Archives de catégorie : Construction du désert

Gaz de schiste : flagrante entourloupe !

Flagrante entourloupe

Le dossier du gaz de schiste est-il clos, comme tente de le faire croire le gouvernement ? Loin de là ! Près de cent soixante permis d’exploration quadrillent toujours le territoire, et au nord d’Alès, les travaux commencent.

La distance qui sépare les déclarations politiciennes de la réalité peut être assez étendue. Avec le gaz de schiste, elle semble devenue infiniment extensible. Ainsi, le 14 septembre, le Président annonce que le gouvernement tourne le dos à ces explosives recherches d’hydrocarbures et demande à la ministre de l’Écologie de prononcer « le rejet des sept demandes de permis qui ont légitimement suscité l’inquiétude des populations. » Pour ceux n’ont pas suivi l’affaire, c’est limpide : il n’y avait que sept demandes de permis, il n’y en a plus. Cécile Duflot trouve le discours « émouvant » et José Bové se réjouit : dispersion générale. Sauf que des permis de recherche, la France en est couverte ! Sur le site du ministère de l’Écologie, on en dénombre encore quatre-vingt-dix-sept en cours d’instruction. Sans oublier les soixante permis attribués par le gouvernement précédent qui débouchent déjà sur la construction de plates-formes de forage dans le bassin parisien. En résumé : si Hollande avait annoncé « le rejet de sept permis », ça aurait déjà été démagogique. Mais annoncer le rejet des sept permis, c’est un flagrant délit d’entourloupe, puisqu’il a essayé de nous faire oublier les quelque cent soixante autres !

Les Cévenols, eux, ne risquent pas d’oublier leur existence car, quelques jours après cette conférence, les maires de treize communes du Gard et de l’Ardèche sont convoqués par les préfectures de Nîmes et de Privas. Motif : informer les élus que des camions vibreurs s’apprêtent à sillonner la région pour sonder le sous-sol, en prévision de forages liés au permis du « bassin d’Alès », attribué en mars 2010. « Tout le gratin nous attendait », raconte Édouard Chaulet, maire de Barjac, « le préfet, la suppléante du député PS, la DREAL [1] et les représentants de la société MouvOil, titulaire du permis. Comme nous avions refusé de rencontrer la société, ils ont utilisé le préfet comme entremetteur. Ça fait partie de leur stratégie du consentement : utiliser l’autorité pour nous faire plier. Le préfet nous a fait la leçon, expliquant que si les hommes des cavernes avaient fait comme nous, s’ils avaient refusé de sortir de leurs grottes, rien n’aurait jamais bougé. Je lui ai répondu que le rétrograde, c’est lui, parce qu’il croit que le développement des forces productives peut continuer à l’infini ! » Et le préfet d’insister : il ne s’agit pas de forages mais seulement de recherche scientifique pour connaître le sous-sol. « C’est leur stratégie », commente le maire de Barjac, « fractionner une idée pour la faire accepter : les camions vibreurs, puis les forages, en fait c’est le même processus. On nous accuse de refuser le progrès et l’emploi. Mais dites-moi quelle offense à l’environnement n’a pas été faite au nom du progrès et de l’emploi ? » À Nîmes comme à Privas, où plus de cinq cents personnes escortaient les élus convoqués, les maires ont prévenu les préfets que le passage des camions vibreurs susciterait « de graves troubles à l’ordre public ».

Le permis du bassin d’Alès, détenu par la société suisse MouvOil, couvre deux cent quinze km2 à la frontière du Gard et de l’Ardèche. Comme toutes les entreprises détentrices ou candidates à l’obtention de permis de recherche d’hydrocarbures en France, MouvOil assure chercher du pétrole conventionnel et jure qu’elle n’utilisera pas la fracturation hydraulique, interdite par la loi de juillet 2011. Cette technique consiste à créer des fissures artificielles en grande profondeur (deux mille quatre cents à quatre mille mètres sous terre) pour y récupérer pétrole ou gaz de roche-mère, en injectant plusieurs dizaines de milliers de mètres cubes d’eau sous pression. Mais comme le confiait à Mediapart Joël Jolivet, hydrogéologue et maire de Tharaux, « compte tenu de la nature de la roche du bassin d’Alès […], on peut y trouver des gisements non conventionnels d’hydrocarbures », d’autant plus que la société compte réaliser un échantillonnage de roche-mère et un forage à deux mille quatre cents mètres. « Peu importe ce que dit MouvOil », résume Christian Buisson, maire de Vagnas, « ce qui les intéresse avant tout, c’est de s’installer. Après, tout est possible. »

En effet, la loi interdisant la fracturation hydraulique est fragile. Parce que la technique n’est pas définie, ce qui permet aux pétroliers d’envisager des méthodes d’extraction proches. Mais aussi parce que cette loi charge une commission d’encadrer « des expérimentations réalisées à des seules fins de recherche scientifique ». Un cadre juridique si équivoque que des députés socialistes, alors dans l’opposition, avaient préparé un projet de loi moins spécieux destiné à interdire pour de bon l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures de roche-mère… Or parmi eux figuraient Jean-Marc Ayrault et Arnaud Montebourg qui, aujourd’hui ministres, ne cachent pas leur intérêt pour la manne pétrolière ! Ces contradictions, Michel Mariton, militant associatif ardéchois, espérait les porter à la conférence environnementale où il était officiellement convié. « Mais les déclarations de Hollande sur le rejet des sept permis et la fermeture de Fessenheim avaient un but précis : elles ont servi à exclure ces deux sujets, que le gouvernement promettait d’examiner depuis des mois. Le gaz de schiste et le nucléaire ont été rayés du programme de la conférence ! »

Seulement, à force de semer la confusion, les dirigeants finissent par s’emmêler les pinceaux. En réponse à une missive des opposants gardois au président de la République, le 20 septembre, un courrier officiel du cabinet présidentiel leur apprend que leur permis est… supprimé : le président a demandé le « rejet des sept demandes de permis déposées auprès de l’État », leur écrit-on, « y compris celle (sic) de la plaine d’Alès et du bassin d’Alès » ! « Une phrase malheureuse », s’excuse un conseiller de Hollande répondant au Midi Libre : le rédacteur de la lettre a fait une bourde ! « Ils sont complètement paumés dans leur propre cirque », commente Michel Mariton, excédé. « Ce n’est pas un cadre juridique normal, c’est une espèce de jungle bizarre. On ne cherche plus à comprendre. Ici, les gens vont les foutre dehors, c’est tout ! »

En attendant mieux, la compagnie MouvOil s’est mise hors de portée de la vindicte cévenole en envoyant un hélicoptère faire ses premiers relevés de terrain. Mais il faudra bien un jour qu’elle remette les pieds sur terre…

Les habitants de l’Ardèche et du Gard peuvent signaler toute circulation de véhicules suspects et annonces en mairie au Comité de Veille du Collectif 07 (06 23 66 15 51). Les personnes souhaitant être prévenues en cas d’alerte sont invitées à faire passer leur n° de téléphone portable par courriel à contact@stopaugazdeschiste07.org.

[1] Les Directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement sont les services déconcentrés du ministère de l’Écologie.

CQFD, 21 novembre 2012

[Notre-Dame-des-Landes] Infos du 20 novembre

Les récits sur la manif du 17 continuent d’arriver. Une compilation de récits et images de la manif de réoccupation sur ce lien. Un récit ici, un autre là. Article 11 a fait un texte sur le sujet. Sur Sons en lutte, petit portrait sympathique de Paul, résistant à Notre-Dame-des-Landes.

Des véhicules armés de canons à eau se sont dirigés vers la ZAD, mais pas de mouvement depuis hier, si ce n’est des hélicos survolant le Rosier, retranché derrières des barricades impressionnantes. Des fouilles archéologiques semblent être en cours… Les véhicules se seraient finalement éloignés. Flash info du jour ici. On y apprend qu’à Nantes la mairie a tronçonné hier soir les arbres de la place Mercoeur…

Les constructions (dont de grands bâtiments collectifs pour la discussion, le sommeil, la bouffe, la toilette) ont bien avancé : des photos ici. Et une AG a lieu ce soir au B17, « pour se raconter le we, faire un premier bilan, parler de l’utilisation des cabanes, des suites de la lutte… « 

Le premier ministre Jean-Marc Ayrault a annulé sa venue au Pays Basque « pour cause d’agenda ». Il était attendu le mercredi 21 novembre à Biarritz, aux Assises de l’Économie Maritime et du Littoral. Le collectif Bizi, qui l’attendait de pied ferme pour lui demander quelques explications, se félicite : bravo à elles et à eux !

Et enfin des nouvelles des interpellés à Paris, solidaires avec la ZAD : un récit de la galère.

Mise à jour : à propos des élites verdâtres, un texte de Stéphane Lhomme : le notable (Vert) est dans le fruit.

Pavillon Noir

[Chalandray – 86] La conf paysanne réagit à la venue du ponte de la FNSEA qui défend les agrocarburants

Le président de la FNSEA est venu défendre le biodiesel

Le président national Xavier Beulin, en visite dans la Vienne, a soutenu l’activité de l’usine de Chalandray. Un message à destination de ses opposants.

Les agrocarburants ne sont pas performants et ne permettent pas de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Pour les soutenir, une défiscalisation très coûteuse a été mise en place sur le dos des contribuables. Ces quelques lignes sont signées de la Confédération paysanne qui a réagi à la venue, samedi matin, à la coopérative Centre Ouest céréales à Chalandray, de Xavier Beulin, président du syndicat agricole FNSEA et de Sofiproteol, structure nationale qui développe une production des cultures de colza et tournesol. Le leader national syndicaliste a visité également, l’après-midi, le 40e concours charolais au parc des expositions à Poitiers. La sortie a irrité la Confédération paysanne : « C’est une provocation pour les éleveurs du département : est-ce le président du syndicat ou bien l’homme d’affaires ? » […]

Didier Monteil, Nouvelle République, 18 novembre 2012

[Notre-Dame-des-Landes] Démonstration de solidarité et de force réussie

Démonstration de solidarité et de force réussie

Hier, une énorme manif de réoccupation a eu lieu dans le bocage nantais, à Notre-Dame-des-Landes, pour combattre le projet de nouvel aéroport, en partenariat public-privé entre l’Etat Ayrault et la multinationale Vinci. Cet aéroport est une gabegie sociale pour les fermier-e-s et habitant-e-s expulsé-e-s sans qu’on leur demande leur avis,  écologique en ce qu’il consiste à transformer 2000 hectares de bocage humide, plein de biodiversité, en horreur bétonnière où circuleraient des machines massivement productrices de gaz à effet de serre. Même l’argument économique ne tient pas, car ce projet suppose un transfert massif de fonds publics vers le profit privé, et ainsi l’endettement de l’Etat et des collectivités locales, à l’heure où paraît-il plus un sou ne reste dans les caisses. Mais le gouvernement « socialiste » et « écologiste » s’acharne à maintenir sous perfusion le profit capitaliste, montrant par là combien ce projet sous-tend un modèle morbide de société que nous rejetons.

Depuis le 16 octobre de cette année, un immense dispositif militaire s’est ainsi déployé sur la zone d’aménagement différé, mais la résistance des habitant-e-s continue face à la violence répressive. Les médias bourgeois ont d’abord rapporté la présence de 2000 manifestants, avant que la préfecture n’évoque le chiffre non moins farfelu de 13.500. En réalité, ce furent 40.000 manifestant-e-s et 400 tracteurs qui furent sur place, avec un cortège intarissable sur de nombreuses heures, remplissant un champ entier. Pas de flic en vue, signe de la fébrilité d’un gouvernement qui malgré les fanfaronnades de Hollande, d’Ayrault et du préfet, ne peut que constater que cette lutte légitime a l’adhésion d’un nombre de plus en plus immense de gens.

Des prises de parole se sont succédées, avec les collectifs de résistance locaux de paysans et d’habitant-e-s, mais aussi des interventions solidaires de personnes qui résistent ailleurs, contre d’autres grands chantiers destructeurs. Tels que la ligne à très haute tension Cotentin-Maine, la ligne à grande vitesse Lyon-Turin, le projet minier en Allemagne dans la forêt de Hambach près de Cologne… la colère y a côtoyé la détermination et la joie de nous retrouver fort-e-s, ensemble ! Et la patate pour continuer la lutte partout où nous sommes, contre les mêmes logiques de domination et de profit.

Des tentes, des cabanes et des maisons se sont élevées pour succéder à toutes celles que l’Etat et Vinci ont détruites, avec l’aide de milliers de petites mains. Sans compter les ateliers divers, les cuisines, les orchestres, chorales et autres batucadas…

Un grand sentiment de solidarité en actes, où la diversité fourmillante des organisations, formelles et informelles, a su faire taire les petites querelles stériles. Les drapeaux étaient rangés, les planches, les marteaux et les clous en action ! Occasion d’innombrables bons moments de partages, d’organisation concrète, de discussions, et d’espoir collectif qu’aucune des gesticulations sinistres de robots en cravate ou en uniforme ne saurait entamer.

La lutte continue, et la Fédération Anarchiste, à sa mesure modeste mais déterminée, continuera de la soutenir par tous les moyens nécessaires.

Pavillon Noir, 18 novembre 2012

NdPN : on lira sur zad.nadir.org plusieurs textes.

Le flash info du jour relatant cette belle journée

Un petit récit de la manif de réoccupation

Communiqué de presse

-Une prise de parole à l’arrivée de la manif de réoccup

Une lettre collective de soutien venue du Mexique

[Notre-Dame-des-Landes] Infos du 16 novembre

Le Rosier est expulsable depuis ce matin, mais c’est calme sur la ZAD. Calme mais actif ! Plein de petites mains s’activent à la cuisine, à des travaux sur les lieux, à des ateliers de préparation de la manif, etc. (voir flash info du jour).

Mise à jour : sur le fil info du jour, une nouvelle est tombée peu après 13H : « 2 personnes qui ont pris part au Collectif idf de lutte contre l’aéroport et sont partis en action cette nuit sont en Garde à Vue depuis 2h du matin. Pour le moment on a peu d’infos : on ne sait pas où ni pourquoi ils sont détenus. Plus d’infos dès que possible. »

Pendant ce temps les actions de solidarité vont bon train un peu partout. Squat.net fait un topo sur les actions diverses du mois de novembre. On peut y ajouter une vidéo sur le mariage de Monsieur Vinci fait-du-profit et de Madame l’Etat français à Vannes, samedi dernier. Quatre camarades du groupe Lochu (FA) étaient présent-e-s.

A lire aussi, un article paru sur Reporterre qui nous avait échappé, évoquant « la raison cachée de l’intérêt de Vinci pour Notre Dame des Landes« . Cimer aux copains-copines de Ni dieu ni maitre in da poitou d’avoir mis en ligne ! On peut y ajouter un article de Bastamag, sorti aujourd’hui, sur les aéroports qui coûtent chers et ne servent presque à rien.

A propos de la manif et pour les journalistes qui lisent ce blog (on a cru comprendre que certain-e-s d’entre elles et eux lisent parfois ce blog histoire de se tenir au jus), un petit point info pour elles et eux.

Le Jura libertaire compile deux articles d’Acrimed et de Breizh journal, peu flatteurs sur la presse bourgeoise, sur les désinformations et les mensonges qui ont entouré « l’agression » du vigile, et les pressions sur les zadistes pour « condamner » ledit événement.

On notera néanmoins un article de Ouest-France (voir ci-dessous)sur la solidarité des zadistes… balayant toutes les fallacieuses dissociations politicardes, notamment de ténors d’EELV, entre les « bons » et les « mauvais » opposants au projet d’aéroport.

NB : Pas d’article sur le blog Pavillon Noir demain, pour cause de déplacement quelque part où l’on espère retrouver les lectrices et lecteurs du blog !

Pavillon Noir

Près de Nantes, au cœur du bocage anti-aéroport

Sylvain Fresneau (à droite) a mis son hangar agricole à disposition des expulsés et de ceux qui affrontent les forces de l’ordre. Photo : Jérôme FOUQUET

Un mois après les premières interventions de centaines de gendarmes  mobiles et de CRS, on se serre les coudes à Notre-Dame-des-Landes.  Opposants de longue date à l’aéroport, paysans, militants politiques,  squatters, préparent une manifestation de réoccupation de la zone,  samedi. Rencontres.

Permanence des opposants à l’aéroport, devant la mairie de Notre-Dame-des-Landes. Une délégation venue de Dinan-Saint-Malo se présente avec pâtes, riz, fruits secs, et crêpes dentelles.

Mais Julien Durand et Michel Tarin, paysans retraités et piliers de la contestation, doivent d’abord régler une urgence : négocier avec une poignée de jeunes. Fraîchement débarqués, ceux-ci barrent une route départementale. Pas besoin d’en rajouter, alors qu’aucune force de l’ordre n’est signalée dans le secteur.

Surtout que des riverains expriment leur lassitude. Comme cette jeune femme, qui a appelé notre rédaction, racontant ses difficultés quotidiennes de déplacement, pour cause de routes défoncées, de barricades en feu, et de barrages de gendarmerie…

Direction la Vache-Rit, hangar agricole devenu base de vie et centre opérationnel des occupants de la ZAD (comprendre « zone à défendre »). L’ancien docker nazairien Gilles Denigot y a installé une grande marmite récupérée chez un copain charcutier bio. « On peut y préparer à manger pour 300 personnes. »

Expulsés des maisons vides qu’ils squattaient, délogés de constructions en bois et en terre, les militants anti-aéroport viennent ici se réchauffer, se nourrir, changer de vêtements avant de repartir harceler gendarmes mobiles et CRS.

Une partie du hangar est envahie par des collines de vêtements secs, des forêts de bottes, déposés par des soutiens extérieurs. Un couple de Carquefou est venu chercher des vêtements boueux, et les a lavés. Plus loin, l’espace nourriture. « Une fois par semaine j’apporte des légumes », témoigne Thérèse, une retraitée de Guenrouët.

La vache-Rit est sur le terrain de Sylvain Fresneau, 50 ans, cinquième génération de paysans. Son Gaec des Pommiers, 90 vaches laitières, est en cours d’expropriation. Le paysan a mis le hangar à disposition de ceux qu’il appelle « les jeunes ». Il déteste le mot « squatters ».

« Les CRS nous ont rapprochés »

« Sans eux, nous serions restés bien seuls dans la lutte. Les premiers sont arrivés il y a trois ans. Des relations se sont nouées. On se rend service. Aujourd’hui, certains vont m’aider à collecter les ficelles de bottes de paille et les bâches d’ensilage. » Au Liminbout, autre exploitation condamnée, Sylvie Thébault, exploitante de 46 ans, confirme. Elle avait aidé « les nouveaux habitants » qui retapaient Les Planchettes, une maison vide, rasée mi-octobre. « Quand mon mari a fait la grève de la faim, ils ont assuré la traite du soir ».

Alain Bretesché, lui, vit à la Rolandière depuis vingt ans, dans une maison désormais propriété d’Aéroports du Grand Ouest. Un sursis, obtenu par les grévistes de la faim du printemps, protège temporairement le couple de l’expulsion. Il a recueilli chez lui une éducatrice allemande et ses trois enfants, restés sur zone après un rassemblement anti-aéroport.

Aux Fosses noires, Élisabeth, 53 ans, locataire elle aussi bénéficiaire du sursis, a ouvert ses dépendances aux expulsés. Damien, 30 ans, y prépare une fournée. Venu « lutter contre l’aéroport, et expérimenter un autre mode de vie », le boulanger vivait aux 100 Chênes. « On avait des ruches, un jardin, on était autonomes ». Il a eu le temps de démonter son four avant l’arrivée des pelleteuses.

Camille, jeune maraîcher diplômé en environnement, avait été installé sur le terrain du Sabot par le mouvement international Reclaim the fields (Récupérons les champs). « On produisait des légumes pour les occupants de la zone. On nourrissait les antinucléaires, et les opposants aux lignes très haute tension. » Il ne reste rien du Sabot.

Un tracteur passe, la remorque chargée de matériaux de récupération. Samedi, les opposants appellent à une manifestation dite de « réoccupation ». Avec en point d’orgue la construction d’un bâtiment collectif.

D’autres abris sont déja en construction sur des terres mises à disposition par des propriétaires pas encore expulsables. Déjà ça trie, dépointe, préassemble. Par le passé, les occupants de la zone et les opposants historiques ont pu diverger dans leurs stratégies. « L’attaque des CRS a rapproché tout le monde », résume Alain Godin, paysan bio de 63 ans, un des pionniers de l’opposition à l’aéroport.

Marc LE DUC, Ouest-France, 13 novembre 2012