Archives de catégorie : Répression

[Poitiers] Communiqué suite à la manifestation en hommage à Clément à Poitiers

Communiqué suite à la manifestation en hommage à Clément à Poitiers

Le jeudi 6 juin à 18 h 30 a eu lieu à Poitiers comme dans de nombreuses autres villes une manifestation organisée à l’appel du groupe unitaire contre l’extrême droite de la Vienne à la suite de la mort de Clément Méric à Paris. Nous avons été agréablement surpris de l’ampleur de la manifestation organisée dans la journée même (entre 250 et 300 personnes), mais nous avons cependant quelques critiques à émettre et besoin de rappeler certains faits.

Nous nous étonnons que des cadres du Parti socialiste de la mairie de Poitiers soient venus sans honte se montrer en mémoire de quelqu’un qui les combattait politiquement. En effet, rappelons que Clément était certes un militant antifasciste mais qu’on ne saurait le réduire à cela. Il était révolutionnaire, et impliqué dans les luttes contre le capital et fatalement contre le gouvernement socialo-écologiste actuel. Antifasciste convaincu, il militait aussi contre toutes les formes d’exploitation et de domination : le sexisme, le racisme et l’homophobie…

Revenons à la manifestation poitevine, non déclarée comme le veut la tradition ici, et regroupant des individus (libertaires ou proches), encartés de gauche et d’extrême gauche et autres membres d’associations. Voilà bien longtemps que tout ce beau monde n’avait pas été réuni. En effet, le bras de fer entre la mairie socialiste et les associations, les anarchistes et surtout dernièrement le DAL 86 dure depuis plusieurs années, et la gouvernance de M. Claeys nous montre le véritable visage de la social-démocratie depuis.

Nous avons donc pu voir nos braves cadres locaux se retirer du cortège au niveau de la mairie alors que ce dernier évoluait vers la préfecture. Très bien, nous dirons-nous, mais cette manœuvre semble aussi avoir été tactique. Car, plus d’une heure après la fin de la manifestation, deux personnes ont été arrêtées et emmenées au poste pour « manifestation illégale » et « outrage aux forces de l’ordre » (des « Flics porcs assassins » s’étant glissés dans les slogans scandés). Ces deux personnes seront relâchées le lendemain et passeront en Comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC). Devant le procureur, donc. Mais le fait intéressant à noter ici est cette phrase lâchée par un conseiller municipal et conseiller de Grand Poitiers bien connu comme bureaucrate de la lutte (notamment au sein des MJS lors du mouvement anti-CPE) : « Ce n’est pas une manifestation, mais un rassemblement silencieux contre les violences de l’extrême droite ». Voilà, tout est dit. Vous vous êtes fait attraper ? Vous ne pouvez que vous en prendre à vous-mêmes. Il ne fallait pas faire de manif (ou du moins pas jusqu’au bout)… puisqu’il existe une pression de la préfecture vis-à-vis des manifestations non déclarées depuis environ un an, et relayée par son chien de garde édenté : la mairie.

Ici donc, les socialistes poitevins suivent la ligne dictée par l’Elysée et le taulier de la place Beauvau : s’émouvoir de manière hypocrite sur la violence et la dangerosité idéologiques des groupes fascistes bien connus. Alors que ce sont ces mêmes socialistes qui, de par leur politique, ne contribuent point à faire reculer les pratiques et idées de l’extrême droite ; bien au contraire, celle-ci s’en est servie à plusieurs reprises afin de gagner des élections, de promouvoir des politiques sécuritaires de la République (n’oublions pas que les centres de rétention, ces prisons démocratiques pour étrangers, datent de l’ère mitterrandienne). Par ailleurs, le jour même où Clément a été agressé, la police de Manuel Valls procédait à une grande rafle de sans-papiers dans le quartier populaire de Barbès à Paris. République, sacro-sainte République! Tel un chant incantatoire, ce terme sonnait creux pour Clément et ses camarades ! Alors, fichez-nous la paix avec cet appel à un front républicain chimérique.

La République n’est qu’un champ de bataille symbolique pour les aspirants au pouvoir, ça fait bien longtemps que son caractère attractif et magique n’opère plus ! Bref, nous nous opposons fermement à cette tentative de récupération étatique de la mort de Clément.

De plus, nous pensons que la dissolution de groupes fascistes ne changera pas la donne. Hormis leur caractère symbolique orchestré par le pouvoir et une partie de la gauche, l’Histoire nous a montré à plusieurs reprises que la dissolution de ces groupes est un leurre (des Ligues des années 1930 à Unité radicale des années 2000, en passant par Ordre nouveau des années 1970) : ils se sont toujours reformés, ils ont juste eu besoin de changer de nom. Mais nous n’appelons pas non plus à une « justice pour Clément ». Cette justice qui nous condamne aussi bien et que nous combattons tous les jours.

Soulignons que depuis plusieurs années les fascistes et autres nazillons ressortent dans la rue et souhaitent la reprendre, galvanisés par les scores de leurs homologues dans de nombreux pays en Europe (Grèce, Hongrie…) sur fond de crise économique. Nous ne découvrons rien, dans plusieurs villes les fascistes sont très actifs, et s’adonnent à des actions violentes et/ou symboliques : Lyon, Toulouse, Tours, Besançon, etc. Mais les dernières manifs contre le mariage homosexuel leur ont permis de se rencontrer, de recruter, bref d’avoir un nouveau souffle, avec la complicité des médias ayant offert leurs micros sur des plateaux d’argent à des mouvements réactionnaires de toutes sortes disséminant leurs discours haineux.

Par exemple, nous avons remarqué qu’ils sont de plus en plus présents sur Poitiers, du moins par leurs affiches et autocollants. Qu’ils soient à Méridien Zéro, au Mouvement Action Sociale, au Parti de France, à l’Œuvre Française ou au plus traditionnel Front National, les militants fascistes tentent de s’implanter localement et durablement. Ils se sentent même pousser des ailes. Pour preuve, début mai ont été découvertes des affiches, collées dans les rues de Poitiers, comprenant les photos de deux militants du NPA avec comme surtitre « Wanted » et cette légende : « Tags dégueulasses, gribouillis partout, panneaux sales, portes tatouées ? Assez ! La police s’en occupe pas on va s’en occuper ! ».

En mémoire de notre camarade Clément,nous souhaiterions que les bureaucrates politiques, membres du gouvernement et autres charognards de la presse fassent profil bas sur le sujet. Pour vous, fascistes, belek : une attaque contre un est une attaque contre tous.

 Dieu pardonne, pas le prolétariat !

 L’Épine noire, 8 juin 2013

[Lyon] Violences d’extrême-droite, répression policière des antifascistes !

NdPN : Il n’y a pas qu’à Poitiers que la police et la « justice » montrent dans quel camp elles se situent…

Mort de Clément : Collomb demande l’arrestation… des antifascistes !

Jeudi soir, à la fin du rassemblement à la mémoire de Clément, antifasciste assassiné à Paris, Gérard Collomb, maire de Lyon, a été brièvement pris à partie par les quelques manifestants présents sur la place. Les manifestants auraient eu beaucoup de questions à poser au maire de Lyon : sur son silence tout au long des violences fascistes à Lyon, sur son soudain réveil alors que la question fait la une de l’actualité, etc.

Si les manifestants n’ont pas réussi à approcher le maire de Lyon avec l’arrivée de la BAC – on vante même dans la presse la bravoure de son chauffeur qui a « ceinturé un anarchiste », si, si ! – il prend l’évènement pour un affront personnel, et se répand dans la presse contre une prétendue « violence insupportable [—] d’extrême gauche ».

Alors qu’un antifasciste est mort, Collomb, en renvoyant dos à dos, dans le Progrès, extrême-droite et extrême-gauche, met cette mort sur un pied d’égalité avec les quolibets qu’il a reçu. Il prouve au passage le peu de cas qu’il fait de la violence fasciste à Lyon – ou à Paris.

Ce vendredi, le maire de Lyon a annoncé qu’il portait plainte et demande l’arrestation d’individus que la police désigne comme « anarcho-libertaire ». La seule réaction tangible de Collomb suite à la mort de Clément aura donc été de demander l’arrestation des antifascistes.

Mais après tout, qu’attendre de plus d’un maire qui, quand il ne négocie pas avec les grands patrons, expulse les roms, multiplie les caméras de vidéosurveillance et fait silence sur la violence d’extrême-droite. Sa tentative de récupération politique de l’antifascisme aura été bien brève, nous ne vivons décidément pas dans le même monde.

Rebellyon, 7 juin 2013

Coupables d’antifascisme -appel à soutien-

Le 9 mail 2013 deux groupuscules fascistes implantés dans la ville de Lyon organisaient des rassemblements illégaux dans deux lieux distincts : ce supposé hommage pour un militant nationaliste décédé était surtout l’occasion pour eux d’occuper une nouvelle fois la rue.

Le 9 mail 2013 deux grou­pus­cu­les fas­cis­tes implan­tés dans la ville de Lyon orga­ni­saient des ras­sem­ble­ments illé­gaux dans deux lieux dis­tincts : ce sup­posé hom­mage pour un mili­tant natio­na­liste décédé était sur­tout l’occa­sion pour eux d’occu­per une nou­velle fois la rue.

Bien déci­déEs à ne pas leur lais­ser celle-ci, nous, mili­tan­tEs anti­fas­cis­tes, avions déci­dés de nous ras­sem­bler spon­ta­né­ment afin de dénon­cer publi­que­ment la tenue d’une énième mobi­li­sa­tion d’extrême-droite sur Lyon.

Nous tenons à sou­li­gner aujourd’hui que nous assu­mons tota­le­ment notre pré­sence sur la place Maréchal Lyuatey à quel­ques rues du ras­sem­ble­ment pétai­niste. Notre ban­de­role « contre la peste brune, déra­ti­sons », en tête de cor­tège à notre arri­vée sur cette place était une réponse poli­ti­que et popu­laire face à ces mili­tants natio­na­lis­tes radi­caux. Contrairement à ce que vou­draient nous faire croire la jus­tice et la presse, nous ne sommes pas une bande armée d’extrême gauche mais des étudiantEs, des tra­vailleurs-euses, des syn­di­ca­lis­tes, des mili­tan­tEs en lutte pour une société égalitaire et soli­daire.

Face à cela, un triste bilan sur Lyon : depuis 2010 c’est 40 agres­sions réper­to­riées de la part des fas­cis­tes, soit près de 500 jours d’ITT dis­tri­bués.

Ce 9 mai 2013, l’État et la jus­tice ont visi­ble­ment choisi leur camp. Alors que les deux ras­sem­ble­ments d’extrême droite n’était pas auto­ri­sés ; les ama­teurs de saluts nazis ont pu tran­quille­ment se réunir (sans être inquié­tés) sous la bonne garde des forces de police. Quant à nous, le cons­tat fut rapide avec 25 mili­tan­tEs arrê­téEs alors que nous arri­vions tout juste sur la place du rendez-vous où se trou­vaient une tren­taine de sym­pa­thi­san­tEs !

Les fait qui nous sont repro­chés sont aber­rants, de façon non-exaus­tive en voici cer­tains :
– par­ti­ci­pa­tion à un ras­sem­ble­ment non-auto­risé
– par­ti­ci­pa­tions à un regrou­pe­ment armé en vue de com­met­tre des vio­len­ces sur per­son­nes ou des dégra­da­tions
– vio­lence sur agent

Et ce fut pour nous de 21h à 42h de garde à vue, des sai­sies de télé­phone por­ta­ble et des contrô­les judi­ciai­res pour 6 d’entre nous nous inter­di­sant de nous côtoyer jusqu’au procès. Par ailleurs, cer­tai­nEs d’entre nous pour mani­fes­ter leur refus du fichage géné­ra­lisé de la popu­la­tion, ont décidé de ne pas se sou­met­tre aux dif­fé­rents rele­vés d’iden­ti­fi­ca­tion : prise d’empreinte et pré­lè­ve­ments ADN. Ces délits s’ajou­te­ront à ceux cités pré­cé­dem­ment.

Nous affir­mons haut et fort que nous ne nous tai­rons pas, nous ne plie­rons pas face à leurs atta­ques ni face à leur répres­sion. Nous ne lais­se­rons jamais ces fas­cis­tes et autres néo-nazis occu­per la rue comme ils l’enten­dent ; nous conti­nue­rons de lutter pour ancrer auprès de la popu­la­tion un anti­fas­cisme popu­laire.

Face à ce parti pris de l’Etat et de la jus­tice, face à la montée de l’extrême-droite dans notre ville, un seul mot d’ordre : SOLIDARITE.

Collectif des 25 inter­pel­léEs.

Pour nous sou­te­nir : ordre des chè­ques TEMOINS, dos du chèque « antifa 9 mai »
Adresse : Caisse de Solidarité 91 rue Montesquieu 69007 LYON
Nous contac­ter : 25in­ter­pel­lyon@riseup.net

Rebellyon, 7 juin 2013 – mis à jour le 8 juin 2013

[Poitiers] A propos de l’arrestation de deux camarades, suite à la manifestation en hommage à Clément

A propos de l’arrestation de deux camarades, suite à la manifestation en hommage à Clément

Suite à l’assassinat de Clément Méric ce 5 juin par des fascistes, des dizaines de manifestations ont eu lieu dans de nombreuses villes de France et d’ailleurs, pour rendre hommage à ce militant syndicaliste, antifasciste et révolutionnaire. Il s’agissait aussi de prouver que les idées qu’il défendait ne sont pas mortes avec lui. Elles ont rassemblé un grand nombre de personnes, militantes ou non d’associations, de collectifs, de syndicats et d’organisations politiques, dans la dignité et l’émotion. Dans plusieurs villes néanmoins, des militant-e-s antifascistes ont réagi avec agacement à des interventions publiques de représentants de partis politiques (du PS, du Front de gauche…), accusés de récupération. L’antifascisme ne consiste en effet pas qu’à s’indigner que des brutalités de groupuscules d’extrême-droite. Il consiste aussi à dénoncer et à lutter contre ce qui a toujours favorisé le fascisme, à savoir  la répression du capitalisme et de l’Etat ; contre les pauvres, les immigrés, les Roms, les femmes, les homos, bis, trans… C’étaient les idées de Clément Méric, ce sont les nôtres.

A Poitiers aussi, la manifestation fut importante, avec 250 à 300 personnes, rassemblées avec des banderoles, des slogans, des drapeaux et des chansons. Or à Poitiers, une fois de plus la police s’est comportée de façon indigne. Les policiers n’ont rien trouvé de mieux à faire que d’interpeller deux camarades peu après la manifestation, qui ont ensuite passé la nuit en garde à vue ! Ils ont été accusés d’ « outrage » au directeur départemental de la sécurité publique adjoint. Une accusation hélas récurrente de la part des services de police, notamment contre un certain type de personnes bien ciblées.

Rappel du contexte poitevin de cette manifestation : hormis les tâches peu glorieuses, hélas communes à tous les policiers de par leurs fonctions, d’arrêter des étrangers, d’expulser des squats de sans-papiers et de Roms, de défendre la propriété privée, ou de conduire des pauvres en prison, les policiers poitevins s’illustrent depuis un bon moment dans d’autres comportements, dépassant de fait allègrement leurs prérogatives et le droit, en matière notamment de liberté d’expression.

Ces intimidations portent sur un certain type de militant-e-s, bien souvent étiqueté-e-s libertaires, anarchistes, autonomes, communistes, etc. C’est un fait plusieurs fois avéré par des contrôles d’identité (parfois avec fouille sur la voie publique). Ces contrôles d’identité, bien ciblés, lors de rassemblements antifascistes, antiracistes, antisexistes, antihomophobes, se font au nom de la prévention du « trouble à l’ordre public », notion fourre-tout critiquée par de nombreux éminents juristes. Ils s’ajoutent en outre à une longue liste locale de tentatives de confiscation d’appareils numériques et plus généralement d’enfreintes diverses à la liberté d’expression : banderoles arrachées, confiscations voire arrestations pour diffusion de journaux et de tracts sur la voie publique… bref des atteintes manifestes et récurrentes aux droits que les policiers sont sensés faire respecter, et respecter eux-mêmes.

Par ailleurs, ces derniers mois à Poitiers (comme à Paris pour Clément, et en bien d’autres endroits encore), des antifascistes se sont régulièrement rassemblé-e-s contre des expressions homophobes sur la voie publique. Ces antifascistes ont été parfois menacé-e-s par la police poitevine d’amendes, de peines de prison ; ont été systématiquement filmé-e-s ; il y a eu des contrôles d’identité, et même des arrestations. Alors que le droit à la contre-manifestation a été reconnu par la cour européenne des droits de l’homme le 24 juillet 2012 (affaire Faber contre Hongrie). Les policiers n’ont par contre pas eu la même attitude avec les manifestant-e-s contre le mariage homo, parmi lesquels étaient présents des militants d’extrême-droite, s’accordant même avec des homophobes pour faciliter leurs manifestations. Ces comportements pour le moins partiaux et intimidants, posent question ; y compris du point de vue déontologique si l’on ne s’en tenait même qu’à cela. Ils n’ont pas contribué à la « tranquillité publique » – qu’ils sont pourtant sensés défendre si l’on en croit leur ministre de tutelle.

Cette manifestation du 6 juin à Poitiers n’a pas échappé à ce triste acharnement policier. Elle a, dès le départ, été étroitement encadrée par un grand nombre de policiers, dont plusieurs en civil de la BAC qui n’ont une fois de plus pas estimé nécessaire de respecter le code de déontologie minimal consistant à revêtir leurs brassards « police » en manif. Les policiers n’ont cessé de prendre des vidéos des visages des manifestant-e-s, déjà bien ému-e-s par la mort de Clément. S’approchant à outrance, parfois à moins d’un mètre. Un autre policier est venu avec insistance dans le cortège, pour demander à des manifestant-e-s, choqué-e-s par cette attitude, de ne pas « dissimuler le visage ». Les manifestant-e-s, qui n’étaient pas là pour finir en garde à vue, ont obtempéré. Rappelons que les manifestant-e-s marchaient dans l’émotion et la dignité, suite à la MORT d’un militant : un minimum de décence s’imposait ! Un manifestant a justement demandé aux policiers, à deux reprises et avec émotion, d’avoir un minimum de décence et d’arrêter de filmer ainsi des manifestant-e-s ému-e-s par l’assassinat d’un camarade. Rien n’y a fait. Enfin, après la manif, pendant plus d’une heure des policiers (dont des hauts gradés) ont continué de filmer, photographier et prendre des notes sur des manifestant-e-s, qui après leur dispersion se reposaient à des terrasses ensoleillées de la place du marché… On sait que la police poitevine s’acharne contre certain-e-s, mais on ne l’a pas toujours vu faire de façon aussi caricaturale et indécente sur la place publique.

Revenons-en à présent à la manif, et à l’accusation policière d’outrage. Dans le cortège, des manifestant-e-s ont chanté une chanson bien connue d’un groupe anarcho-punk, avec des paroles contenant l’expression « flics porcs assassins ». Il est à noter que, bien que connu, ce groupe n’a jamais été condamné pour ses textes, la liberté d’expression ayant été reconnue ces dernières années pour de nombreux groupes ayant des paroles mettant en cause la police. Pourquoi cette chanson ? Ce texte rend explicitement hommage à Zyed Benna et Bouna Traoré, deux mineurs morts dans un transformateur électrique alors qu’ils étaient poursuivis par la police. Or, la veille de l’assassinat de Clément, le 4 juin, l’avocate général de la cour d’appel de Rennes venait de réclamer un non-lieu pour les deux policiers impliqués, tandis que l’avocat représentant les policiers accusés de non-assistance à personne en danger avait qualifié de « poutinerie » [sic] la volonté de l’accusation de les renvoyer en correctionnelle… ajoutant l’injure à la souffrance des familles, surtout quand on connaît la violence de la police de l’Etat dirigé par Vladimir Poutine. Cette chanson antifasciste était donc d’autant plus pertinente, vu le contexte, qu’elle rend aussi hommage à un autre jeune antifasciste, assassiné cette fois-ci par la police grecque, il y a quelques années, en reprenant le slogan célèbre des manifestant-e-s de ce pays contre les répressions policières : « flics, porcs, assassins ». Encore une fois, l’antifascisme ne dissocie pas les violences d’extrême-droite de celles que les Etats infligent aux pauvres, aux immigré-e-s, aux militant-e-s LGBTI, etc.

Il ne s’agit pas pour nous de juger ou non de l’esthétique ou de la pertinence politique des paroles  de cette chanson, comprenant ce slogan grec devenu le symbole du ras-le-bol de tout une population. Mais de montrer en quoi la convocation de nos deux camarades poitevins, pour une composition pénale avec le procureur de la république, est à notre sens non fondée. Non seulement sur un plan éthique (ce qui ne devrait poser aucune question à nos lecteurs-rices, du moins on l’espère), mais aussi sur le plan juridique. Leur convocation étant identique dans les reproches d’outrage au DDSP adjoint Laurent SIAM, quoiqu’à des dates distantes (nous y reviendrons), nous pouvons émettre des critiques communes sur la recevabilité à notre sens fort douteuse de cette nouvelle initiative répressive.

Premièrement, il est reproché que l’outrage (en l’occurrence, « flics, porcs, assassins ») ait été adressée à une personne, Laurent SIAM, ce qui est tout simplement aberrant. Les paroles criées en manifestation sont politiques, elles ne désignent généralement pas des individus particuliers. « Flics porcs assassins », faisant partie des paroles chantées par des manifestant-e-s, dénonce non des personnes précises sous leurs uniformes, mais l’institution policière qu’elles servent, leur travail consistant à exécuter les ordres, y compris lorsque ceux-ci sont parfois manifestement injustes et inhumains. Ca se discute, mais c’est une opinion tout à fait libre, du moins en France, n’en déplaise aux policiers. Pourquoi un policier particulier a-t-il pensé que cette phrase s’adressait à lui en particulier, alors même que son nom n’a jamais été prononcé ? Voilà qui interroge, mais nous n’avons pas pour propos de rentrer dans des considérations psychologiques.

Cette phrase « flics porcs assassins » dénonce les meurtres commis par la police tout au long de son histoire contre des militant-e-s des mouvements sociaux, jusqu’à nos jours, en France aussi hélas. Comme nous l’avons dit, elle a été popularisée après la mort d’un jeune grec, tué par la police grecque, qui a ému toute la Grèce et bien au-delà. On connaît hélas les accointances de certains policiers grecs avec le mouvement néo-nazi Aube dorée, responsable de crimes contre des immigré-e-s et des militant-e-s. Nous ne ferons pas la sinistre liste des personnes mortes du fait de violences policières, nombre d’historien-ne-s, de journalistes et d’avocat-e-s ayant déjà fait ce travail – et continuant à le faire. Cette phrase dénonce juste un fait établi, certes peu agréable pour les oreilles de certains policiers, nous pouvons le concevoir, mais n’empêche : sans même avoir à remonter jusqu’à la déportation des juifs sous Vichy, OUI, la police a  assassiné et continue d’assassiner des militant-e-s des mouvements sociaux. Ce qui à moins de n’avoir aucune notion d’histoire ou de ne lire aucun journal, est une évidence. Que l’on considère qu’il s’agisse de « bavures », ou d’un phénomène récurrent parmi toutes les polices de tous lieux et toutes époques, est un autre débat.

Quant à la comparaison avec le cochon, elle remonte à très loin (XIXème siècle, puis dans les mouvements antiracistes des années 1960 aux Etats-Unis, où les policiers assassinaient des militant-e-s noir-e-s). Tout comme celle avec le « poulet » du reste… Comparaison au passage, à notre sens, malheureuse (les cochons n’ayant jamais assassiné quiconque, mais c’est un autre débat). Nous noterons aussi qu’une autre métaphore zoologique, en l’occurrence canine, comprise dans les paroles de la chanson (« clébards »), chantée par de nombreux-euses manifestant-e-s à Poitiers, n’ait pas été retenue comme un outrage. Il faut croire que « porcs » est jugé plus outrageant que « clébards en uniforme », mais là non plus, nous ne nous aventurerons pas dans des considérations psychologiques – ni des jugements artistiques.

Quand bien même le nom de ce policier qui se sent « outragé » aurait été associé à une insulte  en manifestation, ce qui n’est répétons-le pas le cas, la jurisprudence retient qu’à Poitiers, M. A. Evillard a été totalement relaxé par la justice, au nom de la liberté d’expression, pour avoir qualifié le procureur de l’époque de « Papon » et de « salaud », lors d’une manifestation pour protester l’emprisonnement de trois militants. LIBERTE D’EXPRESSION : notion constitutionnelle avec laquelle la police poitevine semble avoir quelques difficultés, comme nous l’évoquions plus haut. Mais fermons cette parenthèse juridique car répétons-le une dernière fois : pas une seule fois le nom de M. Laurent SIAM n’a été ajouté dans la chanson, ni crié par des manifestant-e-s.

Autre piste juridique : le fait que chanter une chanson puisse être considéré comme un outrage ? Là aussi, la jurisprudence est claire. Et pas seulement celle concernant les groupes musicaux, que nous avons évoquée plus haut, relaxés depuis plusieurs années pour des chansons très dures contre la police, avec des mots parfois insultants. Là aussi, contentons-nous de rester à Poitiers, et revenons à ce jugement de M. J.-C. Clochard, qui passait il y a quelque temps au tribunal de grande instance, pour outrage à un agent de police. L’outrage consistait d’abord, pour la police, en le fait d’avoir chanté la chanson « Hécatombe » de Georges Brassens (contenant une flopée d’injures contre l’institution policière). Cet « outrage » a finalement été abandonné par le procureur lui-même, là aussi au nom de la liberté d’expression, comme le rappelle le compte-rendu du procès. Les choses sont très claires, comme dans d’autres villes d’ailleurs, où le même type de procès avait eu lieu : chanter une chanson n’est pas condamnable, c’est l’exercice de la liberté d’expression. Le seul outrage retenu par la justice avait été celui… d’un jet de confettis, ce qui est peut-être plus ridicule encore, mais là n’est pas le débat : chanter une chanson, même désagréable à certaines oreilles, relève de la liberté d’expression, et ce n’est même pas nous qui le disons, mais la constitution et la jurisprudence.

Pour conclure, puisque rien ne tient dans cette procédure judiciaire, nous pouvons nous interroger sur le choix du procureur de proposer une composition pénale, et non directement un procès. Il s’agit d’une procédure juridique consistant à conclure un arrangement entre les parties, avec une peine éventuellement proposée par le procureur.  Si l’on considère de plus que les rendez-vous fixés sont très dispersés (juillet pour l’un, septembre pour l’autre), alors qu’il s’agit des mêmes accusations, nous pouvons supposer plusieurs choses. D’une part, que police et justice semblent cette fois-ci mal à l’aise de faire un procès pour outrage. La raison en est simple : juridiquement, comme nous l’avons dit, l’accusation ne tient pas debout. Politiquement en revanche, il y a un intérêt pour la police… il s’agit de continuer à mettre la pression judiciaire des personnes isolées bien précises, et d’éviter un procès public, qui porterait à la connaissance et à la réflexion d’un grand nombre de gens certains comportements de la police. La police poitevine veut visiblement éviter de montrer une fois de plus (de trop ?) son acharnement contre des militant-e-s bien ciblé-e-s. Politiquement toujours, il s’agit aussi d’éviter l’indignation que pourrait susciter l’indécence d’un procès public pour « outrage », de la part des autorités, contre des personnes accusées d’avoir chanté une chanson antifasciste…  Rappelons-le, cette manifestation était en hommage à un militant antifasciste, tué pour ses idées !

Nous en avons assez des agressions brutales de l’extrême-droite, et de la banalisation de ses discours, repris partout par les médias et le pouvoir politique. Nous en avons aussi assez, en tant que militant-e-s antifascistes, d’être harcelé-e-s par la police et la justice de la ville de Poitiers. Cela devait être dit. Il faudrait par ailleurs dénoncer la qualification devenue quasi-systématique de « manifestation illégale », cette nouvelle arme de la police de Poitiers pour s’attaquer à la moindre protestation portée sur la place publique dès qu’une poignée de personnes se retrouvent, mais ce sera un autre débat.

Groupe Pavillon Noir (Fédération Anarchiste 86), 7 juin 2013

[Paris, Barbès] Rafle de sans-papiers – le fascisme ne se limite pas à des groupuscules fachos !

Rafle de sans papiers en ce moment sur Barbès

les fachos assassinent hier, les socialos raflent aujourd’hui,  énorme rafle en ce moment sur barbès, des centaines  de flics encerclent le quartier depuis plus de deux heures, quatre cars d’embarquement présents, l’un rempli de sans papiers vient de partir, des copains sont sur place, les sans papiers vont peut être être amenés rue de l’évangile.

6 juin 2013, Indymedia Paris

Violences d’extrême-droite, violences d’Etat

Mercredi 5 juin 2013, un jeune camarade de notre union syndicale a été battu à mort par un  fasciste. Le lendemain, à l’heure même où nous étions réuni-e-s en silence à l’endroit où Clément  avait été tué, nous recevions des sms  nous informant que le ministre de l’intérieur organisait une rafle massive de sans-papiers à quelques stations de métro de là, à Barbès.

Ceci n’est pas possible, nous vivons cela comme une insulte à la mémoire de Clément, de ses engagements. Le fascisme c’est un ensemble. Un gouvernement PS ne peut appeler à participer à un rassemblement contre la violence fasciste et dans le même temps organiser une rafle. Une époque ne se définit pas comme fasciste uniquement lorsque  quelques individus extrémistes se sentant tout puissants tuent en plein cœur de la ville.

Quand un gouvernement rafle des personnes par centaines dans un quartier bouclé, cela participe d’un ensemble. La chasse aux rroms qui ont des papiers européens et aux africain-e-s qui n’en ont pas participe du même contexte politique que les manifs et discours homophobes et que les violences de rue des skinheads et groupes nationalistes fascistes. Le fascisme c’est un ensemble.

Face à la montée du fascisme, chacun-e se retrouve placé-e face à sa responsabilité. Appeler à des manifs ne suffira pas à dédouaner ceux qui ont fait le choix de la discrimination vis-à-vis des étrangers. Clément Méric (nous citons son prénom et son nom, car c’est ainsi qu’on parle d’un militant adulte et responsable) ne restreignait certainement pas son combat antifasciste aux seuls extrémistes au crâne rasé. Ce soir nous sommes en colère, nous sommes écœuré-e-s, et nous pensons devoir à sa mémoire de ne rien concéder ni sur les violences d’extrême droite, ni sur les violences d’état : les rafles organisées doivent cesser ! Liberté de circulation pour tou-te-s ! Le fascisme est une gangrène, soit on l’élimine soit on en crève !

Isabelle et Olivier, instits et syndicalistes

Indymedia Paris, 7 juin 2013

Mise à jour 11 juin 2013 :

voir l’article paru sur le Jura Libertaire

[Poitiers] Une belle manif en hommage à Clément, qui se termine par des arrestations

NdPN : Contrairement à ce que raconte la NR, il y a bel et bien eu une manif aujourd’hui, à la fois digne et forte, en hommage à Clément. Pour affirmer clairement que l’engagement syndicaliste et révolutionnaire qu’il avait n’est pas mort avec lui. Divers slogans, tracts et banderoles ont témoigné de l’envie commune de partager la tristesse, mais aussi la colère et la détermination. Hélas les policiers n’ont cessé de mettre la pression en filmant les manifestant-e-s, de façon indécente vu ce qui nous rassemblait. Après la manif, deux personnes ont été arrêtées. Nous transmettons ici les infos qui circulent sur plusieurs listes militantes poitevines. Plus d’infos quand on aura des nouvelles des deux camarades, qu’on espère retrouver très vite.

Aujourd’hui à Poitiers a eu lieu une manif antifa en réaction à la mort de Clément (antifasciste paris banlieue). A 18h30 entre 250 et 300 personnes se sont rassemblées place du palais de justice et sont parties en manif dans le centre ville de Poitiers. Cette manif s’est terminée place du marché, et certain-e-s en ont profité pour prendre un apéro sur les terrasses ensoleillées des bars. Pendant plus d’1h30 une vingtaine de flics dont des hauts placés n’ont cessé de filmer, photographier et épier les moindres gestes des personnes présentes sur les terrasses.  Cette petite histoire se termine (encore une fois) mal, en effet 2 personnes ont été interpellées pour « attroupement illégal » et « insultes envers des forces de l’ordre« …. Ces personnes risquent de passer au minimum 4heures au poste et voir plus si affinités…

Les flics et les autorités de Poitiers continuent d’utiliser leur nouvelle arme: « la manif illégale ».  Un cas parmi tant d’autres…. http://www.antirep86.fr/2012/11/19/la-liberte-dexpression-ne-se-demande-pas-elle-se-prend/