Aujourd’hui la NR produit une foultitude d’articles panégyristes pro-LGV Tours-Bordeaux, le plus monstrueux partenariat public-privé d’Europe (7,8 milliards d’euros), dont on sait qu’il permet surtout le profit privé et l’endettement public. Après l’émission d’hier sur France Bleu Poitou, le rouleau-compresseur médiatique se poursuit donc en faveur de ce chantier destructeur.
On comprend que les journalistes aient envie de garder des liens de travail avec la mairie PS (partisane inconditionnelle de cette LGV), mais à voir ce matraquage, on va finir par croire qu’ils ont des actions chez Vinci…
Allez, on commence par la rubrique la LGV c’est super pour la recherche scientifique, avec la découverte archéologique de plantes vieilles de 100 millions d’années. On oublie juste de dire l’évidence corollaire à ce type de découvertes archéologiques : le chantier détruit la surface de la terre à des mètres et des mètres de profondeur ! Soit la bagatelle de huit millions de mètres cube rien que pour le terrassement (on ne parle même pas des remblais), ou de 65.000 mètres cube de béton rien que pour la quarantaine d’ouvrages « d’art » prévus pour la LGV dans le département… Si l’humanité existe encore dans 100 millions d’années, que penseront de nous les archéologues qui ne pourront constater qu’une dévastation géologique sans précédent ?
Dans la rubrique la LGV c’est convivial et c’est une « aubaine », voici Ginette, restauratrice ravie pour son resto. Elle dit « si j’arrête, je meurs ». Avertissons-la tout de même qu’après le chantier et ses emplois précaires, y’aura plus grand monde et que tous ses nouveaux amis ouvriers n’auront plus qu’à rentrer chez eux.
Dans le même article, on apprend que Vinci « met en valeur » un monument aux fusillés… qu’il déplace. Vinci aménage aussi de nouveaux tracés temporaires pour les pèlerins de Compostelle, mais les chemins de l’Eternel ne sont-ils pas impénétrables ? En tout cas, celui du Capital transforme, avec cette LGV, 1.100 hectares du département en no man’s land, traçant un sillon écocidaire de plus de 200 mètres de large dans le paysage et la biodiversité. On n’arrête pas le progrès !
Dans la rubrique la LGV dynamise l’économie locale, vient ensuite la joie du patron de Sateco, une entreprise sous-traitante qui fait dans le progrès de l’humanité : elle participe aussi au chantier d’un EPR en Finlande… Pour l’emploi après le chantier, qui pour la LGV passera de milliers à moins de deux cent, soit le retour au chomdu pour des milliers de prolos, dont ceux employés par Sateco ? « Notre travail est cyclique. On le sait et on s’adapte. » D’où le recours fréquent à des intérimaires, heureusement nombreux et compétents dans la région. » Merveilleux, l’avenir des esclaves salariés compétents réside dans le précariat, l’intérim et l’adaptation aux desiderata capitalistes : on nage dans la joie… Joie de vivre en caravane à des centaines de kilomètres de chez soi, « prix à payer pour avoir un salaire convenable », dixit l’ouvrier interviewé, qui ajoute qu’après ce taf son « avenir est encore incertain ».
Dans ce même second article, on apprend que Vinci aménage des passages pour la grande faune et la petite faune, et reboise… nous avons déjà dit tout le bien que nous pensions de cette mesure de greenwashing.
Continuons dans la pâmoison : vient la rubrique la LGV, c’est un peu moins de temps pour aller à Bordeaux. Les habitant-e-s de Libourne, que la ligne nouvelle évitera désormais, apprécieront. Tout ça pour ça ?
Vient enfin le ponpon, avec cet article vantant le fait que la ligne impacte toute la population de la Vienne, car tout le monde connaîtrait quelqu’un qui connaîtrait quelqu’un qui bosse sur la ligne… et un historique omettant délibérément les actes de résistance, faisant le déni de nombreux avis éclairés contre cette ligne dévastatrice. L’histoire appartient aux vainqueurs…
La NR fournit tout de même l’avis d’une spécialiste de l’impact des LGV, qui tempère fortement toutes ces belles envolées lyriques : le lien entre LGV et le sacro-saint « développement économique », de l’emploi, de la démographie urbaine, n’est pas du tout démontré, à de nombreux niveaux. Mais bon, les étudiants pourront désormais étudier plus facilement à Bordeaux : hum. Voilà qui valait bien 3 milliards d’argent public refilés à Vinci…
Pavillon Noir, 14 juin 2013