Archives de catégorie : Propagande marchande

[Saint-Benoît – 86] Propagande pour le meurtre technologique à la sauce Sagem

Trois articles dans la Nouvelle République de ce mardi 21 février 2012, faisant la promotion du meurtre militaire ultratechnologique à la sauce Sagem. Des militaires exposent leur nouveau joujou nécrotechnologique avec un discours véritablement glaçant.

Il ne s’agit pas d’un équipement « du futur », puisque le bidasse sur la vidéo s’enorgueillit de le dire déjà opérationnel en Kapissa (Afghanistan), où s’accomplit la philanthropique besogne de l’Etat français. On goûtera la phrase suivante dudit bidasse : « [le Felin] améliore l’agressivité, avec les capacités de tir de jour et de nuit, de tir à toutes les armes… » Un autre de ses petits copains : « Ce système (…) nous permet véritablement d’augmenter à la fois nos capacités de détection ennemie, notre agressivité, puisque nous sommes en mesure de détecter l’ennemi à 800 mètres et de le traiter à 400 mètres avec beaucoup plus de facilité qu’avant ».

On apprendra aussi qu’une version de jumelles militaires, Vigilens, est développée pour équiper la police et la gendarmerie.

Et c’est dans une usine Sagem de Saint-Benoît, tout près de Poitiers, recrutant des prolos salarié-e-s et intérimaires, que se fabrique la partie optronique de cette horreur, destinée à être manipulée par d’autres prolos pour éliminer d’autres prolos, pour le plus grand profit de leurs maîtres communs.

En temps de crise, le capitalisme spécule sur le sang des hommes et des femmes.

Sabotage.

Pavillon Noir

Une compagnie de  » Félin  » dans la lande écossaise

Première sortie du 8 e RPIMa de Castres avec du matériel Félin de la Sagem, hors du territoire français, dont une partie est fabriquée à Saint-Benoît.

Une des jumelles Sword (infrarouges ou à intensité lumineuse) qui équipe un Famas. Une des jumelles Sword (infrarouges ou à intensité lumineuse) qui équipe un Famas. – (Photo Patrick Lavaud)

Qu’est-ce qui relie Saint-Benoît, Castres et Newcastle ? Le matériel de vision de la Sagem fabriqué à proximité de Poitiers et qui équipe le 8e Régiment de parachutistes d’infanterie de marine (8e RPIMa) basé à Castres, en exercice la semaine dernière sur le camp d’Otterburn à la frontière de l’Écosse et de l’Angleterre. Équipés du système Félin (Fantassin à équipements et liaison intégrés) développé par la Sagem Défense Sécurité, les 140 parachutistes ont manœuvré à tir réel de jour comme de nuit.

 C’est dans l’optronique qu’intervient le site de Saint-Benoît

Commandé à 22.600 exemplaires par l’armée française, l’équipement est entré en service en 2010. Car communication, observation, protection et mobilité sont les atouts du fantassin du XXIe siècle. Fusil d’assaut Famas équipé d’une lunette jour nuit, gilet pare-balles et pare-éclats, radio individuelle, GPS, équipement optronique (électronique et optique réunies) : c’est dans ce domaine qu’intervient le site de Saint-Benoît où est fabriquée la gamme couvrant tous les besoins du combattant (lunettes de tir infrarouge et à intensification lumineuse, lunette pour des tirs de précision), les jumelles infrarouges multifonctions JIM et la caméra du casque OVD (optique à vision déportée). Tout ce matériel doit résister à l’environnement extrêmement sévère du combattant. Sagem Sécurité tient compte des retours d’expérience des soldats pour apporter des modifications à l’équipement (augmentation de l’autonomie des batteries et passage à la wifi). L’export reste un enjeu important, la Suisse vient d’ailleurs de sélectionner l’entreprise française. La concurrence israélienne, chinoise, américaine, coréenne, allemande et italienne, oblige l’entreprise à travailler la qualité des produits, à assurer la continuité du programme et à répondre à la demande précise de chaque pays. « On ne peut plus qualifier cet équipement du futur puisqu’il équipe actuellement en Kapissa (Afghanistan) le 1er régiment d’infanterie », faisait remarquer le général Hervé Charpentier commandant des Forces Terrestres, présent durant ces exercices.

La vidéo ici

> Le site de Sagem est implanté sur la commune de Saint-Benoit et appartient à la branche Défense Sécurité du groupe Safran.

> L’usine est spécialisée dans la fabrication de matériel optronique mélange d’optique et d’électronique et pilote l’approvisionnement de tout l’équipement Félin.

> 650 salariés dont une centaine d’intérimaires travaillent dans la Vienne. Saint-Benoit sous-traite une partie de l’activité pour d’autres usines du groupe (Dijon, Montluçon).

Les jumelles infrarouges JIM LR made in Saint-Benoît

La JIM LR en action de nuit dans le Nord de l'Angleterre. La JIM LR en action de nuit dans le Nord de l’Angleterre. – (Photo Patrick Lavaud)

Fabriquée à Saint-Benoît, la jumelle JIM LR a été vendue à 2.000 exemplaires et équipe aussi l’armée des États-Unis, le Royaume-Uni, l’OTAN et plusieurs autres pays européens. L’appareil ergonomique et compact est bourré de technologie : vision de jour, vision thermique, télémètre, pointeur laser, GPS, compas magnétiques… des applications qui donnent à l’opérateur une localisation précise d’objectifs de jour comme de nuit. Elle est régulièrement utilisée en opérations extérieures. Il existe une seconde version qui s’appelle la JIM MR vendue à 4.500 unités. Une dernière version, Vigilens, existe pour équiper la police et la gendarmerie.

Nouvelle République, 21 février 2012

 » La vie du soldat est facilitée « 

« On n’a reçu Félin que depuis quelques mois mais déjà on commence à l’avoir en main. Ce n’est plus la même chose qu’avec notre ancien équipement. Nous y avons gagné en efficacité. On est tous équipé d’une radio-osthéophonie qui amplifie les vibrations osseuses du crâne, ce qui permet de communiquer tous ensemble. Le tout est parfaitement silencieux en émission et en écoute, inutile de parler fort pour se faire entendre : une plus grande sécurité sur le terrain. Le GPS intégré évite de se perdre et de retrouver facilement son chef d’équipe. Nous pouvons envoyer régulièrement l’état des munitions à notre chef de groupe. Grâce aux jumelles, la portée avec laquelle on peut traiter l’objectif, a augmenté. A partir du clavier du Famas, on a la possibilité d’utiliser la radio sans lâcher des mains le fusil. On peut aussi piloter la lunette pour faire des photos. Tout cet équipement nous facilite le travail, on s’habitue au poids (24 kg). En cas de panne, je peux continuer à utiliser mon arme et de travailler à l’ancienne. La vie du soldat est facilitée. »

Nouvelle République, 21 février 2012

[Persac – 86] LGV dégage !

La LGV en territoire hostile

Après Lhommaizé, RFF avait donné rendez-vous à Persac pour étudier le tracé du projet de LGV Poitiers-Limoges. Dialogue de sourds.

RFF a fort à faire pour étudier les aménagements de la LGV Poitiers-Limoges en passant outre le débat sur son bien fondé. RFF a fort à faire pour étudier les aménagements de la LGV Poitiers-Limoges en passant outre le débat sur son bien fondé.

La déconvenue de cet opposant au projet de LGV Poitiers-Limoges en dit long. Jérôme Thomas (Réseau ferré de France) vient de lui annoncer qu’il est trop tard pour s’y opposer. C’était le débat public de 2006 qui tranchait ce point. Désormais, le prochain rendez-vous sera l’enquête d’utilité publique (voir « bon à savoir »).

Démarrée avec une audience limitée, la réunion de présentation du projet à Persac s’étoffe d’opposants notoires à la LGV. Si Réseau ferré de France vient y présenter, simulations 3D à l’appui, le tracé de la future ligne TGV, les Persacois, eux, viennent s’opposer au principe même de cette LGV. Ils sont bien aidés par les membres du collectif « Non à la LGV » emmenés par leur président Nicolas Bourmeyster. Au point que le débat va dériver vers une mise en cause systématique du projet. Même si certains riverains réorienteront le débat sur les aménagements paysagers, les rétablissements routiers et les remembrements, le débat reviendra systématiquement sur le bien fondé de cette ligne.

Principe de défiance

Thierry Mesmin n’est pas le dernier à remettre en cause cette ligne. « S’inscrire dans une réflexion sur les aménagements autour du projet, c’est accréditer qu’il va se faire. » Et le sang du conseiller général ne fait qu’un tour quand Jérôme Thomas revendique un accord de principe du conseil général sur la constitution de réserves foncières d’urgence. Un accord que Thierry Mesmin soumet à un vote favorable de l’assemblée départementale et à des financements à obtenir. Sous un feu roulant d’objections, Jérôme Thomas garde un calme méritoire. « Le coût estimé aux conditions économiques de 2010 est de 1,5 million d’euros. Les 2,4 millions d’euros que vous évoquez sont la valeur estimée de l’investissement aux conditions 2020. »« Mais cette ligne TGV n’existe pas ! C’est bien le coût final du projet qui est intéressant », s’exclame Nicolas Bourmeyster. Et Thierry Mesmin d’en rajouter. « La SNCF elle-même conteste le coût, la fréquentation et le prix du billet sur lesquels reposent vos études. On a réclamé à RFF une nouvelle étude et vous continuez à présenter des arguments éculés. Dites-nous plutôt ce que vous comptez faire pour les riverains dont les projets sont bloqués par cette ligne ! » Sur ce point, RFF est clair. Aucun financement n’est prévu à ce stade pour les riverains placés sous cette épée de Damoclès. Pas plus pour les propriétaires qui ne sont pas impactés directement par la LGV. Seule la dépréciation des biens sera indemnisée au cas par cas.

bon à savoir

Un participant finira par poser la question qui résume la défiance de la population vis-à-vis de RFF et des pouvoirs publics. « Qu’est-ce qui peut faire qu’une enquête publique remette en cause le projet ? » Dans l’esprit des riverains de la future ligne LGV, il est clair en effet que les dés sont jetés. Ils ne voient pas comment ils empêcheront le train, dont ils ne veulent pas, de passer chez eux. Même si des projets ont effectivement capoté au stade de l’enquête publique (parcs éoliens, lignes à haute tension…), le sentiment local est qu’on leur impose de Paris un projet dont seules Poitiers et Limoges profiteront et dont ils paieront les impacts. Du côté de RFF, Jérôme Thomas leur donne rendez-vous pour l’enquête d’utilité publique qui devrait avoir lieu durant le second semestre 2012 avant une déclaration d’utilité publique en 2013 et des travaux en 2015.

Nouvelle République, Dominique Guinefoleau, 21 février 2012

Sur le « mécanisme européen de stabilité »

Pourquoi le « mécanisme européen de stabilité » est une aberration

Extrêmement risqué du point de vue financier, destructeur sur le plan social, et antidémocratique, le mécanisme européen de stabilité symbolisera-t-il le suicide de l’Europe et la fin d’un demi-siècle de patiente construction et de progrès social ? Explications.

Le 21 février, l’Assemblée nationale se prononcera sur le « Mécanisme européen de stabilité » (MES). Voulu par Nicolas Sarkozy et Angela Merkel, ce complexe traité instaure une sorte de FMI européen. Il aura « pour but de mobiliser des ressources financières et de fournir, sous une stricte conditionnalité (…), un soutien à la stabilité à ses membres qui connaissent ou risquent de connaître de graves problèmes de financement ». En clair, le MES devrait être en mesure d’avancer des fonds aux États de la zone euro qui rencontreraient des difficultés pour emprunter directement auprès des marchés financiers. Les 17 États membres l’ont signé le 2 février. Reste à le ratifier… Cela se fera-t-il dans l’indifférence générale ? Si le traité est combattu par le Front de gauche, le PS hésite à s’y opposer vraiment. Europe écologie-Les Verts (EELV) demeure pour le moment discret sur le sujet mais semble s’apprêter à voter contre [1].

Le MES en tant que tel n’est pas un traité, mais une société financière, basée au Luxembourg, dont les actionnaires sont les 17 États de la zone euro. Le capital est fixé à 700 milliards d’euros. Plus un pays est fort économiquement, plus il est obligé de souscrire un nombre important d’actions [2]. Les deux plus gros « actionnaires » sont ainsi l’Allemagne (à 27 %) et la France (20,5 %), suivis par l’Italie (18 %), l’Espagne (12 %) puis les Pays-Bas (5,5 %). Les 12 autres actionnaires possèdent entre 3,5 % (Belgique) et 0,07 % (Malte) du capital. Question préalable : la France devra-t-elle donc débourser 142,7 milliards d’euros pour honorer ses engagements auprès du MES ? Pas en un seul chèque. Le capital de chaque pays doit être mis à disposition dans les cinq ans, par tranche de 20 % par an (soit 28,5 milliards par an dans le cas français, 38 milliards dans le cas allemand). Cependant, en cas de difficultés, les dirigeants du MES peuvent accélérer le versement de ce capital [3]. Dans ce cas, les pays membres devront s’acquitter de la somme demandée dans les sept jours.

Un mécanisme fragilisé par la pression des marchés

Disposant donc de 700 milliards garantis par les États membres, le MES pourra racheter une partie de la dette d’un État en difficulté – des obligations grecques, par exemple – sur les marchés. Mais au rythme où vont les choses, les 700 milliards risquent vite de s’épuiser. Comme avec son éphémère prédécesseur, le Fonds européen de stabilité financière (FESF), les concepteurs du MES espèrent donc jouer sur l’effet levier pour augmenter sa « force de frappe » : lever des fonds auprès des marchés financiers pour accroître ses propres capacités de prêt. Le MES est ainsi « habilité à emprunter sur les marchés de capitaux auprès des banques, des institutions financières ou d’autres personnes ou institutions afin de réaliser son but » (article 21).

Leur pari : que le MES soit en mesure d’emprunter à des taux assez bas (entre 2 % et 3,5 % sur trente ans s’il dispose du triple A) pour en faire bénéficier, moyennant une commission, des États qui, s’ils s’adressaient directement aux marchés, seraient soumis à des taux très élevés à cause de leur note dégradée (23 % pour la Grèce, mi-février, 10 % pour le Portugal, 6 % pour l’Espagne et l’Italie…). En recourant à cet effet levier, le MES pourrait ainsi emprunter trois à quatre fois son capital, soit entre 2 000 et 3 000 milliards d’euros. En théorie.

Une dépendance totale à l’égard des agences de notation

Car cette belle mécanique néolibérale risque de se détraquer. Emprunter à des taux bas implique que le MES soit bien noté par les agences de notation. Or, parmi ses principales garanties, seuls l’Allemagne et les Pays-Bas conservent, pour l’instant, leur triple A auprès des trois agences de notation. Ces deux pays ne représentent que 32,5 % du capital du MES. Les trois pays actuellement en grande difficulté – Grèce, Portugal, Irlande – pèsent à peine 7 %. Que se passera-t-il si cet équilibre se rompt ? Si des pays plus importants, déjà dégradés par les agences de notation, continuent d’être déstabilisés ? « Les véritables garants sont ceux qui peuvent y mettre de l’argent. Si les agences de notation dégradent tout le monde, la situation devient impossible », prévient l’économiste Michel Aglietta, du Centre d’études prospectives et d’informations internationales (Cepii).

L’Espagne et l’Italie, qui risquent de perdre leur A, constituent 30 % du capital du MES. La France, elle, est à la croisée des chemins. Ne demandez pas à un investisseur de prêter à une entreprise dont la majorité des actionnaires sont considérés comme étant en difficulté ! Le MES, déjà engagé pour renflouer la Grèce, le Portugal et l’Irlande [4], sera-t-il en mesure de se porter au secours de l’Espagne puis de l’Italie, voire de la France si ces pays sont attaqués ? Les besoins de financement dépasseront largement ses capacités. Et ne pouvant faire appel à la contribution des pays déstabilisés, ne reposant que sur les garanties de l’Allemagne et d’une France fragilisée, les taux d’intérêt des titres financiers émis par le MES risqueront de grimper, et sa dette de gonfler. C’est tout ce château de liquidités qui menacera de s’effondrer.

La généralisation de la potion grecque

Mais revenons au mécanisme lui-même : qui prend les décisions ? Le MES est doté d’un « conseil des gouverneurs », composé par les ministres des Finances de chaque pays membre, François Baroin aujourd’hui, dans le cas de la France. Ce sont les gouverneurs qui décident notamment de répondre ou non à la demande de soutien d’un État membre et de lever des fonds pour le faire. Ils nomment le directeur général, qui assure la plupart des affaires courantes en lien avec le conseil d’administration, composé de 17 administrateurs nommés par chaque gouverneur. La plupart des décisions se prennent soit à la majorité simple, soit à la majorité qualifiée (80 % des voix). Mais attention, nous sommes dans une entreprise et non en démocratie : chaque gouverneur dispose d’un nombre de voix équivalent au nombre d’actions que son pays possède. L’Allemagne détient ainsi 27 % des voix et la France 20,5 %. Soit, à eux deux, 47,5 % des votes. À aucun moment l’avis du Parlement européen ou des parlements nationaux n’intervient. Ce qui fait du MES une superstructure encore moins démocratique que la Banque européenne d’investissement (BEI), dont une éventuelle modification de statuts nécessite la consultation du Parlement européen [5].

Autre point très sensible : les « strictes » conditions auxquelles sera octroyée « l’assistance financière » à un État en difficulté. Sur ce point, ce n’est même plus le MES qui s’en charge, mais la « troïka », c’est-à-dire la Commission européenne, la Banque centrale européenne (BCE) et le Fonds monétaire international (FMI) mandaté par le conseil des gouverneurs [6]. Trois organes sur lesquels les élus et les citoyens n’ont aucun contrôle ! Ce qui se passe en Grèce ou au Portugal nous livre un petit aperçu du type de conditions qui seront fixées : privatisations massives, réduction de salaires du public comme du privé, diminution du Smic, remise en cause profonde du droit du travail et des systèmes de protection sociale, augmentation de la TVA… [7]

Une structure antidémocratique

La troïka sera chargée de « veiller au respect » de ces plans d’austérité. Ils ne pourront en aucun cas être contestés ou amendés, comme le montre là encore le laboratoire grec. Face à la révolte sociale qui s’y exprime et à la perspective d’un passage à gauche de la Grèce (les trois partis de gauche qui ont refusé le plan d’austérité totalisent désormais 42 % des intentions de vote), « il ne peut y avoir d’amendement au programme et il n’y en aura pas », a déclaré Angela Merckel, le 13 février. Voter ne servirait donc plus à rien ? L’aide financière à un État sera également soumise au Traité sur le fonctionnement de l’UE, qui prévoit notamment de graver dans le marbre la « règle d’or » : l’interdiction de tout endettement, donc la fin de tout investissement public sur le long terme. En ces temps de nécessaire transition énergétique et écologique, l’Europe se coupe un bras.

Impossible donc d’interroger l’efficacité des « protocoles d’accord » (les plans d’austérité) mis en œuvre depuis deux ans et de les modifier. Pourtant, ils se révèlent totalement inefficaces. « Les plans d’austérité sont faits pour payer les intérêts de la dette qui montent. Mais austérité signifie moins de croissance, donc moins de recettes et une hausse des dépenses liées au chômage. À mesure que les États renouvellent leurs obligations sur les marchés pour se financer, les taux d’intérêts continuent de s’alourdir. Au lieu de le baisser, la Grèce a accru son déficit à cause de la charge de la dette », explique l’économiste Michel Aglietta. Au Portugal, le chômage explose : 35,4 % des moins de 24 ans sont sans emploi.

Progrès nulle part, austérité partout

En dix ans, l’Espagne a remboursé trois fois ce qu’elle avait emprunté en 2000 (voir notre article ici). Et doit encore près du double ! En France, 60 % du déficit budgétaire (78,7 milliards prévus en 2012) correspondent au remboursement des intérêts de la dette (46,8 milliards d’euros). « À chaque fois que l’on durcit un plan d’austérité, on amplifie la récession », commente Michel Fried, économiste du Laboratoire social d’action, d’innovation, de réflexion et d’échanges (Lasaire). « 50 % à 60 % des exportations des économies européennes sont destinées à l’exportation au sein de la zone euro. Si tous ces pays appliquent l’austérité en même temps… » Qu’importe ! Continuons de sombrer dans ce cercle vicieux en interdisant même aux démocraties de corriger leurs erreurs, si tant est qu’elles s’en aperçoivent.

Last but not least : le MES et ses dirigeants agiront dans l’impunité totale : « Le président du conseil des gouverneurs, les gouverneurs, les gouverneurs suppléants, les administrateurs, les administrateurs suppléants ainsi que le directeur général et les autres agents du MES ne peuvent faire l’objet de poursuites à raison des actes accomplis dans l’exercice officiel de leurs fonctions et bénéficient de l’inviolabilité de leurs papiers et documents officiels », stipule l’article 35 (immunité des personnes) [8]. Seul le directeur général peut lever l’immunité d’un employé du MES. Et seul le conseil des gouverneurs peut faire de même pour les gouverneurs et les administrateurs. En clair : le linge sale sera lavé en famille et en toute discrétion. En cas de litige entre le MES et l’un de ses États membres, ce sera la Cour de justice européenne qui tranchera. C’est la seule occasion où une institution extérieure peut intervenir sur ce qui s’y déroule.

Antidémocratique, jouant le jeu des marchés et de la spéculation financière, portant en germes la destruction du modèle social européen, le « Mécanisme européen de stabilité » trahit définitivement l’idéal sur lequel s’est bâtie l’Union. Les prêts accordés sous la pression de marchés dérégulés ne serviront donc plus à construire ou solidifier socialement et économiquement un pays, mais à détruire tout ce qui a été accompli. Les députés français choisiront-ils cette voie suicidaire ?

Ivan du Roy

Photos : CC en une (source) et dans l’article (source)

Voir les statuts du MES (en français)

Notes

[1] Lire la précision d’une militante dans le forum ci-dessous. Le positionnement semble faire débat chez EELV.

[2] Chaque pays y participe en proportion de son revenu national et de son poids au sein de la Banque centrale européenne (article 42).

[3] Les fonds directement à disposition du MES ne doivent jamais passer sous la barre des 80 milliards d’euros (Article 8.2).

[4] Via le FESF, intégré au sein du MES.

[5] « En vertu de l’article 308, paragraphe 3, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, le Conseil, statuant à l’unanimité conformément à une procédure législative spéciale, à la demande de la Banque européenne d’investissement et après consultation du Parlement européen et de la Commission, ou sur proposition de la Commission et après consultation du Parlement européen et de la Banque européenne d’investissement, peut modifier les statuts de la Banque. »

[6] Article 13.3 : « Le conseil des gouverneurs charge la Commission européenne – en liaison avec la BCE et, lorsque cela est possible, conjointement avec le FMI – de négocier avec le membre du MES concerné un protocole d’accord définissant précisément la conditionnalité dont est assortie cette facilité d’assistance financière.

[7] Tout ce que prévoit d’ailleurs, au nom de la « compétitivité », le Pacte euro plus, adopté en mars par les pays de la zone euro.

[8] Voir aussi l’article 32 : « Statut juridique, privilèges et immunités. »

Basta Mag, Ivan Du Roy, 20 février 2012

Le rapport Perruchot épingle aussi le financement des « syndicats » de patrons

Le rapport Perruchot épingle aussi les finances du patronat

Ce n’est plus un rapport, c’est un phénix. Officiellement enfermé à triple tour dans les archives de l’Assemblée depuis son rejet par les députés fin 2011, le rapport de la commission d’enquête sur le financement des syndicats et du patronat (rédigé par le député centriste Nicolas Perruchot) renaît de ses cendres  via le site Internet du « Point » qui l’a publié hier.

Et la  on peut y lire que « Le financement des organisations d’employeurs repose sur diverses ressources qui ne sont pas illicites, mais dont la légitimité manque de force », critique le rapport. Alors que les regards s’étaient jusqu’ici surtout portés sur les syndicats, le patronat ne sort pas indemne, loin de là, de l’analyse des députés. Les ressources des organisations sont substantielles, recense-t-il  entre 500 millions d’euros et 1 milliard, selon une extrapolation à partir des données disponibles. Si celles-ci sont plus accessibles depuis la loi de 2008 instaurant la publication des comptes, le rapport pointe « certains comportements susceptibles d’entacher de suspicion l’usage de ces ressources ». La part des cotisations des adhérents est parfois faible et les clefs de répartition entre fédérations et organisations peu claires. Surtout, le financement par les fonds du paritarisme, au premier rang desquels la formation (via le Fongefor) sont insuffisamment contrôlés. Le rapport pointe le cas de la CGPME, qui a utilisé une partie de son préciput formation pour financer le Salon Planète PME, qu’elle organise, ainsi qu’une campagne de promotion d’un dispositif de formation des chômeurs (la POE), qui aurait surtout servi son image. Les organisations patronales « semblent également bénéficier d’un soutien matériel parfois significatif de la part d’instances dans la gestion desquelles elles se trouvent impliquées », ajoute le rapport, visant les chambres de commerce et d’agriculture.

Tous va bien au pays des patrons et dans ce monde capitaliste non ????

Blog du groupe de Béthune (Fédération Anarchiste), 18 février 2012

[Poitiers] Vinci démolit

La première grue du viaduc est arrivée de Belgique

Une grue qui pourra soulever 400 tonnes a pris position hier sous la grande passerelle de la gare. Une seconde plus puissante encore doit arriver vendredi.

Le semi-remorque avec les éléments de la grue vient d'arriver sur le parking de la Poste.

Le semi-remorque avec les éléments de la grue vient d’arriver sur le parking de la Poste.

La grande passerelle des Rocs a été fermée le 23 janvier. Depuis, une navette assure la liaison de part et d’autre des voies de la SNCF par la porte de Paris (la rue Maillochon étant interdite pour cause de barrière de dégel). Sur le parking de la Poste, les salariés de GTM Bretagne, filiale de Vinci, l’entreprise retenue par Grand Poitiers pour démonter la passerelle et construire le viaduc, préparent le chantier. Ils ont commencé par édifier la base dans des cubes préfabriqués près du gymnase Maillochon.

 Le convoi exceptionnel est parti lundi

Mais le premier grand moment de « l’opération viaduc » a été l’arrivée hier à 15 h 30 d’un convoi exceptionnel parti lundi de Wolvertem, près de Bruxelles, avec les éléments d’une première grue. « Nous avons suivi les routes nationales, indiquait le chauffeur. Les autoroutes nous sont interdites. » Dans la Vienne, le convoi est passé par Mirebeau avant de rejoindre la RD 910 et d’entrer dans Poitiers par l’avenue du 8-Mai-1945. Pascal Tranchant, l’ingénieur de Grand Poitiers en charge du viaduc : « Dans la traversée de la ville, nous avions le concours des polices nationale et municipale. Cela nous a facilité la tâche. » En raison d’une barrière de dégel rue Maillochon, le convoi a fait un détour par la Porte de Paris avant d’emprunter l’avenue de Nantes et de descendre sur le parking de la Poste. La grue pourra soulever des charges jusqu’à 400 tonnes. Un tonnage appréciable pour qui n’a pas l’habitude d’un chantier de l’envergure de celui qui se profile à Poitiers. Une broutille pour les ouvriers de la société Sarens, à qui appartient la grue et qui se présente comme un spécialiste de « l’extraordinaire » dans l’ingénierie des opérations de levage et de manutention. Ce matin est prévu le montage de la grue. « Ce sera fait en une demi-journée », annonce Pascal Tranchant. Vendredi arrivera un second convoi avec une grue qui pourra soulever des charges jusqu’à 700 tonnes. Elle sera installée avec sa « petite sœur » pour que la déconstruction puisse effectivement commencer mardi prochain.

à suivre

> Mardi prochain 21 février, les deux grues engageront la déconstruction de la grande passerelle du côté de la rue Maillochon. Avec vingt salariés. Un chantier de trois jours : mardi 21, mercredi 22 et jeudi 23.

> Vendredi 24 février, les grues seront démontées pour être installées du côté du boulevard du Grand-Cerf. La poursuite de la déconstruction de la grande passerelle se fera alors en « opération commando » : cinquante heures de travail non-stop.

Le parking Toumaï sera fermé du lundi 27 février, 22 heures au jeudi 1er mars à 5 heures.

> Le boulevard du Grand-Cerf sera interdit à la circulation du mardi 28 février minuit au jeudi 1er mars à 5 heures. Déviation par l’avenue de Nantes, la rue Maillochon et le Pont-Achard, d’un côté, ou par les boulevards de la petite ceinture (Chasseigne, de Lattre, sous Blossac…) de l’autre.

> Pendant la fermeture du parking Toumaï, des arrêts minute seront organisés sur le boulevard du Grand-Cerf. Les abonnés 24 h/24 iront au parking du TAP. Les abonnés à la journée dans les parkings de l’hôtel de ville ou de Blossac.

Jean-Jacques Boissonneau