moment, deux ministres femmes alertent sur le sexisme à l’œuvre dans le développement des nouvelles technologies numériques… mais en ne proposant que davantage d’entrepreneuses. Comme quoi capitalisme et sexisme font bon ménage ! Il n’y a qu’à voir combien les publicités, les jouets industriels, ou les bouquins pour enfants, participent à ancrer la discrimination sexiste dans les structures mentales et la vie quotidienne.

Métiers de femmes, métiers d’hommes: la mixité est encore loin

Infirmière pour les femmes, pompier pour les hommes: les clichés de l’école maternelle sont bien réels en France où la « ségrégation professionnelle » persiste largement, selon une étude du ministère du Travail (Dares) publiée vendredi.

Pour que les métiers soient répartis équitablement entre les sexes, « il faudrait qu’au minimum 52% » des femmes (ou des hommes) changent d’activité, souligne cette enquête qui se fonde sur des données de 2011.

La ségrégation est plus forte dans le privé que dans le public, et en régions qu’en Ile-de France (où il faudrait que 43% des femmes ou des hommes changent de métier).

En trente ans, la mixité a quand même progressé, tandis que la part des femmes dans la population en emploi est passée de 41,7% en 1983 à 47,5% en 2011, note l’étude.

Mais près de la moitié des femmes (47%) se concentre toujours dans une dizaine de métiers comme infirmière (87,7% de femmes), aide à domicile ou assistantes maternelles (97,7%), agents d’entretien, secrétaire ou enseignantes.

Du côté des hommes, la répartition est plus dispersée, les 10 professions les plus « masculines » n’employant que 31% d’entre eux: conducteurs de véhicules (près de 90% d’hommes), l’armée, la police ou les pompiers (environ 75%), ouvriers du bâtiment ou manutentionnaires.

Au cours des trente dernières années, certains métiers « masculins » sont devenus mixtes, notamment chez les cadres (dans la finance, la fonction publique ou la banque). Mais des métiers mixtes sont aussi devenus masculins, comme celui d’agriculteur et des métiers mixtes féminins, comme celui de comptable.

L’étude relève que plusieurs facteurs contribuent à cette ségrégation professionnelle, l’éducation ayant « une importance particulière ». Près de 60% de la ségrégation pourrait ainsi être attribuée à une « ségrégation éducative », les femmes étant plus présentes dans les filières littéraires et tertiaires et les hommes dans les filières scientifiques et techniques.

La ségrégation varie aussi en fonction du diplôme, avec globalement davantage de mixité à mesure que le niveau de qualification augmente, les plus hauts diplômes conduisant à des métiers de plus en plus mixtes.

A l’inverse, la ségrégation a augmenté chez les non diplômés ou titulaires d’un brevet des collèges, les hommes et les femmes étant répartis de manière plus différenciée entre les métiers qu’il y a trente ans.

AFP, 13 décembre 2013

Prostitution : un texte critique du projet de loi

Pénalisons les yeux fermés
In Le Monde libertaire # 1725 du 12 au 18 décembre 2013

SANS TROP DE SURPRISE, le 4 décembre, les députés ont adopté en première lecture le projet de loi visant à lutter contre la prostitution en France en pénalisant les clients. J’entends déjà la voix plaintive de certains lecteurs s’élever :

«Encore un article sur le sujet ! » Désolée si vous pensez que ceci ne vous intéresse pas mais les conséquences de cette loi vont toucher quelques centaines de milliers de personnes, principalement des femmes. En France, le nombre de prostituées est évalué entre 20000 et 40000 mais ce chiffre est contestable : en Allemagne il s’élève à 400000. Il est difficile d’imaginer un tel écart entre les deux pays. Les chiffres officiels français sont estimés à partir du nombre d’interpellations pour racolage et de victimes identifiées dans les affaires de proxénétisme. Ils intègrent une évaluation du nombre de prostituées passant leurs annonces sur Internet. Mais celle-ci est, de l’avis même des services de police, peu fiable, car cette activité, cachée et mobile, est très difficile à quantifier. Quelque 10000 annonces différentes ont été comptabilisées sur une journée.

La loi a été votée à l’Assemblée sans tenir compte des sonnettes d’alarme tirées par diverses associations de santé ou de terrain. Le vendredi 29 novembre, le jour où la loi a été débattue, l’hémicycle était presque désert.

Autant pour le débat. Plus de 200 signataires du manifeste contre la pénalisation ont été simplement ignorés, dont Médecins du monde, la Ligue des droits de l’homme ou encore le Planning familial. Pire, certains n’ont pas hésité à les taxer de prostitueurs, de proxénètes.

Quand certains députés, sceptiques, ont osé émettre des doutes sur l’intentionnalité de la loi et ses risques éventuels, on les a accusés de voter avec leur «calbute». Cette délicatesse vient du socialiste Jean-Marc Germain qui a sans honte fait un parallèle entre ses collègues non-abolitionnistes et les signataires du torchon Touche pas à ma pute, pétition signée par 343 salauds.

De nombreux députés étaient absents ou se sont abstenus. La mobilisation a été importante au groupe socialiste : 238 députés sur 292 ont soutenu le texte. En revanche, alors que le groupe avait dans un premier temps annoncé une abstention, l ’UMP a massivement voté contre avec 101 députés. Seuls dix députés UMP ont voté pour, dont l’un des principaux promoteurs du texte, Guy Geoffroy et la candidate à la mairie de Paris Nathalie Koscuisko-Morizet. Ce qui dérange les députés UMP, c’est avant tout l’abolition du délit de racolage institué par Nicolas Sarkozy ainsi que la proposition d’un titre de séjour temporaire de six mois pour les prostituées étrangères. L’UDI a aussi voté majoritairement contre, de même que les écologistes. La députée Europe Écologie-Les Verts Barbara Pompili s’est exprimée au moment du vote, déclarant qu’elle se refusait à soutenir ce texte d’une « logique répressive ». Avant d’entrer en vigueur, le texte devra être approuvé par le Sénat qui devrait l’examiner avant fin juin.

Il n’aura échappé à personne, que, là encore, les principales concernées par cette loi sont des femmes étrangères. Personne ne peut sérieusement penser que le gouvernement va régulariser quelque 20000 prostituées étrangères.

Que dire de cette phrase prononcée par Maud Olivier, nouvelle héroïne du féminisme :
« Je pense que notre future législation aidera à lutter contre l’immigration clandestine, dès lors qu’elle découragera les réseaux de traite aux fins d’exploitation sexuelle d’amener des jeunes femmes sur le territoire français. » Le féminisme institutionnel a donné toute sa place et, mieux, son soutien à une loi qui ne vise pas à protéger les prostituées mais masque en partie la politique en matière d’immigration du gouvernement français.

On ne peut certes pas accuser tous les défenseurs de ce texte de vouloir du mal aux prostituées mais, sous prétexte de faire une loi de principe, au nom de hautes et nobles valeurs, ils n’hésitent pas à sacrifier toute une frange de la population déjà faible et isolée.

Uniquement portée par une idéologie simpliste dictée parfois par une visée moraliste, cette loi est un net retour en arrière. « D’un côté, les femmes dignes et mariées et de l’autre les putes, êtres immondes privés de toute raison. Voilà une gauche moralisatrice qui, quand on remue leurs idées, se révèlent conservatrice et réactionnaire », note très justement le journaliste Robin Carel.

Outre l’incohérence manifeste de la loi, qui considère la prostitution comme une violence, comme un viol, mais qui ne punirait ce viol que d’une amende (?!?), elle laisse un goût amer aux putes qui, poussées vers la clandestinité, connaîtront des conditions d’exercice (encore plus) déplorables et dangereuses. Une amende pouvant aller jusqu’à 1500 euros sera infligée au client s’il est pris en flagrant délit.

La seule manière pour les prostituées de continuer leur activité sera donc de se cacher, aux dépends de leur sécurité. Plus que jamais isolées, les prostituées devront revoir à la baisse leurs prétentions sanitaires car, avec moins de clients, il leur sera difficile voire impossible de pouvoir faire le tri entre ceux-ci. De plus, les clients vont se faire tellement discrets qu’ils vont veiller à ne donner aucun nom, adresse ou numéro de téléphone. En cas de violences  ou de viol, les prostituées seront dans l’incapacité totale de porter plainte contre un agresseur non-identifié. Quant au montant de l’allocation de sortie de la prostitution, versée pendant quelques mois seulement, il est si ridiculement faible qu’il est insultant… Un climat plus putophobe que jamais et une position plus précaire et dangereuse, voici ce qui a été voté à l’Assemblée1. Nul doute pourtant que les associations féministes abolitionnistes sont en train de célébrer entre elles leur petite victoire de principe. Ces associations pourront se gargariser dans les séminaires et soliloquer que la France ne tolère plus la vente de sexe.

Associations et politiques ont fait ce qu’ils savent le mieux faire: expliquer à la place des concernées qu’elles ne savent pas vraiment ce qu’elles disent dans la mesure où les violences les ont rendus incapables de formuler un consentement éclairé. Le système patriarcal n’a jamais procédé autrement: affirmer que la parole des femmes doit être tenue comme négligeable car les femmes ne savent pas vraiment ce qu’elles disent.

Marie Joffrin Groupe Louise-Michel de la Fédération anarchiste

1. Voir l’article «Ne nous trompons pas de combat» de Marine, Le Monde libertaire n° 1721, pages 20-21.

Vu sur le forum anarchiste, 11 décembre 2013, et à paraître dans Le Monde Libertaire.